Facteurs de risque et morbidité maternelle et néonatale des échecs d’extraction instrumentale par forceps

Facteurs de risque et morbidité maternelle et néonatale des échecs d’extraction instrumentale par forceps

Journal de Gyn´ ecologie Obst´ etrique et Biologie de la Reproduction (2012) 41, 333—338 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com TRAVAIL ORIG...

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Journal de Gyn´ ecologie Obst´ etrique et Biologie de la Reproduction (2012) 41, 333—338

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

TRAVAIL ORIGINAL

Facteurs de risque et morbidité maternelle et néonatale des échecs d’extraction instrumentale par forceps Failed forceps extraction: Risk factors and maternal and neonatal morbidity A. Langeron a,d, G. Mercier b, C. Chauleur a,d, M.-N. Varlet a,d, H. Patural c,d, S. Lima a,d, P. Seffert a,d, G. Chêne a,∗,d a

Département de gynécologie-obstétrique et médecine de la reproduction, hôpital Nord, CHU de Saint-Étienne, avenue Albert-Raimond, 42000 Saint-Étienne, France b Département d’information médicale, bâtiment Aider, hôpital Lapeyronie, 191, avenue du Doyen-Gaston-Giraud, 34295 Montpellier cedex 5, France c Département de réanimation néonatale, hôpital Nord, CHU de Saint-Étienne, avenue Albert-Raimond, 42000 Saint-Étienne, France d Université de Saint-Étienne « Jean-Monnet », 42023 Saint-Étienne, France Rec ¸u le 15 septembre 2010 ; avis du comité de lecture le 19 octobre 2011 ; définitivement accepté le 2 novembre 2011 Disponible sur Internet le 9 janvier 2012

MOTS CLÉS Forceps ; Ventouse ; Extraction instrumentale ; Césarienne ; Échec



Résumé Buts. — Évaluer les facteurs de risque des échecs d’extraction par forceps et la morbidité maternelle et néonatale qui en résulte. Patients et méthodes. — Tous les échecs de forceps de janvier 2005 à juin 2008 de la maternité du CHU de Saint-Étienne ont été analysés rétrospectivement, par rapport à une population témoin de réussite d’extraction par forceps, afin de déterminer les facteurs de risque d’échec de l’extraction par forceps et la morbidité maternofœtale. Résultats. — Le taux d’échec s’élevait à 4,4 % d’échecs (40/918). Les facteurs de risque suivants ont été mis en évidence en analyse multivariée : présentation au-dessus du détroit moyen (OR = 43,03 ; IC 95 % : 3,8—475,41), variétés postérieures (OR = 34,64 ; IC 95 % : 4,08—293,5), et le diamètre bipariétal supérieur à 95 mm (OR = 10,74 ; IC 95 % : 1,4—82,41). On ne retrouvait pas de déchirures périnéales sévères. Le taux d’hémorragie de la délivrance était de 12,5 % (sans significativité par rapport aux témoins). La morbidité fœtale était représentée par une hypotonie néonatale transitoire (p = 0,004).

Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (G. Chêne).

0368-2315/$ – see front matter © 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.jgyn.2011.11.001

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A. Langeron et al. Conclusions Une évaluation précise de la hauteur de présentation et du type de variété est un pré-requis indispensable avant toute extraction instrumentale. Même si les complications maternelles et néonatales semblent limitées, une réflexion sur l’utilité d’un forceps « difficile » ou forceps d’essai paraît nécessaire et il ne devrait s’envisager qu’en salle de césarienne. Une discussion sur l’usage de la ventouse plutôt que du forceps sur les variétés postérieures paraît intéressante. © 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

KEYWORDS Forceps; Vacuum; Instrumental extraction; Caesarean section; Failure

Summary Objectives. — To evaluate risk factors associated with failed forceps delivery and to compare the maternal and neonatal morbidity. Patients and methods. — In this retrospective case-control study, all failed forceps delivery cases were analyzed from January 2005 to June 2008 and were compared to a successful forceps delivery cohort. Results. — The rate of failed forceps extraction was 4.4% (40/918). Specific risk factors were extraction above a fœtal station of S + 2 (OR = 43.03; IC 95%: 3.8—475.41), occipitoposterior position (OR = 34.64; IC 95%: 4.08—293.5), and biparietal diameter higher than 95 mm (OR = 10.74; IC 95%: 1.4—82.41). Maternal and neonatal morbidity was few in both groups. Conclusions. — Diagnosis of presentation level and variety of presentation are necessary before instrumental extraction. A ‘‘trial of forceps’’ should be performed with caution in a setting where a caesarean delivery could follow. Vacuum extraction could be interesting in case of occipito-posterior position. © 2011 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Introduction La fréquence des extractions instrumentales représente 11,6 % des accouchements en France, dont plus de 36 % d’utilisation de forceps [1]. On retrouve d’ailleurs des disparités régionales importantes d’après la récente étude de Mangin et al. sur les extractions dans les centres académiques franc ¸ais (51,4 % d’utilisation du forceps en niveau I ; 21,3 % en niveau II et 30,8 % en niveau III) [2]. À côté de l’angoisse médicolégale relative à la réalisation d’une extraction instrumentale, se rajoute la crainte de ne pas « réussir son forceps » et de devoir pratiquer une césarienne en urgence. La plupart des études sur les échecs d’extraction par forceps sont anciennes et présentent des biais méthodologiques évidents (groupe témoin inapproprié ou absent, cohortes sélectionnées. . .) [3—5]. Cette étude a pour objectif de décrire les complications maternelles et néonatales des échecs d’extraction par forceps et d’en évaluer les facteurs de risque.

Patients et méthodes Nous avons réalisé une étude rétrospective cas-témoin concernant les échecs d’extraction par forceps effectuées à la maternité du CHU de Saint-Étienne de janvier 2005 à juin 2008 par rapport à une population témoin de réussites de forceps.

Groupe A : échecs d’extraction par forceps Les critères d’inclusion étaient les suivants : tous les échecs d’extraction instrumentale par forceps effectuées sur fœtus uniques en présentation céphalique d’âge gestationnel supérieur à 37 SA.

Les critères d’exclusion concernaient les forceps réalisés avant 37 SA, en cours de césarienne, pour grossesse gémellaire et lors d’interruption médicale de grossesse. Les forceps utilisés étaient en majorité des forceps de Kielland ou parfois ceux de Tarnier, selon l’habitude et l’expérience de l’opérateur. L’extraction par forceps était codifiée : dilatation cervicale complète, membranes amniotiques rompues, variété de présentation connue et vérifiée par échographie en salle de naissances, présentation engagée, sondage vésical réalisé, instrument vérifié, analgésie maternelle suffisante. Les cuillères étaient introduites l’une après l’autre symétriquement avec l’aide d’un guidage manuel et après avoir écarté les tissus vulvovaginaux. L’articulation devait être réalisée sans difficulté, puis l’axe de la traction était déterminé en fonction de la variété et de la hauteur de présentation. L’échec d’extraction était défini par la césarienne réalisée en urgence pour échec de forceps, sachant que l’équipe obstétricale stéphanoise ne réalise pas d’application séquentielle d’instruments. Les extractions instrumentales par forceps étaient réalisées par des obstétriciens séniors ou sous leur supervision. L’enregistrement du rythme cardiaque fœtal continu était systématique durant la seconde partie du travail et pendant la tentative d’extraction.

Groupe B : réussite d’extraction par forceps Les critères d’inclusion ont été les suivants : toutes les réussites d’extraction instrumentale par forceps effectuées sur fœtus uniques en présentation céphalique d’âge gestationnel supérieur à 37 SA. Les critères d’exclusion concernaient les forceps réalisés avant 37 SA, en cours de césarienne, pour grossesse gémellaire et lors d’interruption médicale de grossesse.

Échecs d’extraction par forceps Afin d’avoir une puissance statistique suffisante, notamment en vue de l’analyse multivariée, 60 témoins ont été tirés au sort au sein du listing exhaustif des accouchements instrumentaux réussis réalisés dans le même centre et à la même période. Le tirage au sort a été réalisé par le Dr G. Mercier (département d’information médicale, CHU de Montpellier) à l’aide d’un programme informatique. Sur les 60 patientes, trois ont été exclus car non exploitables (données incomplètes). Nous avons analysé l’ensemble des critères suivants : les données démographiques et cliniques de la grossesse (l’âge maternel, l’âge gestationnel, la parité, la prise de poids materne ainsi que le calcul de l’IMC, le sexe des nouveaux nés), les données obstétricales (le déclenchement artificiel du travail, la durée du travail, la variété de la présentation, le niveau d’extraction, le poids de naissance ainsi que le diamètre bipariétale [BIP] et le périmètre céphalique [PC] du nouveau né, l’indication de l’extraction instrumentale), la morbidité maternelle et fœtale (les lésions des parties molles maternelles, les hémorragies de la délivrance, la durée d’hospitalisation, les scores d’Apgar à une et cinq minutes, l’acidose fœtale [pH et lactates], la réanimation immédiate, les transferts en unité de soins pédiatriques, la détresse respiratoire, l’hypotonie néonatale, les décès, les marques cutanées liées au forceps).

Analyse statistique Une description globale de l’échantillon a été réalisée en donnant les fréquences des différentes catégories pour les variables qualitatives. Les distributions des variables quantitatives n’étant pas toujours gaussiennes, la description de ces variables a été faite à l’aide de la moyenne et de la déviation standard, mais aussi de la médiane et des valeurs minimales et maximales. La comparaison entre les deux groupes a été réalisée à l’aide des tests de comparaison de moyennes (Student ou Wilcoxon en fonction de la distribution) pour les variables quantitatives et à l’aide d’un test du Chi2 pour les variables qualitatives. Lorsque les conditions de validité du Chi2 n’étaient pas respectées, celui-ci a été remplacé par le test exact de Fisher. Une analyse multivariée (régression logistique) a été réalisée afin de mettre en évidence l’influence respective propre de chaque co-variable sur le risque d’échec. Les odds ratios ajustés et leur intervalle de confiance à 95 % ont été calculés. Le seuil de signification a été fixé à 5 % pour tous les tests utilisés. L’analyse statistique a été réalisée au département de l’information médicale du CHU de Montpellier avec le logiciel SAS version 9 (SAS Institute, Cary, N.C.).

Résultats Sur la période de janvier 2005 à juin 2008, il y a eu, au CHU de Saint-Étienne, 7359 naissances, 918 tentatives d’extraction par forceps et 40 césariennes pour échec d’extraction instrumentale par forceps, soit une fréquence de 4,4 %. La moyenne d’âge maternel était de 29 ans pour le groupe A (groupe échec) et 27 ans pour le groupe B (groupe réussite), la différence statistique n’étant pas significative.

335 L’âge gestationnel était équivalent dans les deux groupes (39 SA) (Tableau 1). L’indice de masse corporelle était significativement plus important pour le groupe A (p = 0,001) bien que la prise de poids durant la grossesse soit équivalente (p = 0,56). Les déclenchements étaient plus fréquents dans le groupe A (p = 0,014). Les indications étaient représentées essentiellement par le terme dépassé (43,5 %) ou la rupture avant travail des membranes (39,1 %). Peu de déclenchements ont été réalisés pour une pathologie maternelle (deux pour HTA, un pour diabète et un pour cholestase). La durée du travail était plus longue dans le groupe A que dans le groupe B (p = 0,005) alors qu’il n’y avait pas de différence au niveau de la parité (p = 0,14). L’indication de l’extraction (efforts expulsifs insuffisants avec stagnation de la présentation ou anomalies du rythme cardiaque fœtale) n’était pas statistiquement associée à un risque accru d’échec de forceps. En revanche, la variété de présentation postérieure était plus fréquemment retrouvée dans le groupe A (p < 0,000001). Le niveau d’extraction haut situé (au-dessus du détroit moyen) était également pourvoyeur de césariennes pour échec de forceps (p < 0,000001). Enfin, le diamètre bipariétal était plus important dans le groupe A (p = 0,027) (Tableau 1). En analyse multivariée (Tableau 2), un diamètre bipariétal supérieur à 95 mm, une variété de présentation postérieure et un niveau d’extraction entre le détroit moyen et supérieur étaient associés significativement au risque d’échec de forceps (p < 0,05). Pour le critère déclenchement, on retrouvait une tendance non significative (p = 0,056). Les déchirures périnéales étaient représentées par l’épisiotomie dans 87,7 % des cas dans le groupe B (p < 0,000001). Les échecs de forceps ne se sont pas compliqués de plus d’hémorragies de la délivrance que dans le groupe réussite. Au niveau néonatal, le taux d’acidose était équivalent. Un nouveau-né du groupe A et deux nouveau-nés du groupe B ont eu un score d’Apgar inférieur à sept à cinq minutes (non significatif). Seule l’hypotonie néonatale était plus marquée dans le groupe A (p = 0,004) sans que cela induise plus de transferts en unité de réanimation néonatale (p = 0,3). Aucun traumatisme facial n’a été noté dans les deux groupes et nous ne déplorons aucun décès néonatal ou maternel (Tableau 3).

Discussion Le taux d’échec d’extraction instrumentale par forceps s’élève à 4,4 % dans notre étude, alors que la littérature est plutôt entre 1 à 2 % (échec de ventouse ou échec de forceps) et inférieur à 1 % en cas d’utilisation séquentielle (ventouse, puis forceps). Ces données relativement anciennes, d’une part, et, d’autre part, la tendance à ne plus pratiquer d’extraction haute peuvent expliquer cet écart [6]. D’ailleurs, la méta-analyse de la Cochrane va dans le sens d’une augmentation des échecs d’extraction instrumentale (7,2 % pour les forceps et 11,6 % pour les ventouses) [7].

336

A. Langeron et al.

Tableau 1 Données démographiques et cliniques. Demographic and clinical data. Variables

Échec

Réussite

Valeur p

Âge (années)

29 ± 4,9

27 ± 4,4

0,15

Âge gestationnel (SA)

39 ± 2,1

39 ± 1,4

0,17

14,4 ± 5,9

13,7 ± 4,5

0,56

Index de masse corporel (kg/m )

30,55 ± 4,3

27,78 ± 3,5

0,001

Parité Primiparité (nb et %) Multiparité (nb et %)

5 (12,5 %) 35 (87,5 %)

14 (24,5 %) 43 (75,4 %)

Déclenchement (nb et %)

21 (52,5 %)

16 (28 %)

0,014

Durée du travail (h)

9,6 ± 3,9

7,5 ± 3

0,005

Indications de l’extraction (nb et %) Efforts expulsifs insuffisants (EEI) Anomalies du rythme cardiaque fœtale (ARCF) EEI et ARCF

13 (32,5 %) 21 (52,5 %) 6 (15 %)

17 (29,8 %) 26 (45,6 %) 14 (24,6 %)

Variété de la présentation céphalique (nb et %) Antérieure Postérieure Transverse

12 (30 %) 25 (62,5 %) 3 (7,5 %)

50 (87,7 %) 5 (8,8 %) 2 (3,5 %)

Niveau d’extraction (nb et %) Entre détroits supérieur et moyen Entre détroit moyen et inférieur

30 (75 %) 10 (25 %)

50 (87,7 %) 7 (12,3 %)

Aspect du liquide amniotique (nb et %) Clair Teinté Méconial

28 (70 %) 6 (15 %) 6 (15 %)

46 (81 %) 8 (14 %) 3 (5 %)

Sexe de l’enfant Féminin Masculin

17 (42,5 %) 23 (57,5 %)

24 (42,1 %) 33 (57,9 %)

Poids de naissance (g)

3384 ± 418

3300 ± 398

0,31

BIP (cm)

97,2 ± 5

94,0 ± 4

0,027

PC (cm)

347,2 ± 15,6

344 ± 11,5

0,26

Prise de poids (kg) 2

0,14

0,51

< 0,000001

< 0,000001

0,59

0,96

Les premières études sur les échecs de forceps sont anciennes et présentent des biais méthodologiques (essentiellement sur le choix du group témoin) rendant prudente l’interprétation des résultats [3—5]. Les rares études plus récentes ne font pas état des facteurs de risque d’échec d’extraction par forceps et

décrivent plutôt la morbidité maternelle et néonatale [8—11]. Seul Al-Kadri et al. [6] a étudié par analyse multivariée les facteurs de risque d’échec ; malheureusement, il n’y a pas d’analyse en sous-groupe et les odds ratios sont donnés pour le groupe total échec ventouse (n = 129), échec forceps (n = 13) et échec ventouse plus forceps (n = 66) : les

Tableau 2 Analyse multivariée des facteurs de risque d’échec. Logistic multiple regression analysis about risk factors of failed forceps. Variables

Odd ratio

IC 95 %

p

BIP > 95 Variété postérieure Niveau d’extraction (entre DM et DS) Déclenchement

10,74 34,64 43,03 8,04

1,4—82,41 4,08—293,5 3,8—475,41 0,95—67,97

0,022 0,001 0,002 0,0556

Échecs d’extraction par forceps

337

Tableau 3 Morbidité maternelle et néonatale. Maternal and fœtal outcomes. Variables

Échec

Réussite

Valeur p

Lésions des parties molles Déchirures périnéales 1er — 2e degré Déchirures périnéales 3e — 4e degré Épisiotomie Périnée intact

6 (15 %) 0 1 (2,5 %) 33 (82,5 %)

5 (8,8 %) 2 (3,5 %) 50 (87,7 %) 0

Hémorragie de la délivrance

5 (12,5 %)

2 (3,5 %)

0,12

Détresse respiratoire

0

2 (3,5 %)

0,3

Hypotonie néonatale

6 (15 %)

0

0,004

pH < 7,12

3 (10,3 %)

4 (10,5 %)

1,0

Transfert en réanimation néonatale

4 (10 %)

2 (3,5 %)

0,3

Décès néonatal ou maternel

0

0

< 0,000001

antécédents de césarienne, la nulliparité, le surpoids maternel, le travail prolongé, le niveau de présentation entre DM et DS, la variété de présentation non antérieure et la macrosomie fœtale sont retrouvés comme facteur de risque d’échec d’extraction instrumentale. Dans notre série, le modèle de régression logistique multiple a mis en évidence trois facteurs de risque d’échec :

plus, c’est un instrument de rotation induite par la flexion obtenue et elle évite certaines atteintes potentielles des parties molles maternelles [17,18] ; • BIP supérieur à 95 mm : contrairement à la ventouse, la mise en place des cuillères augmente le diamètre de la présentation, pouvant créer un obstacle mécanique à toute traction au travers du bassin obstétrical.

• l’extraction entre DM et DS : cette tentative d’extraction est souvent critiquée, voire interdite pour certains : difficulté du diagnostic d’engagement de la présentation et risque de réaliser une extraction sur une présentation non engagée. Pourtant, un « forceps d’essai » pourrait parfois être discuté sous certaines conditions très strictes [11,12] sans grever le pronostic néonatal ou maternel : en salle de césarienne (aide habillé, table prête, aspiration branchée), sans insister en cas de non-articulation des cuillères ou d’absence de progression de la présentation et sans utilisation séquentielle de ventouse. D’ailleurs, notre étude ne retrouve aucune complication maternelle et néonatale grave suite à une césarienne pour échec de forceps au dessus du DM. Ce résultat est aussi retrouvé par Miot et al. pour les échecs de ventouse [13]. Il assimile également la ventouse au-dessus du DM à un instrument d’essai ; • les variétés postérieures : ce facteur de risque est aussi retrouvé par Al-Kadri et al. [6] : le forceps aggrave la déflexion alors qu’elle est quasi constante dans les variétés postérieures, ce qui augmente les diamètres de la présentation. Pour Bhide et al. [14], les échecs de ventouses sont associés à des présentations asynclites (OR = 3,5, IC 95 % 1,8—6,8) ; Miot et al. [13] retrouve lui aussi une augmentation du taux de césarienne après échec de ventouse sur les variétés postérieures en analyse univariée, mais pas en multvariée. La ventouse obstétricale est effectivement un instrument de flexion et apparaît plus appropriée pour ce type de présentation : elle serait mécaniquement plus efficace [15,16]. En effet, elle améliore la flexion céphalique et diminue donc les diamètres alors que le forceps accentue la déflexion. De

L’élargissement du BIP ne semble pas s’intégrer à un problème de macrosomie fœtale ou de diabète gestationnel dans notre étude, contrairement à d’autres auteurs [11]. Un quatrième critère (tendance non significative) est évoqué comme facteur de risque dans l’analyse multivariée de notre étude : la notion de déclenchement. Effectivement, les déclenchements sont plus volontiers associés aux extractions instrumentales et donc de ce fait la relation avec les échecs d’extraction peut paraître licite [6,14]. La morbidité maternelle apparaît faible après échec de forceps. Pour autant, même si les lésions des parties molles sont statistiquement plus fréquentes dans le groupe réussite, les conclusions doivent être prudentes : la forte proportion d’épisiotomies dans le groupe B (87,7 % vs 2,5 % pour le groupe A) constitue un authentique facteur confondant. La décision de césarienne est prise bien avant le passage au niveau du périnée et avant la réalisation de l’épisiotomie, et on ne constate pas de déchirures graves dans le groupe échec de forceps même si les déchirures du premier ou deuxième degré sont près de deux fois plus importantes. Dans les travaux relatifs aux échecs de ventouse, on retrouve statistiquement moins de lésions périnéovaginales par rapport au groupe témoin [13,14]. Au niveau néonatal, les complications sont équivalentes dans les deux groupes. Il n’y a pas plus d’acidose néonatale dans le groupe A ; l’hypotonie néonatale est transitoire puisque les transferts en réanimation néonatale ne sont pas statistiquement plus importants. Pour les études concernant les échecs de ventouse, le score d’Apgar et/ou le pH est initialement diminué, mais récupère par la suite. Les échecs

338 d’extraction par ventouse ne sont pas plus souvent associés à des céphalhématomes [13,14]. Les données de la littérature sont en accord : il n’y a pas plus de morbidité materno-fœtale en cas d’échec ou de réussite du forceps. Seul Lowe et al. [12] retrouve une augmentation des hypoxies fœtales et des fièvres maternelles lorsque le nombre de tractions est supérieur à trois. Les extractions par forceps peuvent donc continuer à avoir une place de choix dans la pratique obstétricale en respectant strictement le modus operandi : présentation engagée, absence de disproportion fœto-maternelle, opérateur expérimenté, et possibilité de césarienne rapide en cas d’échec [8,9,11]. Enfin, malgré ces résultats rassurants, la question peut se poser de savoir si une tentative d’extraction par un autre instrument (ventouse, autre type de forceps, spatules) est licite avant la réalisation d’une césarienne [19,20]. L’utilisation séquentielle ventouse puis forceps serait associée à une morbidité maternelle et néonatale plus importante qu’un seul instrument [6,14].

A. Langeron et al.

[3] [4]

[5] [6]

[7]

[8] [9] [10]

Conclusion

[11]

L’opérateur pourrait rechercher les facteurs de risque d’échec que nous avons mis en évidence (présentation audessus du détroit moyen, variétés postérieures et diamètre bipariétal supérieur à 95 mm) avant toute tentative de forceps et ne pas insister en cas d’association de plusieurs facteurs de risque. Le forceps au dessus du DM doit être sérieusement discuté. S’il est réalisé, il doit être, à notre avis, un forceps d’essai, effectué en salle de césarienne, par un opérateur expérimenté, avec le plateau de césarienne ouvert, l’anesthésiste et le pédiatre présent, sans insister en cas d’absence d’articulation ou de non-progression de la présentation. Lorsque la variété de présentation est postérieure, il pourrait être judicieux de préférer une extraction instrumentale par ventouse plutôt que par forceps.

[12]

Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

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