Fistule cutanée révélant une pyonéphrose tuberculeuse

Fistule cutanée révélant une pyonéphrose tuberculeuse

Annales de dermatologie et de vénéréologie (2010) 137, 580—581 DOCUMENT ICONOGRAPHIQUE Fistule cutanée révélant une pyonéphrose tuberculeuse Cutaneo...

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Annales de dermatologie et de vénéréologie (2010) 137, 580—581

DOCUMENT ICONOGRAPHIQUE

Fistule cutanée révélant une pyonéphrose tuberculeuse Cutaneous fistula revealing tubercular pyonephrosis N. Elkihal ∗, K. Senouci , B. Hassam , N. Ismaili Service de dermatologie, CHU de Rabat, Rabat, Maroc Rec ¸u le 10 septembre 2009 ; accepté le 23 avril 2010

Observation Une femme de 56 ans, marocaine, consultait pour un écoulement permanent à partir d’un orifice lombaire gauche évoquant une fistule cutanée et évoluant depuis trois mois (Fig. 1). La patiente n’avait pas d’antécédents, notamment pas de contage tuberculeux. Elle avait été vaccinée contre la tuberculose. Elle ne présentait aucun signe fonctionnel, notamment urinaire. Une biopsie cutanée mettait en évidence un granulome épithélio-gigantocellulaire. Le diagnostic de tuberculose cutanée était posé et la patiente était mise sous traitement antibacillaire pendant six mois (rifampicine, isoniazide, pyrazinamide). Mais, l’évolution était défavorable et elle était adressée au service de dermatologie (CHU de Rabat). L’examen clinique trouvait un orifice de 2 cm de diamètre laissant sourdre un liquide purulent (Fig. 2). L’état général était conservé. Les prélèvements bactériologiques, aussi bien examen direct que culture, réalisés sur la fistule cutanée, étaient négatifs. La recherche de bacille de Koch (BK) dans les urines était négative. Il existait un syndrome inflammatoire, avec une vitesse de sédimentation à 160 mm la première heure.

L’intradermoréaction à la tuberculine était négative, la fonction rénale et l’échographie abdominale étaient normales. La tomodensitométrie abdominopelvienne révélait une collection purulente du rein fistulisée à la peau. Le diagnostic de tuberculose cutanée et rénale était retenu. La patiente était traitée par néphrectomie gauche élargie associée à une antibiothérapie (Rocéphine* ceftriaxone



Auteur correspondant. 130, avenue Mehdi Ben Barka, Hay Riad, Rabat, Maroc. Adresse e-mail : [email protected] (N. Elkihal).

Figure 1.

0151-9638/$ — see front matter © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.annder.2010.06.003

Fistule lombaire gauche.

Fistule cutanée révélant une pyonéphrose tuberculeuse

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Figure 3. Figure 2.

Examen radiologique.

Fistule de 2 cm de diamètre.

1 g/jour pendant cinq jours). L’examen microscopique de la pièce opératoire mettait en évidence des foyers granulomateux épithélio-gigantocellulaires riches en lymphoplasmocytes, avec par endroits des foyers d’abcédation et de nécrose.

Discussion Il s’agissait d’une patiente présentant une pyonéphrose tuberculeuse révélée par une fistule lombaire, sans signes urinaires ni fièvre. Devant une ulcération lombaire ne répondant pas aux traitements antibacillaires, nous avions évoqué une autre infection, notamment actinomycose, mycobactériose, un foyer néoplasique ou une fistule sur pyélonéphrite chronique lithiasique [1—4], bien que l’association tuberculose et lithiase ait été rapportée [5]. Le diagnostic final a été retenu sur les critères épidémiologiques, le Maroc étant un pays d’endémie pour la tuberculose, les critères radiologiques et histologiques réalisés sur la pièce opératoire. Les fistules néphrocutanées sont une des complications de la tuberculose rénale [5], bien que les localisations cervicales soient les plus fréquentes [6,7]. Le diagnostic est confirmé par le bilan radiologique (Fig. 3) [8]. La mise en évidence du BK dans les urines est variable, allant de 5 à 87,5 % selon les données de la littérature [5,9,10]. Elle était négative dans notre cas. Le traitement de la tuberculose extrapulmonaire est identique à celui des formes pulmonaires. Il repose sur un traitement de six mois au total avec durant les deux premiers mois, l’association de trois antituberculeux administrés six jours sur sept (rifampicine, isoniazide et pyrazinamide), puis suppression du pyrazinamide les quatre mois suivants [11,12]. La durée de traitement peut être prolongée jusqu’à 12 à 24 mois. Le traitement chirurgical est une alternative dans les formes avancées, l’héminéphrectomie peut être proposée. Notre patiente avait déjà une pyonéphrose et la néphrectomie était proposée. Cette observation illustre une localisation silencieuse de la tuberculose qui finit par détruire le rein.

Conflit d’intérêt Les auteurs n’ont pas de conflit d’intérêt.

Références [1] Petavy-Catala C, Legoux A, Esteve E. Fistule cutanée révélant une pyélonéphrite chronique. Ann Dermatol Venereol 1999;126:835. [2] Lautin R, Gerard PS, Fuksbrumer M. Asymptomatic calculous pyelonephritis with cutaneous-renal-broncho-pleural fistula. Urology 1996;48:928—9. [3] O’Boyle C, Gleeson M, Butler M, Tanner WA. Xanthogranulomatous pyelonephritis presenting as a cutaneous fistula. Ir J Med Sci 1993;162:150—1. [4] Biyani CS, Torella F, Cornford PA, Brough SJ. Xanthogranulomatous pyelonephritis with bilateral nephrocutaneous fistulae. Urol Int 1997;59:46—7. [5] Benchekroun A, Nouini Y, Zannoud M, Ahmed El alj H, Lachkar A, Belahnech Z. Fistule cutanéo-réno-colique sur rein tuberculeux avec calcul coralliforme : à propos d’un cas. Ann Urol (Paris) 2002;36:361—4. [6] Sliti N, Benmously R, Fenniche S, Megdiche M, Fenniche T, Mokhtar I. Scrofuloderme inguinal révélant une tuberculose ganglionnaire. Ann Dermatol Venereol 2007;134: S87. [7] Khatibi B, Beqqal K, Rmili M, Senouci K, Hassam B, Benzekri L. Ulcération cutanée révélant une tuberculose viscérale. Ann Dermatol Venereol 2009;136:852—3. [8] Pauwels C, Bulai-livideanu C, Chiavassa H, Lamant L, Carrié D, Sorbara A-M, et al. Hypodermite lombaire abcédée révélant une pyonéphrose. Ann Dermatol Venereol 2009;136: 727—9. [9] El Khader K, Lrhofi MH, El Fassi J, Tazi K, Hachimi M, Lakhrissa A. Tuberculose urogénitale. Expérience de 10 ans. Prog Urol 2002;11:517—9. [10] Benchekroun A, Lachkar A, Soumana A, Farih MH, Belahnech Z, Marzouk M, et al. La tuberculose urogénitale : à propos de 80 cas. Ann Urol (Paris) 1998;2:89—94. [11] Benchekroun A, Nouini Y, Zannoud M, Mustapha Cissé A, Marzouk M, Faik M. Tuberculose épididymaire : à propos d’un cas avec aspect particulier en échodoppler. Ann Urol 2002;36:384—7. [12] Tattevin P. Traitement de la tuberculose en 2007. Med Mal Infect 2007;37:617—28.