Cas clinique n° 7
Inhalation accidentelle de sulfure d’hydrogène
P. Lheureux
Observation Motif d’hospitalisation Appel du SMUR et des pompiers pour arrêt cardiorespiratoire survenu dans un égout industriel.
Antécédents La victime est un homme de 24 ans. Le patient n’a pas d’antécédent particulier, n’a jamais fumé, ne prend pas de médicaments habituellement. Il travaille pour une firme de nettoyage industriel.
Histoire de la maladie
Service d’Accueil des Urgences, SMUR, Unité de Toxicologie Aiguë, CUB - Hôpital Erasme et ULB et Hôpital Français, Bruxelles, Belgique, France. Correspondance :
[email protected]
Le jour de l’accident, le travail du patient consiste dans le curage d’égouts dans une fabrique d’allumettes. Pour cela, il doit descendre par des puits de quelques mètres munis d’échelles sur la paroi. La victime descend sans aucune protection respiratoire. Arrivé à mi-hauteur de la canalisation, il se plaint de violentes céphalées et de dyspnée brutale. Il n’a pas le temps de remonter, car il perd rapidement connaissance et tombe. Son collègue rapporte qu’une forte odeur d’œufs pourris émanait du puits et l’incommodait fortement, même en surface : cette odeur nauséabonde l’empêchait d’apporter de l’aide à la victime. Néanmoins, il alerte très rapidement les secours qui interviennent après 7 à 8 minutes. La victime est en arrêt cardio-respiratoire (asystolie) quand elle est remontée par les pompiers munis d’appareils respiratoires autonomes. L’équipe du SMUR entreprend la réanimation selon le protocole ACLS standardisé. Le patient est intubé et ventilé au ballon avec 100 % d’oxygène. Après cinq minutes de réanimation, la reprise d’une activité circulatoire spontanée est observée.
Rev Mal Respir 2007 ; 24 : 3S55-3S56 © 2007 SPLF. Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
3S55
P. Lheureux
Examen clinique
Évolution
Après la reprise de l’activité circulatoire spontanée, le patient reste en coma profond (GCS 5/15), associé à un myosis et à des signes de décortication. Il n’a pas de respiration spontanée. Son hémodynamique se stabilise avec un RC à 112/min et une PA à 140/80 mmHg. La saturation (SpO2) est à 98 % à l’oxymètre de pouls. Le patient est transporté à l’hôpital sous ventilation assistée, sans autre incident. À l’arrivée en salle de déchocage, une trentaine de minutes plus tard, son état hémodynamique reste stable.
L’évolution du patient est lentement favorable, avec reprise progressive de la conscience permettant le sevrage de l’assistance respiratoire au 6e jour après l’admission, malgré l’apparition de fièvre dès le 2e jour liée à une pneumopathie de la base droite, probablement secondaire à l’inhalation pendant la réanimation. Elle est traitée empiriquement par amoxicilline + acide clavulanique. Le patient garde des troubles mnésiques importants et un ralentissement psychomoteur marqué, associé à des troubles de l’équilibre.
Examens complémentaires Examens complémentaires La gazométrie à l’admission sous ventilation assistée est : pH = 7,28, PaCO2 = 34 mmHg, PaO2 = 66 mmHg, HCO3– = 26 mEq/l sous FiO2 de 1. La SpO2 n’est plus qu’à 91 %. Le lactate est à 7,5 mEq/l. Les résultats des autres examens biologiques sont sans particularité, en dehors d’une élévation des CPK (786 UI), SGOT (369 UI) et LDH (726 UI), d’une glycémie à 168 mg/dl et une kaliémie à 5,4 mEq/l. Radiographie thoracique à l’admission (fig. 1).
Le cliché radiologique est reproduit dans la fig. 2. Les épreuves fonctionnelles respiratoires sont transmises dans le tableau I. Les derniers gaz du sang réalisés en cours d’hospitalisation étaient : pH = 7,44, PaCO2 = 34 mmHg, PaO2 = 77 mmHg, HCO3– = 24 mEq/l.
Fig. 2. Fig. 1. Tableau I.
Explorations fonctionnelles respiratoires.
Questions Interprétez la radiographie thoracique Quel toxique est probablement incriminé au cours de cet accident ? Quels sont les autres examens complémentaires que vous pratiquez ? Quelle est votre prise en charge initiale ?
3S56
Rev Mal Respir 2007 ; 24 : 3S55-3S56
VEMS
2 050 ml/sec (52 %)
CV
2 320 ml (48 %)
VEMS/CV
88 %
CPT
3120 ml (52 %)
Diffusion du CO
69 %
Question Que pensez-vous de l’évolution ? Faut-il réaliser d’autres examens ?