Progression de la rétinopathie diabétique au cours de la grossesse

Progression de la rétinopathie diabétique au cours de la grossesse

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Dossier thématique Diabète et grossesse

Progression de la rétinopathie diabétique au cours de la grossesse Progression of diabetic retinopathy during pregnancy

K. Averous

Résumé

Ophtalmologie, Clinique Mutualiste Arnaud-Duben, Pessac.

Les modifications hormonales et vasculaires induites par la grossesse ont un impact sur l’oeil. La rétinopathie diabétique (RD) est l’une des pathologies susceptible d’être influencée par la grossesse. Les facteurs connus de progression de la RD pendant la grossesse sont la non-programmation de la grossesse, le stade de la RD, la durée du diabète, le mauvais contrôle glycémique et sa rééquilibration rapide, ainsi que l’hypertension artérielle. La surveillance ophtalmologique doit donc être adaptée durant cette période à risque, et s’inscrire dans une prise en charge globale et pluridisciplinaire de la femme enceinte diabétique.

Mots-clés : Rétinopathie diabétique – grossesse – prise en charge –  programmation de la grossesse. Summary Hormonal and cardiocirculatory modifications during pregnancy cause changes in eye. Diabetic retinopathy (DR) is one of the conditions influenced by pregnancy. Risk factors for DR progression are absence of pregnancy programming, initial stage of DR, diabetes duration, poor glycemic control, rapid correction of glycemic control and hypertension. A multidisciplinary medical management including ophthalmologic follow-up can minimize the risk of DR impairment during pregnancy.

Key-words: Diabetic retinopathy – pregnancy – management –  pregnancy programming.

Introduction

Correspondance : Kristel Averous Clinique Mutualiste Arnaud-Duben 54, av. du Docteur Albert-Schweitzer 33600 Pessac kaverous [email protected] © 2012 - Elsevier Masson SAS - Tous droits réservés.

Les progrès de la médecine ont rendu possible la grossesse chez les femmes diabétiques présentant des complications ophtalmologiques. Mais, il y a encore 40  ans, l‘existence d’une rétinopathie diabétique (RD), ou son apparition en cours de grossesse, contre-indiquait cette dernière, ou était une cause d’interruption médicale de grossesse. • La grossesse reste une période à risque chez les femmes diabétiques, avec des impacts potentiels négatifs du diabète sur la grossesse et de la gros-

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sesse sur le diabète  [1]. Les femmes diabétiques sont plus susceptibles de présenter des grossesses dites « à risques » et de développer des complications (Odds ratio, OR : 2,6) [1]. Ces complications peuvent être classées en trois catégories : – métaboliques : déséquilibre du diabète, hypoglycémie, acidocétose ; – microvasculaires : rétinopathie diabétique, néphropathie, gastroparésie… ; – macrovasculaires, dont la plus importante est la coronaropathie. • L’ophtalmologiste s’attachera à dépister la progression de la RD. Cette dernière étant corrélée au risque de

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Dossier thématique Diabète et grossesse morbi-mortalité maternelle et fœtal  ; l’ophtalmologiste doit s’intégrer dans une prise en charge multidisciplinaire de la femme enceinte diabétique, et doit travailler en étroite collaboration avec l’endocrinologue et l’obstétricien.

Épidémiologie • Classiquement, les femmes enceintes diabétiques étaient principalement atteintes de diabète de type 1 (DT1). Ces dernières années, le nombre de femmes enceintes atteintes d’un diabète de type 2 (DT2) a constamment progressé  [2], jusqu’à avoisiner 30 à 50 % des grossesses chez les diabétiques, selon les séries [3]. Ces populations sont différentes et, si souvent les femmes DT2 ont une durée d’évolution du diabète moindre, elles sont également souvent plus âgées, obèses et hypertendues. Les données épidémiologiques concernant ces populations de femmes DT2 sont encore peu nombreuses. • Entre les âges de 20 et 30 ans, la RD touche 20 à 27 % des femmes DT1 et

environ 18 à 28 % des femmes DT2. Les taux de progression de la RD varient entre 16 et 85  %, et sont estimées à environ 25 % pour les études les plus récentes [4] (tableau I [4-12]). Les taux de progression semblent moindres au sein de la population des femmes DT2, situés autour de 14 % [3], mais il s’agit de petites cohortes, et ces résultats doivent être confirmés par des études à plus grande échelle. • Le risque d’aggravation de la RD en cours de grossesse est maximal au cours du 2e trimestre, avec une amélioration possible en post-partum. Certaines études retrouvent même un risque d’aggravation persistant dans l’année qui suit la grossesse, avec toujours une possibilité d’amélioration passée cette période. Cette amélioration est le plus souvent partielle, et survient entre 3 et 12 mois en post-partum. L’amélioration est également la règle pour l’oedème maculaire. Enfin, la régression partielle ou totale d’une RD proliférante est possible, bien qu’exceptionnelle. • Le diabète gestationnel, pour sa part, ne justifie pas une surveillance ophtalmologique particulière.

Tableau I : Taux de progression de la rétinopathie diabétique (RD) durant la grossesse, selon diverses études. Étude

Année de publication

Nombre de grossesses

Taux de progression de la RD

Taux de progression vers une RDP

Horvat et al. [5]

1980

172

23,2 %

6%

Monoley et al. [6]

1982

53

22,6 %

7,5 %

Phelps et al. [7]

1986

38

55,2 %

18,4 %

DIEP Study [4]

1995

140

24,2 %

7%

Axer-Siegel et al. [8]

1996

70

77,5 %

22,5 %

DCCT [9] Groupe traitement conventionnel

2000

135

31 %

5 %

DCCT [9] Groupe traitement intensif

2000

135

51 %

0 %

Temple et al. [10]

2001

179

5%

2,2 %

Loukovaara et al. [11]

2003

69

31,8 %

8,6 %

Kaaja et al. [12]

2005

39

36 %

10 %

Facteurs de risque de progression de la rétinopathie diabétique Ancienneté du diabète • L’existence et la sévérité de la RD sont directement liées à la durée d’évolution du diabète chez les femmes non enceintes. Les études retrouvent, globalement, une corrélation entre durée d’évolution du diabète avant la grossesse et risque de progression de la RD. La Diabetes In Early Pregnancy (DIEP) Study  [4] a montré que l’ancienneté du diabète n’était pas, en soi, un facteur de risque, mais que s’il y avait progression de la RD préexistante, celle-ci serait d’autant plus grave que le diabète est ancien et la RD sévère. Ainsi, le taux d’aggravation d’un stade ou plus chez les patientes ayant une RD modérée ou plus sévère est de 55 % lorsque la durée du diabète est  ≤  15  ans, et de 50  % si la durée du diabète est > 15 ans. Par contre, si l’on examine les patientes ayant développé une RD proliférante, le risque d’aggravation est de 39 % tous stades confondus en cas de durée de diabète > 15 ans, versus 18 % si la durée de la maladie diabétique est ≤ 15 ans. • Les populations de femmes DT2 ont souvent une durée d’évolution du diabète moindre lors de leur grossesse que les femmes DT1, ce qui pourrait expliquer les taux de progressions inférieurs observés chez les femmes DT2.

Sévérité de la RD initiale Le risque d’évolution est d’autant plus élevé que la RD initiale est sévère. De 5 % en l’absence de RD ou en cas de RD minime, il passe à 29 % en cas de RD modérée à sévère. Le risque d’apparition d’une néovascularisation est de 60 à 70 % en cas de RD non proliférante sévère en début de grossesse.

Niveau de contrôle du diabète et équilibration rapide

RDP : rétinopathie diabétique proliférante ; DIEP : Diabetes in early pregnancy study ; DCCT : Diabetes control and complications trial.

• L’aggravation transitoire de la RD en cas de normalisation trop brutale de la glycémie est connue chez le sujet diabétique, de façon générale. La planification de la grossesse est donc capitale, le but

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étant d’atteindre un équilibre glycémique satisfaisant avant la conception. • Si la grossesse n’a pas été planifiée, l’équilibration du diabète doit être obtenu le plus progressivement possible, et s’effectuer sous strict contrôle ophtalmologique. L’étude DIEP [4], démontre clairement que les patientes ayant des taux d’HbA1c élevés, et par conséquent une régularisation rapide de ces taux dans les 14 premières semaines de grossesse, ont nettement plus de risques de voir s’aggraver leur RD. • Dans l’essai Diabetes Control and Complications Trial (DCCT), conduit chez des patients DT1, le taux d’aggravation de la RD était moins important chez les patientes du groupe conventionnel dont la grossesse avait été programmée, comparé à celui des femmes du même groupe sans programmation de la grossesse (OR de 0,9 versus 2,1 en cas de non-programmation) [9].

Grossesse La grossesse, en elle-même, a été identifiée comme un facteur de risque indépendant de progression de la RD, avec un OR variant de 1,6 à 2,5, selon les études [9]. Son influence pourrait perdurer jusqu’à 6 mois, voire 1 an, en post-partum. Sur le long terme, la grossesse n’a pas d’influence sur la progression de la RD.

Hypertension artérielle L’hypertension artérielle (HTA) diastolique est un facteur de risque indépendant d’aggravation de la RD au cours de la grossesse. • Rosenn et al. ont suivi 154  femmes diabétiques de type 1 pendant leur grossesse ; un tiers de ces femmes présentaient une HTA ; 55 % des femmes hypertendues ont aggravé leur RD pendant la grossesse, versus seulement 25 % chez les femmes normotendues [13]. • Axer-Siegel et al. [8] observent, dans leur étude, une corrélation significative entre les chiffres de pression artérielle systolique élevés et le taux d’aggravation de la RD. Quoi qu’il en soit, l’existence d’une HTA antérieure à la grossesse doit alerter le clinicien et ce, d’autant plus, que les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC), utilisés en première intention chez les diabétiques (en raison de leurs effets

positifs sur l’évolution de la néphropathie diabétique), sont contre-indiqués pendant la grossesse. Ce facteur de risque va, certainement, compter de plus en plus dans les années à venir, car les femmes DT2 sont plus souvent hypertendues avant leur grossesse, et plus à risque de présenter des HTA gravidiques, voire des éclampsies durant celle-ci.

Non-programmation de la grossesse L’absence de programmation de la grossesse ne ressort pas clairement comme un facteur de risque indépendant de progression de la RD en cours de grossesse. Néanmoins, l’importance de cette programmation est capitale : – d’une part, pour sensibiliser les patientes aux risques potentiels ophtalmologiques et extra-ophtalmologiques de la grossesse ; – d’autre part, pour insister sur la nécessité d’un suivi accru et adapté lors de cette période. Les causes de non-programmation sont : – un niveau socioéconomique bas ; – la monoparentalité, ou les dissentions dans le couple ; – les mauvais rapports patient-médecin. Malheureusement, ces facteurs de risques sont souvent présents dans les populations de femmes DT2, qui sont donc plus exposées à la non-programmation et à un plus mauvais suivi ophtalmologique pendant leur grossesse. En moyenne, 20  % des femmes DT2 bénéficient réellement d’une planification, versus 40,5 % des femmes DT1. Dans une étude danoise récente, alors que la prévalence de la RD était évaluée à 18 %, seules 60 % des femmes DT2 de la cohorte avaient bénéficié d’un suivi ophtalmologique adapté [3] (tableau II).

Tableau II : Facteurs de risque de progression de la rétinopathie diabétique (RD) pendant la grossesse [d’après 3]. – Ancienneté du diabète. – Sévérité initiale de la RD. – Taux d’HbA1c initial ; rapidité et amplitude de la chute glycémique en début de grossesse. – Hypertension artérielle ; éclampsie.

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Physiopathologie La grossesse, chez une femme non diabétique, s’accompagne de modifications métaboliques et hormonales dans le but de stocker des lipides et du glycogène en première partie de grossesse (anabolisme facilité). Ces substrats seront réutilisés ensuite par le foetus (catabolisme privilégié).

Modifications métaboliques chez la femme enceinte diabétique Chez la femme enceinte diabétique, il existe une grande instabilité glycémique, avec un risque important d’acidocétose pendant le 3e trimestre ; cette instabilité est encore plus grande lors de l’accouchement. Les besoins en insuline chutent brutalement, de près de 30  %, lors de la délivrance, exposant la mère à de graves risques d’hypoglycémie. Des modifications hémodynamiques découlent également de l’état gravide. Bien que le mécanisme exact de l’aggravation de la RD ne soit pas encore totalement élucidé, deux théories coexistent : – la théorie métabolique ; – la théorie vasculaire.

Théorie métabolique De nombreuses hormones sont sécrétées par le placenta et la mère, tout au long de la grossesse. Ces hormones peuvent avoir un effet direct sur la progression de la RD en agissant comme des facteurs de croissance. Au cours de la grossesse, l’hormone de croissance est progressivement remplacée par l’hormone de croissance placentaire. Or, l’hormone de croissance hypophysaire et l’hormone de croissance placentaire agissent principalement via l’insulin-like growth factor-1 (IGF-1). Chez les patients diabétiques avec une RD proliférante, les taux intra-vitréens d’IGF-1 sont très élevés. L’IGF-1 agit, tel un facteur de croissance, sur de nombreux organes et, notamment, sur le foetus lors de la grossesse. L’interaction entre l’IGF-1 et le vascular endothelial growth factor (VEGF) dans l’apparition d’une RD est très fortement

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Dossier thématique Diabète et grossesse suspectée [14], et de mieux en mieux connue grâce aux travaux expérimentaux chez l’animal. L’IGF-1 aurait un rôle direct de régulation, à la fois de la production, mais également de l’action du VEGF. Cette interaction permet de mieux comprendre les mécanismes conduisant à l’aggravation de la RD lors d’une rééquilibration glycémique rapide. Chez le sujet diabétique mal équilibré, l’hypoxie stimule la production de VEGF, mais les taux d’IGF-1 sont bas (conséquence de la résistance à l’hormone de croissance). Les taux bas d’IGF-1 diminuent l’effet du VEGF. Lors de la rééquilibration glycémique rapide par insuline, les taux d’IGF-1 augmentent et stimulent l’effet du VEGF sur les cellules endothéliales et sur la néovascularisation. Sur le long terme, le bon équilibre glycémique permet une quasi-normalisation des taux de VEGF et d’IGF-1, et donc, un meilleur contrôle de la RD. Chez les femmes dont la RD progresse en cours de grossesse, les taux d’IGF-1 sont significativement plus élevés que chez les femmes dont la RD reste stable. Les taux d’IGF-1 vitréens évoluant de façon parallèle aux taux sanguins [15]. Cependant, aucune étude sur la variation des taux du VEGF en cours de grossesse n’est disponible, car l’affinité du VEGF pour son récepteur est très augmentée en cours de la grossesse.

Théorie vasculaire Lors de la grossesse, le débit cardiaque augmente, le volume sanguin total augmente et les résistances périphériques diminuent. L’augmentation de la vélocité dans les capillaires rétiniens pourrait donc augmenter le stress de cisaillement endothélial et, initier ainsi l’aggravation de la RD. L’impact de ces modifications rhéologiques sur la RD a été étudié par différents auteurs [16-18], et suggèrent que l’augmentation du flux circulatoire dû à la grossesse induit une constriction vasculaire (autorégulation) chez les femmes enceintes non diabétiques. Chez les femmes enceintes diabétiques, cette autorégulation est altérée ou absente. Il est, par contre, difficile de conclure si la perte de l’autorégulation microvasculaire est une conséquence de la RD, ou bien le primum movens de son aggravation au cours de la grossesse.

Conduite à tenir Équilibre glycémique L’American Diabetes Association (ADA)  [19] et la Société francophone du diabète (SFD, anciennement Alfediam)  [20], rappellent que seul un programme de soins préconceptionnels garantit la diminution des risques materno-fœtaux inhérents à la grossesse chez la femme diabétique. Le but est d’obtenir un taux d’hémoglobine glyquée (HbA1c) le plus bas possible avant la grossesse. Des études épidémiologiques ont prouvé que, pour des taux d’HbA1c jusqu’à 1 % supérieur aux valeurs normales, les risques de malformations et d’avortements spontanés sont comparables à ceux de la population générale [21-23]. Il n’y a pas, cependant, de valeur seuil, et plus les taux d’HbA1c sont bas, plus les risques de complication diminuent. Le taux d’HbA1c optimal est donc le plus bas possible, en tenant compte des risques d’hypoglycémie chez la mère.

Bilan ophtalmologique • Le bilan ophtalmologique comportant acuité visuelle, prise de tension oculaire, examen à la lampe à fente et fond d’œil, doit être réalisé avant la grossesse [23]. • L’utilisation d’une caméra non mydriatique doit être systématique. Cet examen non invasif est, à la fois, plus sensible et plus spécifique que le simple fond d’oeil. Il présente, en outre, l’avantage d’être moins éblouissant pour la patiente, et il permet de conserver une trace de chaque examen et de suivre de façon très précise l’évolution du fond d’oeil. • Dans les cas de RD sévère, une angiographie peut-être nécessaire, l’utilisation de la fluorescéine n’étant pas contreindiquée pendant la grossesse, ni pendant l’allaitement.

Conduite selon la situation ophtalmologique • En l’absence de RD, la surveillance doit être ensuite trimestrielle pendant toute la durée de la grossesse et en post-partum. • En cas de RD, quel que soit son degré, la surveillance doit être, au minimum, mensuelle, en adaptant, bien

entendu, le rythme de surveillance à l’évolution de la RD. • En cas de RD proliférante, une panphotocoagulation rétinienne (PPR) doit être pratiquée, la Diabetic Retinopathy Study ayant montré l’efficacité de la PPR dans la prise en charge des RD proliférantes compliquées et non compliquées, ainsi que des RD non proliférantes sévères chez la femme enceinte [24]. • En début de grossesse, une PPR rapide doit être entreprise. En cas d’aggravation en fin de grossesse, ou d’apparition d’un œdème maculaire (OM), il faut garder à l’esprit qu’une amélioration est possible. Une attitude moins agressive est donc envisageable, au prix d’une surveillance rapprochée. Enfin, il est bon de programmer un examen complet en post-partum à 3 mois, voire un examen supplémentaire à 6 mois s’il y a eu progression de la RD (tableau III) [23].

Tableau III  : Recommandations de suivi ophtalmologique des femmes enceintes diabétiques [23]. Examen préconceptionnel – Acuité visuelle – Tension oculaire – Fond d’œil – Rétinophotographies Pas de rétinopathie diabétique (RD) – Surveillance trimestrielle – Contrôle en post-partum (à 3 mois) RD minime à modérée – Surveillance mensuelle, à adapter en fonction de la progression de la RD – Examen du post-partum (à 3 et 6 mois) RD préproliférante sévère ou proliférante * Si diagnostiquée en début de grossesse : – pan-photocoagulation rétinienne (PPR), à achever avant la fin du second semestre – surveillance du post-partum : à 3 et 6 mois * Si diagnostiquée en cours de grossesse, avant la fin du second semestre : idem ci-dessus (diagnostic en début de grossesse) * Si diagnostiquée en fin de grossesse : PPR, ou surveillance rapprochée en post-partum (possibilité d’amélioration) Note : L’angiographie est possible pendant la grossesse.

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Cas clinique

Figures 1A

Figures 1B

Figures 1C

Figures 1D

Figures 1E

• Janvier 2010 : 2 mois de grossesse (figures 1A). Patiente âgée de 30 ans, diabétique de type 1. Vue à 2 mois de grossesse avec un taux d’HbA1c à 9 % nécessitant une rééquilibration rapide. La patiente présente une rétinopathie diabétique (RD) non proliférante sévère, sans œdème maculaire, pour laquelle une pan-photocoagulation rétinienne (PPR) rapide est débutée. • Avril 2010 : 5 mois de grossesse (figures 1B). La PPR a été conduite en 1 mois. Il est constaté une aggravation de la RD et l’apparition d’un œdème maculaire bilatéral. La surveillance est intensifiée.

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• Juin 2010 : 7 mois de grossesse (figures 1C). La RD s’aggrave encore, et l’on constate l’apparition de néovaisseaux, toutefois sans complication ; l’œdème maculaire persiste. Pas de nouveau traitement, mais la surveillance ophtalmologique est renforcée = tous les 15 jours. • 28 juillet 2010 : accouchement par voie basse, déclenché en raison de la RD. • Septembre 2010 : 2 mois post-partum (figures1D). La RD commence à s’inactiver ; l’œdème maculaire persiste. • Septembre 2011 : 14 mois post-partum (figures 1E). La RD a quasi-totalement involué et l’œdème maculaire a régressé.

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• Le cas clinique décrit (encadré, rétinophotographies 1A à 1E) illustre l’évolution d’une RD non proliférante sévère, sans œdème maculaire, et la conduite du traitement ophtalmologique, chez une patiente âgée de 30 ans, diabétique de type 1, dont le diabète était mal contrôlé (taux d’HbA1c : 9 %) au début de la grossesse.

Rôle de l’ophtalmologue dans la prise en charge multidisciplinaire • La prise en charge des grossesses diabétiques doit être pluridisciplinaire, et le médecin ophtalmologue y occupe une place importante. • Si la patiente est vue en période préconceptionelle, la présence d’une RD non proliférante sévère ou plus, doit conduire à retarder – si possible – la conception, le temps d’avancer le plus possible dans la PPR. Cette PPR doit être achevée avant la fin du 2e semestre. • Toute progression ou apparition d’une RD en cours de grossesse doit être signalée aux autres médecins prenant en charge la patiente. Rappelons, toutefois, qu’une RD, même proliférante, n’est pas une contre-indication à un accouchement par voie basse et, que, seul l’obstétricien est habilité à déterminer le mode de délivrance. De même, une néovascularisation, même compliquée, ne doit qu’exceptionnellement motiver une décision d’interruption thérapeutique de grossesse (ITG). Le médecin ophtalmologue a un rôle consultatif dans la décision d’une ITG si celle-ci est envisagée, mais, elle ne doit qu’exceptionnellement être à son initiative. • Enfin, en cas d’aggravation de la RD en fin de grossesse, et notamment dans les formes néovasculaires, l’ophtalmologiste devra déconseiller l’al-

laitement et en informer l’obstétricien et les pédiatres. En effet, l’allaitement maintiendrait le risque de progression de la RD, même si aucune étude spécifique sur le sujet ne peut clairement le démontrer. Déclaration d’intérêt L’auteur déclare n’avoir aucun conflit d’intérêt en lien avec cet article.

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