HROMBOTIQUE VEINEUX, SE ET TRAITEMENT CJZSTROPROGESTATI Martine
Aiach a
(TVP), souvent recidivantes. Cincidence de la MTE augmente avec I’age et depend
de I’exposition
(contraceptifs
a des facteurs de risque circonstanciels
oraux, chirurgie, grossesse), bien qu’elle puisse appa-
raitre en I’absence de facteur de risque identifie. Les valeurs du risque relatif (RR) sont autour de quatre pour le FII G2021 OA, de cinq pour On distingue des facteurs genetiques, des facteurs acquis et des facteurs dont I’origine hereditaire est probable mais non demontree.
le FV Leiden et entre cinq et dix pour les deficits en PC ou en PS. Le deficit en AT a une expression clinique plus severe, avec des RR entre dix et vingt. II existe une forme grave, homozygote,
En 1965, Egeberg decrit le premier cas de thrombophilie associee a un deficit hereditaire
en antithrombine
hereditaire
(AT). Les deficits
hereditaires en proteine C (PC) et en proteine S (PS), deux autres inhibiteurs physioiogiqces
de la coagulation,
sont egalement
impliques
dans la thrombophilie familiale. Les deficits en AT, PC et PS sont rares et n’affectent
que 5 a 10 % des patients atteints de maladie throm-
boembolique
veineuse (MTEV). Les mutations des genes de I’AT, de
de thrombophilie
due a i’ab-
sence totale de PC ou de PS circulante, avec un processus thrombotique des la naissance qui entraine des n&roses tableau
de purpura
fulminans
necessitant
cutanees et un
un traitement
par des
concentres de PC purifiee et le maintien sous anticoagulant a vie. Chez les sujets homozygotes
pour la mutation Leiden du FV, le risque de
MTE est majeur, avec un risque relatif de I’ordre de cinquante a cent, mais la maladie n’apparait pas avant la puberte.
la PC et de la PS sont tres nombreuses et regroupees dans des bases
Plusieurs etudes recentes montrent que la presence simultanee de
de donnees. A noter l’existence de cas sporadiques,
deux facteurs de risque genetiques
tions de nova, ce qui expliquerait
avec des muta-
la diversite des anomalies de ces
fait souvent apparaitre plusieurs anomalies genetiques.
genes. La plus frequente
des anomalies genetiques
associees
a la MTEV
(20 a 30 % des cas) est la resistance a la PCs, decouverte par Dahlback. Arg506Gln
majore le risque de thrombose,
avec des RR de I’ordre de vingt. Cetude des familles thrombophiliques
en 1993
Canomalie est due a une mutation du facteur
Ainsi, bien que la transmission de chacune des anomalies biologiques soit autosomique
(F) V,
rent&
ou FV Leiden, qui ralentit le clivage du FVa par la PCs. Le
etant
FV Leiden affecte essentiellement
les populations
d’origine
cauca-
sienne en Europe et en Amerique du Nord, avec une frequence a 8 O/odans la population
de 3
generale.
assez frequente,
I’expression
le mode
clinique
de differents
chez les appa-
facteurs
de transmission
Pour un facteur don&,
la penetrance,
de risque
de la maladie
est complexe, faisant intervenir plusieurs determinants homozygotes
Plus recemment, ie groupe de Bertina a identifie, dans le gene de la
dominante,
est variable. La conjonction
genetiques.
bien que plus elevee chez les
que chez les heterozygotes,
n’est pratiquement
jamais
complete.
prothrombine (FII), une mutation associee a la MTE qui affecte la region 3’ non traduite du gene et conduit a une augmentation
de la quantite
d’ARN messagers traduits en proteine. Le FII G2021 OA, qui semble avoir le meme type de distribution geographique
que le FV Leiden, est
observe chez environ 10 O/odes patients atteints de MTE. La thrombophilie
se manifeste de faqon plus ou moins severe et pre-
coce en fonction du genotype qui peut etre heterozygote, homozygote ou heterozygote
composite
; elle peut egalement associer plusieurs
facteurs de risque genetiques
differents
(tableau 1).
Les anticorps antiphospholipides
sont associes a des TVP, particu-
lierement ceux qui ont, in vitro, un effet anticoagulant
(tcanticoagulant
lupique jj). Ils sont soit associes a une maladie auto-immune systemique (lupus), soit idiopathiques, pholipides
primaires.
est particulierement
determinant
le syndrome
des antiphos-
Dans les deux cas, le risque thrombotique important au tours de la grossesse et du post-
partum. Chez les heterozygotes,
la maladie se manifeste, dans la grande majo-
rite des cas, a i’age adulte par des thromboses
veineuses profondes
Chyperhomocysteinemie
(> 18,5 mmol/l) est egalement obsetvee chez
10 O/odes patients ayant une MTEV. Elle est ou non associee a une carence en folates etlou en vitamine B12. Plusieurs etudes parues recemment montrent qu’une concentration en FVIII 2 150 o/o, en dehors de tout contexte facteur 360
a Service d’hkmatologie bioiogique A HBpital europ&n Georges-Pompldou 20, rue Leblanc 75908 Paris cedex 15
patients
suivis
pendant
plusieurs
(correspondant
Fran&e
est un chez
que le taux de
aux valeurs au-dela du 90e percentile [7]. La concenpar des facteurs genetiques
tifies a I’heure actuelle et par des facteurs
C Elsevier, Paris Revue
annees,
demontre,
recidive est multiplie par dix chez les sujets ayant un FVlll > 234 % tration du FVIII est controlee
Suppl6ment au N” 349,
inflammatoire,
de risque de MTEV. II a ete egalement
des Laboratoires, janv~er2003
non iden-
environnementaux. 11
La recherche d’une anomalie de I’hemostase predisposant a la thrombose veineuse doit, au minimum, comporter le dosage de I’AT, de la PC et de la PS, la recherche de la mutation Leiden du FV (par bioloAucune anomalie FII G2021 OA
gie moleculaire pour differencier les homozygotes des heterozygotes), la recherche de la mutation G2021 OA du Fll, ainsi que le dosage du FVIII et la recherche d’anticorps
antiphospholipides
(anticardiolipine
et anticoagulant circulant) (tableau I/). Cexamen doit etre fait en dehors de toute periode aigue, en I’absence de traitement anticoagulant, monal et en dehors de toute grossesse. n + une des autres anomalies
hor-
Les deficits en PS, les elk
vations du FVIII et les anticorps antiphospholipides
doivent etre veri-
fies a deux mois, seules les anomalies permanentes
&ant a prendre
en compte.
D’aprbs Aiach et al. [ll.
Cincidence de la MTEV augmente avec I’age. Chez la femme en age de procreer, elle se situe entre 0,40 et 0,70/l Au tours de !a grossesse,
000 par an (tableau l/I).
le risque est multiplie par cinq, la majorite
des TVP survenant durant le troisieme trimestre de la grossesse et dans la periode du post-partum. A noter que la cesarienne multiplie le risque
- Dosage de I’AT, de la PC et de la PS
par cinq. Cage (a partir de 37 ans) et le surpoids
-
sont egalement associes a un risque plus eleve [4]. Dans 85 s/o des
Recherche du FV Leiden Recherche du FII G2021 OA Dosage du FVIII Dosage de I’homocysteine Recherche des anticardiolipines et d’un anticoagulant cireulant
(BMI > 29 kg/m*)
; elle est ie plus souvent proximale.
cas, la TVP est a gauche
Quelle qu’en soit I’origine, un antecedent de MTEV augmente d’un facteur 4 le risque de thrombose pendant la grossesse. Cependant, la mise en route dune prophylaxie pendant la grossesse est loin d’etre sans risque, ce qui incite a la prudence, d’autant plus que l’incidence des embolies pulmonaires fatales est t&s faible. Une etude prospective
recente evalue le risque de recidive pendant
la grossesse chez 125 femmes ayant un antecedent I’ensemble, le risque de recidive ante-partum tifiant pas I’utilisation
de I’heparine
de MTEV. Dans
est bas (2,4 e/o), ne jus-
[2].
Le risque, chez les femmes thrombophiliques,
est sans doute plus
important, comme le montre I’etude retrospective de 119 femmes ayant une MTEV pendant la grossesse ou le post-partum. anomalies thrombophiliques
La frequence des
est plus elevee chez ces 1 19 cas com-
pares a 233 contrbles apparies (tableau IV). Les etudes prospectives de families thrombophiliques sence d’antecedents,
confirment le risque eleve, meme en I’ab-
associe a la mutation du FV a l’etat homozygote
et aux anomalies combinees Chez la femme en age de prow&r, I’incidence se sltue entre 0,40 et 0.70 pour 1 000. D’aprks Oger et al [91.
[8]. Ainsi, dans ces cas exceptionnels,
on peut envisager une prophylaxie au cows du troisieme trimestre et du post-partum,
meme en I’absence d’antecedents.
Les femmes asymptomatiques
porteuses
dune
anomalie thrombo-
philique unique a l’etat heterozygote ne relevent pas d’un traitement preventif pendant la grossesse, sauf s’il s’agit d’un deficit en antithrombine. La prophylaxie durant le post-par-turn est probablement tifiee dans cette situation mais non formellement tenu de la frequence generale.
demontree,
jus-
compte
importante de ces anomalies dans la population
Chez les femmes ayant deja eu un episode de MTEV, qu’elles aient ou pas une anomalie responsable
de thrombophilie,
une prophylaxie
par heparine de bas poids moleculaire (HBPM) dans le post-par-turn est toujours justifiee. Le port de contention veineuse durant toute la grossesse et le postpartum est egalement toujours de mise. La prophylaxie durant la grossesse est en revanche non codifiee. En cas de deficit en antithrombine,
nous recommandons
une prophylaxie d&s le
debut de la grossesse en raison du risque Blev6 de thrombose. En cas * Analyse multivari~e - IC : intervalle de confiance Gerhqdt et al. [5].
, D’aprBs 12
de deficit hktkozygote
en PC, PS, ou chez les porteuses de la muta-
tion Leiden du FV ou de I’allele A2021 0 de la prothrombine,
le debut
Suppl6ment au N” 349, Revue Franqa~sedes Laboratoires, janvier 2003
de la prophylaxie au plus tard d&s le debut du troisieme trimestre, et
divante. Dans le cas de ces anomalies rares (d8ficit en AT, PC, PS),
pour certains plus tBt, doit &re systkmatique. L’intBret de I’association d’aspirine A faible dose (100 mg/j) A une HBPM A dose prophylac-
il est difficile d’estimer I’interaction du genotype avec les CO dans des Btudes cas-contkle.
tique meriterait d’&re Bvaluk dans certaines situations. Enfin, en cas
La frequence
de syndrome des antiphospholipides
anticoa-
son interaction avec les CO. Une etude cas-contr8le &value I’incidence
est recom-
des TVP par an et par 10 000 femmes A Q,8 en l’absence des deux facteurs de risque, B 3 chez les femmes prenant des CO, A 5,7 chez
gulant efficace par HBPM
a&r&
une traitement
associb B 100 mg d’aspirine
mandit. En rakon de I’absence pr&ise de codification de ces traitements, de la difficult6 d’apprkier le risque de kcidive d’une patiente A une autre, les indications
de prophylaxie
devraient
toujours
&re
de la mutation Leiden du FV a permis de mieux cerner
les femmes portant la mutation Leiden du FV et A 28,5 chez les porteuses de la mutation sous CO 1111. Les cestroprogestatifs
s’addi-
posbes en milieu spkcialis8 en Btroiie collaboration avec I’Bquipe obs-
tionnent au risque de la mutation Leiden du FV. Cette Etude est reprise
t&kale.
en tenant compte du progestatif
: le desogestrel rendrait compte en
grande partie de cette multiplication du risque chez les femmes ayan-i une p&disposition g&&ique. La multiplication du risque par i’effet combine des CO et de la mutation
Leiden du FV est confirm&e dans
d’autres Btudes. L’utilisation d’cestroprogestatifs
dans le cadre de la contraception
orale
Chez les femmes homozygotes, les CO seraient le facteur dklenchant
(CO) est associbe B un risque de MTEV dbmontre par de nombreux
pour la premiere TVP dans bon nombre
travaux, I’accident survenant le plus souvent dans I’anke debut du traitement.
La decouverte
Dans une etude de I’OMS
cas-contr8le
collaborative
Galiske
portant sur 1 143 femmes atteintes
contr8les, le risque relatif de dckelopper
qui suit le
sous 1’8gide
de MTEV et 2 998
une thrombose sous cestro-
progestatifs est estime A quatre en Europe et 6 trois dans les pays en voie de dkveloppemelnt [lo]. Cette Btude montre Bgalement un effet du progestatiff
: les mokcuies
dites de troisieme g&kration
den, desogestrel), utilisbes dans les spkialitks
(gesto-
les plus rkentes,
sem-
blent multiplier ce risque par un facteur de I’ordre de deux par rapport aux contraceptifs de premiere et deuxieme g&&ation. Ces don&es ont Btr? vkifiees
dans d’autres Etudes 161.
de la mutation
Leiden
de cas.
du FV chez une patiente ayant
des antk&dents personnels ou familiaux de thrombose est une contreindication B I’utilisation des cestroprogestatifs. II semble cependant dkraisonnable de pratiquer systkmatiquement tion avant la prescription
la recherche de la muta-
de CO, car le risque reste faible,
1 femme
sur 10 000 environ par an souffrant de MTEV sous CO. En revanche, cet examen doit &re prescrit chez une femme ayant des antecedents personnels et/au familiaux de thrombose veineuse. Le risque de MTEV induit par I’hormonothkapie substitutive
a et&
rkemment observe dans plusieurs etudes Bpidkmiologiques. Une m&a-analyse rkente [3] conduit les auteurs B conclure B la r&aliti! du risque de thrombose veineuse associe A I’hormonoth&apie
substitu-
Chez les patientes souffrant d’un deficit en AT, la survenue d’une com-
tive. Comme dans le cas des CO, le probleme n’est pas simple car
plication thrornbotique
de nombreuses modifications metaboliques observees peuvent &duke
est favoriske
indique ce mode de contraception. beaucoup
par la prise de CO et contre-
Les donnites de la littkature
sont
moins nettes pour les deficits en PC et les deficits en PS,
bien que la diminution de la PS sous CO soit parfaitement d&montke. Dans 1’8tat actuel de nos connaissances, pas de faGon significative sont contreindiquks
ces deficits n’augmentent
le risque de thrombose
que chez les femmes presentant une MTEV rkci-
[11 Aiach M., Alhenc-Gelas M., LBger P., Levesque H., Recommandations de la Soci& frantaise de gi.n&tique hurnaine, Commission +ratique de la gi?n&ique*, Les Cahiers de diagnostic g&&ique, Inserm, 2000. [2] Brill-Edwards P., Ginsberg J.S., Gent M. et al., Safety of withholding heparin in pregnant women with a history of venous thromboembolism, N. Engl. J. Med. 343 (2000) 1439-l 444. [3] Douketis J.D., Ginsberg J.S., Holbrook A., Crowther M., Duku E.K., Burrows R.F., A reevaluation of the risk for venous thromboembolism with the use of oral contraceptives and hormone replacement therapy, Arch. intern. Med. 157 (1997) 1522-l 530.
Suppl&ment au N” 349.
Ii6 aux CO qui ne
Revue
Franqaise des Laboratoires,
ou augmenter
le risque de MTEV. De plus, la grande majoritk des
Etudes est effect&e
avec des cestrogbnes de synthbse ou d’origine
Equine administres par voie orale, alors qu’en France, la majoritk des patientes reqoivent des cestrogenes dont les effets m&aboliques
naturels par voie transcutanbe,
sont sensiblement
differents et dont le
risque n’a pas kt8 6valu6.
[41 Eldor A., Thrombophilia, thrombosis and pregnancy, Thromb. Haemost. 86 (2001) 104-l Il.
of Severe inherited thrombophilia, Thromb. Haemost. 86 (2001) 800-803.
[51 Gerhardt Prothrombin a history of puerperium,
[9] Oger E., Incidence of venous thromboembolism: a community-based study in Western France, EPIGFTBP Study Group, Groupe d’Etude de la Thrombose de Bretagne Occidentale, Thromb. Haemost. 83 (2000) 657-660.
A., Scharf R.E., Beckmann M.W. et al., and factor V mutations in women with thrombosis during pregnancy and the N. Engl. J. Med. 342 (2000) 374-380.
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janvier
2003
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13