Compression médullaire révélant une fluorose osseuse

Compression médullaire révélant une fluorose osseuse

Lettres à la rédaction / Revue du Rhumatisme 75 (2008) 94–106 97 des lésions viscérales dont une hépatite, une glomérulonéphrite, des atteintes neur...

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Lettres à la rédaction / Revue du Rhumatisme 75 (2008) 94–106

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des lésions viscérales dont une hépatite, une glomérulonéphrite, des atteintes neurologiques avec des céphalées, une méningite, des lésions des paires crâniennes et également des manifestations ostéoarticulaires comme les périostites, ténosynovites, lombalgies par spondylite ou sacro-iliite à radiographie normale [2]. Ainsi, plusieurs cas d’arthrites ou d’ostéites sont rapportés dans la littérature [3,4]. C’est habituellement par ce biais que le rhumatologue peut être amené à voir des patients syphilitiques. Toutefois, dans le cas clinique rapporté, la maladie a été diagnostiquée du fait de la découverte d’adénopathies profondes. En effet, une lymphadénopathie généralisée est également fréquente en phase secondaire. Cette dernière s’explique par le fait que les tréponèmes prolifèrent dans le chancre puis sont transportés par les vaisseaux lymphatiques vers la circulation sanguine à partir de laquelle ils se disséminent [5]. Cette lymphadénopathie est typiquement sans rapport avec les territoires cutanés atteints [6]. Références [1] Couturier E, Michel A, Janier M, et al. Syphilis surveillance in France, 2000–2003. Euro Surveill 2004;9:8–10. [2] Liote F, Ea HK. Arthrites vénériennes. Rev Rhum 2005:154–8. [3] Reginato AJ. Syphilitic arthritis and osteitis. Rheum Dis Clin North Am 1993;19:379–98. [4] Blanch J, Faus S, Gimeno-Bayon JL, et al. Syphilitic arthro-osteitis. Med Clin (Barc) 1990;94:502–4. [5] Musher DM, Knox JM. Syphilis and yaws. In: Schell RE, Musher DM, editors. Pathogenesis and immunology of treponemal infections. New York: Marcel Dekker; 1983. p. 101–20. [6] Baughn RE, Musher DM. Secondary syphilitic lesions. Clin Microbiol Rev 2005;18:205–16.

Anne Fouque-Aubert ∗ Roland Chapurlat Service de rhumatologie, hôpital Édouard-Herriot, 5, place d’Arsonval, 69437 Lyon cedex, France ∗ Auteur

correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (A. Fouque-Aubert) 27 mars 2007 Disponible sur Internet le 6 septembre 2007 Fig. 2. Scanner thoraco-abdominopelvien : il existe de multiples adénopathies le long de l’axe aortico-cave (a) sous traitement. Diminution des adénopathies à un mois (b) puis quasi disparition à trois mois (c).

3. Discussion La résurgence de la syphilis est bien documentée dans certains pays dont la France. Une surveillance du nombre de cas de syphilis dans cinq régions franc¸aises et Paris par l’Institut de veille sanitaire a été mise en place en 2002 et 2003 ; une nette augmentation a été démontrée, principalement dans la région parisienne [1], une vigilance accrue s’impose donc. Sur le plan clinique, en phase secondaire, les manifestations de la maladie peuvent être des lésions cutanées dont la roséole, les plaques muqueuses, les syphilides papuloérosives ou encore

doi: 10.1016/j.rhum.2007.03.008

Compression médullaire révélant une fluorose osseuse夽 Spinal cord compression revealing fluorosis Mots clés : Compression médullaire ; Fluorose ; Ossification du ligament vertébral commun postérieur ; Imagerie Keywords: Spinal cord compression; Fluorosis; Ossification of the posterior longitudinal ligament; Imaging

夽 Ne pas utiliser, pour citation, la référence franc ¸ aise de cet article, mais sa référence anglaise dans le même volume de Joint Bone Spine.

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2. Observation Une femme âgée de 49 ans avait présenté des troubles de la marche d’évolution progressive, associés à des douleurs osseuses des membres et une incontinence urinaire. Elle est originaire du sud de la Tunisie et sans antécédent pathologique notable. L’examen clinique trouvait une coloration brunâtre des dents et un syndrome quadripyramidal franc. Les radiographies standard du rachis révélaient une condensation vertébrale diffuse et une ossification du ligament vertébral commun postérieur aux trois étages cervical, dorsal et lombaire. L’examen tomodensitométrique confirmait la calcification du ligament vertébral commun postérieur et l’IRM objectivait une compression médullaire cervicale (Fig. 1a–c). Le bilan radiologique standard avait révélé une ossification des membranes interosseuses des avant-bras et des jambes. L’origine de la patiente, la coloration brunâtre des dents et l’aspect radiologique ont fait suspecter une intoxication au fluor. Le dosage du fluor sanguin et urinaire en utilisant la méthode d’électrode spécifique était très élevé (la fluorémie était à 253 ␮g/l pour une valeur normale inférieure à 30 ␮g/l, la fluorurie était à 22,9 mg/g créatinine pour une valeur normale inférieure à 0,5 mg/g créatinine). Par ailleurs, le bilan rénal et endocrinien était normal. Vu l’étendue de l’atteinte et le risque majeur de l’instabilité du rachis, une laminectomie étagée de décompression du rachis cervical était réalisée. L’évolution était marquée par la régression des douleurs mais sans amélioration du déficit neurologique. 3. Discussion

Fig. 1. Calcification du LVCP (flèche) et anomalie du signal médullaire (tête de flèche). (a) : radiographie de profil du rachis cervical ; (b) : tomodensitométrie, reconstruction dans le plan sagittal ; (c) : IRM en coupe sagittale pondérée T2.

1. Introduction La fluorose osseuse hydrotellurique est signalée comme une maladie endémique en Afrique du Nord et en Inde [1]. Les complications neurologiques sont rares. Elles sont représentées par des compressions radiculaires ou médullaires, secondaires aux excroissances osseuses qui sont observées surtout au niveau du rachis cervical [1,2]. Nous rapportons un nouveau cas de compression médullaire par ossification du ligament vertébral postérieur, au cours d’une fluorose osseuse.

La fluorose osseuse sévit sous forme endémique dans certaines régions du centre et du sud de la Tunisie [1]. Les arguments diagnostiques reposent sur l’association d’une ostéocondensation diffuse, d’une ossification des membranes interosseuses, des insertions tendineuses et des disques intervertébraux et sur l’augmentation de la fluorémie (> 0,2 mg/l) et/ou de la fluorurie (≥1,8 mg/24 h) [1–3]. Cliniquement, la fluorose osseuse peut se révéler par des douleurs osseuses rachidiennes et surtout des membres inférieurs. Ces douleurs correspondent probablement à des microfissures, parfois visibles à la scintigraphie ou à l’IRM [4]. Dans cette observation, les signes neurologiques ont été révélateurs de l’intoxication fluorée chronique. Ces complications, à type de compression médullaire, s’observent dans 10 % des cas de fluorose osseuse et, dans la plupart des cas, au stade ultime de la maladie et après des expositions prolongées et à des doses très élevées de fluor [5]. Le rachis cervical est souvent atteint. La plus grande série de myélopathies cervicales secondaires à une fluorose osseuse a été rapportée en Inde [6]. Les colonnes dorsale et lombaire sont moins fréquemment touchées. Le fluor s’incorpore au sein du cristal d’hydroxyapatite remplac¸ant l’ion hydroxyde. Par ailleurs, il a un effet stimulant sur les ostéoblastes entraînant des augmentations importantes de la formation osseuse. L’ostéoformation sous- périostée, qui caractérise cette maladie, épaissit les os et rétrécit parfois le canal

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rachidien et les trous de conjugaison. Outre ces modifications osseuses, le fluor peut entraîner une calcification des insertions tendineuses et ligamentaires, en particulier des ligaments vertébraux. Dans les formes chroniques, le déficit neurologique est souvent définitif. L’évolution peut être néanmoins favorable dans les formes précoces après arrêt de l’intoxication. Plusieurs facteurs concourent à la genèse de l’intoxication fluorée chronique et de la myélopathie chez notre patiente ; résidence dans une zone d’endémie, travail manuel dans une atmosphère chaude, consommation accrue d’eau riche en fluor, port de charge lourdes. Le retentissement sur la moelle et les racines, au cours d’une fluorose osseuse évoluée, sont au mieux montrés par l’IRM. Ainsi, un hypersignal médullaire T2 associé à un hyposignal T1 serait un facteur de mauvaise récupération postopératoire [5,7]. Le traitement chirurgical des myélopathies fluorosiques doit être systématique devant des signes de compression. Les résultats dépendent de la diffusion des lésions, de la durée de l’intoxication et du risque de décompensation des segments sus- et sous-jacents après décompression rachidienne segmentaire. Les facteurs pronostiques sont le retard au diagnostic et la durée prolongée de l’intoxication [6]. Références [1] Ghariani MT, Ben Hassen T, Djaidane A. La fluorose osseuse : à propos de 15 cas. Tunis Med 1983;4:292–5. [2] Subba Rao B, Taraknath VR, Sista VN. Ossification of the posterior longitudinal ligament and fluorosis. J Bone Joint Surg 1992;74:469–70. [3] Klisnick A, Clavelou P, Lemaire JJ, et al. Compression médullaire cervicale par ossification du ligament vertébral commun postérieur : à propos d’un cas. Neurochirurgie 1995;41:359–62. [4] Javier RM, Sibilia J, Durckel J, et al. Ostéopathies médicamenteuses. J Radiol 1999;80:709–13. [5] Muthukumar N. Ossification of the ligamentum flavum as a result of fluorosis causing myelopathy: report of two cases. Neurosurgery 2005;56: E622. [6] Jayakumar PN, Sastry Kolluri VR, Jam VK, et al. Ossified posterior longitudinal ligament. Neurol India 1987;35:55. [7] Gupta RK, Agarwal P, Kumar S, et al. Compressive myelopathy in fluorosis: MRI. Neuroradiology 1996;38:338–42.

Chiraz Hafsa ∗ Service d’imagerie médicale, CHU Fattouma-Bourguiba, 5000 Monastir, Tunisie Houneida Zaghouani Service d’imagerie médicale, CHU Fattouma-Bourguiba, 5000 Monastir, Tunisie Soulef Kriaa Service d’imagerie médicale, CHU Fattouma-Bourguiba, 5000 Monastir, Tunisie Randa Salem Service d’imagerie médicale, CHU Fattouma-Bourguiba, 5000 Monastir, Tunisie

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Saida Jerbi-Omezzine Service d’imagerie médicale, CHU Fattouma-Bourguiba, 5000 Monastir, Tunisie Mondher Golli Service d’imagerie médicale, CHU Fattouma-Bourguiba, 5000 Monastir, Tunisie Mongi Touzi Service de rhumatologie, CHU Fattouma-Bourguiba, 5000 Monastir, Tunisie Naceur Berguaoui Service de rhumatologie, CHU Fattouma-Bourguiba, 5000 Monastir, Tunisie Amor Gannouni Service d’imagerie médicale, CHU Fattouma-Bourguiba, 5000 Monastir, Tunisie ∗ Auteur

correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (C. Hafsa) 26 avril 2007 Disponible sur Internet le 6 septembre 2007 doi: 10.1016/j.rhum.2007.04.014

Un cas d’ostéolyses post-fracturaires du bassin simulant une lésion maligne夽 Post-fracture osteolysis of the pelvis simulating a malignancy: A case report Mots clés : Ostéolyse ; Bassin ; Fractures ; Pseudotumorale ; Ostéoporose Keywords: Osteolysis; Pelvis; Fractures; Pseudotumoral; Osteoporosis

1. Introduction L’ostéolyse post-fracturaire du bassin, décrite pour la première fois au pubis en 1978 [1], est une entité rare correspondant à un mode évolutif inhabituel d’une fracture par insuffisance osseuse sur un terrain d’ostéopathie raréfiante [2]. Ces lésions peuvent être d’allure très lytique, conduisant à des images inquiétantes, qui posent des problèmes de diagnostic et mènent à des investigations lourdes pour le patient. Nous rapportons 夽 Ne pas utiliser, pour citation, la référence franc ¸ aise de cet article, mais sa référence anglaise dans le même volume de Joint Bone Spine.