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Revue des Maladies Respiratoires (2014) xxx, xxx—xxx
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ÉDITORIAL
Dépistage et diagnostic précoce de la BPCO en médecine générale COPD screening and COPD early diagnosis
La BPCO est la première maladie respiratoire chronique chez l’adulte, affectant environ 3,5 millions de personnes en France. Ce constat est probablement sous-estimé, à la lumière de l’étude menée par Roche et al. chez 4764 sujets de plus de 45 ans, ayant effectué une spirométrie systématique dans 31 centres d’examen de santé de la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) [1]. La BPCO a été dépistée chez 325 sujets (7,5 % des sujets non-asthmatiques) et 94 % des sujets dépistés ignoraient le diagnostic [1]. C’est sur ce point que de nombreuses initiatives ont été proposées pour accompagner le plan ministériel BPCO 2005—2010 afin d’améliorer la connaissance de la BPCO, favoriser son diagnostic précoce et optimiser sa prise en charge [2]. Cette situation n’est cependant spécifique ni à la France [3,4] ni à la BPCO elle-même [5,6]. On retrouve en effet ici une situation analogue à celle posée pour le diagnostic du diabète et de fac ¸on encore plus marquée pour le diagnostic de l’hypertension artérielle systémique. Ces deux pathologies sont pourtant beaucoup mieux connues du grand public et bénéficient d’un dépistage et/ou diagnostic simple et accessible à tous. Ainsi, la problématique du dépistage et/ou du diagnostic précoce ne se limite pas à une question de matériel ni de formation du médecin généraliste, car les outils sont faciles d’emploi, aisément disponibles et l’information professionnelle dédiée à la BPCO a connu une croissance exponentielle depuis l’instauration du plan BPCO. Il faut à ce titre saluer la contribution majeure de la collectivité pneumologique au travers de nombreux documents élaborés et initiatives menées par la SPLF, la FFP et la Fondation du Souffle entre autres [7—12]. La spirométrie reste à ce jour la pierre angulaire, l’élément incontournable du diagnostic de BPCO [9,13]. Ceci soulève les questions de l’équipement nécessaire, de son contrôle qualité et de la formation initiale à la réalisation de la manœuvre expiratoire forcée. Cependant ces procédures se sont considérablement simplifiées ces dernières années avec l’apparition d’une génération de spiromètres qui ont gagné en miniaturisation, en fiabilité et facilité d’utilisation avec des pneumotachographes autocalibrés en usine et à usage unique.
0761-8425/$ — see front matter © 2014 SPLF. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. http://dx.doi.org/10.1016/j.rmr.2014.01.005
Pour citer cet article : Chambellan A, Housset B. Dépistage et diagnostic précoce de la BPCO en médecine générale. Revue des Maladies Respiratoires (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.rmr.2014.01.005
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Éditorial
L’étude de Vorilhon et al. publiée dans ce numéro de la Revue des Maladies Respiratoires, ainsi que d’autres initiatives semblables ces dernières années se sont intéressées à l’utilisation des mini-spiromètres dans le dépistage de la BPCO en médecine générale et confirment la faisabilité de cette approche [14]. Mais, comme souligné dans l’étude de Morin et al. également publiée dans ce numéro de la Revue des Maladies Respiratoires, la formation et l’intérêt du futur médecin généraliste vis-à-vis de ces outils restent insuffisants. Ainsi le manque de temps est-il trop souvent et trop facilement avancé comme facteur limitant la démarche diagnostique. En effet, un des freins au diagnostic précoce, à côté de l’indispensable et insuffisante formation interdisciplinaire à la mesure du souffle, est une question de fond sur l’intérêt médical d’un dépistage ou diagnostic précoce de la BPCO. La conviction du médecin généraliste sur ce point est essentielle. Si le sujet reste encore débattu pour les stades II de la classification GOLD 2007 [13], les preuves de l’intérêt d’une intervention médicale aux stades III et IV ne manquent pas [9]. C’est d’ailleurs un élément qui pourrait aussi justifier pour certains l’usage d’un questionnaire et d’un débit de pointe avec l’objectif d’éliminer la présence d’une forme modérée à sévère [15]. Faut-il rappeler que 16 % des malades hospitalisés pour exacerbation de BPCO ne se savent pas atteints de cette maladie ? [16]. Il serait illusoire de penser que chaque médecin généraliste, une fois installé, pratiquera une mesure du souffle dans son cabinet chez tout patient suspect de BPCO. Il réalisera peut-être cet examen mais pourra aussi adresser le patient à un autre professionnel de santé formé et ayant développé un intérêt pour cette exploration. L’amélioration du dépistage passe donc aussi par l’implication de tous les professionnels de santé. Au-delà même du médecin généraliste, les réseaux de soins développent l’interdisciplinarité afin d’élargir les acteurs du dépistage et du diagnostic, que ce soit sur les lieux de travail, en lien avec les services de médecine du travail, en pharmacie, chez les professionnels paramédicaux (infirmières, kinésithérapeutes. . .) ou dans les centres d’examen de santé de la CPAM. L’engagement beaucoup plus marqué des tutelles de santé et le développement des outils de communication actuels doivent être encouragés pour, d’une part, sensibiliser le grand public aux maladies respiratoires et, d’autre part, faciliter la mesure du souffle. Un effet culturel vis-àvis du comportement faisant suite à l’annonce du diagnostic peut cependant représenter un facteur limitant notable comme l’a montré la récente étude de Guérin et al. dans laquelle 44 % des personnes dépistées avec le Piko-6® ne souhaitait pas confirmer le diagnostic par une consultation chez le pneumologue, probablement par crainte du diagnostic et des examens à suivre [17]. Cette attitude contraste avec le souhait d’information sur les maladies respiratoires manifesté par les deux tiers des sujets lors d’une campagne de dépistage [18]. Ainsi, si la place de la formation pratique des différents acteurs de santé est centrale et au cœur des réflexions actuelles des sociétés médicales et des tutelles impliquées en santé respiratoire, elle doit-être accompagnée d’actions de sensibilisation pour permettre au grand public de se familiariser avec le souffle, ses maladies et sa mesure. Le succès des fêtes du souffle animées ces dernières années
illustre bien cette volonté à rassembler autour du spiromètre et dans un contexte ludique, les acteurs de santé avec un message positif pour tous. À nous maintenant d’accompagner cette belle initiative et de la faire vivre au-delà de l’évènementiel !
Déclaration d’intérêts AC ne déclare aucun lien d’intérêt en rapport avec le thème de cet article. BH déclare des honoraires et financements pour participation à des congrès, communication, actions de formation médicale continue, participation à des groupes d’experts de la part des laboratoires AstraZeneca, Boehringer Ingelheim, Chiesi, Glaxo SmithKline, Mundipharma, Novartis, Nycomed/Altana, Pfizer.
Références [1] Roche N, Dalmay F, Perez T, et al. Impact of chronic airflow obstruction in a working population. Eur Respir J 2008;31:1227—33. [2] Biron E, Carre P, Chanez P, et al. Programme d’actions en faveur de la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO). 2005—2010. Connaître, prévenir et mieux prendre en charge la BPCO. Rev Mal Respir 2006;23 [8S9—8S55]. [3] Bednarek M, Maciejewski J, Wozniak M, et al. Prevalence, severity and underdiagnosis of COPD in the primary care setting. Thorax 2008;63:402—7. [4] Menezes AM, Perez-Padilla R, Jardim JR, et al. Chronic obstructive pulmonary disease in five Latin American cities (the PLATINO study): a prevalence study. Lancet 2005;366:1875—81. [5] Ollerton RL, Playle R, Luzio SD, et al. Underdiagnosis of type 2 diabetes by use of American Diabetes Association criteria. Diabetes Care 1999;22:649—50. [6] Banerjee D, Chung S, Wong EC, et al. Underdiagnosis of hypertension using electronic health records. Am J Hypertens 2012;25:97—102. [7] Sergysels R, Similowski T, Roche N. La distension doit-elle devenir la préoccupation principale de la prise en charge de la BPCO ? Rev Mal Respir 2008;25:1219—22. [8] Dusser D, Roche N. La série « voies aériennes distales » : de l’asthme à la BPCO. Rev Mal Respir 2009;26:1035—6. [9] Société de pneumologie de langue franc ¸aise. Recommanda¸aise sur la tions de la Société de pneumologie de langue franc prise en charge de la BPCO (mise à jour 2009). Rev Mal Respir 2010;27:S1—76. [10] Burgel PR, Marchand E. La BPCO, une maladie systémique ! Ou non ? Rev Mal Respir 2010;27:1128—9. [11] Aubier M, Roche N. Inflammation et BPCO : nouvelles données pour un ancien concept. Rev Mal Respir 2010;27:1136—7. [12] Perez T, Serrier P, Pribil C, et al. BPCO et qualité de vie : impact de la maladie en médecine générale en France. Rev Mal Respir 2013;30:22—32. [13] Rabe KF, Hurd S, Anzueto A, et al. Global strategy for the diagnosis, management, and prevention of chronic obstructive pulmonary disease: GOLD executive summary. Am J Respir Crit Care Med 2007;176:532—55. [14] Duong-Quy S, Hua-Huy T, Mai-Huu-Thanh B, et al. Détection précoce de la bronchopneumopathie chronique obstructive post-tabagique au Viet Nam. Rev Mal Respir 2009;26:267—74. [15] Perez-Padilla R, Vollmer WM, Vazquez-Garcia JC, et al. Can a normal peak expiratory flow exclude severe chronic obstructive pulmonary disease? Int J Tuberc Lung Dis 2009;13:387—93.
Pour citer cet article : Chambellan A, Housset B. Dépistage et diagnostic précoce de la BPCO en médecine générale. Revue des Maladies Respiratoires (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.rmr.2014.01.005
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Faculté de médecine, université de Nantes, 44035 Nantes, France c Inserm UMR1087, DHU2020, 44000 Nantes, France d Service de pneumologie, faculté de médecine, université Paris Est Créteil, CHI de Créteil, 94010 Créteil, France
A. Chambellan a,∗,b,c , B. Housset d
Rec ¸u le 2 novembre 2013 ; accepté le 6 janvier 2014
a
Laboratoire des explorations fonctionnelles, l’institut du thorax, CHU de Nantes, boulevard J.-Monod, 44093 Nantes, France
∗ Auteur
correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (A. Chambellan)
Pour citer cet article : Chambellan A, Housset B. Dépistage et diagnostic précoce de la BPCO en médecine générale. Revue des Maladies Respiratoires (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.rmr.2014.01.005