Annales de pathologie (2012) 32S, S20—S21
Disponible en ligne sur
www.sciencedirect.com
SYMPOSIUM
La révolution du séquenc ¸age de nouvelle génération夽 The revolution of the new generation sequencing Thierry Frebourg a,∗,b a
Département de génétique, hôpital Charles-Nicolle, CHU de Rouen, 1, rue de Germont, 76031 Rouen cedex, France b Inserm U1079, institut de recherche et d’innovation biomédicale, université de Rouen, Rouen, France Accepté pour publication le 12 septembre 2012 Disponible sur Internet le 12 octobre 2012
Le développement depuis 2009 du séquenc ¸age de nouvelle génération (New Generation Sequencing [NGS]), basé sur des technologies de séquenc ¸age massif, clonal, en parallèle et à haut débit de l’ADN, représente un saut technologique sans précédent en génétique moléculaire puisque cette technologique rend accessible l’intégralité du patrimoine génétique et en particulier l’ensemble des exons ou exome correspondant dans l’espèce humaine à 160 000 exons soit 30 millions de paires de base ou 30 Mb. Dans le domaine de la génétique constitutionnelle, l’analyse des exomes a révélé tout d’abord la variabilité insoupc ¸onnée du génome humain puisque l’exome de chaque individu présente environ 15 000 variations nucléotidiques (Single Nucleotide Variations [SNV]), dont 1500 ne sont pas répertoriées dans les bases de données. Le défi de la génétique moderne n’est donc plus la détection des variations génétiques mais leur interprétation nécessitant dans les laboratoires une expertise bio-informatique devenue incontournable. En l’espace de trois ans, les stratégies d’exomes ont permis de fac ¸on très puissante d’identifier, à partir d’un nombre limité de familles, les bases génétiques de maladies Mendéliennes qui n’étaient pas caractérisées et ont révélé que des présentations sporadiques de phénotypes extrêmes résultaient fréquemment de mutations délétères de novo. L’intégration du NGS dans les laboratoires de génétique médicale est une nécessité impérative pour améliorer le diagnostic et la prise en charge médicale des maladies géniques en réduisant d’une part les délais de rendus de résultats et d’autre part assurer l’analyse de gènes qui à ce jour ne sont pas analysés. L’application diagnostique du NGS en génétique constitutionnelle est basée sur l’analyse par NGS de gènes ciblés en fonction de la maladie considérée. Dans cette stratégie, le NGS s’effectue après la capture ou l’amplification sélective de gènes sélectionnés en fonction du phénotype. Ce NGS ciblé remplacera rapidement le séquenc ¸age de type Sanger, sur lequel le diagnostic moléculaire des maladies génétiques a été basé lors des 20 dernières années. Ce NGS ciblé à visée diagnostique se développe progressivement
夽 ∗
Symposium présenté le lundi 19 novembre 2012 de 14 h 30 à 16 h 30, en salle 101. Département de génétique, hôpital Charles-Nicolle, CHU de Rouen, 1, rue de Germont, 76031 Rouen cedex, France. Adresse e-mail :
[email protected]
0242-6498/$ — see front matter © 2012 Publi´ e par Elsevier Masson SAS. http://dx.doi.org/10.1016/j.annpat.2012.09.194
La révolution du séquenc ¸age de nouvelle génération dans les laboratoires de génétique médicale, ce qui nécessite une réorganisation des laboratoires vu le nombre de prélèvements analysables et la masse de données générées, une formation au NGS des généticiens moléculaires et des techniciens, l’intégration d’une expertise bio-informatique et la mise sur le marché par les sociétés de réactifs dont la qualité est compatible avec une activité diagnostique. Dans le domaine de la génétique somatique, le NGS développé au titre de la recherche permet l’analyse globale du génome tumoral. Les analyses comparatives d’exomes tumoraux et d’exomes constitutionnels réalisées sur des grandes séries de tumeurs, telles les mélanomes, les tumeurs cérébrales, les adénocarcinomes pancréatiques ou les lymphomes ont permis l’identification de mutations récurrentes, d’intérêt nosologique, pronostique ou dans le cadre des thérapeutiques ciblées et a révélé l’hétérogénéité génétique des tumeurs. Le NGS se déploie progressivement dans les laboratoires de génétique somatique des tumeurs. Compte tenu du nombre limité de gènes dont l’analyse médicale a actuellement un intérêt médical démontré dans les tumeurs solides (KRAS, BRAF EGFR, PI3KCA, HER2, ALK, KIT, PDGFRA, HER2. . .), l’apport du NGS dans de tels laboratoires est de réaliser une analyse globale de tous ces gènes sur un grand nombre de patients et de réduire les délais. La sensibilité considérable du NGS, permise par la profondeur de lecture, en fera probablement une méthode
S21 de choix pour la détection de la maladie résiduelle dans les hémopathies et la détection d’ADN tumoral circulant dans le sang, avec pour intérêt la détection de marqueurs de résistance ou de sensibilité aux thérapies ciblées chez le patient métastatique, la détection précoce de mutations secondaires à l’origine d’une résistance aux thérapies ciblées chez les patients traités et le suivi biologique de l’évolutivité de la maladie cancéreuse. Il est probable que le NGS appliquée aux tumeurs bouleversera rapidement l’utilisation des thérapeutiques ciblées actuellement déclinées et évaluées par localisation tumorale. En effet, chez un patient présentant un cancer, l’analyse de l’exome de sa tumeur permettra l’identification de mutations prédictives d’une sensibilité aux thérapies ciblées et il est probable que la détection de telles mutations conduira, dans le futur, à l’utilisation de la thérapie correspondante indépendamment de la localisation tumorale. Ainsi, l’intégration du NGS dans les laboratoires de génétique somatique des tumeurs et d’anatomopathologie devrait permettre le passage de la chimiothérapie globalisée à la chimiothérapie personnalisée.
Déclaration d’intérêts L’auteur n’a pas transmis de déclaration de conflits d’intérêts.