Tuberculose mammaire pseudo-tumorale avec pacchypleurite chez l’homme

Tuberculose mammaire pseudo-tumorale avec pacchypleurite chez l’homme

Modele + ARTICLE IN PRESS PNEUMO-443; No. of Pages 3 Revue de Pneumologie clinique (2014) xxx, xxx—xxx Disponible en ligne sur ScienceDirect www...

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ARTICLE IN PRESS

PNEUMO-443; No. of Pages 3

Revue de Pneumologie clinique (2014) xxx, xxx—xxx

Disponible en ligne sur

ScienceDirect www.sciencedirect.com

LETTRE À LA RÉDACTION Tuberculose mammaire pseudotumorale avec pacchypleurite chez l’homme

Un traitement anti-bacillaire a été instauré pendant 6 mois (2 mois de rifampicine-isoniazide-pyrazinamide puis 4 mois de rifampicine-isoniazide). L’évolution a été favorable sans récidive jusqu’à nos jours.

Breast cancer-mimicking tuberculosis with pacchypleurite in male

Discussion

Introduction La tuberculose mammaire est une affection très rare même pour les pays dont l’endémicité tuberculeuse est très haute. Plusieurs travaux ont rapporté cette localisation tuberculeuse chez la femme, mais chez l’homme cette atteinte mammaire reste très exceptionnelle, d’où l’intérêt de notre observation pour dégager les particularités clinique, radiologique et thérapeutique de la tuberculose mammaire chez l’homme tout en évoquant la difficulté du diagnostic différentiel notamment avec le cancer du sein chez l’homme. Observation Il s’agit d’un patient de 55 ans, tabagique chronique, sans antécédents tuberculeux ou contage récent, qui a présenté un mois avant son admission une gynécomastie progressive gauche douloureuse sans issue de pus par le mamelon ni signes généraux associés. L’examen physique a noté une tuméfaction molle kystique froide fixe par rapport aux plans adjacents prenant toute la glande, avec des ganglions axillaires centimétriques non fistulisés. Le bilan biologique a été marqué par un syndrome inflammatoire important : une CRP à 258 mg/L, des GB à 14 000 éléments/mm3 . Le bilan phtysiologique dans les crachats et la sérologie VIH ont été négatifs. La radiographie thoracique était normale. L’échographie mammaire a noté une masse tumorale suspecte de 7 cm de diamètre à contenu hétérogène tissulaire et liquidien avec des ganglions satellites à centre hypoéchogène. La TDM a montré une masse tissulaire mammaire arrivant au contact du plan costal et associée à une pacchypleurite et des calcifications pleurales en regard (Fig. 1). Le liquide de ponction a objectivé des bacilles de Koch (BK) à l’examen direct avec une culture positive. Une résection de la masse par incision sous-mammaire a été réalisée avec suites simples. Le résultat histologique était en faveur de granulomes épithélioïdes et giganto-cellulaires avec nécrose caséeuse évoquant une tuberculose (Fig. 2).

La localisation mammaire est parmi les plus inhabituelles de la tuberculose extra-pulmonaire (0,1 %), et environ 4,5 % des tumeurs du sein [1]. La femme jeune est touchée dans 95 % des cas [1]. Chez l’homme, elle est exceptionnelle et la littérature en rapporte très peu de cas cliniques isolés. L’atteinte mammaire tuberculeuse est le plus souvent secondaire à une tuberculose pulmonaire (37 %) ou extra-pulmonaire (7,6 %) et la voie de contamination est soit lymphatique à partir d’un foyer thoracique ou abdominal, soit directe à partir d’un foyer costal, chondrocostal, ou sterno-claviculaire [2]. Notre observation est particulière du fait que la tuberculose mammaire chez l’homme prend souvent des formes pseudo-néoplasiques, et rarement une forme de suppuration mammaire chronique, ce qui pose des problèmes diagnostiques au clinicien surtout que la présence de pacchypleurite en regard peut simuler les métastases pleurales fréquentes lors du cancer du sein. L’atteinte hématogène décrite lors des miliaires tuberculeuses est rare [3]. Dans quelques cas, l’atteinte peut être primaire, comme chez notre patient. On définit trois formes cliniques [1] : • la forme nodulaire froide, de loin la plus fréquente (77 % des cas) ; • la forme inflammatoire diffuse fistulisée à la peau ; • la forme d’un abcès mammaire chronique résistant aux antibiotiques habituels [2]. Les deux seins peuvent être atteints avec une fréquence égale mais la forme bilatérale n’est observée que dans 3 % des cas [4]. Des adénopathies axillaires sont retrouvées dans 75 % des cas, mobiles pouvant évoluer vers la fistulisation [5]. La mammographie n’est pas d’un apport décisif car la plupart des images sont d’allure maligne. L’échographie objective une masse hypoéchogène dans 60 % des cas [6]. La TDM et l’IRM évaluent l’extension vers la paroi thoracique et explorent le parenchyme pulmonaire à la recherche d’une forme pulmonaire associée. La cytoponction découvre rarement des cellules épithélioïdes ou des bacilles de Koch comme c’est le cas de notre patient, et

http://dx.doi.org/10.1016/j.pneumo.2014.03.003 0761-8417/© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Pour citer cet article : El Hammoumi M, et al. Tuberculose mammaire pseudo-tumorale avec pacchypleurite chez l’homme. Rev Pneumol Clin (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.pneumo.2014.03.003

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Lettre à la rédaction

Figure 1. regard.

Aspect scannographique d’une tuberculose mammaire pseudo-tumorale avec pacchypleurite et calcifications localisées en

Le traitement est avant tout médical, faisant appel aux anti-bacillaires selon un schéma associant rifampicine, isoniazide et pyrazinamide pendant 2 mois, et aux phases d’entretien, associant rifampicine et isoniazide pendant 4 mois [1,6]. La place de la chirurgie est primordiale soit par des biopsies diagnostiques, évacuation d’un abcès, curetage de fistule, tumorectomie, ou même par mastectomie totale en cas de sein détruit [9]. Le pronostic est excellent si la prise en charge est adéquate. Le taux de récidive est de 3 % [10]. Conclusion

Figure 2. Aspect histologique d’une inflammation granulomateuse avec cellules épithélioïdes, des cellules géantes et quelques amas de nécrose caséeuse (HE × 250).

elle peut montrer des cellules dyscaryotiques en faveur d’un carcinome. Les techniques nouvelles (la culture sur milieu liquide Bactec, ou par la PCR améliorent le diagnostic) [7]. Le diagnostic de certitude repose sur l’examen bactériologique et/ou histologique des prélèvements biopsiques en montrant un granulome épithélio-giganto-cellulaire avec nécrose caséeuse [1,5]. Le principal diagnostic différentiel se pose avec le cancer du sein. Même si la coexistence de cancer et de tuberculose mammaire a été rarement décrite, nous pensons que l’étude histologique postopératoire du tissu mammaire est nécessaire afin d’éliminer un carcinome associé. La présence de pacchypleurite localisée avec des calcifications à notre sens oriente plus vers une pathologie bénigne ou réactionnelle. La cryptococcose, la blastomycose, l’actinomycose, l’histoplasmose, l’abcès à pyogène modifié par les antibiotiques, la granulomatose mammaire, le sarcome, l’ectasie canalaire et la mastite avec réaction à cellules géantes sur corps étranger sont aussi un diagnostic différentiel [8].

La tuberculose mammaire chez l’homme reste rare même en pays endémiques. La destruction de la glande est anatomiquement rapide et le principal diagnostic différentiel est le cancer. Le traitement est avant tout médical, fondé sur les anti-bacillaires. La chirurgie reste une thérapeutique primordiale chez l’homme. Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article. Références [1] Kumar M, Chand G, Nag VL, Maurya AK, Rao RN, Agarwal S, et al. Breast tuberculosis in immunocompetent patients at tertiary care center: a case series. J Res Med Sci 2012;17: 199—202. [2] Rakoto-Ratsimba HN, Samison LH, Razafimahandry HJ, Rakototiana AF, Imbiki Z, Ranaivozanany A. Two cases of breast tuberculosis in Madagascar. Med Trop 2005;65:355—8. [3] Chellaoui M, Taleb A, Chat L, Achaabane F, Alami D, Najid A, et al. Tuberculosis of the breast: a case report. J Radiol 2002;83:742—4. [4] Morsad F, Ghazli M, Boumzgou K, Abbassi H, El Kerroumi M, Matar N, et al. Tuberculose mammaire. J Gynecol Obstet Biol Reprod 2001;30:331. [5] El mrabet F, Ferhati D, Amenssag L, El Idrissi F, Erchidi I, Melhouf A, et al. Breast tuberculosis. Med Trop 2002;62: 77—80.

Pour citer cet article : El Hammoumi M, et al. Tuberculose mammaire pseudo-tumorale avec pacchypleurite chez l’homme. Rev Pneumol Clin (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.pneumo.2014.03.003

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Lettre à la rédaction [6] Kachewar S, Sankaye S. Primary tubercular mastopathy. Australas Med J 2012;5:436—9. [7] Thompson KS, Donzelli J, Jensen J, Pachucki C, Eng AM, Reyes CV. Breast and cutaneous mycobacteriosis: diagnosis by fine-needle aspiration biopsy. Diagn Cytopathol 1997;17: 45—9. [8] Khanna R, Prasanna GV, Gupta P, Kumar M, Khanna S, Khanna AK, et al. Mammary tuberculosis: report on 52 cases. Postgrad Med J 2002;78:422—4. [9] Ozol D, Bozer M, Bayrak R. Breast tuberculosis. Saudi Med J 2006;27:1066—70. [10] Chung SY, Yang I, Bae SH, Lee Y, Park HJ, Kim HH, et al. Tuberculous abscess in retromammary region: CT findings. J Comput Assist Tomogr 1996;20:766—9.

3 M. El Hammoumi a,∗,b , A. Ktaibi b,c , F. El Oueriachi a,b , A. Arsalane a,b , E.H. Kabiri a,b a Département de chirurgie thoracique, hôpital militaire d’instruction Mohammed-V, Riad 10100 Rabat, Maroc b Faculté de médecine et de pharmacie, université Mohamed-V, Souissi, 10100 Rabat, Maroc c Département d’anatomie pathologique, hôpital militaire d’instruction Mohammed-V, Rabat, Maroc ∗ Auteur

correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (M. El Hammoumi)

Pour citer cet article : El Hammoumi M, et al. Tuberculose mammaire pseudo-tumorale avec pacchypleurite chez l’homme. Rev Pneumol Clin (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.pneumo.2014.03.003