Rev M&d Interne 1998 ; 19 : 535-6 0 Else&r, Paris
kditorial
Int6r6t de l’ikho-doppler
au tours de la maladie de Horton PY Hatron
Service
de mkdecine
inrerne,
h6pital (Rqu
Claude-Huriez,
CHU,
place
de Verdun,
553037 Lille cedex, France
le 7 mai 1998 ; accept6 le 12 mai 1998)
artirite inflammatoire / Horton (maladie de) / vascularites / &ho-doppler giant-cell arteritis / cranial arteritis / vasculitis / color Doppler echocardiography
La maladie de Horton est maintenant pas&e dans le domaine public et n’est plus, B I’Bvidence, le domaine rkservk des intemistes. Ses signes sont bien connus, son traitement est souvent - mais pas toujours - facile et d’efficacitk spectaculaire. Si bien que trbs souvent le mkdecin gbnkraliste, 2 juste titre, en assure aujourd’hui le diagnostic et la prise en charge thkrapeutique. Restent done aux intemistes les cas difficiies tant sur le plan du traitement que du diagnostic : la Ewre ou le syndrome inflammatoire nus, les formes de r&Clation extrackphalique . . . au tours desquels manquent les signes cardinaux de la maladie. N’allons pas alors chercher de l’aide dans les critkes diagnostiques de I’American College of Rheumatology [I] : ils ne servent qu’B distinguer la maladie de Horton des autres vascular&es et reposent sur les manifestations typiques de la maladie. Certes leur sensibilitk est de plus de 90 %, mais l’essentie1 des patients que nous recevons se trouve dans les 10 % restant ! La biopsie d’art&e temporale est bien sQr l’examen clC du diagnostic, toujours indiqde, y compris dans les formes typiques, car la sanction thkrapeutique est telle qu’elle justifie une certitude diagnostique. Cependant, mCme r&alisCe dans des conditions rigoureuses, elle ne montrera les l&ions caract&istiques d’arkite gigantocellulaire que deux fois sur trois. C’est pourquoi le clinicien est toujours 2 la recherche de nouvelles explorations qui perrnettraient d’amkliorer les conditions du diagnostic. La maladie de Horton touche bien sQr l’artkre temporale, mais Cgalement les autres branches de la carotide exteme, les art&es ophtalmiques et, dans 10 % des cas environ, l’aorte et les gros vaisseaux qui en naissent
et singulikrement les art&es sous-clavikres. D&s lors, il ttait logique que l’on s’interessht aux explorations vasculaires : elles furent d’abord invasives et, au tours des an&es 1960-70, plusieurs auteurs eurent recours ti l’artkriographie. L’opacification selective de l’artkre temporale lors de sa dknudation avant l’exQ&se-biopsie Ctait un geste relativement anodin mais qui n’explorait qu’un territoire limit& et de ce fait manquait de spkcificitk et de sensibilitk [2, 31. L’artkriographie de la carotide primitive ou exteme permettait au contraire de visualiser l’ensemble du bouquet ckphalique terminal [4], mais il s’agissait d’un geste beaucoup plus traumatisant, difficilement rdalisable chez une personne agte. Ces explorations n’ont jamais connu de d&eloppement pratique ; elles eurent cependant le m&e de montrer la frequence des st6noses ou des occlusions artk-ielles de ces tenitoires au tours de la maladie de Horton. Ces mCmes renseignements peuvent en fait &tre apport6s de fagon non invasive par l’examen doppler. Dans les annCes 80, plusieurs kquipes, fran$aises pour la plupart, se sont done intCress&es B cette technique dans le cadre du diagnostic de la maladie [5-lo]. Les conclusions de ces Ctudes ttaient unanimes sur la frCquence ClevCe des anomalies vClocimCtriques enregist&es au niveau des art&es temporales B types de stCnose ou d’occlusion. Certains auteurs ont toutefois contest6 la spkcificite de l’examen: p&s de la moitiC des patients prksentant de telles anomalies n’avaient pas de maladie de Horton, la biopsie dkouvrant des l&ions artkrielles purement dCgCn&atives [7]. Dans notre expkrience, qui Ctait quantitativement la plus importante, seuls 20 % des sujets tkmoins avaient un
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doppler temporal pathologique. Aucun d’entre eux n’avait d’occlusion compkte de l’artkre [9], ce qui d’ailleurs Concorde avec les etudes anatomopathologiques qui avaient montrC que, chez le sujet 5gk normal, l’artkre temporale est rarement le sikge de &nose dCgCn&ative [ 111. Cette spCcificitC de l’examen est saris aucun doute amtliorke si l’on ne prend en compte que les anomalies franches de l’enregistrement, et particulibrement si l’examen doppler s’ktend aux art&es axillaires, et surtout aux autres branches de la carotide exteme accessibles au doppler : occipitales, faciales, ainsi qu’aux artkres ophtalmiques [8,9]. C’est en fait la diffusion des l&ions art&ielles au niveau du bouquet ckphalique terminal qui est t&s caractkistique de la maladie de Horton. Cette spkcificitt est d’ailleurs confirmCe par la kgression lente, prenant plusieurs mois, des signes de &nose ou d’occlusion artkielle [9121. L’examen doppler est tgalement utile pour guider la biopsie d’art&-e temporale, bien que leur concordance ne soit pas parfaite [9]. L’intCr&t de l’examen n’est pas seulement diagnostique : l’enregistrement des branches de I’artbre ophtalmique permet d’approcher le risque visuel des patients et done le degrC d’urgence thkrapeutique: nous avons en effet observk une bonne corrklation entre la prksence et la sCv6ritC des anomalies de la vascularisation ophtalmique enregistrCes au niveau de l’art&re nasale inteme et en transoculaire, et la prdsence de troubles visuels [9]. Le doppler simple n’est capable de dkpister que des &noses dkjh serrkes rkduisant de plus de 60 % la lumikre vasculaire. Cela explique saris doute qu’au moins IO % des patients ont un examen doppler normal, et l’on peut imaginer que ces faux nkgatifs concernent des maladies de Horton relativement rkentes, explorkes 2 un stade pr&t&otique. Ce manque de sensibilitk risque d’Ctre amkliork par l’utilisation de l’tkho-doppler couleur : les appareils de nouvelle g&&ration, de haute r&olution, permettent d’examiner des vaisseaux de petit calibre et superficiels comme l’artkre temporale qui se situe 3 ?i 4 mm sow la peau. C’est avec ce type de matCrie1 qu’une Cquipe allemande a dtcrit l’existence d’un halo hypo&hog&e entourant la lumibre vasculaire des art&es temporales des patients atteints de maladie de Horton (131. Pour ces auteurs, ce halo traduit l’cedkme par& tal lik 5 l’inflammation artkrielle. 11 disparait en moyenne 15 jours aprks le dCbut du traitement. Cette image n’est observke que chez 75 % des patients explorks, mais serait beaucoup plus spkcifique que les aspects de stknose ou d’occlusion artkielle, puisqu’elle n’a jamais Ct& observke chez les sujets t6moins ou chez les patients atteints de pseudopolyarthrite rhizomt5lique. Les auteurs sont tellement persuadesde sa spkificiti: qu’ils proposent de se passer de biopsie d’artGre temporale lorsque cette image caractCristique
est constaGe. Ces donnkes mCritent bien entendu d’Ctre confirmkes : en effet, une autre tquipe n’a retrouvC ce halo pkriluminal que chez deux patients sur 11 [ 121, toutefois le nombre de patients explorks est faible, certains d’entre eux Ctaient dkja soustraitemerit, et le matkriel utilise Ctait different. 11est certain que l’inconvknient majeur de l’examen, qu’il s’agisse du doppler simple ou de l’khodoppler, est qu’il est opkateur-dkpendant et, pour ce qui est de l’ktude pa&ale, matCriel-dCpendant.Toutefois, dans des mains expCriment&s, le doppler apporte actuellement une aide prkcieuse au diagnostic de maladie de Horton, mSme s’il est t&s vraisemblable qu’il sera prochainement en compktition avec de nouveaux marqueurs skriques ou cellulaires de l’artkrite inflammatoire [14]. 11est cependant t&s utile, et le restera sansdoute, dans I’apprkciation du risque ophtalmique et done du degrCd’urgence thkrapeutique.
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