Analyse clinique et dosimétrique de 469 patients traités en France en 2005 par implantation prostatique de grains d'iode 125 IsoSeed Bebig : rapport pour le Comité économique des produits de santé (CEPS)

Analyse clinique et dosimétrique de 469 patients traités en France en 2005 par implantation prostatique de grains d'iode 125 IsoSeed Bebig : rapport pour le Comité économique des produits de santé (CEPS)

Cancer/Radiothérapie 11 (2007) 206–213 http://france.elsevier.com/direct/CANRAD/ Mise au point Analyse clinique et dosimétrique de 469 patients trai...

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Cancer/Radiothérapie 11 (2007) 206–213 http://france.elsevier.com/direct/CANRAD/

Mise au point

Analyse clinique et dosimétrique de 469 patients traités en France en 2005 par implantation prostatique de grains d’iode 125 IsoSeed Bebig : rapport pour le Comité économique des produits de santé (CEPS) Clinical and dosimetric analysis of 469 prostate cancer patients treated in France in 2005 by permanent implant brachytherapy using the Iodin 125 seeds IsoSeed Bebig: report to the French Economic committee of health products (CEPS) J.-M. Cosseta,*, S. Gommea, D. Peiffertb, S. Guerifc, A. Labibd, J.-M. Hannoun-Lévie, P. Martinf, P. Quéting, T.-D. Nguyenh, T. Flami, N. Thiounnj, M. Hennia, J.-C. Rosenwalda, M. Houssetk, D. Pontverta, B. Asselaina, L. Chauveinca,l a

Institut Curie, 26, rue d’Ulm, 75005 Paris, France b Centre Alexis-Vautrin, Nancy, France c CHU de Poitiers, Poitiers, France d Centre René-Huguenin, Saint-Cloud, France e Centre Antoine-Lacassagne, Nice, France f Polyclinique de Bourgogne, Lille, France g Centre Paul-Strauss, Strasbourg, France h Centre Jean-Godinot, Reims, France i Hôpital Cochin, Paris, France j Hôpital Necker, Paris, France k Hôpital européen Georges-Pompidou, Paris, France l Clinique Hartmann, Neuilly-sur-Seine, France Reçu le 7 mai 2007 ; révisé le 21 mai 2007 ; accepté le 31 mai 2007 Disponible sur internet le 28 juin 2007

Résumé Par arrêté en date du 3 février 2005, les grains d’iode 125 de plusieurs fabricants pour implantation permanente en curiethérapie prostatique ont été inscrits sur la liste des produits et prestations remboursables (LPP). Dans ce cadre, le Comité économique des produits de santé (CEPS) a demandé qu’un rapport annuel lui soit fourni sur le suivi de l’utilisation de ces grains, avec publication des résultats. Ce rapport a pour objectifs essentiels de s’assurer que les patients traités correspondaient bien aux critères d’inclusion définis par les instances nationales et internationales, de contrôler les critères de qualité dosimétriques des implantations, et enfin d’analyser les données relatives aux effets secondaires et aux complications, voire aux accidents ou incidents en rapport avec ces implantations. Nous rapportons donc ici le bilan clinique et dosimétrique de 469 patients traités en France dans neuf centres en 2005 à l’aide des grains d’iode 125 IsoSeed Bebig. Ce bilan montre : 1) que les recommandations nationales pour l’inclusion des patients ont été respectées dans la quasi-totalité des cas (97 %) ; 2) que les critères de qualité des implantations étaient optimaux dans la très grande majorité des cas de cette série ; 98 % des patients avaient une D90 supérieure à 145 Gy et 96 % des patients

* Auteur

correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (J.-M. Cosset).

1278-3218/$ - see front matter © 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.canrad.2007.05.003

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un V100 supérieur à 95 % ; 3) que la toxicité précoce se situe dans la fourchette basse des données de la littérature, avec en particulier un taux de rétention urinaire précoce de seulement 2,4 %. © 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Abstract A French decree of February 3rd 2005, allowed the Iodin 125 seeds from several companies to be reimbursed after a permanent implantation brachytherapy for a prostate cancer. Within this frame, the French "Comité économique des produits de santé" (CEPS; Economic committee for health products) made mandatory the annual writing and publication of a follow-up study with three main aims; make sure that the seeds were used for prostate cancer patients with criterias corresponding to the national recommendations, analyze the quality of the dosimetric data, and report all side effects, complications and possible accidents. We therefore report here a clinical and dosimetric analysis of 469 patient cases treated in France in nine centers in 2005 with the Iodin 125 IsoSeed Bebig. This analysis shows that: 1) The national recommendations for selecting patients for exclusive prostate brachytherapy have been taken into account in 97% of the cases; 2) The dosimetric quality criterias totally fulfilled the recommendations in a large majority of cases; the intra-operative D90 was found to be superior to 145 Gy in 98% of the patients, and the intra-operative V100 was superior to 95% in 96% of the cases; 3) The early toxicity (mainly urinary) was found to be at the lower range of what is reported in the literature, with in particular a retention rate of 2.4%. © 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Cancer de la prostate ; Brachythérapie ; Grains d’iode 125 ; Dosimétrie ; Effets secondaires Keywords: Prostate cancer; Brachytherapy; Iodine 125 seeds; Intra-operative dosimetry; Side effects

1. Introduction La curiethérapie prostatique par implantation permanente de grains radioactifs (essentiellement d’iode 125) est maintenant considérée en France comme un traitement validé pour les cancers de prostate localisés à « faible risque » évolutif [1,5,6,9, 10,11]. De grandes séries monocentriques [2,19,20,22] et maintenant même multicentriques [12,23] ont rapporté des résultats très encourageants en termes de survie globale et sans récidive à long terme, superposables à ceux obtenus par les séries chirurgicales [14] ; de plus, le profil de toxicité tardive semble intéressant, avec en moyenne moins d’incontinence et d’impuissance sexuelle qu’après chirurgie (mais avec davantage de symptômes irritatifs urinaires dans les suites de l’implantation) [4]. Dans ce cadre, un arrêté du 3 février 2005, paru au Journal Officiel du 16 mars 2005, inscrivait au chapitre 4 du titre III de la liste des produits et prestations remboursables (LPP), prévue à l’article L.165–1 du code de la sécurité sociale, les grains d’iode 125 de deux fabricants (d’autres fabricants de grains ont, depuis, bénéficié également de cette inscription). Il convient ici de rendre hommage aux efforts financiers consentis par les centres pionniers de la curiethérapie prostatique par implants permanents en France, qui avaient démarré la technique dès 1998–1999, sans aucun remboursement des grains radioactifs implantés. Cet arrêté était complété par une convention passée entre le Comité économique des produits de santé (CEPS) et la société Eckert-Ziegler Bebig Gmbh, fabricant des grains IsoSeed. Cette convention fait obligation à la société Bebig de mener une étude de suivi des patients traités par les grains IsoSeed. La convention précise que cette étude doit permettre, nous citons : ● « De décrire les patients implantés …

● D’observer les conditions réelles dans lesquelles les produits sont implantés et de s’assurer que les caractéristiques des patients qui les reçoivent correspondent aux conditions d’inscription du produit à la LPP ; ● D’évaluer l’impact de la diffusion de ces dispositifs sur la population cible en termes de morbimortalité et de qualité de vie ; ● De recueillir toutes les données relatives à des incidents ou complications, liés à l’implantation, avec ou sans signalement de matériovigilance, pendant la durée de l’évaluation. » La convention demandait également qu’un comité scientifique comprenant des experts épidémiologistes, cliniciens et statisticiens soit formé pour analyser et valider les données recueillies ; la composition de ce comité est rapportée en Annexe A. Cette composition a été acceptée par la Direction générale de la santé (DGS). Enfin, la convention souhaitait que ces données fassent l’objet de publications dans des revues à comité de lecture international, ce qui est le but du présent article. Le premier rapport pour le CEPS a été rendu mi-2006 sur les données recueillies pour les patients implantés en France en 2005 avec les grains IsoSeed. Le présent article reprend les grandes lignes du rapport dans une présentation réadaptée à sa publication. Il est clair que ni le rapport pour le CEPS ni le présent article n’ont pour vocation de se substituer à l’évaluation scientifique détaillée qui sera effectuée par chacun des centres impliqués, pour ses propres patients. Ce travail a donc pour objectifs essentiels de s’assurer que les patients traités par cette technique correspondaient bien aux critères d’inclusion définis par les instances nationales et internationales, de contrôler les critères de qualité dosimétriques des implantations, et enfin d’analyser les données correspondant aux effets secondaires et aux complications.

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2. Description de la population de patients implantés Les données correspondant à 469 patients implantés avec les grains libres IsoSeed Bebig dans neuf centres français en 2005 (technique d’implantation dite « en temps réel ») ont pu être recueillies et analysées. La répartition des patients selon les centres est détaillée dans le Tableau 1. D’après les informations en sa possession, le comité scientifique estime que les 469 patients étudiés dans le présent travail représentent entre 80 et 90 % des patients traités en France en 2005 avec cette technique ; en effet, quelques centres n’ont pas répondu à la demande qui leur a été faite de communiquer leurs données, et un autre a répondu trop tardivement pour permettre d’intégrer ses chiffres. On peut donc considérer que cette série de 469 patients représente un « échantillon » représentatif de l’activité d’implantation avec ces grains IsoSeed Bebig dans notre pays en 2005. L’âge des patients est détaillé dans le Tableau 2 ; la médiane est de 64 ans, avec des extrêmes allant de 48 à 83 ans. Le stade tumoral, selon le système international TNM de l’UICC, est détaillé dans le Tableau 3. La classification UICC 2002 (et non la précédente de 1997) est celle qui a été prise en compte ici. On remarque une large majorité de tumeurs classées T1c (examen clinique normal, découverte du cancer sur les biopsies) ; 67 % des cas dans cette série. À l’autre extréTableau 1 Centres impliqués Institut Curie, Paris Centre Alexis-Vautrin, Nancy CHU de Poitiers Clinique Hartmann, Neuilly-sur-Seine Centre René-Huguenin, Saint-Cloud Centre Antoine-Lacassagne, Nice Polyclinique de Bourgogne, Lille Centre Jean-Godinot, Reims Centre Paul-Strauss, Strasbourg Total

Nombre 191 57 52 51 36 26 20 18 18 469

Pourcentage (%) 40,72 12,15 11,09 10,87 7,68 5,54 4,26 3,84 3,84 100

Tableau 2 Répartition par âge Âge 460 63,89 [63,31 ; 64,47] 64 48–83 6,41

Nombre Moyenne IC de la moyenne Médiane Extrêmes Écart-type Tableau 3 Stade tumoral Stade Stade Stade Stade Stade Stade Total

T1a T1b T1c T2a T2b T2c

Nombre 8 3 311 116 23 5 466

Pourcentage (%) 1,72 0,64 66,74 24,89 4,94 1,07 100

mité, on ne retrouve que 1,07 % de tumeurs classées T2c, et aucune T3–T4. La concentration sérique initiale de PSA (au moment du diagnostic) est détaillée dans le Tableau 4 ; on peut contrôler qu’une très large majorité de patients (91,4 %) se présentaient avec une concentration inférieure ou égale à 10 ng/ml. Seuls six patients (1,29 %) avaient au moment du diagnostic une concentration supérieure à 15 ng/ml. Le score de Gleason initial est détaillé dans le Tableau 5. Une très large majorité de patients (81 %) se présentaient avec une tumeur de score de Gleason 5 ou 6, 14 % de score de 7, aucune de score de Gleason supérieur à 7. L’« IPSS » (Score international des symptômes urinaires) initial est disponible pour 321 patients de cette série (Tableau 6) ; 46 % des patients de cette cohorte n’avaient aucun symptôme urinaire (IPSS = 0), 53 % des symptômes, mais ne dépassant pas un score de 15. Seuls quatre patients (1,25 %) avaient un score IPSS supérieur à 15. Le volume prostatique, tel que retrouvé sur l’échographie initiale, est détaillé sur la Fig. 1. On peut contrôler que la grande majorité des patients (86 %) se présentaient avec un volume échographique initial compris entre 20 et 50 cm3, avec seulement six patients (1,3 %) avec un volume supérieur à 60 cm3. La valeur médiane est de 33 cm3. Traitements à visée symptomatique urinaire : la grande majorité des patients (91 %) ne prenaient aucune médication avant l’implantation. Cela corrobore les données du Tableau 6 ci-dessus (score IPSS), confirmant que la grande majorité des patients n’avaient que des symptômes urinaires modérés ou pas de symptômes du tout. Les traitements hormonaux reçus par les patients avant l’implantation sont détaillés dans les Tableaux 7, 8 et 9. On note que plus d’un tiers des patients de cette cohorte ont reçu une hormonothérapie avant leur curiethérapie de prostate Tableau 4 Concentration sérique initiale de PSA PSA ≤ 10 PSA [10 ; 15] PSA > 15 Total

Nombre 425 34 6 465

Pourcentage (%) 91,4 7,31 1,29 100

Nombre 1 21 62 315 66 465

Pourcentage (%) 0,22 4,52 13,33 67,74 14,19 100

Nombre 148 169 4 321

Pourcentage (%) 46,11 52,65 1,25 100

Tableau 5 Score de Gleason 3 4 5 6 7 Total Tableau 6 IPSS initial IPSS = 0 IPSS ]0 ; 15] IPSS > 15 Total

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(Tableau 7). D’après les éléments en notre possession, la réduction du volume de la prostate et un score de Gleason à 7 étaient les raisons principales de cette prescription. Dans un certain nombre de cas en revanche, ce sont les délais de prise en charge qui ont poussé à prescrire une hormonothérapie « d’attente ». Le Tableau 8 montre que dans la majorité des cas

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(69,36 %), les patients n’ont reçu qu’un antiandrogène seul. Le Tableau 9 précise que dans 82 % des cas, l’hormonothérapie (néoadjuvante) n’a pas dépassé avant l’implantation une durée de quatre mois. 3. Analyse des données dosimétriques Le Tableau 10 donne les détails du volume dit supérieur « MMS », correspondant au volume mesuré au cours de l’implantation et pris en compte pour le calcul du nombre de grains à implanter. Comme on peut le constater, la valeur médiane (32,1 cm3) reste très proche du volume médian mesuré avant l’implantation (Fig. 1). Dans l’expérience des membres du comité, cela n’empêche pas l’observation, dans quelques rares cas, de discordances notables entre le volume mesuré sur l’échographie initiale et le volume « MMS » (ce dernier étant mesuré de manière plus précise au cours de l’implantation). Le nombre de grains implantés est rapporté sur la Fig. 2 et dans le Tableau 11 ; ce nombre est en moyenne de 65, mais avec d’importantes variations (directement liées aux variations du volume prostatique) ; les valeurs extrêmes sont de 31 et 112 … La « D90 » est l’un des principaux paramètres permettant de juger de la qualité de l’implantation ; il s’agit de la dose miniTableau 10 Volume mesuré en cours d’implantation (dit « MMS »)

Fig. 1. Volume prostatique sur l’échographie initiale (prétraitement). Tableau 7 Hormonothérapie avant l’implantation Non prise Prise Total

Nombre 289 174 463

Nombre Moyenne IC de la moyenne Médiane Extrêmes Écart-type

Volume MMS 437 33,47 [32,47 ; 34,47] 32,1 12,09–80 11,06

Pourcentage (%) 62,42 37,58 100

Tableau 8 Type d’hormonothérapie prescrite avant l’implantation Antiandrogène seul Agoniste LHRH seul Blocage androgénique complet Total

Nombre 120 7 46

Pourcentage (%) 69,36 4,05 26,59

173

100

Tableau 9 Durée de l’hormonothérapie avant l’implantation (en mois) 1 2 3 4 5 6 7 8 12 Total

Nombre 4 15 71 49 11 16 1 1 1 169

Pourcentage (%) 2,37 8,88 42,01 28,99 6,51 9,47 0,59 0,59 0,59 100

Fig. 2. Nombre de grains radioactifs implantés par patient.

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Tableau 11 Nombre de grains radioactifs implantés par patient Nombre Moyenne IC de la moyenne Médiane Extrêmes Écart-type

Nombre de grains 434 65,64 [64,44 ; 66,84] 65 31–112 13,24

male reçue par 90 % du volume prostatique ; selon les recommandations actuelles, cette dose doit être d’au moins 145 Gy (grays). Les détails des résultats se trouvent sur la Fig. 3 et dans le Tableau 12. La quasi-totalité des patients de cette série ont une D90 supérieure à 145 Gy, avec une valeur moyenne de 176 Gy. Le « V100 » est le second paramètre majeur permettant de juger la qualité de l’implantation ; il correspond au pourcentage de volume prostatique recevant la dose prescrite (145 Gy) ; idéalement, il doit donc être de 100 % ; en pratique, on considère que l’implantation est correcte quand le V100 est supé-

rieur à 95 %. La Fig. 4 et le Tableau 13 donnent les résultats dans cette série ; on constate que sur les données échographiques obtenues en cours d’implantation, 96 % des patients avaient un V100 supérieur ou égal à 95 %. Le détail du nombre de grains ayant « migré » est indiqué dans les Tableaux 14 et 15. On constate : ● que le pourcentage de grains perdus dans les urines par rapport au nombre total de grains implantés est inférieur à deux pour 1000 ; ● qu’en cas de perte de grains dans les urines, cette perte ne concerne qu’un seul grain dans la grande majorité des cas ;

Fig. 4. V100 mesuré en cours d’implantation sur les données échographiques (ECV100). Tableau 13 V100 mesuré en cours d’implantation (ECV100)

Fig. 3. D90 mesurée lors de l’implantation (sur les données de l’échographie ; ECD90).

Tableau 14 Nombre de grains ayant migré dans les urines

Tableau 12 D90 mesurée en cours d’implantation Nombre Moyenne IC de la moyenne Médiane Extrêmes Écart-type

ECV100 377 99,27 [99,13 ; 99,40] 100 90–100 1,45

Nombre Moyenne IC de la moyenne Médiane Extrêmes Écart-type

ECD90 434 176,44 [175,55 ; 177,32] 176,5 90–206 9,81

0 1 2 3 4 6 Total

Nombre de patients 371 33 9 5 4 1 423

Pourcentage (%) 87,71 7,8 2,13 1,18 0,95 0,24 100

J.-M. Cosset et al. / Cancer/Radiothérapie 11 (2007) 206–213 Tableau 15 Nombre de grains ayant migré dans les poumons 0 1 2 Total

Nombre de patients 386 10 1 397

Pourcentage (%) 97,23 2,52 0,25 100

● seuls 3 % des patients ont présenté une migration pulmonaire, dans tous les cas, sauf un ne portant que sur un seul grain ; ● on note qu’un seul patient a éliminé un seul grain par le sperme. 4. Effets secondaires et complications Le taux d’infection urinaire est faible dans cette série ; moins de 4 % des patients ont eu une infection urinaire au décours de l’implantation. Aucune n’a donné lieu à des complications plus sérieuses. La toxicité urinaire précoce est détaillée dans le Tableau 16. On note qu’un tiers des patients n’ont eu aucun symptôme. Une majorité (60 %) avaient une toxicité modérée de grade 1 ou 2 selon le score du NIH (National Institut of Health). Moins de 5 % avaient une toxicité de grade 3, c’est-à-dire invalidante (pollakiurie, dysurie importante). Une rétention urinaire, ayant nécessité la pose d’une sonde urinaire ou d’un cathéter suspubien (toxicité de grade 4) a été observée dans 2,4 % des cas. La toxicité rectale précoce est détaillée dans le Tableau 17 ; 81 % des patients n’ont aucun symptôme anorectal. Dix-sept pour cent se plaignaient d’un inconfort rectal. Un saignement ou l’émission de glaires est noté dans 2 % des cas. Il n’a pas été observé de cas de fistule prostatorectale (grade 4) dans cette série. 5. Synthèse et discussion On sait que la sélection des patients pour une curiethérapie prostatique exclusive doit être rigoureuse ; des règles strictes ont été éditées dans ce sens par plusieurs instances internationales et nationales. Tableau 16 Grade urinaire précoce (Common toxicity criteria du NIH, version 2) 0 1 2 3 4 Total

Nombre 152 197 76 20 11 456

Pourcentage (%) 33,33 43,2 16,67 4,39 2,41 100

Nombre 372 78 6 3 459

Pourcentage (%) 81,05 16,99 1,31 0,65 100

Tableau 17 Grade rectal précoce 0 1 2 3 Total

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En 1999, l’American Brachytherapy Society (ABS) [15] recommandait de sélectionner pour une curiethérapie de prostate les patients porteurs de cancers localisés « à bas risque », c’est-à-dire : ● T1c à T2a (dans la classification de l’UICC de 1997, soit pas plus d’un lobe envahi) ; ● avec concentration sérique de PSA inférieur à 10 ng/ml ; ● avec score de Gleason inférieur ou égal à 6. Cette sélection était complétée par un score IPSS inférieur à 15 et un volume ne dépassant pas 50–60 cm3 au moment de l’implantation (avec en outre une liste de contre-indications « relatives »). En octobre 2004, cinq sociétés savantes françaises (Société française de radiothérapie oncologique — SFRO, Association française d’urologie — AFU, Société française de pathologie — SFP, Société française de radiologie — SFR, Société française de physique médicale — SFPM) avaient déposé au ministère de la Santé des « Recommandations pour la curiethérapie exclusive par implants permanents pour le cancer localisé de la prostate ». Ces recommandations reprenaient comme « standards » celles de l’ABS détaillées plus haut, mais précisaient que ; « En option, un seul des critères suivants pris isolément peut être accepté après concertation multidisciplinaire : ● concentration sérique de PSA entre 10 et 15 ng/ml ; ● score de Gleason 7 ; ● atteinte des deux lobes » (T2b dans la classification UICC 1997, T2c dans la classification UICC 2002). L’analyse des Tableaux 3, 4 et 5 montre que les recommandations déposées au ministère en 2004 ont été suivies pour la quasi-totalité des cas de cette cohorte ; seuls cinq patients atteints d’un cancer classé T2c (1,07 %), six patients dont la concentration sérique de PSA était supérieure à 15 (soit 1,29 % des cas), et quatre patients dont l’IPSS était de plus de 15 (1,25 %) sortent du cadre prévu. Sur le plan dosimétrique, les deux principaux paramètres de qualité des implantations, la D90 et le V100, peuvent être évalués au cours même de l’implantation, sur les données échographiques, et un à deux mois plus tard, sur les données d’une scanographie pelvienne effectuée à ce moment. Dans la présente série, nous ne disposons que des données échographiques établies en temps réel durant l’implantation. Les scanographies à un–deux mois ont bien été effectuées dans la quasi-totalité des cas, mais l’étude dosimétrique sur ces documents n’a été effectuée que sur un pourcentage limité de patients, nous interdisant toute analyse. Les explications pour ce manque de dosimétrie de « contrôle » à un–deux mois sont les suivantes : ● manque de disponibilité des équipes ; ● aucune tarification de cette activité ; ● surtout, plusieurs études récentes [7,18] ont montré que la dosimétrie sur échographie « en temps réel » (celle rappor-

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tée dans la présente étude) prédisait, à 10 % près, la dosimétrie de contrôle sur scanographie à un–deux mois dans la grande majorité des cas, au point que dans le dernier article publié, Potters et al. [18] se posaient même la question de l’utilité de la poursuite du contrôle dosimétrique à un–deux mois. Considérant donc les données dosimétriques en temps réel, on observe que plus de 98 % des patients avaient une D90 correspondant aux recommandations (supérieure à 145 Gy). En parallèle, 96 % des patients avaient un V100 supérieur à 95 %. La quasi-totalité des patients de cette série a donc bénéficié d’une implantation considérée comme optimale selon les principaux critères de qualité. La migration d’un ou plusieurs grains est parfois mise en cause dans la technique de « grains libres » utilisée ici ; dans la présente série, un total de 65 grains a migré, soit dans les urines (52 grains), les poumons (12 grains) et le sperme (un seul grain) ; rapportés au nombre total de grains implantés (plus de 30 000), le pourcentage de grains migrants n’est donc que d’environ deux pour 1000. Cela correspond aux données de la littérature récente [8,21]. Les conséquences cliniques sont inexistantes. Les conséquences dosimétriques pour leur part paraissent négligeables, la perte d’un seul grain (sur une moyenne de 65) n’étant pas susceptible de modifier de façon significative la distribution de dose. L’analyse des effets secondaires et des complications montre que le taux d’infection urinaire est faible dans cette série : 3,76 %. La toxicité urinaire précoce était nulle ou quasi-nulle chez un tiers des patients. En revanche, une majorité (60 %) de patients avaient une toxicité modérée, de grade 1 ou 2. Cinq pour cent des patients présentent une toxicité de grade 3, c’està-dire invalidante (pollakiurie majeure diurne et nocturne, dysurie importante, douleurs mictionnelles). Une rétention urinaire, ayant nécessité la pose d’une sonde urinaire ou d’un cathéter sus-pubien (toxicité de grade 4), a été observée dans 2,4 % des cas dans cette série. On note qu’il s’agit ici de l’un des taux de rétention les plus bas rapportés dans la littérature [3,13,16,17]. Quant à la toxicité rectale précoce, elle était quasiment négligeable dans cette série. 6. Conclusions Cette analyse de 469 patients traités par implantation permanente de grains d’iode 125 IsoSeed Bebig par neuf centres français en 2005 montre : ● que les recommandations nationales pour l’inclusion des patients ont été respectées dans la quasi-totalité des cas ; ● que les critères de qualité (en termes de D90 et de V100) des implantations étaient atteints dans la très grande majorité des cas ; ● que la toxicité précoce se situe dans la fourchette basse des données de la littérature, avec en particulier un taux de rétention urinaire précoce de seulement 2,4 %.

Remerciements Le comité scientifique tient à remercier Jocelyne Goubet (institut Curie, Paris) pour la qualité du travail statistique effectué sur cette cohorte. Annexe A. Composition du comité scientifique (par ordre alphabétique) Dr Bernard Asselain (institut Curie, Paris), Dr Laurent Chauveinc (clinique Hartmann et institut Curie, Paris), Pr Jean-Marc Cosset (institut Curie, Paris), Dr Stéphane Guérif (CHU de Poitiers), Pr Martin Housset (HEGP, Paris), Dr Jean-Claude Rosenwald (institut Curie, Paris), Pr Nicolas Thiounn (hôpital Necker, Paris). Références [1] Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé. Les traitements du cancer localisé de la prostate. 2001. [2] Ash D, Al-Qaisieh B, Bottomley D, Carey B, Joseph J. The correlation between D90 and outcome for I-125 seed implant monotherapy for localised prostate cancer. Radiother Oncol 2006;79:185–9. [3] Bottomley B, Ash D, Al-Qaisieh B, Carey B, Joseph J, St Clair S, et al. Side effects of permanent I125 prostate seed implants in 667 patients treated in Leeds. Radiother Oncol 2007;82:46–9. [4] Buron C, Le Vu B, Cosset JM, Pommier P, Peiffert D, Delannes M, et al. Brachytherapy versus prostatectomy in localized prostate cancer: results of a French multicenter prospective medico-economic study. Int J Radiat Oncol Biol Phys 2007;67:812–22. [5] Chauveinc L, Salem N, Pommier P, Peiffert D, Guerif S, Hannou-Levy JM, et al. La curiethérapie prostatique par implantation permanente d’iode 125 ; les règles de bonne conduite. Cancer Radiother 2002;6: 122–5. [6] Chauveinc L, Flam T, Solignac S, Rosenwald JC, Thiounn N, Firmin F, et al. Les indications de la curiethérapie de prostate par implantation permanente. Cancer Radiother 2002:154–8. [7] Chauveinc L, Flam T, Solignac S, Thiounn N, Firmin F, Debre B, et al. Prostate cancer brachytherapy: is real-time ultrasound-based dosimetry predictive of subsequent CT-based dose distribution calculation? A study of 450 patients by the Institut Curie–Hospital Cochin (Paris) Group. Int J Radiat Oncol Biol Phys 2004;59:691–5. [8] Chauveinc L, Osseili A, Flam T, Thiounn N, Rosenwald JC, Savignoni A, et al. Iodin 125 seed migration after prostate brachytherapy: a study of 170 patients. Cancer Radiother 2004;8(4):211–6. [9] Comité de cancérologie de l’Association française d’urologie. Recommandations 2004 en Uro-oncologie. Prog Urol 2004;1(Suppl):913–56. [10] Cosset JM, Haie-Meder C. Curiethérapie du cancer prostatique : haut débit ou bas débit de dose ? Cancer Radiother 2005;9:610–9. [11] Flam T, Chauveinc L, Servois V, Rosenwald JC, Cosset JM, Thiounn N, et al. La curiethérapie dans le traitement curatif du cancer de la prostate localisé. Prog Urol 2000;10(1):3–13. [12] Guedea F, Aguilo F, Polo A, Langley S, Laing R, Henderson A, et al. Early biochemical outcomes following permanent interstitial brachytherapy as monotherapy in 1050 patients with clinical T1-T2 prostate cancer. Radiother Oncol 2006;80:57–61. [13] Keyes M, Schellenberg D, Moravan V, McKenzie M, Agranovich A, Pickles T, et al. Decline in urinary retention incidence in 805 patients after prostate brachytherapy: the effect of learning curve? Int J Radiat Oncol Biol Phys 2006;64:825–34. [14] Kupelian PA, Potters L, Khuntia D, Ciezki JP, Reddy CA, Reuther AM, et al. Radical prostatectomy, external beam radiotherapy < 72 Gy, external beam radiotherapy > or = 72 Gy, permanent seed implantation, or

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