Pemphigus vulgaire néonatal

Pemphigus vulgaire néonatal

1136 Lettres à la rédaction Pemphigus vulgaire néonatal P. Masson1*, C. Gaudy-Marqueste2, A. Es Sathi1, A. Tizeggaghine1, K. Touati1 1 Service de n...

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Lettres à la rédaction

Pemphigus vulgaire néonatal P. Masson1*, C. Gaudy-Marqueste2, A. Es Sathi1, A. Tizeggaghine1, K. Touati1 1

Service de néonatologie, centre hospitalier Henri Duffaut, 305, rue Raoul Follereau, 84902 Avignon cedex 9, France ; 2 service de dermatologie, centre hospitalier Henri Duffaut, 305, rue Raoul Follereau, 84902 Avignon cedex 9, France (Reçu le 19 juin 2001 ; accepté le 27 juin 2001) pemphigus vulgaire / maladie auto-immune / transfert transplacentaire pemphigus vulgaris / autoimmune diseases / maternal-fetal exchange

Le pemphigus vulgaire (PV) est une maladie auto-immune à expression cutanéo-muqueuse, caractérisée par la présence de bulles intra-épidermiques. Des auto-anticorps antisubstance inter-cellulaire (SIC) de type IgG se fixent entre les kératinocytes des couches profondes de l’épiderme et entraînent une dislocation des connections inter-cellulaires. Le pemphigus vulgaire néonatal est transitoire, induit par le transfert passif trans-placentaire des anticorps anti-SIC d’une mère atteinte de PV. Laura est née le 17 août 2000, d’une mère de 38 ans porteuse d’un PV connu depuis 1996. Sa première grossesse, en 1990, s’était déroulée sans problèmes particuliers. Le diagnostic de PV avait été confirmé par l’examen histologique, avec présence en immunofluorescence directe d’anticorps anti-SIC de type IgG et en immunofluorescence indirecte d’un taux sanguin circulant d’anticorps anti-SIC à 1 ‰. Une corticothérapie orale à 1 mg/kg avait été instituée, puis arrêtée progressivement sur six mois avec la disparition des lésions. En janvier 2000, au premier trimestre de cette 2e grossesse, l’apparition de lésions inguinales et abdominales vésiculocroûteuses prurigineuses associées à un taux d’anticorps antiSIC de 1 ‰ avaient fait instituer un traitement local simple par Dermovalt. La grossesse se déroule sans problèmes particuliers et Laura naît à terme par voie basse. Le score d’Apgar est à 10 et elle pèse 3 560 g. Elle présente d’importantes lésions érosives cutanées au niveau du siège (remontant jusqu’en péri-ombilical), de la nuque et de la face postérieure du pied gauche, sans atteinte muqueuse associée (figure 1). Il existe un signe de Nikolsky en périphérie des lésions. Le reste de l’examen clinique est normal. L’examen histologique de la biopsie cutanée en zone atteinte montre une nécrose épidermique superficielle avec présence en immunofluorescence directe d’IgG et de C3, et d’un taux d’anticorps circulants anti-SIC à 1 %. La guérison s’effectue spontanément avec des soins locaux en 15 jours.

*Correspondance. Adresse e-mail : [email protected] (P. Masson).

Figure 1. Atteinte « en culotte » avec décollement cutané en périphérie de la lésion.

La littérature rapporte à ce jour 27 grossesses de mères ayant un PV [1], dont 15 observations (55 %) avec atteinte clinique du fœtus ou du nouveau-né [2]. Une seule fois, la mère n’avait pas d’atteinte clinique pendant la grossesse et a donné naissance à un enfant atteint [3]. À la naissance, le nouveau-né peut présenter des bulles et des lésions érosives cutanées ou muqueuses dont l’histologie et l’examen immuno-pathologique confirment le diagnostic de pemphigus. Les bulles sont extensives en cas de traumatisme cutané et contre-indiquent toute agression locale (électrodes, poches adhésives, etc.). Il n’existe en revanche aucune indication préventive d’accouchement systématique par césarienne des femmes ayant un PV, et la voie basse est autorisée en dehors des contre-indications obstétricales habituelles. Les autoanticorps passifs disparaissent de la circulation en quelques semaines, parallèlement à la cicatrisation des lésions cutanées qui est constamment favorable, sans rechutes, en deux à trois semaines avec un simple traitement local antiseptique et émollient. L’allaitement maternel ne semble pas contreindiqué. Parmi ces 15 dossiers, quatre cas de mort fœtale in utero (26 %) ont été observés [4,5], chaque fois lors d’atteintes cutanées maternelles sévères et évolutives, avec un taux d’anticorps anti-SIC élevé, ayant nécessité lors de ces grossesses de fortes doses de corticoïdes (parfois associées à des traitements adjuvants par dapsone et/ou azathioprine). L’autopsie pratiquée chez uniquement 3 de ces fœtus est peu informative (rôle des anticorps ? de la corticothérapie ?). Ces chiffres inquiétants sont à interpréter avec précaution puisque la majeure partie des grossesses de mères ayant un PV se déroulent probablement sans problèmes et ne sont pas rap

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portées, tandis que la littérature nous livre les cas pathologiques. Il semble malgré tout utile de considérer les grossesses chez les femmes atteintes de PV sévères comme des grossesses à risques et de pratiquer au cours du 3e trimestre une surveillance rapprochée de la viabilité fœtale. Au cours d’un PV lors de la grossesse, et comme pour les autres maladies maternelles avec IgG (myasthénie, purpura thrombopénique immunologique, maladie thyroïdienne), on ne connaît pas d’élément prédictif clinique ou biologique fiable d’atteinte fœtale et néonatale. Le titre des anticorps circulants chez la mère semble assez bien corrélé au degré d’activité de sa maladie mais pas à celui de l’atteinte fœtale, puisque des nouveau-nés sont atteints avec des taux maternels faibles [6], tandis que certains ne sont pas atteints avec des taux maternels élevés [7]. Lors de la grossesse, il faudra traiter une atteinte clinique maternelle (intérêt de la corticothérapie locale dans les cas les moins sévères), mais ne pas tenter de supprimer l’activité biologique de la maladie par des traitements lourds et à potentialité toxique pour le fœtus (pas de corticothérapie générale systématique).

1 Fainaru O, Mashiach R, Kupferminc M, Shenhav M, Pauzner D, Lessing JB. Pemphigus vulgaris in pregnancy : a case report and review of literature. Hum Reprod 2000 ; 15 : 1195-7. 2 Chowdhury MMU, Natarajan S. Neonatal pemphigus vulgaris associated with mild oral pemphigus vulgaris in the mother during pregnancy. Br J Dermatol 1998 ; 139 : 500-3. 3 Tope WD, Kamino H, Briggaman RA, Rico MJ, Prose NS. Neonatal pemphigus vulgaris in a child born to a woman in remission. J Am Acad Dermatol 1993 ; 29 : 480-5. 4 Wasserstrum N, Laros RK. Transplacental transmission of pemphigus. JAMA 1983 ; 249 : 1480-2. 5 Green D, Maize JC. Maternal pemphigus vulgaris with in vivo bound antibodies in the stillborn fetus. J Am Acad Dermatol 1982 ; 7 : 388-92. 6 Merlob P, Metzker A, Hazaz B, Rogovin H, Reisner SH. Neonatal pemphigus vulgaris. Pediatrics 1986 ; 78 : 1102-5. 7 Golberg NS, DeFeo C, Kirshenbaum N. Pemphigus vulgaris and pregnancy : Risk factors and recommendations. J Am Acad Dermatol 1993 ; 28 : 877-9. S0929693X01005917/COR Arch Pédiatr 2001 ; 8 : 1136-7

Nouvelle brève ■ Vers la thérapie génique de l’amaurose congénitale de Leber ? Les relations existant entre les photorécepteurs neurosensoriels et l’épithélium pigmentaire adjacent contrôlent le fonctionnement normal de la rétine ; elles sont aussi à la base des explications de la pathogénie des dégénérescences rétiniennes héréditaires. Les bases moléculaires des maladies du photorécepteur et de l’épithélium pigmentaire, maladies à l’origine de cécité, ont été identifiées. Chez des rongeurs, modèles animaux de maladies dégénératives du photorécepteur, quelques essais de thérapie génique ont permis de ralentir les phénomènes dégénératifs. Une étude récente, menée chez le chien, vient d’illustrer l’efficacité potentielle de la thérapie génique dans l’approche thérapeutique de l’amaurose congénitale de Leber. Cette affection est l’une des dégénérescences rétiniennes les plus sévères, à l’origine d’une cécité dans la petite enfance. Elle peut être due à

des mutations du gène codant la protéine RPE65 (amaurose congénitale de Leber de type II). Cette protéine intervient dans le métabolisme des rétinoïdes et son déficit entraîne, chez la souris, une dégénérescence rétinienne progressive. De même, un mutant canin spontané appelé RPE65–/–, porteur à l’état homozygote d’une délétion de quatrepaires de bases dans le gène codant la protéine, a des manifestations ophtalmologiques similaires à celles de l’amaurose de Leber. A partir de ce mutant canin RPE65–/– des cellules oculaires d’un chien mutant et celles d’un chien sain ont été mises en culture. Les cellules RPE65–/– ont été infectées par un AAV (Adéno-associated virus) recombinant ayant intégré l’ADN complémentaire du gène codant RPE65 (AAV-RPE65). Il a ensuite été vérifié que la transfection avait bien été efficace dans les cellules mutantes RPE65–/–. Puis, l’AAV-RPE65 a été injecté dans l’œil de trois chiens malades et l’efficacité de cette expérience a été évaluée par l’électrorétinogramme. La fonction rétinienne a été améliorée dans les yeux traités

par administration sous-rétinienne [1]. En revanche, l’administration de l’AAVRPE65 au sein du vitré n’a été d’aucune efficacité. Quatre mois après injection, une évaluation visuelle qualitative a montré une vision quasi normale chez les trois chiens traités. Enfin, l’étude d’un œil obtenu par énucléation trois mois après traitement a montré que l’expression du transgène était restreinte au quadrant rétinien traité. Ainsi cette approche a permis, chez trois chiens, une récupération des fonctions rétiniennes. D’autres études concernant l’efficacité et l’innocuité à long terme sont nécessaires avant d’envisager d’appliquer ce traitement à certaines formes d’amaurose congénitale de Leber. 1 Acland GM, Aguirre GD, Ray J, Zhang Q, Aleman TS, Cideciyan A, et al. Gene therapy restores vision in a canine model of childhood blindness. Nature Genet 2001 ; 28 : 52-5.

P. Labrune Hôpital Antoine Béclère, Clamart S0929693X01006236/NWS