Annales de chirurgie plastique esthétique 52 (2007) 77–88
a v a i l a b l e a t w w w. s c i e n c e d i r e c t . c o m
j o u r n a l h o m e p a g e : w w w. e l s e v i e r. c o m / l o c a t e / a n n p l a
ARTICLE ORIGINAL
Transferts libres en chirurgie réparatrice (hors urgence) : évolution des indications en 20 ans Free flaps in elective reconstructive surgery: 20 years indications survey J.-P. Pradiera,*, M. Revolb, J.-M. Servantb a
Service de chirurgie plastique et maxillofaciale, hôpital d’instructions des armées Percy, 101, avenue Henri-Barbusse, 92141 Clamart cedex, France b Service de chirurgie plastique, hôpital Saint-Louis, 1, avenue Claude-Vellefaux, 75010 Paris, France Reçu le 18 septembre 2006 ; accepté le 22 septembre 2006
MOTS CLÉS Microchirurgie ; Lambeaux libres ; Sites donneurs ; Indications ; Résultats ; Évolutions
Résumé Objectifs. — Le but de cette étude était d’analyser les éventuelles évolutions de la pratique des lambeaux libres dans le traitement des pathologies aussi bien tumorales que traumatiques. Matériel et méthodes. — Cette étude rétrospective a été réalisée à partir de 328 transferts libres effectués dans le service. Les auteurs ont comparé leur expérience sur deux périodes de dix ans : série 1 de 176 lambeaux ayant déjà fait l’objet d’une publication (12 mars 1981– 13 mars 1991), et série 2 de 152 lambeaux (1er décembre 1994–30 novembre 2004). Résultats. — Il a été constaté une baisse de pratique des lambeaux libres pour les membres inférieurs, une stabilisation dans la région tête et cou et une nette augmentation en reconstruction mammaire. Trois sites donneurs ont été utilisés dans 89 % des cas, les lambeaux de grand dorsal, antibrachial et grand droit. Les divers autres n’ont été utilisés qu’une à sept fois, relevant d’indications spécifiques. Certaines tactiques chirurgicales ont vu leur indication diminuer (lambeau semi-libre ou en chausson), d’autres sont apparues (branchements en Y). La fréquence des échecs a diminué d’une série à l’autre (2,6 contre 5,7 %). Conclusion. — La variété des lambeaux utilisés est demeurée restreinte. Le choix était lié à la constance de leur anatomie vasculaire, à la grosseur des pédicules et à la reproductibilité de leur enseignement au sein du centre hospitalo-universitaire.
© 2006 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
KEYWORDS Microsurgery; Free flaps;
Abstract Purpose. — The purpose of this study was to analyze the evolution of the practice of free flaps in the treatment of tumoral and traumatic pathologies.
* Auteur
correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (J.-P. Pradier).
0294-1260/$ - see front matter © 2006 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.anplas.2006.09.002
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Donor sites; Indications; Results
J.-P. Pradier et al.
Materials and methods. — This retrospective study was realized on 328 free transfers. The authors compared two periods each of 10 years: series 1 concerns 176 flaps realized from March 12th 1981 to March 13th 1991 (already published); series 2 concerns 152 flaps realized from December 1st 1994 to November 30th 2004. Results. — We noticed a decrease of the number of free flaps for lower limbs, a stabilization in the head and neck area and a clear increase in mammary reconstruction. Three donor sites were used in 89% of the cases: latissimus dorsi, forearm and rectus abdominis flaps. Others were used only one to seven times, for specific indications. Some surgical tactics saw their indication decrease (semi-free flap or “apple turnover” technique), others appeared (Y anastomoses). The number of failures decreased from one series to the other (from 5,7 to 2,6%). Conclusion. — The variety of the flaps remains restricted. The choice is due to the constancy of their vascular anatomy, the size of the pedicles and the reproducibility of their teaching in a University Hospital.
© 2006 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Introduction Le recours aux lambeaux libres est devenu partie intégrante du traitement des vastes pertes de substance aussi bien dans les pathologies tumorales [1] que traumatiques [2,3]. Pour autant, il est intéressant de s’interroger sur ce qui a changé entre les débuts de la pratique dans les années 1980 et la pratique actuelle, et s’il existe de réelles différences entre les deux périodes. Pour permettre quelques éléments de réponse, nous rapportons ici notre expérience des transferts tissulaires libres sur deux périodes successives de dix ans dans un service de chirurgie plastique générale, sans garde d’urgence.
Matériel et méthodes Nous avons recherché tous les transferts tissulaires libres pratiqués dans le service pendant deux périodes de dix ans, en excluant les rebranchements microchirurgicaux des veines des lambeaux pédiculés et les patients opérés mais hospitalisés dans un autre service. La première période de dix ans, appelée « série 1 », s’étend du 12 mars 1981 au 13 mars 1991. Les données de cette première série ont déjà été publiées en 1992 [4] et seront reprises partiellement dans cette étude. La seconde période de dix ans, appelée « série 2 », s’étend du 1er décembre 1994 au 30 novembre 2004, et les données sont détaillées ici. Afin de comparer les deux séries entre elles, les données recueillies dans la première série ont également été recueillies dans la seconde. S’agissant dans chaque cas de transferts tissulaires libres, les données étaient : le sexe, l’âge, l’étiologie, le site donneur, le site receveur, le type d’anastomose, les tactiques de branchements, les procédés associés et les échecs. Les autres données, communes aux deux séries, étaient le nombre annuel de transferts libres et de patients hospitalisés. En revanche, certaines données n’ont été recueillies que dans la première série (durée d’hospitalisation, etc.) ou seulement dans la seconde (nombre de reprises chirurgicales des anastomoses, la fermeture du site donneur, nombre d’interventions en reconstruction mammaire, etc.). C’est la raison pour laquelle, ces données ne seront pas comparées entre elles.
Tactiques ou techniques chirurgicales spéciales utilisées Certaines méthodes chirurgicales retrouvées dans notre étude méritent une définition. Chausson aux pommes Dans cette technique, le lambeau est branché sur ses vaisseaux receveurs, mais replié sur lui-même, dans l’attente d’une exérèse chirurgicale réalisée dans un deuxième temps [5]. Boucle artérioveineuse Une boucle artérioveineuse est un shunt artérioveineux réalisé par un greffon veineux branché entre l’artère et la veine receveuse. Dans un deuxième temps opératoire, le transplant est branché sur la boucle sectionnée. Le trajet et la longueur de la boucle étaient calculés pour faciliter le positionnement du lambeau. Le passage correct du flux sanguin était vérifié en écho-doppler avant le deuxième temps chirurgical. Anastomoses en Y Nous appelons anastomose en « Y » une technique consistant en prélever le muscle grand dorsal jusqu’à l’origine de l’artère scapulaire inférieure et avec l’artère circonflexe scapulaire, formant un pédicule en Y [6]. L’artère receveuse est alors sectionnée et deux anastomoses terminoterminales sont réalisées : la première entre l’artère scapulaire inférieure et le moignon proximal de l’artère receveuse, la seconde entre l’artère circonflexe scapulaire et le moignon distal de l’artère receveuse. Patchs La prise de patchs sur l’axe vasculaire principal (artère et/ ou veine) du site donneur sur lequel s’abouche le pédicule du transplant lors du prélèvement de celui-ci, permet d’augmenter le diamètre du pédicule du greffon et de réaliser des anastomoses à l’œil nu sur de gros vaisseaux en utilisant des techniques et des outils de chirurgie vasculaire (clamps, surjet au fil 7/0). Le vaisseau sur lequel le patch est prélevé est suturé par un surjet le plus souvent et occasionne toujours une zone de rétrécissement.
Transferts libres en chirurgie réparatrice
Collerette aponévrotique Une collerette aponévrotique de 5 mm environ était emportée lors du prélèvement de l’artère perforante. Protection des anastomoses La suture en position adéquate du nerf ou du tendon du grand dorsal sur une structure solide (aponévrose, tendon) peut soulager la tension sur les anastomoses, à la manière d’un fusible, et en prévision de la mobilisation future du patient. Modelage à plusieurs palettes Certains lambeaux peuvent être prélevés en plusieurs palettes séparées. Dans le cas du grand dorsal à deux palettes, l’une se situe en proximal à l’aplomb du pédicule cutané propre, l’autre de façon plus distale sur le muscle (elle est vascularisée par la reperfusion de branches perforantes musculocutanées).
Résultats Les données complètes de la série 1 ont déjà été rapportées [4]. Dans la série 2, nous avons trouvé 152 transferts, concernant 152 patients, répartis en 78 femmes pour 74 hommes. L’âge moyen des patients était de 46 ans, avec un minimum de 11 ans et un maximum de 85 ans (Fig. 1). Cinquante-cinq patients ont été opérés par J.-M. Servant, et la majorité des autres patients a été opérée sous son contrôle technique direct et selon ses principes stratégiques [7] par les chefs de clinique du service. Le nombre annuel de transferts libres variait de 7 à 24 (Fig. 2), ce qui représentait 0,2 à 0,9 % environ des patients hospitalisés annuellement dans le service. Les transferts pratiqués étaient : 90 lambeaux de grand dorsal (dont huit musculaires purs), 26 lambeaux de type « chinois » antibrachial, 18 lambeaux de grand droit ou transplant rectus abdominis muscle (TRAM), neuf lambeaux sur la perforante épigastrique inférieure ou deep inferior epigastric perforator (DIEP), deux lambeaux de grand fessier, deux lambeaux de grand dentelé, un lambeau parascapulaire, un lambeau de péroné, un lambeau inguinal, un deuxième orteil et une anse grêle (Fig. 3). Les zones receveuses étaient : le tronc dans 55 cas (dont 57 % de reconstruction mammaire), la tête et le cou dans 48 cas, les membres inférieurs dans 47 cas et le membre supérieur dans deux cas (Fig. 4). La répartition topographique est donnée dans le (Tableau 1). Les branchements décrits plus loin sont les derniers réalisés après reprise éventuelle.
Le tronc Les étiologies étaient : ● 35 reconstructions mammaires après mastectomie pour cancer ; ● 13 exérèses tumorales (quatre dermatofibrosarcomes de Darier Ferrand, deux sarcomes, deux tumeurs desmoïdes, deux carcinomes épidermoïdes, un cordome, une
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● ● ● ● ●
métastase d’hépatocarcinome et un lymphome de Burkitt) ; trois radiolésions ; une éventration récidivante multi-opérée ; une séquelle de traumatisme balistique de la paroi abdominale ; une maladie de Verneuil très évoluée et invalidante ; une complication pariétale après chirurgie abdominale avec fistules digestives multiples. Les branchements vasculaires :
● cas des reconstructions mammaires par un lambeau de TRAM : ○ l’artère épigastrique inférieure était branchée : – 12 fois sur la circonflexe scapulaire en anastomose terminoterminale (TT) ; – deux fois sur l’humérale en TT ; – deux fois sur la thoracodorsale en TT ; – une fois sur la mammaire interne en TT ; – une fois sur l’axillaire en anastomose terminolatérale (TL) ; ○ la veine épigastrique inférieure était branchée : – huit fois sur la circonflexe scapulaire en TT ; – trois fois sur une collatérale humérale en TT ; – deux fois sur l’humérale en TL ; – deux fois sur une collatérale axillaire en TT ; – une fois sur l’axillaire en TL ; – une fois sur la mammaire interne ; – une fois sur une collatérale céphalique ; ● cas des reconstructions mammaires par un lambeau de DIEP : ○ l’artère épigastrique inférieure était branchée en TL sur l’artère axillaire dans les neuf cas ; ○ la veine épigastrique inférieure était branchée en TL sur l’axillaire dans huit cas et en TT sur une collatérale axillaire dans un cas ; ○ notons que dans les trois dernières interventions deux artères et deux veines épigastriques inférieures (ou une division) ont été anastomosées sur le même vaisseau receveur pour chaque patiente ; ● cas des reconstructions mammaires par un lambeau de grand dorsal : ○ le branchement artériel a été fait en TL sur l’axillaire dans quatre cas et sur l’humérale dans deux cas ; ○ le branchement veineux a été fait en TL sur l’humérale dans quatre cas (dont un cas de branchement double) et sur l’axillaire dans deux cas ; ● cas des reconstructions mammaires par lambeau de grand fessier inférieur : ○ l’artère ischiatique était branchée en TT sur la thoracodorsale dans un cas et sur la mammaire interne dans l’autre cas ; ○ le branchement veineux a été fait en TT sur la céphalique détournée dans un cas et sur la mammaire interne dans un autre cas où deux veines sont anastomosées ; ● dans les autres cas : ○ le branchement artériel a été fait :
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Tableau 1 Distribution topographique des lambeaux (série 2) Région
sous-région
Membre inférieur
Cuisse, genou Jambe, cheville Pied, talon Scalp Front, nez Orbite Mâchoire, joue Cou Avant-bras Main Thorax, sein Abdomen Fesse, périné Organes génitaux Total
Tête et cou
Membre supérieur Tronc
Grand dorsal (MC) 14 14 2 5 7 3 10
Grand dorsal (M)
Antibrachial « chinois »
5 1 1 1
2 8
Grand droit
DIEP
Grand fessier
Grand dentelé
Parascapulaire
Fibula
Inguinal
Orteil
Intestin grêle
Total
1
3
1
13
1
1 1 1
1 1 8 12 6 82
8
26
18
9
2
18
9
2
2
1
1
1
1
1
152
J.-P. Pradier et al.
Transferts libres en chirurgie réparatrice – 18 fois en TL sur la fémorale (dont sept fois par un pontage saphène) ; – une fois en TL sur l’axillaire (lymphome axillaire) ; – une fois en TT sur la circonflexe scapulaire (sarcome scapulaire) ; ○ le branchement veineux a été fait : – 16 fois en TT sur la saphène (dont 12 fois déroutée sur plusieurs centimètres) ; – deux fois en TL sur la fémorale ; – une fois en TT sur la circonflexe scapulaire ; – une fois en TL sur l’axillaire.
Tête et cou Les étiologies étaient : ● 34 tumeurs ou leurs séquelles (11 carcinomes spinocellulaires, dont cinq sur la joue, cinq sur le scalp et un auriculaire ; six carcinomes basocellulaires, dont deux sur le front, deux sur la joue et deux auriculaires, cinq Darier Ferrand dont trois sur la joue, trois mélanomes, deux tumeurs de Merkel de la joue, deux carcinomes épidermoïdes l’un touchant le maxillaire supérieur, l’autre la mandibule, une dysplasie fibreuse frontale intracrânienne, une tumeur mucoïde de la joue, un cylindrome du menton, un rétinoblastome) ; ● six malformations (quatre atrophies hémifaciales, une malformation artérioveineuse et une malformation craniofaciale complexe) ; ● cinq traumatismes : deux traumatismes balistiques, deux ingestions buccales de caustique et une avulsion de scalp par machine-outil. Le branchement artériel a été fait : ● sur la carotide externe et ses branches : ○ sur carotide externe directement neuf fois en TT (dont un pontage veineux) et huit fois en TL (dont un pontage veineux) ; ○ Sur la thyroïdienne supérieure 13 fois en TT (dont un pontage veineux) ; ○ sur la carotide externe intraparotidienne six fois en TT ; ○ sur la faciale quatre fois en TT (dont un pontage veineux) ; ● sur la carotide primitive une fois en TL ; ● sur la temporale superficielle trois fois en TT ; ● sur la cervicale transverse deux fois en TT ; ● sur la maxillaire interne une fois en TT ; ● sur la sous-clavière une fois en TL. Le branchement veineux a été fait : ● 16 fois en TT sur le tronc thyrolinguofacial de Farabœuf, ● 15 fois sur la jugulaire interne (dix fois en TL, dont deux fois avec pontage ; cinq fois en TT, dont deux fois avec pontage) ; ● 14 fois en TT sur la jugulaire externe (dont deux pontages) ;
81 ● une fois en TL avec pontage sur la sous-clavière ; ● une fois en TT sur la temporale superficielle ; ● une fois deux veines du même transplant ont été microanastomosées, la première sur la jugulaire externe en TT et la seconde sur le tronc de Farabœuf en TT également.
Membres inférieurs L’étiologie des pertes de substance était : ● 28 traumatismes et séquelles, se répartissant en : ○ dix fractures ouvertes de jambe dont cinq avec perte de substance osseuse significative (deux initialement, trois après excision d’un séquestre) ; ces fractures se situent cinq fois au tiers moyen, quatre fois au tiers inférieur et une fois au tiers supérieur, il existait un axe unique de jambe dans trois cas et dans deux cas un lambeau pédiculé musculaire ou fasciocutané avait été réalisé dans un premier temps sans succès ; ○ six ostéites suppurées de jambe dont trois associées à une pseudarthrose ; elles se situaient trois fois au tiers moyen, deux fois au tiers inférieur et une fois au tiers supérieur ; ○ six nécroses subaiguës apparues entre le 10e et le 60e jour du traumatisme, avec exposition de tendons, d’articulation ou de structure osseuse ; ○ cinq cicatrices instables avec troubles trophiques et ulcérations cutanées ; ○ une séquelle de brûlure. Les transferts libres ont toujours été pratiqués plusieurs semaines après l’accident initial ; ● 11 tumeurs et radiolésions (six sarcomes, quatre radionécroses, un histiocytofibrome) ; ● cinq complications postopératoires à type de nécrose et/ ou de sepsis survenues, dans tous les cas, après chirurgie articulaire (sur une articulation traumatique ou multi-opérée) ; ● trois étiologies diverses (une fasciite nécrosante, une nécrose d’artérite diabétique, un ulcère chronique d’origine veineuse). Les branchements vasculaires : ● pour les pertes de substances (PDS) de la cuisse et du genou : ○ le branchement artériel a été fait 14 fois en TL sur la fémorale dont : – huit fois sur la fémorale commune et six fois sur la fémorale superficielle ; – 11 fois au Scarpa, deux fois au tiers moyen et une fois au quart inférieur de cuisse ; ○ le branchement veineux a été fait : – dix fois en TL sur la fémorale ; – trois fois en TT sur la saphène (dont une fois déroutée) ; – une fois en TT sur une tibiale dans le creux poplité ; ● pour les PDS de la jambe : ○ le branchement artériel a été fait :
82 – 13 fois sur la tibiale postérieure dont sept fois en TL, et six fois selon la technique du Y dont une fois sur un shunt artérioveineux mis en place huit jours avant ; – quatre fois sur la fémorale en TL ; – une fois sur la tibiale antérieure en TL (dont une fois avec une boucle artérioveineuse) ; – une fois sur la poplitée en TL ; – une fois sur le tronc tibiopéroné en TL ; ○ le branchement veineux a été fait : – 12 fois sur la saphène en TT (dont une fois avec une boucle artérioveineuse) ; – huit fois sur la tibiale postérieure (dont une fois en TT, une fois en TT sur une boucle artérioveineuse et deux fois en TL) ; – une fois sur la fémorale en TT ; – une fois sur la poplitée en TL ; ● pour les PDS du pied et du talon : ○ le branchement artériel a été fait : – huit fois sur la tibiale postérieure dont six fois en TL et deux fois selon la technique du Y ; – trois fois sur la tibiale antérieure dont deux fois en TL et une fois en TT ; ○ le branchement veineux a été fait en TT : – six fois sur la saphène ; – deux fois sur la tibiale antérieure ; – deux fois sur la tibiale postérieure ; – une fois sur la saphène et sur la tibiale postérieure.
J.-P. Pradier et al.
sur l’artère. Il n’a pas, été constaté de thrombose du vaisseau prélevé sur nos cas, ni de complication. Collerette aponévrotique Cette technique a été réalisée dans sept cas de lambeau DIEP. Protection des anastomoses Ce procédé a été noté dans dix comptes rendus opératoires de lambeau de grand dorsal mais a vraisemblablement été pratiqué beaucoup plus souvent. Modelage à plusieurs palettes ● Deux palettes ont été utilisées dans six cas pour la reconstruction de la joue (cinq fois par un grand dorsal, une fois par un lambeau chinois) et en général, la palette proximale reconstruisait la face externe de la joue et la palette distale la face endobuccale ; ● trois palettes ont été utilisées quatre fois (trois fois par grand dorsal, une fois par un antibrachial) dans des reconstructions touchant la joue, les fosses nasales et le palais ; ● quatre palettes n’ont été utilisées qu’une seule fois par un grand dorsal pour la reconstruction joue, fosses nasales et palais en deux plans.
Procédés associés Membres supérieurs Les étiologies étaient un sarcome de l’avant-bras et un mélanome unguéal du pouce. Le branchement artériel a été fait sur l’humérale basse en TL et sur la radiale en TT. Le branchement veineux a été fait sur la céphalique en TL et sur la radiale en TT.
Tactiques spéciales Chausson aux pommes Cette technique a été utilisée sept fois, dans des cas où la résection chirurgicale imposait une couverture absolument fiable, quatre fois en zone abdominale ou thoracique, une fois sur un genou, une fois sur le front. Boucle artérioveineuse Une boucle artérioveineuse a été réalisée une fois sur un ulcère de jambe et une fois sur un pied traumatique. Anastomoses en Y Ce type de branchement a été réalisé huit fois sur l’artère tibiale postérieure dont quatre fois sur un axe unique de jambe. Patchs Cette méthode a été utilisée huit fois avec un lambeau de grand dorsal, une fois avec un DIEP et une fois avec un lambeau de grand dentelé. Cinq fois le patch a été prélevé à la fois sur l’artère et la veine, trois fois sur la veine et une fois
Curiethérapie Dans deux cas, des tubes guides ont été placés sous le lambeau pendant l’intervention pour une curiethérapie postopératoire à l’iridium 192. Dans les deux cas, il s’agissait d’un lambeau de grand dorsal. Les indications étaient un carcinome spinocellulaire évolué du scalp et un sarcome de cuisse. Reconstruction osseuse Un lambeau libre de péroné ostéosynthésé en « U » a été utilisé une fois pour reconstruire une mandibule (symphyse et deux branches horizontales). La palette cutanée de ce lambeau était mise en bouche pour reconstruire le palais. Une greffe osseuse a été associée au lambeau libre dans quatre cas. Dans un cas, il s’agissait d’une greffe spongieuse immédiate. Dans trois cas, un ciment à la gentalline a été mis en place et la greffe était pratiquée secondairement. Dans un cas, un greffon osseux a été utilisé secondairement pour la projection du nez. Dans un autre cas, un greffon costal a été utilisé secondairement pour reconstruire un plancher orbitaire. Lambeau local associé dans le même temps L’association entre un lambeau libre et un lambeau pédiculé a été réalisée dans trois cas : ● un cas de lambeau de grand dorsal sur l’abdomen associé à un lambeau pédiculé de fascia lata destiné à reconstruire le pubis ;
Transferts libres en chirurgie réparatrice
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● un cas de lambeau de grand dorsal à trois palettes a été associé à un lambeau d’Eslander destiné à reconstruire une lèvre supérieure ; ● un cas de lambeau de grand dorsal associé à une rhinopoïèse par lambeau frontal armé d’un greffon ostéocartilagineux. Neurotisation En dehors du transfert d’orteil, dont les nerfs ont évidement été suturés aux nerfs collatéraux de la zone receveuse, deux cas de neurotisation motrice ont été pratiqués. Dans un cas, un greffon saphène a été interposé sur un nerf facial interrompu par l’exérèse d’un basocellulaire de la région auriculaire et protégé par un lambeau antibrachial. Dans un second cas, un nerf facial interrompu par l’exérèse d’un spinocellulaire de l’oreille a été suturé au nerf du grand dorsal utilisé pour la couverture cutanée.
Les complications et les échecs (Tableaux 2–4) Quatre nécroses complètes et six nécroses partielles (nécessitant la remobilisation du lambeau) ont été constaTableau 2 Complications (série 2) Complication Nécrose complète Nécrose partielle Hématome Infection Fistule bucco-nasale Communication naso-cranienne Paralysie SPE Total
Nombre de cas 5 6 3 2 1 1
Incidence (%) 3,2 3,9 1,9 1,3 0,6 0,6
1 18
0,6 11,8
Tableau 3 Répartition des complications à type de nécrose (série 2)
91 18 9 2 1
Nombre de nécrose complète 1 1 1 1 1
Nombre de nécrose partielle 4 1 1
31 152
5
6
Lambeau
Nombre total
Grand dorsal Grand droit DIEP Grand fessier Grand dentelé Autres Total
Nombre
Intervention unique de reprise des anastomoses Interventions multiples de reprise des anastomoses Total
12
Fermeture du site donneur Le site donneur a été accessible à une suture directe dans 110 cas. Le site donneur a été recouvert d’emblée par une greffe de peau dans 23 cas dont 18 cas de lambeau antibrachial (dont 11 fois avec une greffe de peau totale sur un bourdonnet) et cinq cas de grand dorsal. La mise en place d’une greffe de peau mince a été réalisée secondairement dans 12 cas, dont 11 cas de lambeau de grand dorsal et un cas de lambeau chinois. Certaines fermetures directes du lambeau antibrachial ont été permises par le prélèvement d’un lambeau fasciograisseux à la façon d’un lambeau greffe. Complément de greffe de peau sur le site receveur Une greffe de peau a été réalisée 13 fois dont 11 cas avec de la peau mince et trois fois avec de la peau totale (face et main).
Autres données chiffrées utiles Le nombre total d’interventions en reconstruction mammaire réalisées à l’hôpital Saint-Louis durant la période du 1er décembre 1994 au 30 novembre 2004 est de 771 cas, répartis comme suit :
Tableau 4 Reprise des anastomoses (série 2) Type de reprise
tées, soit respectivement 2,6 et 3,9 % des cas (Tableau 2). Les autres complications étaient plus rares. Seize lambeaux ont nécessité une reprise chirurgicale des anastomoses, avec un changement dans le branchement veineux dans six cas, dans le branchement artériel dans cinq cas et dans le branchement à la fois artériel et veineux dans cinq cas. Cette reprise chirurgicale a eu lieu dans les 12 heures après l’intervention, dans six cas lors de reprise unique et quatre fois lors de reprise multiple. Dans le cas des reprises multiples, la deuxième intervention a été réalisée dans les 24 heures dans deux cas, dans les 48 heures dans un cas et au cinquième jour dans l’autre. Les autres reprises anastomotiques ont été uniques et effectuées au quatrième jour dans un cas, au sixième jour dans un autre cas et au 14e jour dans un dernier cas. Le cas de reprise au 14e jour est survenu dans un contexte d’évacuation d’un hématome abcédé au contact du pédicule. L’anastomose artérielle déjà pontée a été refaite avec un nouveau greffon et le lambeau n’a pas été perdu. Les reprises chirurgicales ont donc permis de sauver 75 % des lambeaux.
Incidence (%) 7,9
4
2,6
16
10,5
● reconstruction par prothèse : 565 cas (dont 36 reconstructions immédiates), soit 73,4 % ; ● reconstruction par lambeau pédiculé de grand dorsal : 162 cas (dont neuf reconstructions immédiates), soit 21 % ; ● reconstruction par lambeau libre : 35 cas, soit 4,5 % ; ● reconstruction par lambeau pédiculé de grand droit : neuf cas, soit 1,2 %.
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J.-P. Pradier et al.
Comparaison entre les séries 1 et 2 Population (Fig. 1)
Sites donneurs (Fig. 3)
L’âge moyen de la série 2 est légèrement plus élevé et la tranche 20–30 ans est moins représentée. Cela s’explique par la baisse du nombre de traumatismes des membres traités qui touchent souvent cette tranche d’âge et par l’augmentation des tranches d’âge supérieures.
Indications et sites receveurs (Figs. 2 et 4) Nous constatons une baisse du nombre total de lambeaux libres pratiqués (152 cas contre 176). Cette baisse reste modérée, de l’ordre de 15 %. Tronc Nous constatons une nette augmentation du nombre de lambeaux libres pratiqués en reconstruction mammaire (35 contre 1 cas). Tête et cou Au niveau de la tête et du cou, le nombre global d’interventions pratiquées et de pathologies rencontrées est stable. Membres En revanche, nous constatons une nette diminution du nombre de lambeaux libres réalisés sur les membres (47 cas
Figure 1
Distribution des âges (série 2).
Figure 2
contre 106 aux membres inférieurs et deux cas contre 13 aux membres supérieurs).
Incidences (série 2).
Nous avons essentiellement utilisé trois types de lambeaux : le lambeau de grand dorsal, le lambeau antibrachial et le grand droit. Grand dorsal Le nombre de grand dorsal transférés était stable d’une série à l’autre (90 contre 99). Lambeau « chinois » antibrachial Le nombre de lambeaux de type antibrachial transférés a baissé de 44 % (26 contre 46). Lambeaux de TRAM et de DIEP Le nombre de grand droit transférés a nettement augmenté (27 contre 2) et on remarque l’apparition de sa version prélevée uniquement sur les vaisseaux perforants (lambeau de type DIEP) qui a tendance à remplacer systématiquement le TRAM depuis 2003. Lambeaux de péroné La forte baisse apparente du lambeau de péroné (1 contre 12) est liée au fait que les patients sont maintenant hospitalisés dans un autre service (service de stomatologie) bien qu’opérés par les chirurgiens du service. Ils ne sont donc plus comptabilisés dans la seconde série.
Figure 3
Lambeaux utilisés (série 2).
Figure 4
Zones receveuses (série 2).
Transferts libres en chirurgie réparatrice
Autres lambeaux Les autres types de lambeaux ont été utilisés entre une et sept fois en 20 ans. Certains de ces lambeaux sont moins utilisés que par le passé (orteil, parascapulaire) ou ne l’ont pas été (épiploon, pédieux) et d’autres sont apparus (grand fessier, grand dentelé, intestin grêle). Pour une plus grande clarté, et pour mettre en évidence les sites donneurs et receveurs les plus fréquents, la distribution topographique des lambeaux des séries 1 et 2 est présentée dans le (Tableau 5).
Stratégie de branchement Peu de changement a été constaté d’un point de vue global. Au niveau de la tête, le branchement veineux en TT sur le tronc thyrolinguofacial de Farabœuf est devenu plus fréquent, et le branchement sur la veine jugulaire externe en TT apparaît nettement. Certaines tactiques spéciales sont en diminution : ● l’absence de lambeau semi-libre alors que 12 avaient été réalisés précédemment ; ● les lambeaux en chausson étaient en recul de 50 % (7 cas contre 14) ; ● la boucle artérioveineuse est devenue encore plus exceptionnelle (un cas contre quatre) ; ● aucune expansion préalable n’a été réalisée alors qu’elle l’avait été quatre fois. Certaines nouveautés ou astuces sont apparues : ● les branchements en Y et la prise de patchs sur les vaisseaux axillaires lors du prélèvement du muscle grand dorsal ; ● le prélèvement du lambeau de grand droit sur ses perforantes avec une collerette aponévrotique le plus souvent et en laissant le muscle (DIEP) ; ● la technique de protection des anastomoses par un fusible tendineux ou nerveux.
Échecs Une diminution du taux d’échec (2,6 contre 5,7 %) est constatée. Dans la précédente étude les zones donneuses perdues étaient un grand dorsal dans quatre cas, un lambeau antibrachial dans trois cas, un épiploon dans deux cas et un péroné. La répartition est donc différente.
Discussion Les indications et les sites receveurs Le nombre annuel de transferts libres représentait 0,2 à 1 % environ des patients hospitalisés annuellement dans le service. Ce chiffre est assez stable et relativement modéré. La baisse de 15 % du nombre total de lambeaux libres pratiqués peut s’expliquer d’un point de vue conjoncturel, pour ce qui est de l’hôpital Saint-Louis. En effet, il est à noter prin-
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cipalement une diminution des traumatismes des membres traités par les orthopédistes et en moindre mesure des lambeaux de péroné désormais traités, quant à eux, en stomatologie. Cependant, dans la littérature, une augmentation du nombre de lambeaux libres réalisés est encore constatée [8, 9]. Par exemple, Hidalgo et al. [9] ont réalisé 716 lambeaux libres sur dix ans. Par ailleurs, nous avons constaté une augmentation du nombre de cas liés à la reconstruction mammaire. Cela s’intègre dans le développement de cette chirurgie. Aussi, s’agissant de nos indications de transferts tissulaires dans le cadre de la reconstruction mammaire, elles ne semblent pas plus élevées que les autres équipes. Par exemple, l’équipe de Clough de l’institut Curie a réalisé 14 lambeaux libres de TRAM en huit ans entre 1991 et 1998 [10], alors que nous en avons réalisé 18 en dix ans (les lambeaux de DIEP n’étant pas comptabilisés). En effet, sur la période de dix ans de la série 2, seulement 4,5 % des reconstructions mammaires ont été faites par lambeaux libres. Cela montre la relative rareté de nos indications de transferts tissulaires libres dans ce domaine.
Les sites donneurs Nous pensons qu’un nombre limité de lambeaux libres suffit à résoudre la plupart des situations rencontrées et permet également d’accroître leur fiabilité. Les résultats exposés ici et comparés à notre précédente série semblent nous donner raison. Certains auteurs, comme Hidalgo [9], ont également abouti à cette conclusion. Sur la période cumulée des deux séries, soit en 20 ans, il apparaît que nous avons utilisé essentiellement trois lambeaux [Tableau 5]. Grand dorsal Il domine largement les autres lambeaux dans les deux séries. C’est le lambeau le plus universel et le plus vaste [11]. Il peut être prélevé en musculaire pur ou avec une ou plusieurs palettes cutanées [12]. La taille de son pédicule autorise des anastomoses à l’œil nu et son débit vasculaire élevé autorise toutes les possibilités de pontage avec un greffon parfois très long (jusqu’à 26 cm dans cette série). La morbidité de ce lambeau est relativement faible [13]. Il est retrouvé cité dans toutes les grandes séries [1–3,14]. Certains l’utilisent beaucoup [2], d’autres peu [1,9]. Lambeau « chinois » antibrachial Malgré une moindre utilisation actuelle, il reste intéressant par la finesse et l’étendue du tissu qu’il apporte, bien utile dans les reconstructions faciales, par sa fiabilité ainsi que par les multiples possibilités de branchements vasculaires qu’il permet à ses deux extrémités. L’inconvénient majeur de ce lambeau est l’importance des séquelles cosmétiques sur le site donneur [12,15]. Lui aussi est régulièrement cité en bonne position [1,9]. Lambeaux de grand droit Le développement rapide de ces lambeaux s’explique par le fait que certaines reconstructions mammaires ne donnaient pas entière satisfaction avec les méthodes classiques (pro-
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Tableau 5 Distribution topographique des lambeaux sur 20 ans (séries 1 et 2 cumulées) Région
sousrégion
Membre Cuisse, inférieur genou Jambe, cheville pied, talon Tête et Scalp cou front, nez orbite mâchoire, joue Cou Membre Avant-bras Main supérieur Tronc Thorax, sein Abdomen Fesse, périné Organes génitaux Total Nombre Pourcentage
Antibrachial Grand « Chinois » droit (TRAM)
Grand dorsal (MC) 23
Grand dorsal (M)
48
15
25
8 22 16 3 17
1 1 1
17
Péroné
Orteil
ParaEpiploon scapulaire
4
1
4
3
Grand Grand dentelé fessier
10
3
Pédieux Intestin Total grêle
1
99
2
1
1
1 1 3
9
26 25 29 3 37
1 1
1 1
inguinal
28
1
15
2 1
Grand Droit (DIEP)
1
3 7 19
9
2
39
15 7
15 7 1
171 58
4 5 10
18
72 22
1 20 8,8
9
13 3,9
7 7,6
5
5
2
2
2
1
1
328 100
J.-P. Pradier et al.
Transferts libres en chirurgie réparatrice
thèse ou lambeau de grand dorsal prothèse) quand on se trouvait face à : ● un manque de peau ou une peau irradiée sur la cicatrice de mastectomie ; ● un sein controlatéral volumineux, plus ou moins ptosé et de consistance graisseuse. Mais également par le fait que les reconstructions autologues autorisent les traitements adjuvants en postopératoire (radiothérapie), sur le sein reconstruit, contre-indiqués en cas de reconstruction au moyen d’un implant mammaire. Le lambeau de grand droit doit son succès au fait qu’il se situe à proximité du thorax et qu’il ne nécessite pas de changement complet de position. De plus, il peut être prélevé sur ses vaisseaux perforants (DIEP), ce qui diminue la morbidité sur la zone donneuse [16] même s’il rallonge la durée d’intervention. C’est pourquoi, les lambeaux libres de TRAM, ou maintenant de DIEP, sont devenus, pour nous, les lambeaux de choix des reconstructions mammaires immédiates. En reconstruction mammaire différée, ces lambeaux sont pour nous une alternative au lambeau de grand dorsal pédiculé lorsque le sein controlatéral est gros et la morphologie de l’abdomen l’autorise. Le lambeau de DIEP, de par l’absence du muscle, a un flux vasculaire plus faible que le lambeau de TRAM duquel il est dérivé [17]. Il est donc moins fiable, mais surtout la dissection des perforantes rallonge significativement le temps opératoire. Nous réalisons, si possible, des anastomoses TL et non TT sur l’artère de ces lambeaux. Quand la disposition anatomique du transplant se présente avec deux branches distinctes (pédicule double dans 67 % des cas selon Heitman [18]), nous utilisons le branchement de chaque pédicule pour augmenter la surface du territoire perfusé et favoriser le retour veineux. Certains ont décrit la possibilité de le prélever sur le pédicule épigastrique superficiel lambeau SIEP lorsque celui-ci était dominant [14]. Nous n’en avons pas l’expérience et cela pourrait être une piste d’explication de notre échec rencontré. L’augmentation de l’utilisation des lambeaux libres de type TRAM ou DIEP pour la reconstruction mammaire est largement répandue [16]. Pour certains auteurs [14], le lambeau de DIEP est devenu la méthode de premier choix de reconstruction autologue tant en reconstruction mammaire immédiate qu’en reconstruction différée. Stratégie de branchement Certaines astuces comme les branchements en Y, la prise de patchs sur les vaisseaux donneurs alimentant le lambeau transféré ou encore la prise de collerettes aponévrotiques avec les lambeaux perforants sont apparues au fil du temps et vont toujours dans le sens d’une sécurisation maximale de ce type d’intervention. La disparition des lambeaux semi-libres dans la série 2, s’explique par la diminution de l’activité de couverture des membres pris en charge par le service. Enfin, le recul du recours aux lambeaux en chausson s’explique par l’accroissement de la sécurité des lambeaux libres.
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Taux d’échec Le taux d’échec des lambeaux libres se situe, nous l’avons vu, entre 2,6 et 5,7 %. Ce taux est comparable à ceux de la littérature mondiale [1–3,9,14]. Nous pensons comme d’autres auteurs [9] que la fiabilité des lambeaux passe par le respect de principes [7] dans la sélection des indications, le choix du prélèvement, la stratégie de branchement mais aussi par une bonne réactivité en cas de souffrance du lambeau. Dans notre série, les reprises chirurgicales ont permis de sauver 75 % des lambeaux qui auraient été perdus en l’absence de geste salvateur. Hidalgo [9] reconnaît également que sa réactivité lui a permis de sauver 70 % de ses lambeaux en souffrance.
Conclusion À l’issue de la comparaison des deux séries, force est de constater une homogénéité quant au recours à un nombre restreint de lambeaux. Cela s’explique par la politique du service dans la recherche d’une sécurité maximale et la restriction des indications. Deux lambeaux dominent dans les deux séries : le lambeau de grand dorsal et, dans une moindre mesure, le lambeau antibrachial. Dans la plus récente de nos deux séries, le lambeau de grand droit (TRAM ou DIEP) est apparu de façon significative, lié au développement de la reconstruction mammaire. Ces trois lambeaux nous ont permis de résoudre près de 90 % des situations (Tableau 5). Leur choix n’était pas dû au hasard. Il était lié à la constance de leur anatomie vasculaire et à la grosseur des pédicules. Par ailleurs, ils ont permis de faciliter l’enseignement au sein d’un service hospitalouniversitaire.
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