CARREFOUR DES SPECIALITES
Le hoquet chronique j. CABANE*, V. DESMET*, j.Ph. DERENNE**, T. SIMILOWSKI**, S. LAUNOIS**, u, BIZEC***, B. ORCEL **
Resume - Par opposition au hoquet aigu, frequent, de duree limitee et de pronostic benin, Ie hoquet chronique - defini par la poursuite de secousses de hoquet pendant plus de 48 heures - est rare, invalidant et diffidle it traiter. Nous en rapportons 18 cas, recueillis en quatre ans. II s'agit d'adultes d'age souvent avance (moyenne =58,6 ans) qui apres un mode de declenchement variable ont installe un hoquet dont la duree va de 10 jours a30 ans.Les differentes manoeuvres physiques, medications et interventions resophagiennes se sont revelees dans I'ensemble inefficaces. Pourtant, un refluxgastro-resophagien existe des I'apparition du hoquet chronique dans 50 % et apparait secondairement dans 5 % de cas supplementaires, Si les medicaments anti-secretoires gastriques, les pansements gastriques et les prokinetlques ont parfois un certain succes au stade precoce du hoquet chronique assode aun reflux, a un stade ulterieur Ie hoquet semble s'autoperpetuer. De nombreux medicaments neurotropes ont ete proposes (neuroleptiques, antidepresseurs tricycliques, benzodiazepines, anticomitiaux); aucun n'est regulierement efficace. Lebaclofene a donne des resultats interessants (taux de reponse = 60%). L'etude systematique de ces 18 cas selon un plan uniforme montre que Ie hoquet chronique est une entite apart entiere, Ladecouverte d'une etiologie permet parfois un traitement adapte. Mots-des: HOQUET - REFLUX - aSOPHAGITE - DIAPHRAGME - NERF PHRENIQUE.
Rev Med Interne 1992; 13 : 454-459.
Le hoquetest un phenomena moteurcomportant d'abord une brutale contraction des muscles inspiratoires puis une fermeture des voies aeriennes superleures (1). Activite frequente chez l'enfant et connu de tous les sujets normaux, Ie hoquet aigu banal n' entraine qu'une gene passagere,comporte peu de consequences pathologiques et disparait spontanernent en quelques heures. A l'oppose , Ie hoquet chronique, defini comme persistant plus de 48 heures, est un phenornene rare. Ayant ete arnenes en suivre plusieurs cas en rnedecine interne eten pneumologie, nous avons ete frappes par l'infirrnite serieuse que represente Ie hoquet chronique, qui n'a qu'une faible tendance retroceder spontanernent ou sous traitement, et a cependant ete peu etudie jusqu'ici.
a
a
• Service de Medecine Interne IPr j.e. IMBERTJ ; Hopitsl Saint-Antoine ; 184, faubourg Saint-Antoine; 75571 PARISCedex 12. ••Service de Pneumologie IPrj.Ph. DERENNE); Groupe Hospitalier Pitie-Selpetriere ; 47-83, boulevard de l'Hopital ; 75651 PARIS Cedex 13. ••• Service de Pneumologie; Hopita! Saint-joseph lOr l. SAUVAGET}; Rue Pierre Larousse; 75014 PARIS.
Correspondance et tires-a-part : Pr l- CABANE : adresse ci-dessus.
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J. CABANE et coil.
La Iiste importante des maladies pouvant etre associees au hoquet (tableau 1), la possibllite d'etiologies intriquees et la difficulte de gestion de ces malades nous paraissent motiver une mise au point resurnant les causes et consequences du hoquet chronique de I'adulte, partir de notre experience personnelle.
a
MALADES ET METHODES 1) Caracteristlques demograpbiques II s'agit d'une etude prospective de 18 sujets (16 hommes ; 2 femmes) d'age moyen 58,6 ans (extremes 23 et86 ans), dont Ie hoquet a dure en moyenne 51,6 mois (extremes 10 jours et 30 ans). Ces patients ont ete vus soit en consultation soit en hospitalisation, dans Ie service de rnedecine interne de I'H6pital Saint-Antoine et dans Ie service de pneumologie de l'Hopital de la Salpetriere Paris, entre 1988 et 1991. La rnajorite de ces patients nous a ete adressee par les rnedecins traitants la suite d'un travail faisant etat de notre interet pour ce sujet (2).
a
a
Recu Ie 10-1-1992 Renvoi pour correction Ie 25-12-1992 Acceptation definitive Ie 10-&-1992
La Revue de Medecine Interne Novembre
Tableau I:
2) Collection des donnees c1iniques
Maladies ou medicaments associes au hoquet rebelle
Les patients ont fait I'objet d'observations detaillees principalernent axees sur Ie hoquetet les pathologies associees. Constatant la frequencedes anornaliescesophagienneset neurologiques, nous avons etabli un protocole d'examen et d'interrogatoire qui a ete ensuite perfectionne so us forme d'un camet d'observation prograrnmee comportant :
- un questionnaire a remplir par Ie patient sur l'histolre du hoquet et des syrnptornes associes, I' etat actuel du hoquet, des anomalies associees et des traitements pris, l'etat de sante en dehors du hoquet (plaintes.antecedents, mode de vie, facteurs de risque) ; - un canevas d'exarnen somatique minimum pour l'examinateur, comportant huit methodes physiques atester pour tenter de faire disparaitre Ie hoquet s'il est present; - trois examens oesophagiens de base (fibroscopie, rnanomettle et pH rnetrie) ; - un bifan biologique, un cliche pulmonaire standard et un examen ORL; - en annexes sont rappelees les maladies qui ont ete decrites comme pouvant etre associees au hoquet (tableau I) et les manoeuvres dec ritescomme pouvant faire cesser Iehoquet que res malades nous ont colligees dans leurs dossiers (tableau II). .
1) Systeme nerveux central traumatismes craniens
epilepsie tumeurs cerebrales ou rnedullaires accident vasculaire cerebral shunt ventriculoperitoneal
hydrocephalie 2) Maladies toxiques et rnetaboliques hypoventilation per-anesthesie diabete sucre alcool
typhotde abces cerebraux (germes banals, toxoplasmose, ..)
a
corticoTdes forte dose diazepam barbituriques
pericardite, infarctus du myocarde
Un seul patient presentait avant I'apparition du hoquet chronique des episodes brefsde hoquetaigu, banal en apparence,
pneumonie, bronchite, pleuresie pathologie cesophagienne : cancer, oesophagite, obstruction hernie hiatale
Des antecedents d' eructations et de reflux gastro-cesophagien etaientrapportes par 2 malades. Desdouleurs detyperesophagien ont ete frequernrnent notees au debut du hoquet. Un reflux gastro-cesophagien fut decouvert des Ie debut du hoquet dans 10 cas/18 ; dans un cas if ne fut mis en evidence qu'apres un an de hoquet. Lorsque Ie reflux etait modere, il fut en regie aggrave
1992 - Tome Xlll Numero ti
alpharnethyldopa chlordiazepoxide
eventration diaphragmatique stimulateur cardiaque mal place ernphyserne, cancer du pournon, asthme
sarcordose rnediastrnite, tumeur mediastinales traumatisme thoracique
6) Tete et cou pharyngite - laryngite goitre, kyste au tumeur du cou glaucome
irritation du conduit auditif externe hyper-extension (operatoire) du cou ventilation artificielle
7) Abdomen et pelvis
splenomegalie
pancreatite - pseudokyste pancreatique/cancer ou ulcere gastrique, abces intra-abdominal
hepatomegalie -
abces sous-phrenique
hepatite - perihepatite
lithiase vesiculaire Iithiase urinaire
distension gastrique, gastrite
pathologie prostatique
hydronephrose -
anevrysme de l'aorte occlusion intestinale intestinale manipulation per-operatoire du diaphragme ou des visceres
chirurgie urinaire appendicite - hemorragie intestinale infection parasitaire laparotomie - maladie de Crohn
spontanement resolutif.
3) Hoquet chronique et symptomatologie oesophagienne
herpes tuberculose cholera rnenlngite fievre isolee
5) Thorax
1) Mode de declenchement du hoquet chronique
Les antecedents etaient souvent intriques. Les plus frequents sont la bronchopathie chronique obstructive (4/18 patients) et I'insuffisancecoronarienne (5/18). Lesautres antecedents peuvent etre regroupes en plusieurs categories: les pathologies digestives (ulcere : n =3, maladie coeliaque : n = 2) ; les pathologies thoraciques (drains chirurgicaux ou electrodes epicardiques croisant Ie trajet du nerf phrenlque : n = 2, maladie thrombo-embolique : n = 2, suppuration pleuro-pulmonaire : n = 1) ; les pathologies neurologiques (accident ischemique transitoire : n = 1, angiome cerebelleux : n = 1, traumatisme cranien : n =1).
cernle, hypokaliernle hypoglvcemle
4) Medicaments
tumeur diaphragmatique
2) Antecedents
hyperuricernie hvponatrernle, hypocal-
3) Maladies infectieuses paludisme grippe neurosyphilis
RESULTATS Dans 9 cas une circonstances apparemment declenchante a ete retrouvee a l'anamnese, 11 s'agit soit d'un acte chirurgical (drainage d'une contusion hepatique, pontage coronarien), soit d'un episode infectieux broncho-pulmonaire. Des cas isoles de polytraumatisme, de choc psychologique, de zona du pneurnogastrique sont egalernent retrouves.
syrlngomyelie sclerose en plaques syndrome de Wallenberg Iymphome cerebral hernorragie meningee, craniotornle
8) Causes psychologiques hysterie, anorexie mentale, enuresie troubles de la personna lite
choc psychologique simulation
Le hoquet chronique
455
Tableau II :
Manreuvres decrltes comme susceptibles de faire passer Ie hoquet 1)
Les methodes de base:
-
mellre une compresse seche sur la langue, pr endre la po inte de la lan gue entre Ie pouce etl'index et tirer energiquement (manoeuvre
-
tirer de facon rythmique sur la langue pendant deu x minutes masser avec un ecouvillon ou un coton-tige Ie palais sur la Iigne rnedlane toucher Ie fond de la gorge avec un objet long introduit par Ie nez (Salem) , toucher Ie fond de fa gorge avec un ob j et lon g (abai sse-Iangue, rnanche de culllere, bout de bo is ou de pla stique, .,.) introduit par la bouche avaler un e cuillere soupe de sucre crlstallise avaler un sucre imbibe de vinaigre ou d'huile de cajou aval er un e rasade de vinaigre, d'angostura, pipermint, de jus de citron, de la glace pllee, du bicarbonate de sodium, ren ifler de l'ether, de I'ammoniaque mettre une plncee de sel sur la base de fa langue siroter de I'eau glacee ou brGlante comprimer Ie nerf phrenique au cou d'un cote puis de l'autre (1 minute de'chaque) ou au bord superieur de la c1avicule respirer dans un sac plastique assez grand pendant deux minutes (ou reventiler dans un ballon contenant de l'oxygene pendant cinq minutes) arret er de respirer Ie plus longtemps possible boire un verre d'eau par Ie cot e oppose sol-merne respirer toute vitesse Ie plus longtemps possible souffler dans une bouteil/e avoir une frayeur soudaine bo ire beaucoup d'eau sans respirer eternuer, eventuellementen effl eurant les narines avec une plume pousser comme pour aller fa selle insp irer un grand coup et retenir sa respiration poitrine gonflee pr esser fort ement la -5eme vertebre cervicale (au milieu de la nuque) com primer fes yeux fermes pendant qu elques minutes comprimer Ie cartilage thyrotde (pomme d'Adam) masser Ie sinus carotidien (de chaque cote de la pomme d 'Adam) en posit ion assise, lever la tete Ie plus possible et tenir la position rnettre un glacon sur Ie creux de I'estomac (epigastre) appliquer un emplatre de moutarde (slnaplsrne) sur Ie creux de
d'O sler)
-
-
-
a
a
a
a
l'estornac -
-
appuyer Ie genou sur la poitrine presser doucement quelques minutes sur res dernleres cotes, des deux cotes appliquer un doigt dans chaque oreille rnettre une vessie d e glace sur Ie cou pr endre un bain tres chaud faire les pi eds au mur, fe poirier faire comprimer les deu x arteres radiales aux po ignets pendant deux fois la periode separant les hoquets, en fi xant Ie regard de l'operateur faire des prieres se faire proposer de l'argent com prim er fortemen t les yeux ferrnes pendant au moins trois minutes
2) Les methodes non conselllees :
-
massage ou dilatation anale ou rectale massage (apr es auscultation) des deu x carot ides au cou ou des deux glomus
456
J. CABANE et call.
par les periodes de hoquet. Chez un patient (cas n07, voir ci. dessous), la fibroscopie cesophagienne, pratiquee des Ie premier mois de hoquet, permit d 'observer sur la biopsie un aspect de rnetaplasie gastrique. Cet aspect d'endo-brachycesophage a per. siste malgre un traitementanti-refluxet a conduit a une intervention de Nissen (qui a ameliore Ie reflux mais n'a pas abo Ii Ie hoquet), Un patient avait un mega-cesophage sur stenose dent la dilatation a arneliore Ie hoquet. Une dyskinesie a ete objectlvee par I'opacification barytes au la rnanornetrie chez 5 malades. L'aspect etalten regle celui d'une hypotonie du sphincter inferieur de l'oesophage associee a un ralentissement de la vidange gastrique. Un patient a rejete au cours dessecousses de hoquet laso nde cesophagienne, ernpecharu tout enregistrement. Au total, 12 patients avaient un hoquet associe a une pathologie oesophagienne. L'cesophagite a ete arnelioree dans tous les cas par Ie traitement medical ou chirurgical. Le premier stade de traitement medical a consiste en I'association d'antiacides seuls ou couples a de I'alginate et des antagonistes des recepteurs H2. Lesecond stade a faitappel a I'orneprazole. Le reflux a beneflcie d'une intervention de Nissen dans deu x cas. Un mega-cesophags a beneficie d'une dilatation prudente du bas-cesophage stenose avec un bon resultat, Par contre Ie pronostic du hoquet est nettement moins favorable avec un taux de remission complete de 2/12 . La persistance du hoquet a condu it a I'emploi d'autres traitements (prokinetiques, neuroleptiques, anticomitiaux, tricycliques , myorelaxants). L'effettherapeutique n'a ete que transitoire. 4) Imagerie L'imagerie radiologique a fourni peu de renseignements : les radiographies thoraciques ont rnontre dans 2 cas des images pleurales sequellaires non speclflques - 8 patients ont eu un scanner thoracique ou abdominal et 2 une echographie abdominale; la seule anomalie decouvertea ete une rnediastinlte local isee au trajetd'electrodes epicardiques chez un pat ient coronarien convalescent d'un pontage; - 7 imageries cerebrates ont ete faites (TOM et/ou IRM), aboutissant a un diagnostic d'angiome cerebelleux calcifle, un cas d'hypodensite du tronc cerebral eta un cas d'hypodensites cerebrales et du tronc compatibles avec des embolies graisseuses apres polyfractures. -
5) Diagnostic etiologique final Bien qu'il s'agisse souvent de patients ages dont la polypathologie est frequente, no us avons tente d'aboutir dans chaque cas a un diagnostic synthetique perrnettant de c1asser Ie hoquet chronique; Jes resultats figurent au tableau III. Dix malades ont une pathologie oesophaglenne associee au hoquet, generalernent un reflux gastro-oesophagien. Dans 3 observations, nous avons pu documenter I'aggravation de ce reflux par Ie hoquet lul-meme, Ce cercle vicieux nous avait ete suggere par plusieurs autres malades qui ont rapporte des regurgitations et des pyrosis apparus secondairement en periode de hoquet. Deux patients avaient une cause intrathoracique postop eratoire (drain ou electrode au voisinage du trajet du nerf phrenique), 2 avaient un hoquet man ifestement psychogene
La Revue de Medecine Interne Novembre
a
associe d'autres somatlsations, et 3 avaient des pathologies du tronc cerebral (zona du X, angiome cerebelleux, embolie graisseuse). Chaque patient arecu un traitement aussi adapte que possible au diagnostic: neurotrope, prokinetique gastrique, antisecretoire gastrique, etc. ..
a
Les resultats des traitements sont rapportes la figure I qui regroupe les 16 patients pour lesquels des donnees precises sur l'evolution sont disponibles. HOQUET CHRONIQUE· EVOLUTIONA LONG TERME CHEZ 16 CAS
cas
~C
Chez les patients conservant un hoquet rnalgre fa correction de l'anomalie causa le, des medicaments neurotropes ont parfois ete tentes (anticomitiaux ou baclofene par exemple).
.-A' C
,..C
C C RP C
Tableau III : Diagnostics etiologiques et traitements dans 18 cas de hoquet chronique (plus de 48 heuresde hoquet rebelle)
CasN° Age
Diagnostic
Traitement
R C
R RP R
Evolution
~R ~R
i-R
1
30 Irritation diaphragmatique par un drain hepatique
-
R
2
69 Irritation phrenique G par mediastinite localisee sur electrodes epicardiques
C+ antibiotiques
R
78 Hernie hiatale aggravee par Ie reflux
PK
E
4
47 Reflux apres repas abondant + procubitus
APMK
R
5
41 Oesophagite par reflux
chirurgie +MN
E
6
79 Zona du pneumogastrique puis reflux
M
RP
7
82 Reflux gastro
APMK
E
PIMC
RP
DPA+ sevrage
E
86 Oesophagite par reflux
9
55 Oesophagite par reflux + alcoolisme
10
30 Oesophagite
PK
R
11
78 Ulcere gastrique puis hoquet auto-entretenu
D
R
12
78 Stenose du baseesophage
PKdilatation
RP
13
18
20
24
30
36 48 68
J--tJ--{~ mois 80
96
360
R - remission complete (spontanee ou therapeutique) RP = remission partielle . C = chrcnicite, perslstance du hoquet lnchanqe malgre les traitements
6) Psychologie du hoquet chronique A la difference du hoquet aigu qui fait sourire, Ie hoquet chronique a des consequences psychologiques en regie serieuses, parfois severes, Les hoquets psychogenes sont par-centre un moyen d'obtenir des benefices secondaires. Dans notre serle, 2 cas ont fait I'objet d'un diagnostic d'hysterie, Ie psychiatre considerant Ie hoquet comme un syrnptome de conversion. Parmi les 16 autres cas de la serie, 15 disaient etre serieusernent genes par Ie hoquet dont 2 ont souffert d'episodes depressifs francs reactionnels celui-ci. Au cours de l'un d'entre eux, un malade a tente de se pendre. Le hoquet n'a pas ete influence par Ie traumatisme cervical correspondant. Le traitement antidepresseur a ete peu efficace.
a
7) Manoeuvres utllisees
13
51 Reflux
14
71 Reflux par surpoids + alcoolisme
15
35 Psychogene
B
R
16
61 Hysterie
D
R
17
68 Tumeur de la fosse posterieure (angiome ?)
C
RP
18
23 Embolie graisseuse du tronc cerebral
N
R
PM
RP
P regime sevrage
RP
Traitements : A = antlsecretoires ; B = benzodiazepines ; C = anticomitiaux; D = antldepresseurs: T=tricycliques; K= proklnetiques ; M = myorelaxants ; N = neuroleptiques ; I = inhibiteurs calciques ; P = pansements digestifs Evolution: R = remission complete: disparition de longue duree du hoquet ; RP = remission partielle : reapparition ou persistance du hoquet a une frequence netternentinferieure ; E= echec : persistance (le plus souventintermillente) du hoquet aune frequence comparable
1992 - TomeX11l Numero ti
6
Figure I: Evolution de 16 cas de hoquet chronique suivis regulierement
3
8
0,5 1 2
Parmi les nombreuses manoeuvres decrites pour faire cesser Ie hoquet aigu (tableau II), peu sont efficaces au cours du hoquet chronique. Nos patients, questionnes sur ce sujet, ont souvent fourni des listes de « trues» inefficaces et quelques manoeuvres physiques simples qu'ils utilisaient pour attenuer leur maladie. Quatre utilisaient la stimulation pharyngee par voie buccale avec un objet long (abaisse-langue, sonde d'aspiration, manche de cuillere, etc..) allant parfois jusqu'au vomissement et ayant provoque chez l'un une plaie du pharynx; trois la traction en avant de la langue (manoeuvre d'Osler), deux la compression des phreniques au cou, un la compression des carotides, un s'exposait torse nu au froid, trois avalaient du sucre cristallise avec ou sans vinaigre, citronnelle ou yin rose. Un malade se mettait en apnee et faisait un appui vigoureux sur l'epigastre avec Ie poing, un malade se faisait peur (explosion de petard proche de ses pieds).•
8) Traitement et evolution (figure 1) Les 2 hoquets psychogenes et les 2 hoquets post-operatoires (drainage de plaie du foie et mediastinite sur electrodes
Le hoquet chronique
457
epicardiques) ont disparu progressivement. II en fut de rnerne du hoquet associe a une embolie graisseuse cerebrale (chez ce dernier patient, un grain de ble coince dans Ie conduit auditif externe, cause supplernentaire possible du hoquet, a ete extra it). Un des hoquets psychogenes a fait place ades cenestopathies thoraciques aberrantes.. Deux patients ont ete perdus de vue.
9) Blocages respiratoires Trois patients ont decrlt l'apparition, au cours du hoquet, de « spasmes respiratoires» reallsant de veritables apnees involontaires, survenant a unefrequence allantd'un toutes lessemaines a un par mois et se reproduisant regulierernent depuis plusieurs mois voire annees de hoquet. Ces periodes de blocages sont survenues en inspiration forcee maximale chez 2 sujets,et en expiration chez un sujet.
Observations
benzodiazepines, antidepresseurs tricycliques, myorelaxants, carbarnazepine, nifedipine, orneprazole etaient des echecs.
DISCUSSION Le hoquet chronique est une maladie rare et donc mal connue. Labibliographie ace sujetest lirnltee (1,2). On nedispose que d'une etude physiologique portant sur 3 cas (5) et d'aucun essai pharmacologique controle. Ce vide nous a amene a fonder un groupe d'etude dont I'objectif est de promouvoir des etudes scientifiques sur Ie hoquet chronique de I'adulte. Nos 18 patients avaient de nombreuses pathologies, souvent associees, Cependant I'atteinte de I'oesophage paralt largement predominante, avec un role declenchant possible du hoquet par Ie reflux gastro-oesophagien, suggere par plusieurs observations. Cependant, dans plusieurs cas, Ie hoquet « per se » semble aussi provoquer une dyskinesie oesophagienne favorisant Ie reflux. On peut ainsi envisager un cercle vicieux OU Ie hoquet, quelle qu'en soit la cause, pourrait provoquer une oesophagite par reflux et s'auto-perpetuer.
Nous rapportons ci-dessous deux exemples-types de hoquet chronique, I'un resolutif et l'autre rebelle. 1)Casn04: Un homme de 47 ans aux antecedents de pericardite et de colique nephretique, consulta pour un hoquetapparu brutalement apres un repas abondantetepice suivi d'un anteflexion prononcee du tronc pour ramasser un objet a terre. Les secousses de ce hoquet etaient d'ernblee vives, frequentes (60 par minute) et douloureuses avec une gene importante pour fadeglutition et une douleur retrosternale intense qui fit craindre une dissection aortique. Le rnediastin etait normal en TDM eten fibroscopie etait notee une cesophagite grade III. Le traitement par orneprazole, alginate, domperidone et baclofene permit de faire dlsparattre Ie hoquet au 1o~me jour d'evolution. 2) Cas n07 : Un hom me de 41 ans, cadre superieur, sans antecedent, souffrait en Aout 1990 d'une pleuro-pneumopathie infectieuse de la base droite associee a une sinusite. Le hoquet durait alors jour et nuit et resistait au traitement antibiotique associe au metocloprarnlde. /I n'etait que transitoirement diminue par chlorpromazine associe au metocloprarnlde. La perte de poids etalt de15 kilos. La fibroscopie decouvrait un endobrachycesophage dQ a un reflux gastro-oesophagien sur hernie hiatale parglissement. LesTDM cerebral, thoraciqueetabdominal etaient normaux. Ranitidine et alginate etant sans effet, Ie patient recevait de nombreuses drogues neurotropes pour autoriser Ie sommeil. Progressivement Ie patient apprenait a connaitre son hoquetqui avait une certaine periodicite: lessecousses survenaient a une frequence de lOa 30 par minute pendant 1 jour ou 2, cessaient durant Ie sommeil avec des remissions de 1 a 3 jours. Toutefois aplusieurs reprises, Iepatient a passe des nuitsd'insomnie rnalgre la prise de somniferes: la survenue d'une crise de pleurs au petit matin stoppait Ie hoquet. Depuis les 3 derniers mois il decrivait des episodes .de blocage respiratoire angoissants compares a un « hoquet qui ne veut pas redescendre », avec impression de mort imminente et difficultes de ventilation. Une intervention de Nissen arneliorant I'oesophagite, n'influencait pas Ie hoquet. Des essais therapeutiques avec amitryptiline,
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Parmi nos malades (figure 1) Ie taux de remission est d'autant plus eleve que la duree du hoquet est breve et inversement. Audela d'un mois d'evolution, les hoquets chroniques regressent rarement. Ceci pourrait expl iquer au moins en partie lesdifferences qui existent (et qui sont bien demontrees par les deux cas c1iniques rapportes ici en detail) entre les hoquets subaigus, qui representent la prolongation d'un hoquet aigu entre 2 [ours et un mois, et dont Ietraitementde la cause permeten regie la guerison, et les hoquets chroniques ou aucun traitement n'est efficace, rneme pas ceJui de fa cause initiale. Tres peu de grandes series ont ete publiees (3,4) sur Ie hoquet. Laserie de 220 cas vus a la c1inique Mayo de 1935 a 1963 (3) rassemble 39 femmes relativement jeunes dont 36 ont un hoquet dit psychogene et 181 hommes plus ages, dont 40 en periode post-operatolre, 33 avec des hernies hiatales, 44 avec des problernes arteriels coronariens ou cerebraux et 11atteints de « desequllibres rnetaboliques » (diabete, urernie, alcoolisme, ..). Cette repartition, differente de celie de nos patients, rEifiete une experience heterogene rnais met, com me dans notre serie, I'accent sur Iecaractere multifactoriel de I'etiologie des hoquets chroniques: 61 % des patients du groupe des hoquets de cause medicate ont plus d'un diagnostic. Laserie de 50 cas (46 hommes, 4 femmes) rapportee en 1955 par Friedgood et Ripstein (4) traite essentiellement de I'effet de la chlorpromazine (50 mg IV). Elle ne donne que peu de details serniologiques ; la rnoitie des patients (54%) souffrait de hoquet post-operatoire et 22% venaient de presenter un infarctus myocardique.
EN CONCLUSION Le hoquet subaigu (moins d'un mois) est adifferencler du hoquet chronique (plus d'un rnois) ; en effet, plus Ie hoquet dure et moins il a tendance a la remission. Lehoquet subaigu du a une cause rnedicale claire, autrement dit Ie hoquet-symptorne est adifferencler du hoquet-maladie qui, rnerne si on lui entrevoit une ou des causes possibles ayant pu servir de «starter», s'est auto-perennise et ne retrocedera pas apres la correction radicale de sa cause.
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which in turn leads to gastro-esophageal reflux. The treatment was difficult and whenever possible has been directed chiefly towards the cause. However hiccup remained intractable in many cases even after a possible cause had been adequately cured (e.g., successful Nissen procedure in reflux cases). Central nervous system depressants and myorelaxing drugs were not very helpful, except for baclofen (initial response rate ::: 60 %).
Tout hoquet chronique do it beneficler d'une exploration oesophagienne, compte tenu de la frequence elevee des anomalies et des possibilites therapeutiques qui en decoulent. Summary -
Intractable hiccup.
We report 18 cases of chronic hiccup (defined as lasting for more than 48 hours) in adults. Among the numerous possible causes, reflux esophagitis proved to be by far the most frequent (50 % of the cases). However, hiccup often initiated a self-perpetuating vicious circle. This is possibly because hiccup .per se can give esophageal dyskinesia,
Key words: HICCUP - REFLUX - ESOPHAGITIS DIAPHRAGM - PHRENIC NERVE.
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