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Revue du Rhumatisme 75 (2008) 755–762
Injections cortisonées radioguidées du rachis cervical (ce que je fais, ce que je ne fais plus) Cervical spinal steroid injections under fluoroscopic guidance (what I am still doing, what I do no longer) Marc Wybier a,b,∗ a
Service de radiologie ostéoarticulaire, hôpital Lariboisière, 5, rue Ambroise-Paré, 75010 Paris, France b Cabinet radiologique de l’appareil locomoteur, 5, rue Alfred-Bruneau, 75016 Paris, France Accepté le 23 mai 2008 Disponible sur Internet le 3 aoˆut 2008
Mots clés : Rachis cervical ; Douleur ; Injection cortisonée ; Effets indésirables Keywords: Cervical spine; Neck pain; Steroid injection; Side effects
L’injection thérapeutique sélective du rachis cervical consiste à déposer, sous le contrôle de l’image, un dérivé cortisoné à proximité d’une structure anatomique choisie précisément pour sa responsabilité présumée dans les symptômes à traiter. En pratique clinique, ce type de traitement s’applique aux cervicalgies sous-occipitales et à la névralgie cervicobrachiale rebelles, moins souvent à la douleur commune du rachis cervical inférieur. L’arthrose intervertébrale et les hernies discales sont les causes habituelles de ces symptômes. Comme celui des injections cortisonées du rachis en général, l’usage des injections radioguidées du rachis cervical remonte à plusieurs dizaines d’années, sur la base d’un consensus professionnel. Cependant, la nécessité de justifier les actes médicaux par des preuves statistiques se fait pressante : démunie à ce jour de preuves pour les injections cortisonées du rachis, voici la communauté médicale confrontée à la gravité de certaines complications exceptionnelles, révélées par la littérature scientifique récente, et désarmée pour peser le pour et le contre. Ces complications sont la justification du présent travail. Les techniques passées en revue ici sont exclusivement liée au guidage par la scopie télévisée. Elles peuvent être toutes ambulatoires.
∗
Auteur correspondant. Adresse e-mail :
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1169-8330/$ – see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.rhum.2008.05.004
1. Ce que je ne fais pas 1.1. L’injection épidurale cervicale inférieure L’aiguille est placée, sous anesthésie locale, dans la partie dorsale du canal cervical central par voie paramédiane interlamaire C7-T1, sur un patient en procubitus [1]. Une épidurographie opaque première vérifie l’absence de la moindre résistance mécanique au passage du liquide injecté sous faible pression, la répartition prévisible (verticale postérieure de part et d’autre du point de ponction) du liquide injecté et l’absence d’opacification vasculaire. Dans ces conditions favorables, une ampoule de dérivé cortisoné peut suivre le même chemin. Une étude rétrospective, censée paraître prochainement dans J Vasc Interv Radiol, fait état d’une « diminution de la douleur à dix jours dans environ 80 % des cas », sans plus de précision à ce jour [2] sur l’intensité et l’ancienneté initiales de la douleur et le mode d’évaluation du résultat. 2. Ce que je ne fais plus 2.1. L’injection intradiscale d’acétate de prednisolone Décrite en 1957 par Smith et Nichols [3], la discographie cervicale peut être suivie d’une injection thérapeutique, principalement dans le traitement de la névralgie cervicobrachiale rebelle. Certaines équipes ont couramment pratiqué en leur
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Fig. 1. Représentation schématique de la technique de la discographie cervicale par la voie antérolatérale. Le doigt de l’opérateur est à proximité de l’aiguille (têtes de flèche). L’œsophage (flèche longue) est à quelques millimètres en avant du disque.
temps la nucléolyse cervicale à la chymopapaïne, qui leur semblait donner des résultats au moins aussi bons que la nucléolyse lombaire (cette dernière étant la seule cependant à avoir bénéficié d’une autorisation officielle). Notre expérience de l’injection d’acétate de prednisolone ou, antérieurement, de cortivazol dans le disque cervical n’a fait l’objet d’aucune évaluation scientifique ; selon notre expérience passée (non publiée), le taux de succès dans le traitement de la névralgie cervicobrachiale tourne autour de 40 %. Cependant, la ponction radioguidée du disque cervical est grevée d’un risque de spondylodiscite infectieuse estimé à 1 % (contre 0,1 % à l’étage lombaire), ce qui tient vraisemblablement à la voie d’abord, obligatoirement antérolatérale entre paquet jugulocarotidien en avant et artère vertébrale en arrière (Fig. 1). Cette voie d’abord oblige le doigt de l’opérateur à appuyer le plan cutané contre la surface du rachis, ce qui expose au risque de contact avec l’aiguille ; par ailleurs, l’œsophage est à proximité du trajet de l’aiguille, laquelle peut donc traverser un imprévisible et non exceptionnel diverticule œsophagien septique. 2.2. L’injection foraminale stricte par cathétérisme du foramen L’injection foraminale cervicale est pratiquée depuis plus de 20 ans (Warfield et al. 1988, Cicala et al. 1989, Ferrante et al. 1993 in [4]), selon des techniques diverses. Cette longévité laisse supposer, comme pour l’ensemble des injections cortisonées rachidiennes, que l’expérience clinique y trouve son compte. Cependant, à notre connaissance, aucune technique d’injection foraminale cervicale n’a fait, à ce jour, l’objet d’une évaluation selon la norme scientifique actuelle (prospective contre groupe témoin) [5]. La technique classique, recommandée par de nombreux auteurs en particulier nord-américains [6], vise l’épinèvre, ce qui suppose le cathétérisme partiel du foramen (Fig. 2). Sur
Fig. 2. Technique du cathétérisme foraminal. (A). Vue axiale scanographique des artères carotide (c) et vertébrale (v). La flèche indique le trajet idéal de l’aiguille selon cette technique, au ras du bord osseux postérieur du foramen. (B). Vue oblique sur os sec montrant la position de l’aiguille en profondeur.
un patient en décubitus oblique, après une anesthésie locale limitée à la peau, on vise la partie postérieure et inférieure du foramen, pour arriver au contact osseux de la paroi postérieure du foramen [6–12], puis l’aiguille est glissée le long de cette paroi de fac¸on à se trouver en arrière du nerf spinal, en présumant, selon l’anatomie classique, que toutes les structures vasculaires éventuelles du foramen se situent en avant du nerf [7]. L’aiguille d’infiltration est poussée sur environ 2 mm sans dépasser la ligne médiane de l’articulation postérieure de face [7,13] ou jusqu’au déclenchement d’une douleur ou de paresthésies symptomatiques [6]. Après avoir éventuellement fixé une tubulure sur l’aiguille pour éviter son déplacement secondaire, on aspire pour vérifier l’absence de reflux de sang et
M. Wybier / Revue du Rhumatisme 75 (2008) 755–762 Tableau 1 Séries non compliquées d’injections foraminales cervicales radioguidées Cyteval et al. [21] : 30 cas Vallée et al. [19] : 43 cas Bush et Hillier [15] : 68 cas Huston et al. [22] : 89 cas consécutifs Série collégiale de plus de 300 cas en pratique libérale (non publiée) Série collégiale de l’hôpital Lariboisière de plus de 350 cas (non publiée)
on opacifie l’espace épineural, qui apparaît comme une image en rail. Enfin, un dérivé cortisoné en suspension (acétate de prednisolone en France) est injecté. Plusieurs études ouvertes font état d’un taux de très bons et bons résultats d’environ 60 % de la population traitée (Tableau 1) [14–19], avec une amélioration comparable pour la douleur radiculaire et la douleur cervicale [19]. Bush et Hillier disent avoir évité un traitement chirurgical à 100 % de leurs 68 patients [15]. À titre de comparaison, le traitement chirurgical de la névralgie cervicobrachiale donne 64 à 96 % de bons résultats selon une revue de la littérature de 1994 [20]. Rappelons aussi que l’évolution naturelle de la névralgie cervicobrachiale commune se fait vers la guérison dans 80 à 90 % des cas [20], information qu’il est loyal de donner au patient avant une injection cortisonée dirigée ou traitement chirurgical (Tableau 2). Cependant, le risque d’échec de l’injection cortisonée est aussi influencé par l’ancienneté de la douleur : il passe de 40 % pour les douleurs de moins de six mois à 80 % pour celles de plus de 18 mois [19], ce qui fait évidemment hésiter à laisser l’évolution naturelle suivre son cours sur un nombre excessif de mois. De plus, la douleur radiculaire à traiter est souvent très pénible, son niveau moyen sur une échelle visuelle analogique étant supérieur à 6 [16,21]. Le lien de cause à effet entre l’injection cortisonée et l’amélioration clinique est suggéré par le bref délai qui les sépare, une à deux semaines [16,19], et l’absence d’amélioration supplémentaire, passé ce délai initial [19]. On ne sait pas si l’échec d’une première injection peut être suivi du succès d’une seconde. La reproduction de la douleur symptomatique au cours du geste n’a aucune valeur prédictive pour le résultat clinique [19]. Les complications de l’injection cortisonée radioguidée du foramen cervical sont exceptionnelles. Dans notre série collégiale non publiée de 650 cas ambulatoires consécutifs (en pratique libérale ou hospitalière), aucune complication n’est à déplorer à ce jour. L’étude prospective des effets secondaires de Tableau 2 Complications de la chirurgie discale cervicale par voie antérieure [3,28] Aggravation d’une myélopathie pré-existante : 3,3 % Contusion médullaire sévère : 1 cas Hématome (1 %) ou abcès (0,2 %) épidural Infection locale : 1 % Blessure d’une racine nerveuse : 1 % Paralysie du récurrent : 1 à 8 % Syndrome de Claude-Bernard-Horner : 1 % Insuffisance respiratoire : 1 % Instabilité intervertébrale : 1 % Blessure du pharynx (0,2 %) ou de l’œsophage (0,4 %) Méningite par perforation durale : 0,2 %
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l’«injection sélective radioguidée des racines nerveuses cervicales » avec évaluation en insu contre groupe témoin de Huston et al. ne fait état d’aucune complication traumatique ni ischémique dans une série de 89 injections foraminales cervicales consécutives [22] ; dans cette étude, aucune complication même mineure n’a été observée dans 91 % des cas ; les désagréments mineurs du geste sont, à côté du réveil transitoire de la cervicalgie et de la radiculalgie, un « étourdissement » (13,5 % des cas), une nausée (3,4 % des cas), une céphalée non spécifique (4,5 % des cas). À trois mois, il n’y avait aucune différence entre le groupe traité et le groupe témoin au regard des évènements indésirables. Dans une série de 134 injections dirigées d’un foramen cervical entre C3 et T1 comprenant une stimulation mécanique du nerf par l’aiguille destinée à un travail de corrélation radioanatomique, aucune complication n’est signalée [23]. Le risque d’un malaise vagal transitoire peut atteindre 25 % quand le geste est pratiqué sur un patient vertical [19]. Cependant, les publications sur des complications graves liées à l’injection dirigée d’un foramen cervical se sont succédées dans la littérature médicale, principalement anglophone à notre connaissance, depuis 1999 [8,10–13,24]. Il peut s’agir d’un syndrome de l’artère spinale antérieure, par infarctus médullaire [8,11,24] ou d’un infarctus cérébelleux [10,12,25], entraînant le décès du patient ou de lourdes séquelles neurologiques. Dans les deux types d’accidents, les complications s’installent en 24 heures, les premiers signes apparaissant au cours des minutes qui suivent l’injection, ce qui exclut la mise en cause d’un éventuel effet démyélinisant du dérivé cortisoné ou d’un excipient. 2.2.1. Le syndrome de l’artère spinale antérieure cervicale Le syndrome de l’artère spinale antérieure cervicale associe paralysie motrice des quatre membres, insensibilité thermoalgésique et conservation de la sensibilité proprioceptive ; il s’accompagne d’images IRM d’infarctus médullaire antérieur étendu verticalement en amont du niveau de l’injection [7] (Fig. 3) et, exceptionnellement, étendu aux cordons médullaires postérieurs [26] ; il pourrait être en rapport avec l’obstruction d’une artère par un embole médicamenteux ; en effet, les cristaux d’acétate de méthylprednisolone, d’acétonide de triamcinolone et de dexaméthasone ont un diamètre de plus de 50 (la bétaméthasone a des cristaux de diamètre très inférieur) et sont susceptibles de phénomènes de coalescence secondaire à l’origine d’agrégats de plus de 100 pour les deux derniers ; la taille de ces cristaux ou de leurs agrégats est à comparer au calibre des artères à destinée spinale : 0,2 à 0,5 mm pour l’artère spinale antérieure [27], un calibre inférieur pour ses branches intramédullaires ; de tels agrégats sont donc à même d’obstruer le réseau artériolaire terminal qui irrigue les cornes ventrales, la base des cornes dorsales et une grande partie des tractus ventrolatéraux de la moelle (Fig. 4). L’embolie médullaire suppose donc une injection intra-artérielle accidentelle : elle ne concerne pas l’artère vertébrale, dont la piqûre accidentelle donne des infarctus non pas médullaires, mais cérébelleux (cf. infra). Le risque est lié à la piqûre d’une artère inhabituelle située à la partie postérieure du foramen [28], là où, inspirée par les données anatomiques classiques, la technique du cathétérisme foraminal prétend placer l’aiguille d’injection. Il ne s’agit jamais des
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Fig. 3. Infarctus médullaire antérieur en IRM-T2 (flèches). À gauche, coupe sagittale montrant l’extension de la lésion en hauteur ; à droite, la coupe axiale montre la localisation électivement antérieure de l’infarctus (clichés dus à l’obligeance du Dr Jean-Pierre Guichard, hôpital Lariboisière).
artères segmentaires, radiculomédullaires, nées des artères vertébrales, qui passent dans la partie antérieure du foramen (encore que ces artères pourraient aussi siéger chez certains individus à la partie postérieure du foramen [29]). En revanche, l’artère cervicale ascendante (Fig. 5) peut donner une branche spinale, qui pénètre dans le foramen C3-4 ou C4-5 à sa partie postérieure et inférieure, et l’artère cervicale profonde (Fig. 5), qui donne en général des branches pour le plexus brachial, peut aussi donner de larges branches spinales qui pénètrent la partie postérieure du foramen, juste en arrière de la racine nerveuse, en C5-6, C6-7 ou C7-T1. Ces variations anatomiques sont le plus souvent impaires, de sorte qu’un antécédent d’injection foraminale réussie sans problème n’est pas une garantie d’innocuité pour l’injection du côté opposé au même étage cervical [11]. Au cours
Fig. 5. Vue oblique schématique des artères cervicales (d’après [28]). L’artère cervicale ascendante (a) donne des branches foraminales en C3-4 ou C4-5 ; l’artère cervicale profonde (p) donne des branches foraminales en C5-6, C6-7 ou C7-T1 (v : artère vertébrale).
du placement d’une aiguille dans la partie postérieure, rétronerveuse, d’un foramen cervical entre C3 et T1, des variations anatomiques imprévisibles exposent à un risque de piqûre accidentelle d’une artériole estimé à 7 % [28]. Heureusement, seule une fraction (à notre connaissance non chiffrée) de ces artérioles imprévues contribue à alimenter l’artère spinale antérieure. Dans le cas compliqué d’un infarctus médullaire de Brouwers et al., le patient avait même subi sans difficulté une première injection cortisonée dans le même foramen cervical trois mois plus tôt [8] ! 2.2.2. L’infarctus cérébelleux L’infarctus cérébelleux résulte de la piqûre de l’artère vertébrale, suivie d’une possible embolie médicamenteuse [19] ou d’une dissection de la paroi artérielle [10]. Dans l’un de ces deux cas [12], la piqûre accidentelle de l’artère vertébrale a été mise sur le compte d’un trajet artériel anormalement tortueux (Fig. 6), ce qui montre qu’il est indispensable de disposer avant le geste d’une imagerie en coupes de la région cervicale afin de prévoir les variations anatomiques les plus grossières [16].
Fig. 4. Vue axiale schématique des artères spinales antérieure (a) et postérieure (p) et de leurs branches intramédullaires.
À notre connaissance, ces complications graves sont toutes le fait d’auteurs américains adeptes expérimentés du placement intraforaminal franc de l’aiguille. Initialement, notre propre technique aussi consistait à venir au contact de l’articulation postérieure, puis, par le jeu d’un retrait–réorientation de l’extrémité
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Fig. 6. Trajet aberrant d’une artère vertébrale. À droite (flèche longue), l’artère vertébrale fait une longue boucle orientée horizontalement dans le grand axe du foramen ; à gauche (tête de flèche), trajet vertical normal de l’artère vertébrale en avant du foramen (Cliché dû à l’obligeance du Dr V. Vuillemin).
de l’aiguille, à glisser sur 1 ou 2 mm en avant du massif articulaire au pied du foramen, mais sans chercher, comme dans la technique nord-américaine, à arriver sur la « ligne sagittale médiane de l’articulation postérieure ». Tous les accidents graves sont survenus avec l’utilisation d’aiguilles à ponction fines, de 25G (soit 0,5 mm), sauf dans un cas où l’aiguille n’avait qu’un calibre de 22G [8], encore supérieur cependant à celui que nous préconisons (20G, soit 0,9 mm). Or le travail anatomique de Huntoon montre que les artères susceptibles d’être accidentellement croisées sur la route de la partie postérieure du foramen cervical ont un diamètre de 0,8 à 1,2 mm et sont donc davantage exposées au cathétérisme accidentel si l’aiguille est trop fine [28]. L’injection préalable d’un produit de contraste hydrosoluble non neurotoxique est a priori une sage précaution : destinée initialement à obtenir l’opacification de l’épinèvre, elle permet aussi de vérifier que l’aiguille n’est pas dans un vaisseau, éventualité rencontrée dans presque un cas sur cinq d’une série de 504 injections foraminales cervicales par Furman et al. [9] ; cependant, cette précaution ne garantit pas contre un accident ischémique grave, puisqu’elle avait été prise dans bon nombre des cas de complications publiés [8,11,12] : l’explication réside peut-être dans la survenue d’un léger déplacement de l’aiguille entre l’injection du produit de contraste et celle du dérivé cortisoné ; par ailleurs, on se souvient que l’injection d’un produit de contraste iodé comporte en elle-même un risque, très rare, de choc cardiovasculaire mortel. L’opacification préalable n’est d’ailleurs pas recommandée par tous les auteurs américains. Quant à l’aspiration préalable, à faire juste avant d’injecter le dérivé cortisoné pour vérifier que du sang ne remonte pas dans l’aiguille, sa sensibilité est inférieure à la moitié de celle de l’injection d’un produit opaque [9]. Il n’est cependant pas impossible que l’embolie médicamenteuse passe par voie veineuse rétrograde, à travers les riches plexus veineux de la région. 2.3. L’injection juxtaforaminale [16] Elle vise le bord latéral de l’articulation postérieure, sans chercher à cathétériser le foramen (Fig. 7). Le patient est installé
Fig. 7. Technique sécurisée de l’infiltration foraminale cervicale (d’après 16). (A). Vue oblique sur os sec : l’aiguille (flèches) vient s’appuyer latéralement sur l’interligne articulaire postérieur. (B). Vue axiale schématique : l’aiguille en place se situe juste en arrière de l’orifice latéral du foramen, sans cathétériser ce dernier.
et préparé comme précédemment. L’aiguille est ici poussée jusqu’au contact osseux du processus articulaire supérieur de la vertèbre inférieure. Ce contact provoque inconstamment un réveil douloureux plus ou moins complet, donc plus ou moins facilement identifiable à la douleur symptomatique. Une aspiration vérifie l’absence de reflux de sang dans l’aiguille, puis on injecte quelques gouttes de produit de contraste iodé sous contrôle scopique télévisé permanent, pour écarter la possibilité d’une opacification intravasculaire (Fig. 8); le passage du contraste vers le foramen n’est pas une condition nécessaire à la poursuite du geste. L’opacification du récessus crânial de l’articulation interapophysaire postérieure (Fig. 9) n’est pas non plus requise, mais elle est une garantie a posteriori qu’il n’y aura aucun passage intra-vasculaire du produit thérapeutique ! L’injection du produit opaque, puis celle de l’acétate de prednisolone peuvent éveiller une douleur symptomatique plus ou moins complète (le patient est prévenu, au fur et à mesure, de toutes les étapes pouvant éveiller une douleur, afin de lui éviter une inutile inquiétude). Le patient reste sous surveillance médicale pendant environ une heure en décubitus ou semi-décubitus. Il lui est recommandé de porter un
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Fig. 8. Technique sécurisée de l’infiltration foraminale cervicale. A. L’aiguille est posée contre le massif articulaire postérieur. B. L’injection de contraste iodé opacifie un vaisseau cervical profond (flèches) (clichés dus à l’obligeance du Dr Bassam Hamzé).
collier cervical et de limiter les mouvements de la tête pendant 48 heures pour favoriser le séjour in situ du dérivé cortisoné. Malheureusement, notre expérience la plus récente nous suggère que cette voie aussi expose à des injections intra-vasculaires imprévisibles. 3. Ce que je fais 3.1. L’injection atlanto-axoïdienne latérale Elle est indiquée dans les douleurs (éventuellement une névralgie d’Arnold) imputées à une arthropathie C1-2 latérale démontrée par l’imagerie (Fig. 10). Il s’agit, en règle générale,
Fig. 10. Technique de l’infiltration atlanto-axoïdienne latérale. (A). Arthropathie évoluée à gauche (flèche noire). L’aiguille (flèche blanche) arrive au contact de l’interligne articulaire par voie ascendante postérieure. (B). Opacification de l’interligne articulaire (têtes de flèche).
d’une arthrose (qui ne se voit, selon notre expérience, que comme le couronnement d’une arthrose postérieure évoluée et étagée du rachis cervical inférieur), d’une arthropathie chondrocalcinosique ou encore rhumatoïde. Sur un patient placé en procubitus strict, en délordose cervicale maximale, la tête appuyée par le front sur la table de radiologie et la bouche grande ouverte, on vise le milieu de l’interligne par un abord postérieur parasagittal, le point d’entrée cutané de l’aiguille étant suffisamment bas situé pour permettre à cette dernière de monter vers l’interligne articulaire sans jamais se projeter plus crânialement que lui, ce qui est la garantie de ne jamais croiser l’artère vertébrale (Fig. 11), dont l’image a été évidemment préalablement vérifiée sur un scanner ou une IRM. La confrontation de l’âge avancé du patient et du positionnement qui lui est demandé sur la table de radiologie constitue la principale difficulté de ce geste. 3.2. L’injection zygapophysaire (articulaire postérieure) C2-3
Fig. 9. Technique sécurisée de l’infiltration foraminale cervicale. Opacification du récessus crânial (flèche) de l’articulation zygapophysaire.
Si l’injection précédente n’apporte pas d’amélioration, les anastomoses nerveuses postérieures rendent licite l’injection seconde de l’articulation postérieure C2-3 homolatérale. La position du patient est analogue à la précédente, avec cependant
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« consensus professionnel fort », selon la terminologie administrative. Elles sont une des réponses thérapeutiques à la cervicalgie ou à la cervicoradiculalgie communes, symptômes que leur fréquence fait peser sur l’économie de la santé. Des complications très rares, mais très graves se sont fait jour, notamment au cours des injections foraminales strictes. L’exigence de transparence à l’égard des patients impose une confrontation entre le risque encouru et l’espérance de bénéfice thérapeutique. Pour chiffrer cette dernière, les sociétés savantes concernées doivent obtenir de la tutelle financière la possibilité de mener des études selon les normes scientifiques en vigueur. Notre expérience nous a appris que le caractère subjectif de la douleur, notamment radiculaire, du patient mais aussi de son mode d’évaluation par le clinicien constitue la principale difficulté méthodologique à laquelle est exposé ce projet. Remerciements
Fig. 11. Représentation schématique de la zone de sécurité dans l’abord percutané de l’interligne articulaire atlanto-axoïdien latéral, au regard de la situation de l’artère vertébrale (têtes de flèches).
L’auteur remercie M. Dominique Torreilles, directeur des Éditions Sauramps-médical (Montpellier), qui a autorisé la reproduction de larges extraits et des illustrations de l’article de l’auteur « Injections cortisonées radioguidées des foramens cervicaux comme traitement de la névralgie cervicobrachiale rebelle. Indications, techniques, résultats et complications », publié dans le numéro 9 de la collection Savoir Faire en Radiologie Ostéoarticulaire, (coordonné par J.-D. Larédo et M. Wybier), Sauramps-médical, Montpellier, 2007, pp. 143–50. Références
Fig. 12. Représentation schématique de l’abord percutané de l’interligne zygapophysaire au rachis cervical inférieur. L’aiguille est représentée par la flèche ; elle vise le récessus articulaire caudal (rond noir inférieur).
moins de rigueur dans la délordose cervicale et la possibilité de garder la bouche fermée. Selon un trajet ascendant, l’aiguille vise le pied de l’interligne articulaire (Fig. 12), l’injection des premières gouttes de contraste permettant de silhouetter immédiatement le récessus crânial de l’articulation. La progression de l’aiguille dans un plan parasagittal suffisamment médial est une garantie certaine contre la piqûre de l’artère vertébrale. Quant à la pénétration accidentelle dans le canal médullaire, elle est pratiquement impossible, notamment à ce niveau du rachis cervical. Au rachis cervical inférieur, cette voie intra-articulaire stricte mérite d’être proposée aussi pour le traitement de la névralgie rebelle. 4. Conclusion Les injections cortisonées radioguidées du rachis cervical sont quotidiennement pratiquées en France, sur la base d’un
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