Traitement du diabète et de l’obésité et stratégies comportementales

Traitement du diabète et de l’obésité et stratégies comportementales

Ann. Endocrinol., 2005 ; 66, 2 : 146-148 © Masson, Paris, 2005 SIXIÈMES RENCONTRES NATIONALES DES INTERNES EN ENDOCRINOLOGIE TRAITEMENT DU DIABÈTE E...

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Ann. Endocrinol., 2005 ; 66, 2 : 146-148 © Masson, Paris, 2005

SIXIÈMES RENCONTRES NATIONALES DES INTERNES EN ENDOCRINOLOGIE

TRAITEMENT DU DIABÈTE ET DE L’OBÉSITÉ ET STRATÉGIES COMPORTEMENTALES É. Ghanassia Service de Médecine Interne, CHU de Montpellier-Nîmes. D’après les présentations lors du symposium « How to change behaviour in nutrition », animé par A. Basdevant (Paris) et JM. Race (Amiens) — 18e Congrès de la Fédération Internationale du Diabète » IDF-Pais 2003 », 24-29 août 2003.

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Le diabète (en particulier de type 2) et l’obésité ont pour caractéristique d’être des maladies métaboliques chroniques, dont la prise en charge ne s’envisage qu’au long cours. Elles surviennent sur un terrain génétique prédisposé, sur lequel influent des facteurs d’environnement, pour la plupart liés aux comportements des individus ou des populations. De plus, ces deux maladies sont liées entre elles puisque l’obésité représente le facteur d’environnement le plus fréquent et le plus important du diabète de type 2, et que sa prise en charge conditionne celle du diabète. Il s’agit également de pathologies en pleine expansion puisque l’on parle aujourd’hui de véritable épidémie ce qui, du fait des conséquences sur la morbi-mortalité et du coût engendré pour la société, représente un véritable enjeu de santé publique. Mais du fait de leur caractère chronique, elles ne peuvent bénéficier du schéma thérapeutique des maladies aiguës : « diagnostic — prescription médicamenteuse — conseils à court terme ». En effet, même si les principes de prise en charge du diabétique sont désormais bien établis : traitement hypoglycémiant (médicamenteux ou non), recherche active, prévention et traitement des complications, leur application passe avant tout par des mesures non médicamenteuses portant sur le mode de vie. N’oublions pas en effet, que ces patients : — doivent admettre leur maladie (alors que l’obésité n’est reconnue comme telle que depuis peu et que le diabète est asymptomatique), — doivent en admettre le caractère chronique (et donc admettre qu’il ne pourront en guérir, comme on « guérit » d’une grippe), — doivent donc modifier divers comportements (en particulier dans le domaine alimentaire et de l’activité physique), — doivent gérer leur maladie au quotidien, à partir de leurs propres ressources et possibilités. Ces maladies chroniques nécessitent donc une éducation du patient à sa maladie et à la gestion de celle-ci, faute de quoi, malgré un projet thérapeutique optimal, la prise en charge peut échouer. Cela pose, bien entendu, le problème de l’observance du traitement au long cours.

Plusieurs travaux, encore trop peu nombreux, peutêtre du fait du caractère apparemment moins objectif des données considérées, se sont intéressés à cette facette du traitement et, en particulier, à prendre en charge en collaboration avec les patients, les modifications de leurs habitudes de vie et l’autogestion de leur maladie. Cette responsabilisation du patient induit un nouveau style de relation médecin-malade. En particulier, le développement des théories comportementales et cognitives et des thérapies qui en découlent, offrent des perspectives intéressantes. De plus, elles permettent de disposer de données quantifiables et reproductibles, permettant une analyse comparative et l’utilisation d’études prospectives. Nous rapporterons ici un résumé des communications présentées lors du symposium consacré aux stratégies de changement de comportement alimentaire et leurs impacts métaboliques, organisé dans le cadre du Congrès l’IDF-2003. STRATÉGIES COMPORTEMENTALES DE MAINTIEN DE POIDS (J. FOREYT, USA) Les traitements actuels de l’obésité ont 5 % à 10 % de succès à long terme, selon les séries. Or, la prise en charge de l’obésité soulève les mêmes problèmes que celle du diabète. La maîtrise pondérale est un facteur essentiel de l’équilibre glycémique (lutte contre l’insulinorésistance) et de la prévention des co-morbidités cardiovasculaires. De plus, il a été récemment établi que les traitements actuels de l’obésité peuvent avoir des effets délétères. L’échec des thérapeutiques à long terme est lié à un défaut d’observance, du fait de la nécessité du changement de comportement et des habitudes de vie. Pourtant, comme dans le diabète, le principe est simple : diminuer les entrées caloriques et augmenter les sorties (dépenses). Partant de ce principe, certains ont proposé d’intégrer les stratégies comportementales à la prise en charge de l’obésité. La prévalence de l’obésité prend aujourd’hui des proportions inquiétantes : à titre d’exemple, aux États-Unis, on recensait 46 % de la population en surpoids en 1980, 64 % en 2000 et les prévisions sont de 91,5 %

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en 2030 et de 100 % en 2040. Quant aux obèses, ils représentaient 30 % de la population en 2000, et les prévisions sont de 45 % en 2020 et 63 % en 2040. Afin d’orienter le traitement, et de cerner les facteurs comportementaux, trois catégories de facteurs favorisants ont été identifiées : — du point de vue de l’obèse lui-même : facteurs génétiques, perte de régulation des sensations alimentaires, discriminations, stress et mésestime de soi ; — du point de vue de la société : promotion de l’idéal minceur, augmentation du temps de travail (au détriment du choix et de la préparation des aliments et de l’activité physique), augmentation de la disponibilité alimentaire (+200 kcal/j en 10 ans, +26 g/j de lipides en 30 ans), rejet des obèses. — du point de vue des traitements : restriction cognitive, absence d’objectifs précis, reprise du poids perdu, dilemme droit à la liberté/désir de changement. Certaines équipes, à partir de ces observations, ont entrepris d’appliquer les principes de traitement validés de l’obésité, en aidant le patient à gérer activement son changement de comportement (restriction calorique, activité physique, prise en charge psychologique, éviter tout sentiment de privation). Cinq étapes peuvent ainsi être distinguées : 1. Analyse motivationnelle : aide à cerner les motivations et la demande sous-jacente. Elle a pour but de responsabiliser le patient en lui faisant présenter la situation de son point de vue. L’objectif étant, en plus de modifier le comportement, de renforcer l’efficacité personnelle du patient. 2. Analyse fonctionnelle : entretien et surtout autodiagnostic, via le carnet comportemental, afin que le patient identifie lui-même les points problématiques, établisse sa propre stratégie et s’approprie la démarche afin d‘intégrer de nouvelles habitudes à long terme. 3. Définir précisément les objectifs : l’objectif pondéral doit être réaliste. Il est essentiel à ce stade de définir explicitement les véritables buts et objectifs du patient (qui sont rarement les mêmes que ceux du médecin !). 4. Mettre en route le traitement, à partir des éléments débouchant des trois premières étapes via plusieurs techniques cognitivo-comportementales. 5. Prévenir les rechutes : la prévention des rechutes est l’un des points-clés puisqu’elle garantit la stabilité pondérale à long terme. Trois facteurs prédictifs ont été identifiés comme étant de bon pronostic, mais ce sont plus de simples marqueurs d’un changement de comportement plus global. Ce sont : a) la pratique régulière d’une activité physique, b) la faible proportion de graisses dans l’alimentation et c) la surveillance régulière du poids.

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Les deux principaux facteurs d’échec sont l’impossibilité d’atteindre l’objectif fixé et la non-acquisition de compétences d’autogestion. Les mécanismes en cause sont la sous-estimation de la perte de poids obtenue, la tendance à croire en une inaptitude personnelle et la restriction cognitive. Les principaux objectifs comportementaux à ce stade sont d’apprendre à se satisfaire de tout résultat (quitte à revoir l’objectif ou le délai fixé pour l’atteindre), d’expliquer l’intérêt du maintien (et non de la perte) du poids, et d’insister sur l’acquisition des techniques d’autogestion et d’efficacité personnelle. IMPACTS D’UNE ÉDUCATION COMPORTEMENTALE VS UNE ÉDUCATION TRADITIONNELLE SUR LE PROFIL MÉTABOLIQUE DU DIABÈTE DE TYPE 2 (C. CABRERA-PIVARAL, MEXIQUE) L’éducation à la santé vise, à partir d’actions individuelles et collectives, à rechercher et enseigner les facteurs permettant une amélioration de l’état de santé d’un individu ou d’une population. Cependant, malgré les progrès réalisés, certains facteurs liés aux patients (culture, éducation) ou à l’information transmise (nature, technique de transmission) peuvent limiter ou annuler le bénéfice souhaité. Le patient diabétique de type 2 est habituellement un patient obèse, présentant des habitudes néfastes au niveau de l’alimentation et de l’hygiène de vie. Des facteurs socio-économiques, culturels, éducatifs et psychologiques, au niveau de l’individu ou de son environnement, conditionnent ces comportements. L’éducation, telle qu’elle est traditionnellement pratiquée, consiste en une transmission d’information par écrit ou par oral sur différents aspects du diabète ou de son traitement, qui aboutissent à des recommandations données à un patient qui écoute passivement. Les premiers indicateurs de l’efficacité de cette éducation sont l’interrogatoire du patient et les modifications du profil métabolique. Une étude incluant 49 patients a été menée afin de comparer l’impact de cette éducation dite « traditionnelle » vs une éducation dite « comportementale » agissant activement sur les comportements alimentaires des sujets. Il s’agissait de diabétiques de type 2, non insulino-traités, et motivés pour participer à des séances d’éducation. Ces séances ont eu lieu à raison d’une par semaine durant 9 mois. Une participation à un minimum de 32 séances était requise. Les patients ont été répartis par randomisation en 2 groupes standardisés selon l’âge, le sexe, la durée d’évolution du diabète et le niveau d’études.

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Le groupe « expérimental »

Le groupe « traditionnel »

Il a donc assisté à des sessions de 2 heures séparées en 2 parties. Cinq principes et 4 techniques ont été utilisés. Les 5 principes étaient : 1. analyser et renforcer la motivation, 2. considérer le sujet comme actif, critique et créatif, 3. développer l’auto-efficacité et la capacité à l’autogestion, 4. échanger et comparer différentes idées et initiatives, 5. intégrer connaissance et savoir-faire. Les 4 techniques étaient : — auto-diagnostic : « état des lieux » : chacun évoque son diabète et ses habitudes alimentaires, et les analyse de façon critique à travers ses connaissances et son vécu. Le coordinateur classe chaque expérience et sélectionne les points importants ; — théorisation : à partir de l’expérience de chacun, les autres participants expriment leurs opinions d’après leurs connaissances, le coordinateur facilitant l’information par ses interventions ; — mise en pratique : lors des ateliers, les participants comparaient ce qu’ils faisaient au quotidien à ce qu’ils devaient faire en théorie ; — auto-évaluation : celle-ci se faisait via le carnet d’habitudes alimentaires et les résultats biologiques. Le sujet les commentait, puis le coordinateur aidait à préciser les points positifs et négatifs et à prouver les avantages de ces modifications de comportement.

Il a assisté au même nombre de sessions, avec des rythmes et des durées identiques. Les principes étaient ceux de l’éducation traditionnelle : « un enseignant forme un enseigné » — il établit des objectifs éducatifs hiérarchisés selon l’importance qu’il leur donne — il transmet les informations. Les techniques étaient : — enseignement classique sous forme d’exposés par l’enseignant à un groupe, via des diapositives, des films, des transparents, — établissement d’une liste comparative : mauvaises/bonnes habitudes alimentaires à suivre au domicile, — analyse et commentaire par l’enseignant. des résultats des analyses biologiques. Les résultats pour les 2 groupes ont été établis à partir de prises de sang mensuelles, effectuées juste avant le début du programme, puis tous les mois jusqu’à la fin des sessions. Ont été dosés : la glycémie à jeun, les taux de cholestérol total et de triglycérides. CONCLUSION Il ressort de cette étude que l’application d’une éducation à visée comportementale, a un impact supérieur à une éducation traditionnelle, sur le profil métabolique des patients diabétiques de type 2.