Un cas de TINU syndrome avec alvéolite lymphocytaire chez une patiente de 15 ans

Un cas de TINU syndrome avec alvéolite lymphocytaire chez une patiente de 15 ans

Modele + JFO-1150; No. of Pages 3 ARTICLE IN PRESS Journal français d’ophtalmologie (2015) xxx, xxx.e1—xxx.e3 Disponible en ligne sur ScienceDirec...

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Modele + JFO-1150; No. of Pages 3

ARTICLE IN PRESS

Journal français d’ophtalmologie (2015) xxx, xxx.e1—xxx.e3

Disponible en ligne sur

ScienceDirect www.sciencedirect.com

LETTRE À L’ÉDITEUR Un cas de TINU syndrome avec alvéolite lymphocytaire chez une patiente de 15 ans夽 A case of TINU syndrome with lymphocytic alveolitis in a 15-year-old girl Présentation

Figure 1. Photographies cornéennes bilatérales, montrant de multiples précipités rétrocornéens fins.

Le syndrome de néphrite tubulo-interstitielle (NTI) et uvéite (tubulointerstitial nephritis and uveitis syndrome [TINU]) a été décrit au milieu des années 1970 par Dobrin et al. [1]. Le TINU est « certain » si la NTI est prouvée histologiquement en association avec une uvéite typique (bilatérale et débutant 2 à 12 mois avant la NTI) [2]. Il est principalement défini chez les patientes (sex ratio 3:1) jeunes (moyenne d’âge 15 ans). L’uvéite est antérieure, bilatérale, brutale, douloureuse et photophobique [2—4], associée à des signes systémiques et un syndrome pseudo-grippal. L’atteinte rénale se traduit par une insuffisance rénale aiguë avec une protéinurie modérée, associée à une leucocyturie aseptique et l’anatomopathologie rénale montre une NTI. Levinson et al. [5] ont montré une forte association avec l’allèle HLA-DRB1*0102.

sans fibrose et des dépôts d’immunoglobulines G en immunofluorescence (Fig. 2). Une fibroscopie bronchique avec biopsie et lavement bronchio-alvéolaire est effectuée (imagerie thoracique normale) et montre seulement une alvéolite lymphocytaire (22 % de lymphocytes (rapport CD4/CD8 à 2,65), 58 % de macrophage,12 % de neutrophiles,8 % d’éosinophiles). Une biopsie des glandes salivaires accessoires montre un infiltrat lymphoplasmocytaire interstitiel, sans granulome, de stade I à II de Chisholm. Le diagnostic du TINU est retenu. Une corticothérapie orale (1 mg/kg) et locale est introduite pendant 3 semaines avec décroissance progressive. L’évolution clinico-biologique est favorable.

Observation

Discussion

Une patiente de 15 ans, sans antécédent ni traitement, consulte pour douleurs oculaires bilatérales subaiguës, baisse d’acuité visuelle associées à une toux sèche et une altération générale (asthénie, pâleur). L’examen montre un Tyndall ++ et des précipités rétrocornéens bilatéraux fins (Fig. 1). Nous concluons à une uvéite antérieure aiguë (UAA) bilatérale, normotone, non granulomateuse photophobique. La biologie montre une CRP à 45 mg/L (n < 5), une créatinine augmentée (115 ␮mol/L : MDRD à 58 mL/mn), une protéinurie à 0,9 g/L. La NFS montre une hyper-éosinophilie (740/mm3 ) isolée, et nous retrouvons une hypergammaglobulinémie (19 g/L) polyclonale avec élévation de la bêta-2-microglobulinémie (4,3 mg/L). Le bilan infectieux et auto-immun est négatif. L’échographie rénale étant normale une ponction biopsie rénale sera réalisée montrant, en microscopie optique une atteinte interstitielle avec œdème diffus, un infiltrat lymphoplasmocytaire et éosinophilique,

Nous exposons un cas de TINU syndrome avec atteintes ophtalmologique et rénale classique, l’atteinte alvéolaire étant plus rarement décrite [6,7] : 3e cas décrit. L’atteinte rénale précède l’atteinte ophtalmologique dans 65 % des cas et 90 % des patients ont une insuffisance rénale. L’atteinte ophtalmologique se traduit dans 80 % des cas par une UAA, le pronostic visuel étant en lien avec les atteintes postérieures. Nous présentons les diagnostics différentiels (DD). La sarcoïdose (DD majeur) est une granulomatose systémique avec prédominance féminine et touchant principalement les jeunes. On retrouve entre un tiers et la moitié des patients qui sont atteints au niveau ophtalmologique. Elle peut toucher quasiment tous les éléments du globe et de ses annexes, et typiquement on retrouve une UA chronique granulomateuse. L’atteinte principale dans la sarcoïdose est pulmonaire. L’atteinte rénale est possible et se traduit par une néphropathie TI. Dans notre cas, il n’est pas retrouvé d’atteinte du parenchyme pulmonaire, ni d’anomalie de l’enzyme de conversion ni du bilan phosphocalcique et l’atteinte

夽 Cette lettre à l’éditeur est issue d’un e-poster présenté au 120e congrès annuel de la Société franc ¸aise d’ophtalmologie.

Pour citer cet article : Gascon P, et al. Un cas de TINU syndrome avec alvéolite lymphocytaire chez une patiente de 15 ans. J Fr Ophtalmol (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.jfo.2014.06.022

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Lettre à l’éditeur

Figure 2. a : microscopie optique (argentation de Jones, × 400) : atteinte inflammatoire interstitielle avec œdème diffus et infiltrat lymphoplasmocytaire avec éosinophiles et tubulite (flèches). b : trichrome de Gomori, × 100 : œdème interstitiel et souffrance épithéliale tubulaire. c : trichrome de Gomori, × 200 : absence d’atteinte glomérulaire. d : argentation de Jones, × 200 : infiltrat inflammatoire avec tubulites.

ophtalmologique est non granulomateuse. Nous notons la présence d’éosinophile sur la biopsie rénale (discordant avec la sarcoïdose). Le diagnostic de sarcoïdose n’est pas retenu. Nous évoquons aussi les maladies auto-immunes avec atteinte systémique, comme le lupus érythémateux systémique, où les manifestations oculaires ne sont pas limitées aux uvéites et peuvent résulter de la maladie elle-même, des maladies qui lui sont associées (syndrome des antiphospholipides, Sjogren. . .) et qui dans ce cas résultera de différents phénomènes (thrombotique, sécheresse. . .) ou bien sera en rapport avec son traitement (antipaludéen de synthèse donnant des maculopathies). Avant d’évoquer le TINU, il faut éliminer les causes iatrogènes qui peuvent provoquer des NTI. Des pathologies héréditaires peuvent affecter l’œil et le rein comme le syndrome d’Alport (transmission autosomique récessive, dominante ou liée à l’X). Il y a fréquemment une atteinte auditive. Chez notre patiente aucun problème auditif, ni antécédent familial, ni de consanguinité n’est connu. Conclusion Il paraît intéressant de rechercher chez un patient jeune (surtout s’il s’agit d’une femme), ayant une UAA peu inflammatoire brutale, une atteinte rénale. De même qu’un examen ophtalmologique, devant une atteinte rénale TI d’étiologie indéterminée, peut être utile. Sous traitement adapté les personnes atteintes du TINU ont rarement recours à la dialyse. L’atteinte oculaire est de bon pronostic, malgré

la possible chronicisation ou la récidive de l’uvéite. Il semblerait qu’un mécanisme auto-immun soit, en partie, responsable de la pathologie, sans qu’il ait pu pour le moment être clairement identifié [8,9]. Annexe 1. Matériel complémentaire Le matériel complémentaire accompagnant la version en ligne de cet article est disponible sur http://www. sciencedirect.com et doi:10.1016/j.jfo.2014.06.022. Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflit d’intérêt en relation avec cet article. Références [1] Dobrin RS, Vemier RL, Fish AL. Acute eosinophilic interstitial nephritis and renal failure with bone marrow-lymph node granulomas and anterior uveitis. A new syndrome. Am J Med 1975;59:325—33. [2] Mandeville JT, Levinson RD, Holland GN. The tubulointerstitial nephritis and uveitis syndrome. Surv Ophtalmol 2001;46:195—208. [3] Mackensen F, Smith JR, Rosenbaum JT. Enhanced recognition, treatment, and prognosis of tubulointerstitial nephritis and uveitis syndrome. Ophtalmology 2007;114:995—9. [4] Goda C, Kotake S, Ichiishi A, et al. Clinical features in tubulointerstitial nephritis ans uveitis (TINU) syndrome. Am J Ophtalmol 2005;140:637—41.

Pour citer cet article : Gascon P, et al. Un cas de TINU syndrome avec alvéolite lymphocytaire chez une patiente de 15 ans. J Fr Ophtalmol (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.jfo.2014.06.022

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Lettre à l’éditeur [5] Levinson RD, Park MS, Rikkers SM, et al. Strong associations between specific HLA-DQ and HLA-DR alleles and the tubulointerstitial nephritis and uveitis syndrome. Invest Ophtalmol Vis Sci 2003;44:653—7. [6] Khammassi N, Mohsen D, Ounissi M, et al. TINU syndrome and lymphoid interstitial alveolitis: a new observation. Tunis Med 2011;89:210—2. [7] Hofmann N, Müller KM, Morath C, et al. Lymphoid interstitial lung disease in a patient with acute tubulointerstitial nephritis and uveitis: a new facet of a rare syndrome? Am J Kidney Dis 2006;47:e55—9. [8] Shimazaki K, Jirawuthiworavong GV, Nguyen EV, et al. Tubulointerstitial nephritis and uveitis syndrome: a case with an autoimmune reactivity against retinal and renal antigens. Ocul Immunol Inflamm 2008;16:51—3. [9] Abed L, Merouani A, Haddad E, et al. Presence of autoantibodies against tubular and uveal cells in a patient with

xxx.e3 tubulointerstitial nephritis and uveitis (TINU) syndrome. Nephrol Dial Transplant 2008;23:1452—5.

P. Gascon ∗ , M. Sisiroi , S. Soare , V. Pestre , L. Daniel , S. Guigou Centre hospitalier Henri-Duffaut, 305, rue Raoul-Follereau, 84000 Avignon, France ∗ Auteur

correspondant. 25, impasse de la Guadeloupe, 13006 Marseille, France.

Adresse e-mail : gascon [email protected] (P. Gascon) http://dx.doi.org/10.1016/j.jfo.2014.06.022 0181-5512/© 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Pour citer cet article : Gascon P, et al. Un cas de TINU syndrome avec alvéolite lymphocytaire chez une patiente de 15 ans. J Fr Ophtalmol (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.jfo.2014.06.022