Annales françaises d’oto-rhino-laryngologie et de pathologie cervico-faciale 133 (2016) 403–404
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Quel est votre diagnostic ?
Une surdité brusque lytique夽 A. Diallo , M. Gratacap , S. Tringali ∗ Service d’otologie et d’oto-neurotologie, hospices civils de Lyon, centre hospitalier Lyon Sud, 69495 Pierre-Bénite, France
Un patient de 18 ans consulte dans notre service 2 mois après un épisode de surdité brusque de l’oreille gauche. Le patient avait bénéficié d’un traitement initial par corticothérapie orale à forte dose sans efficacité. À l’interrogatoire le patient rapporte une otalgie gauche intermittente depuis plusieurs mois. Son examen
clinique est normal et l’audiométrie tonale et vocale confirme la cophose gauche. Une imagerie par résonance magnétique (IRM) cérébrale puis une tomodensitométrie (TDM) des rochers ont été réalisées (Fig. 1a,b,c). Quel est votre diagnostic et votre prise en charge ?
Fig. 1. a : IRM centrée sur l’angle ponto-cérébelleux en coupe axiale en pondération T1 avec injection de gadolinium. Il existe une lésion de l’apex pétreux gauche fortement rehaussé par l’injection de gadolinium ; b : IRM centrée sur l’angle ponto-cérébelleux en coupe axiale en pondération T2 haute résolution (CISS). Lésion iso-intense au contacte de la cochlée (flèche) ; c : TDM du rocher gauche en coupe axiale, confirmant la lyse osseuse au niveau de la cochlée (flèche).
DOI de l’article original : http://dx.doi.org/10.1016/j.anorl.2016.05.010. 夽 Ne pas utiliser pour citation la référence franc¸aise de cet article mais celle de l’article original paru dans European Annals of Otorhinolaryngology Head and Neck Diseases en utilisant le DOI ci-dessus. ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (S. Tringali). http://dx.doi.org/10.1016/j.aforl.2015.02.005 ´ ´ 1879-7261/© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits reserv es.
Quel est votre diagnostic ?
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A. Diallo et al. / Annales françaises d’oto-rhino-laryngologie et de pathologie cervico-faciale 133 (2016) 403–404
1. Réponse La survenue d’une surdité brusque totale sans récupération est une indication de réalisation d’une IRM de l’angle pontocérébelleux. L’IRM encéphalique en séquence T1 sans injection de gadolinium centrée sur la fosse cérébrale postérieure et l’angle ponto-cérébelleux objective une lésion en isosignal de l’apex pétreux gauche. On note un rehaussement de signal après injection de gadolinium sur la Fig. 1a. Les séquences T2 haute résolution (constructive interface in steady state [CISS]) montrent une lésion en isosignal avec un aspect d’effraction de la capsule otique sur la Fig. 1b. Les séquences de diffusion sont négatives. La TDM des rochers, présentée sur la Fig. 1c, met en évidence une lésion ostéolytique de l’apex du rocher gauche avec atteinte du conduit auditif interne et la cochlée gauche. L’aspect radiologique pourrait faire évoquer un cholestéatome mais la prise de contraste de toute la lésion et la négativité des séquences de diffusion élimine ce diagnostic. Il ne peut s’agir d’un granulome à cholestérine qui habituellement se présente en hypersignal T1 et en hypersignal T2. Le diagnostic à évoquer est celui d’une histiocytose langerhansienne (HL). Les autres hypothèses à évoquer sont les lésions inflammatoires ou infectieuses, les hémopathies et les tumeurs malignes primitives ou secondaires. Le bilan d’extension comprenant une scintigraphie osseuse et un scanner thoraco-abdomino-pelvien a retrouvé chez ce patient une atteinte iliaque droite dont la biopsie transcutanée à permis de confirmer le diagnostic d’HL. L’HL, antérieurement dénommée histiocytose X, est une affection localisée ou diffuse du système mononuclé phagocytaire, d’étiologie inconnue, caractérisée par un grand polymorphisme clinique, ce qui rend son diagnostic parfois difficile. Il s’agit d’une maladie touchant essentiellement l’enfant et l’adulte jeune avec une prévalence estimée à 2 cas pour 100 000 et une prédominance masculine [1]. Les localisations de la tête et du cou, principalement la base du crâne, sont notées dans environ 60 % des cas [2]. À ce niveau, l’expression la plus rencontrée est la localisation monotissulaire, appelée granulome éosinophile, connue comme étant généralement de bon pronostic. La maladie de Letterer-Siwe correspond à la forme disséminée des HL touchant des organes vitaux, tels que le foie, le poumon et la moelle osseuse et dont l’évolution est généralement rapide avec un pronostic réservé. Entre ces deux formes, tous les intermédiaires sont possibles.
Au cours de cette atteinte ostéolytique, la douleur constitue la circonstance de découverte la plus fréquente. Ce qui a été le cas de notre patient qui, en plus de la surdité, se plaignait d’otalgie gauche. Toutefois, les lésions cutanées sont d’un apport diagnostique important. Le diagnostic de certitude est établi par la biopsie et l’examen histologique et immunohistochimique du granulome (détection du CD1a). La microscopie électronique n’est que rarement pratiquée. La stratégie thérapeutique dans l’HL est fonction du degré d’atteinte organique. Les formes uni- ou pauci-focales, généralement bénignes, nécessitent une surveillance. Dans certaines formes osseuses, un traitement chirurgical (curetage et/ou ostéosynthèse) peut être proposé pour réduire le risque de fracture. Les formes multifocales, peuvent justifier une chimiothérapie (vinblastine ou l’étoposide) seule ou associée à une corticothérapie [3]. Après concertation multidisciplinaire, le patient a bénéficié d’un traitement par l’association vinblatine-prednisone avec un schéma d’induction pendant une durée de 6 semaines, suivi d’une phase de maintenance pour une durée totale de 12 mois. L’utilisation d’anticorps monoclonaux anti-CD1a constitue une nouvelle stratégie thérapeutique à l’étude [4]. En somme, l’HL est une hypothèse à évoquer devant une atteinte ostéolytique du rocher avec fistule labyrinthique et/ou paralysie faciale. Le bilan radiologique par IRM met en évidence une lésion en isosignal T1 et T2 qui est fortement rehaussée après injection de gadolinium ainsi qu’une lyse osseuse à la TDM. Le diagnostic de certitude repose sur la biopsie osseuse. Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. Références [1] Nguyen KH, Tazi A. Histiocytose langerhansienne de l’adulte. Rev Prat 2006;56:1863–71. [2] Coleman MA, Matsumoto J, Carr CM, et al. Bilateral temporal bone langerhans cell histiocytosis: radiologic pearls. Open Neuroimaging J 2013;7:53–7. [3] El Kababri M, Cherkaoui S, Kili A, et al. L’histiocytose langerhansienne chez l’enfant. Rev Mar Mal Enf 2013;31:16–20. [4] Sabani H, El Khatib MK, Hamama J, et al. Histiocytose langerhansienne osseuse multifocale : à propos d’un cas. Actual Odontostomatol 2012;258: 127–33.