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Article original
Traitement de la maladie de Dupuytren par collagénase injectable, évaluation de l’échographie assistée Collagenase injection in Dupuytren’s disease, evaluation of the ultrasound assisted technique F.-M. Leclère *, L. Mathys, E. Vögelin Service de chirurgie plastique, chirurgie de la main et des nerfs périphériques, Inselspital Berne, université de Berne, Freiburgstrasse, 3010 Bern, Suisse Reçu le 7 août 2013 ; reçu sous la forme révisée le 11 janvier 2014 ; accepté le 26 janvier 2014
Résumé Depuis le 1er octobre 2011, la lyse enzymatique par collagénase a été introduite (Xiapex1, Auxilium Pharmaceuticals, distribué par Pfizer) en Suisse pour le traitement de la maladie de Dupuytren. Nous présentons ici notre première expérience universitaire et soulignons le rôle de l’échographie lors de l’injection. Entre décembre 2011 et février 2013, 52 injections de collagénase ont été réalisées sous échographie chez 33 patients pour éliminer 43 cordes à l’origine d’une raideur en extension de l’articulation métacarpo-phalangienne (MCP) et/ou de l’articulation interphalangienne proximale (IPP). L’âge moyen des patients était de 64,4 8,5 ans. Les complications étaient systématiquement documentées. Avant, immédiatement après, et au minimum six mois après injection, le degré de raideur de l’articulation était mesuré à l’aide d’un goniomètre. Au minimum six mois après l’injection, le score DASH était évalué et il était demandé au patient d’évaluer subjectivement le résultat du traitement (très bon, bon, moyen, mauvais) et s’il referait cette injection si nécessaire. Quatre déchirures cutanées, une lymphangite et un syndrome douloureux régional complexe furent responsables d’un taux de complications de 18 %. Il n’y eu ni infection ni rupture tendineuse dans la série. Au total, la raideur moyenne des articulations MCP était de 36,8 27,48, 3,5 7,88 (gain de mobilité par rapport à la situation avant injection 33,38, p < 0,001), et 8,4 13,98 (gain 28,48, p < 0,001) respectivement avant injection, juste après et lors du dernier contrôle clinique. Pour les articulations IPP, la raideur moyenne était évaluée respectivement à 36,5 29,18, 5,9 6,78 (gain 30,68, p < 0,001), et 15,1 13,88 (gain 21,48, p < 0,001) respectivement avant injection, juste après et lors du dernier contrôle clinique. Le score DASH passait de 24 14 à 7 9 ( p < 0,001). Quatre-vingt-un pour cent des patients étaient satisfaits ou très satisfaits du traitement. Tous les patients sauf deux referaient ce traitement si nécessaire. L’échographie permet de cibler l’injection de collagénase dans le but de réduire les complications. Les résultats à court terme de cette thérapie non invasive sont très prometteurs. La comparaison avec l’arsenal thérapeutique classique est difficile, car les résultats à long terme manquent. # 2014 Publié par Elsevier Masson SAS. Mots clés : Dupuytren ; Collagénase ; Échographie ; Xiapex1 ; Cordes
Abstract Since October 2011, the enzymatic lysis of Dupuytren’s cord was introduced in Switzerland (Xiapex1, Auxilium Pharmaceuticals, Pfizer). Here we present our first university experience and underline the major role of ultrasound during the injection. Between December 2011 and February 2013, 52 injections were performed to eliminate 43 Dupuytren’s cords in 33 patients. The mean age of the patients was 64.4 8.5 years. Complications were documented for each patient. Before, directly after and after a minimum of 6 months post-injection, the contracture of the treated joint was measured with use of a goniometer. The DASH score was evaluated after a minimum of 6 months and the patients were asked to subjectively evaluate the outcome of the treatment (very good, good, mild, poor) and whether they would reiterate it if necessary. Four skin defects, one lymphangitis, and one CRPS were responsible for a complication rate of 18%. There was no infection and no tendon rupture in the series. The mean MCP joint contracture was respectively 36.8 27.48, 3.5 7.88 (gain of mobility compared to the preoperative situation 33.38, P < 0.001), and 8.4 13.98 (gain 28.48, P < 0,001) respectively before, just after and at the long-term clinical control. The mean PIP joint contracture was respectively 36.5 29.18, 5.9 6.78 (gain 30.68, P < 0.001), and 15.1 13.88 (gain 21.48, P < 0.001) respectively before injection, just after and
* Auteur correspondant. Adresses e-mail :
[email protected],
[email protected] (F.M. Leclère). 1297-3203/$ – see front matter # 2014 Publié par Elsevier Masson SAS. http://dx.doi.org/10.1016/j.main.2014.01.006
Pour citer cet article : Leclère F-M, et al. Traitement de la maladie de Dupuytren par collagénase injectable, évaluation de l’échographie assistée. Chir Main (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.main.2014.01.006
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at the long-term clinical control. The DASH score decreased from 24 14 to 7 9 (P < 0.001). Eighty-one per cent of the patients were satisfied or very satisfied of the treatment. All but two would reiterate the treatment if necessary. Ultrasound is able to target the injection of collagenase in order to reduce complications. The short-term results of this non-invasive therapy are very promising however comparison with conventional procedures is difficult as the long-term results are lacking. # 2014 Published by Elsevier Masson SAS. Keywords: Dupuytren; Collagenase; Ultrasound; Xiapex1; Cords
1. Introduction Décrite initialement par Henry Cline, la maladie de Dupuytren limite la fonction de la main, diminue la qualité de la vie et, dans sa forme avancée, peut entraîner une véritable incapacité [1]. La chirurgie suivie de kinésithérapie précoce reste le traitement de référence [2]. Parmi les alternatives thérapeutiques, on retrouve également l’aponévrotomie par aiguille [3] et récemment le traitement par collagénase [4]. Bien que la collagénase du Clostridium histolyticum soit déjà connue depuis les années 1950 et déjà utilisée pour le débridement des brûlures et des ulcères [5], il a fallu attendre les années 1990 pour voir apparaître la première étude in vivo pour la lyse des cordes des patients atteints de la maladie de Dupuytren [4]. Les essais cliniques subséquents menés par Badalamente et al. [6] et Hurst et al. [7] ont conduit à une reconnaissance de la préparation Xiapex1 (Auxilium Pharmaceuticals, Malvern, États-Unis) pour le traitement de la maladie de Dupuytren aux États-Unis par la Food & Drug Administration (FDA). En France, une étude très récente menée par Foissac et al. [8] est revenue sur les nombreux avantages de ce traitement utilisé uniquement pour les cordes palpables depuis février 2011. En Suisse, une préparation de collagénase est commercialisée depuis octobre 2011 sous le nom commercial Xiapex1 (Xiapex, Auxilium Pharmaceuticals, distribué par Pfizer). Le but de cette étude était d’évaluer notre première expérience universitaire avec ce produit injectable. Nous revenons sur les avantages de ce nouveau traitement, ses possibles complications et sa place dans l’arsenal thérapeutique classique. Nous mettons en valeur la place de l’échographie, afin de réaliser des injections ciblées et d’éviter au maximum les complications.
17 cas, et les 2 côtés chez deux patients. Pour 22 patients, il s’agissait d’une récidive de la maladie après aponévrectomie chirurgicale partielle. 2.2. Technique d’injection La technique était réalisée en deux temps : temps d’injection et temps d’arthrolyse manuelle 24 heures plus tard. L’injection était toujours réalisée sous asepsie et comprenait un volume de 0,58 mg de Xiapex1 (Xiapex, Collagenase, Clostridium Histolyticum, Auxilium Pharmaceuticals, distribué par Pfizer) selon les recommandations du fabricant. Après anesthésie locale, on injectait 0,25 mL pour les articulations MCP, 0,20 mL pour les articulations IPP. L’appareil utilisé pour le repérage échographique était le suivant : Philips iu 22, transducer 17.5 MHz. La sonde échographique permettait de repérer le plan osseux, le plan
2. Patients et méthodes 2.1. Patients Cette étude prospective a été conduite entre décembre 2011 et février 2013. Au total, 52 injections de collagénase ont été réalisées pour la première fois sous échographie chez 33 patients, 28 hommes et 5 femmes, pour éliminer 43 cordes à l’origine d’une raideur en extension de l’articulation métacarpo-phalangienne (MCP) et/ou de l’articulation interphalangienne proximale (IPP) (Fig. 1). L’âge moyen des patients était de 64,4 8,5 (47–82) ans (Tableau 1). On y distinguait 21 droitiers contre seulement 12 gauchers. Le syndrome affectait le côté droit chez 15 patients, le côté gauche dans
Fig. 1. Patients de 54 ans (Patient 5 de la série, déjà opéré trois fois) avant (A) et 14 mois après (B) injection de collagénase.
Pour citer cet article : Leclère F-M, et al. Traitement de la maladie de Dupuytren par collagénase injectable, évaluation de l’échographie assistée. Chir Main (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.main.2014.01.006
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des deux tendons fléchisseurs et les cordes (Fig. 2). Ce nouveau type d’échographe permet en effet de mesurer précisément l’épaisseur et la largeur des cordes, et aussi leurs rapports avec le plan des tendons fléchisseurs. L’aiguille était ensuite insérée à 458 dans la corde en prenant soin de rester à distance des tendons comme préconisé par Zhang et al. [9]. La mauvaise position de l’aiguille dans le tendon était facilement évitée, puisque le coulissage du tendon n’était pas observé à l’échographie. Après la première injection, l’aiguille était retirée de la zone à traiter, mais pas de la peau. Elle était ensuite placée successivement sous échoguidage deux autres fois plus distalement (à 2–3 mm, puis 5 mm) par le même point d’entrée cutané.
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Vingt-quatre heures après la première injection, une infiltration de xylocaïne était réalisée. Cinq minutes plus tard, on réalisait aisément une arthrolyse manuelle des articulations par rupture de la corde. 2.3. Soins postopératoires Un pansement sec était appliqué sur le site d’injection. Les patients venaient avec un gant-attelle (FixxGlove, DanMic Global, États-Unis) adapté (Fig. 3). Ce dernier permettait de maintenir les doigts en extension. Il était prescrit pour une durée de 4 mois pendant la nuit. Aucune attelle n’était prescrite pendant la journée. Des séances de kinésithérapie étaient
Tableau 1 Notre série de 33 patients traités par Xiapex1. Âge
n
Sexe
1
72
H
2 3 4 5
57 59 74 54
H H H H
6
63
H
7
67
H
8
66
H
9 10 11 12
56 67 63 62
H H H H
13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24
68 67 63 62 47 69 66 73 66 82 61 80
H H H F H H H F H H H F
25 26
62 57
H H
27 28 29 30 31 32 33
70 47 65 75 73 48 65
F H H H H F H
Rayons impliqués
IV V V IV IV IV V III IV V VD IV G V II IV V IV III D IV D IV G V IV IV IV IV V IV IV V V V IV V V IV V V V V V V IV IV
Nombre d’injections
3 2 1 1 1 2 1 1 2 1 1 2 1 1 1 2 2 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 2 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1
Raideur en extension avant injection
Raideur en extension après injection
MCP
IPP
MCP
IPP
70 92 0 30 50 20 90 40 30 0 70 0 30 0 30 40 30 50 70 50 0 40 30 30 45 70 30 0 90 30 0 50 50 0 60 55 0 0 50 30 65 30 40
0 0 55 0 30 90 90 0 30 35 40 65 90 60 30 40 30 80 60 90 50 30 0 0 15 5 30 35 50 30 50 0 0 45 40 40 95 80 25 35 45 0 0
20 40 0 0 0 0 5 5 0 0 10 0 0 0 0 0 0 0 0 – 0 10 0 0 5 0 0 0 20 5 0 0 0 0 10 10 0 0 0 0 0 0 5
0 0 5 0 30 5 10 0 5 0 0 10 20 5 0 10 0 10 10 – 15 15 0 0 15 5 5 0 10 0 10 0 0 5 5 5 10 10 0 0 10 0 0
Pour citer cet article : Leclère F-M, et al. Traitement de la maladie de Dupuytren par collagénase injectable, évaluation de l’échographie assistée. Chir Main (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.main.2014.01.006
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prescrites pour 6 semaines, afin de garder la mobilité articulaire.
goniomètre. La durée d’arrêt des activités journalières était enregistrée pour chaque patient.
2.4. Résultats objectifs 2.5. Résultats subjectifs Les effets secondaires et complications (Fig. 4) étaient systématiquement enregistrés dans le dossier. La mesure de la mobilité articulaire était effectuée avant, directement après et au minimum six mois après l’injection à l’aide d’un
Le score DASH était systématiquement évalué avant, ainsi qu’au minimum six mois après l’opération. Il était demandé aux patients d’évaluer subjectivement la douleur lors du traitement,
Tableau 1 (Suite) n
Complications
Douleur peropératoire (0–10)
Durée arrêt d’activité (Jours)
Durée suivi (Mois)
Raideur en extension dernier contrôle IPP
A = très bon B = bon C = moyen D = mauvais
Préopératoire
Postopératoire
0 0 25 0 30 10 25 0 20 15 0 40 45 355 – 15 0 25 30 20 20 15 0 5 15 5 10 10 20 10 30 0 0 10 10 15 45
A
21
5
A A A B
8 9 24 23
8 0 8 8
A
42
5
C
41
28
D
41
41
A A A B
24 8 26 28
2 0 0 13
B C A C – A B B B A D A
5 44 9 8 – 19 12 43 40 – 22 16
1 12 1 0 – 1 3 5 8 – 18 7
B C
30 21
0 5
A
–
–
30 0 20 35 0 0
A B A A A A
41 58 – 23 0 21
11 16 – 8 0 0
–
2
2
18
2 3 4 5
– – – –
2 3 4 5
2 2 2 2
17 15 16 14
6
–
1
2
14
7
PDS cutanée (Déchirure, récidive après opération) PDS cutanée (Déchirure, récidive après opération) –
5
14
13
8
14
12
Induration lymphangiomateuse CRPS
7 2 6 3
2 2 5 55
12 11 11 10
13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24
– – – – – – – – – – – –
8 7 8 6 3 9 8 1 2 7 4 3
2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2
10 10 10 9 10 9 8 8 8 8 8 8
25 26
– PDS cutanée (Déchirure) PDS cutanée (Déchirure, récidive après opération) – – – – – –
6 6
2 7
7 7
–
14
7
20 45 0 0 5 0 5 0 0 0 50 0 0 0 – 0 0 25 20 20 0 10 0 0 5 0 0 0 40 5 0 0 0 0 25 30 0
9 8 – 4 4 5
56 2 2 2 2 2
6 6 6 6 6 6
0 30 15 0 0 15
9 10 11 12
27 28 29 30 31 32 33
Score DASH
MCP
1
8
Satisfaction/ résultat
MCP : méta-carpo phalangienne ; IPP : interphalangienne proximale ; PDS : perte de substance ; CRPS : syndrome douloureux régional complexe.
Pour citer cet article : Leclère F-M, et al. Traitement de la maladie de Dupuytren par collagénase injectable, évaluation de l’échographie assistée. Chir Main (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.main.2014.01.006
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Fig. 3. Attelle-gant utilisée la nuit pendant une durée de quatre mois pour maintenir en extension les articulations traitées.
3. Résultats
Fig. 2. Aspect échographique d’une corde traitée par échographie. Coupe transversale du 4e rayon avant injection : corde (entre les points), nodules (flèches blanche et jaune) (A). Coupe transversale après injection : reliquat cicatriciel suite à la lyse de la corde (flèche blanche), nodule (flèche jaune) (B).
son résultat global (très bon, bon, moyen, mauvais) et s’il referait cette injection si nécessaire.
Entre décembre 2011 et février 2013, 52 injections ont été réalisées sous échographie chez 33 patients (Fig. 1). 3.1. Complications Les complications sont présentées au Tableau 1. Quatre déchirures cutanées, une lymphangite et un syndrome douloureux régional complexe (SDRC) furent responsables d’un taux de complications de 18 %. Il n’y eut ni infection, ni lésion tendineuse ou nerveuse dans la série (Fig. 4).
2.6. Analyse statistique
3.2. Amélioration fonctionnelle
Cette étude prospective impliquait 52 injections réalisées sous échographie chez 33 patients. L’analyse statistique a été réalisée avec le logiciel SPSS. Un t test de Student était réalisé lorsque possible. Les données sont présentées sous forme de moyenne déviation standard à la moyenne. Un p < 0,05 était considéré comme significatif.
Le recul moyen était de 9,9 3,4 mois. Le Tableau 1 présente les résultats après injection pour chaque patient et articulations concernées. Au total, la raideur des articulations MCP était de 36,8 27,48, 3,5 7,88 (gain de mobilité par rapport à la situation avant injection 33,38, p < 0,001), et 8,4 13,98 (gain/ avant opération 28,48, p < 0,001) respectivement avant
Fig. 4. Les complications possibles. Hématome lors de l’arthrolyse manuelle (A). Déchirure cutanée (B). Lymphangite après injection de collagénase (C).
Pour citer cet article : Leclère F-M, et al. Traitement de la maladie de Dupuytren par collagénase injectable, évaluation de l’échographie assistée. Chir Main (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.main.2014.01.006
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injection, juste après et lors du dernier contrôle clinique. Pour les articulations IPP, la raideur était évaluée respectivement à 36,5 29,18, 5,9 6,78 (gain/avant opération 30,68, p < 0,001), et 15,1 13,88 (gain/avant opération 21,48, p < 0,001) respectivement avant injection, juste après et lors du dernier contrôle clinique. 3.3. Résultats subjectifs Le Tableau 1 présente la douleur opératoire ainsi que les scores DASH avant et au minimum 6 mois après l’opération pour chaque patient. Au total, le score DASH moyen était largement amélioré : il passait ainsi de 24 14 à 7 9 ( p < 0,001). Quatre-vingt-un pour cent des patients étaient satisfaits ou très satisfaits du traitement. Tous les patients sauf deux referaient ce traitement si nécessaire. 4. Discussion Dans cette étude préliminaire, 52 injections ont été réalisées sous échographie entre décembre 2011 et février 2013 chez 33 patients. Quatre déchirures cutanées, une lymphangite et un SDRC furent responsables d’un taux de complications de 18 %. Après un recul moyen d’environ 10 mois, le gain de mobilité était de 27,58 pour les articulations MCP et de 20,38 pour les articulations IPP. Le score DASH passait de 24 à 7. Quatrevingt-un pour cent des patients étaient satisfaits ou très satisfaits du traitement. Tous les patients sauf deux referaient ce traitement si nécessaire. Si ce traitement apparaît aujourd’hui très novateur, il convient de souligner que de multiples thérapies non invasives ont tout d’abord été essayées avec des résultats souvent décevants. On retiendra les traitements par radiothérapie, diméthylsulfoxide, vitamine E, méthylhydrazine, allopurinol, interféron gamma, corticoïdes, ou encore la kinésithérapie assistée ou non par ultrasons [10–19]. Le concept de fasciotomie enzymatique par lyse du collagène apparut avec les travaux de Bassot [20]. Ce dernier préconisait l’injection d’un mélange de trypsine, alpha-chymotrypsine, hyaluronidase, thiomucase et lidocaïne pour détruire les cordes trouvées chez les patients atteints de la maladie de Dupuytren [20]. Il publia des résultats prometteurs sur 34 patients. En 1971, Hueston [21] proposa une technique semblable avec une injection plus simple composée seulement de trypsine, hyaluronidase et marcaïne. Il fallut cependant attendre 1992 et les travaux de McCarthy [22] pour voir apparaître la notion de spécificité dans la littérature : si la fasciotomie enzymatique n’est pas spécifique, elle risque en effet de provoquer des lésions tendineuses et nerveuses. La collagénase est une enzyme dérivée du Clostridium histolyticum qui était déjà largement utilisée pour le débridement des brûlures et des ulcères [5]. Starkweather et al. [4], Badalamente et al. [6] et Hurst et al. [7] ont su démontrer son action spécifique dans la maladie de Dupuytren. Leurs travaux regroupent une étude in vivo ainsi que quatre études démontrant son efficacité en clinique. Récemment, ces auteurs ont publié une étude randomisée contrôlée en double
aveugle sur 308 patients. Ils montré que 76,7 % des patients avec une atteinte de l’articulation MCP et 40 % des patients avec une atteinte de l’articulation IPP atteignaient une extension complète ou quasi-complète (déficit d’extension inférieur à 58) après une à trois injections de collagénase. L’étude multicentrique de Hurst et al. souligne également la fréquence importante des effets secondaires [7]. Ces problèmes se résolvent d’eux-mêmes le plus souvent dans les 21 jours suivant l’injection. Au regard des complications, la littérature fait état de deux ruptures tendineuses et d’un SDRC [9,23]. Nous ne déplorons pas de rupture tendineuse dans notre série préliminaire. Pour éviter ce type de complications, nous avons injecté les doses prescrites par le fabricant, les aiguilles étaient toujours tenues à 458 comme le recommandent Zhang et al. [9,23], et surtout l’échographie a permis de cibler l’injection de façon extrêmement précise. En particulier, cette dernière a permis d’éviter 5 injections en dehors de la zone atteinte : l’excellente qualité d’image obtenue avec les nouveaux échographes permet en effet de rester à distance des deux tendons fléchisseurs et de voir très précisément les limites des cordes. Comme dans le travail multicentrique [7], nous trouvons un épisode de SDRC dans notre série. Dans cette étude préliminaire, on voit combien l’évolution des technologies a permis de documenter les effets du traitement de la maladie de Dupuytren par collagénase, d’en limiter les complications et, par là, de promouvoir son développement. Les résultats obtenus par le traitement par collagénase apparaissent très prometteurs, il faudrait cependant les confronter à ceux de la fasciectomie chirurgicale, qui reste le traitement de référence. Certes, en plus de la résection des cordes, cette dernière permet dans le même temps d’effectuer les ténolyses et arthrolyses parfois nécessaires. Cependant, cette technique invasive présente un taux de complications qui varie entre 17 % et 29 % selon les séries [24,25]. Les hématomes et les nécroses cutanées restent les principales complications avec des taux de 0 à 9,6 % [24]. En comparaison, le traitement par collagénase reste non invasif et les complications de ce type restent mineures. Le plus souvent, il s’agit uniquement des petites déchirures cutanées. Mais encore, le traitement par collagénase ne nécessite pas d’anesthésie générale ou plexique et est toujours réalisé en ambulatoire. Ceci est un avantage indiscutable pour les patients difficilement opérables, voire inopérables. Finalement, la durée de l’arrêt d’activité est largement inférieure en cas de traitement par collagénase : six semaines en moyenne pour la chirurgie contre une à deux journées dans notre série de patients traités par collagénase. En termes de taux de récidive, les données du traitement par collagénase manquent actuellement, vu la relative nouveauté de ce traitement. Une étude est maintenant en cours dans notre centre universitaire afin de répondre à cette question. Outre le traitement chirurgical, il nous faut comparer le traitement par collagénase avec l’aponévrotomie par aiguille (AA) [3]. Si les deux traitements sont peu invasifs, le traitement par collagénase a l’avantage d’aboutir à une disparition des cordes, avec pour corollaire le port réduit de l’attelle : quatre mois dans le cas du traitement par collagénase contre six mois
Pour citer cet article : Leclère F-M, et al. Traitement de la maladie de Dupuytren par collagénase injectable, évaluation de l’échographie assistée. Chir Main (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.main.2014.01.006
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pour l’AA [2]. De plus, le traitement des raideurs au niveau des articulations IPP par AA reste controversé, alors qu’il peut être réalisé facilement avec les collagénases à l’aide de l’assistance échographique présentée ici. Enfin, corollaire de l’absence d’exérèse des cordes dans le cas de l’AA, le taux de récidives est de l’ordre de 50 % [2]. Bien que méconnu pour le traitement des collagénases, ce taux devrait cependant être réduit, puisque la corde est lysée par le traitement enzymatique. Malgré les résultats fonctionnels et subjectifs excellents présentés dans cette série, notre étude présente des limitations de type méthodologique. Tout d’abord, on pourrait lui reprocher le petit nombre de patients et son caractère hétérogène. Cependant, il s’agit ici d’une première évaluation du produit en Suisse et une étude sur un petit nombre était nécessaire avant une diffusion plus large dans le service. Ensuite, corollaire du petit nombre de patients inclus dans l’étude, un groupe témoin manque clairement. Mais encore, malgré un recul minimum de 6 mois, il est difficile ici d’évaluer l’efficacité à long terme du traitement en termes de récidive. Cette limitation a d’ailleurs déjà été soulevée par Watt et al. [24] et Peimer et al. [26] qui concluent au manque de recul à long terme dans l’ensemble de la littérature. Enfin, il est certain que cette étude ne clarifie pas le problème des anticorps anticollagénases qui pourraient diminuer l’efficacité de ce traitement à long terme [5] et obliger à un surdosage dangereux localement. À côté des effets secondaires présentés ci-dessus, trois aspects expliquent parfaitement la mise en place très lente de cette thérapie non invasive dont les premiers essais cliniques remontent à une quinzaine d’années. D’une part, la peur du manque de spécificité et les lésions des structures nobles ont largement freiné sa diffusion. D’autre part, le risque que cette injection soit réalisée par un chirurgien non spécialiste de la main, voire par un médecin non chirurgien, a largement contribué à la lenteur de sa diffusion. Le dosage précis de l’injection et sa réalisation sous guidage échographique par un chirurgien spécialiste, les recommandations et formations proposées par la firme, mais aussi les nombreux conseils issus de la littérature sont à même d’assurer une courbe d’apprentissage rapide et sûre de la technique. Enfin, le traitement reste coûteux, comme en témoigne la littérature [8]. Cependant, il est impossible de comparer son prix de revient avec celui de la chirurgie ou de l’AA, car les taux de récidives ne sont pas connus [26]. À noter cependant que l’échographie n’a pas représenté de coût supplémentaire, puisque l’appareil était disponible dans le service. Le service est un des centres formateurs suisses en échographie du membre supérieur : tous les membres du service utilisent les appareils de manière régulière. Ils ont un entraînement régulier, ainsi qu’une formation de base délivrée par les seniors du service.
5. Conclusion L’échographie permet de cibler précisément l’injection de collagénase dans le but de réduire les complications. Les résultats à court terme de cette thérapie non invasive sont très
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prometteurs. La comparaison avec l’arsenal thérapeutique classique est difficile, car les résultats à long terme manquent. Déclaration d’intérêts Franck-Marie Leclère et Esther Vögelin n’ont aucun conflit d’intérêt. Lukas Mathys a reçu des royalties de Pfizer pour des workshops concernant ce produit. Références [1] Elliot D. The early history of contracture of the palmar fascia. Part 3: the controversy in Paris and the spread of surgical treatment of the disease throughout Europe. J Hand Surg Br 1989;14:25–31. [2] Spanholtz TA, Holzbach T, Wallmichrath J, Pototschnig A, Deglmann C, Frick A, et al. Treatment of Dupuytren’s contracture by means of injectable collagenase: first clinical experiences. Handchir Mikrochir Plast 2011;43:275–80. [3] Lermusiaux JL, Debeyre N. Le traitement médical de la maladie de Dupuytren. In: de Sèze S, Ryckewaert A, Kahn MF, Kuntz D, Dryll A, Meyer O, editors. L’actualité rhumatologique. Paris: Expansion scientifique; 1979. p. 3383–443. [4] Starkweather KD, Lattuga S, Hurst LC, Badalamente MA, Guilak F, Sampson SP, et al. Collagenase in the treatment of Dupuytren’s disease: an in vitro study. J Hand Surg Am 1996;21:490–5. [5] Srinivasan RC, Shah AS, Jebson PJL. New treatment options for Dupuytren’s surgery collagenase and percutaneous aponeurotomy. J Hand Surg Am 2010;35:1362–4. [6] Badalamente MA, Hurst LC, Hentz VR. Collagen as a clinical target: nonoperative treatment of Dupuytren’s disease. J Hand Surg Am 2002; 27:788–98. [7] Hurst LC, Badalamente MA, Hentz VR, Hotchkiss RN, Kaplan FT, Meals RA, et al. Injectable collagenase Clostridium histolyticum for Dupuytren’s contracture. N Eng J Med 2009;361:968–79. [8] Foissac R, Camuzard O, Dumas P, Dumontier C, Chignon-Sicard B. Treatment of Dupuytren’s contracture by collagenase injection. Chir Main 2013;32:199–205. [9] Zhang AY, Curtin CM, Hentz VR. Flexor tendon rupture after collagenase injection for Dupuytren contracture: case report. J Hand Surg Am 2011; 36:1323–5. [10] Falter E, Herndl E, Mulbauer W. Dupuytren’s contracture: when operate? Conservative preliminary treatment? Fortschr Med 1991;109:223–6. [11] Keilholz L, Seegenschmeidt MH, Sauer R. Radiotherapy for prevention of disease progression in early stage Dupuytren’s contracture: initial and long-term results. Int J Radiat Oncol Biol Phys 1996;36:891–7. [12] Stiles PJ. Ultrasonic therapy in Dupuytren’s contracture. J Bone Joint Surg Br 1966;48:452–4. [13] Vuopala U, Kaipainen WJ. DMOS in the treatment of Dupuytren’s contracture. A therapeutic experiment. Acta Rheumatol Scand 1971; 17:61–2. [14] Weinzierl G, Flügel M, Geldmacher J. Lack of effectiveness of alternative nonsurgical treatment procedures of Dupuytren contracture. Chirurgie 1993;64:492–4. [15] Kirk JE, Cheiffi M. Tocopherol administration to patients with Dupuytren’s contracture: effect on plasma tocopherol levels and degree of contracture. Proc Soc Exp Biol Med 1952;80:565–8. [16] Dahmen G, Kerckhoff F. Possibilities and limitations of the conservative treatment of Dupuytren’s contracture. Med Monatsschr 1966;20:297–300. [17] Howard Jr LD, Pratt DR, Bunnell S. The use of compound F (hydrocortisone) in operative and non-operative conditions of the hand. J Bone Joint Surg Am 1953;35:994–1002. [18] Dominguez-Malagon HR, Alferian-Ruiz A, Chavarria-Xicotencatl P, Duran-Hernandez MS. Clinical and cellular effects of colchicine in fibromatosis. Cancer 1992;69:2478–83. [19] Pittet B, Rubia-Brandt L, Desmoulière A, Qappino AP, Roggero P, Guerret S, et al. Effects of gamma-interferon on clinical and biologic evolution of
Pour citer cet article : Leclère F-M, et al. Traitement de la maladie de Dupuytren par collagénase injectable, évaluation de l’échographie assistée. Chir Main (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.main.2014.01.006
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Pour citer cet article : Leclère F-M, et al. Traitement de la maladie de Dupuytren par collagénase injectable, évaluation de l’échographie assistée. Chir Main (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.main.2014.01.006