Quel traitement proposer dans la prévention de la néphropathie induite par les produits de contraste radiologiques chez les malades atteints de cirrhose ?

Quel traitement proposer dans la prévention de la néphropathie induite par les produits de contraste radiologiques chez les malades atteints de cirrhose ?

© Masson, Paris, 2005. Gastroenterol Clin Biol 2005;29:1211-1212 Quel traitement proposer dans la prévention de la néphropathie induite par les prod...

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© Masson, Paris, 2005.

Gastroenterol Clin Biol 2005;29:1211-1212

Quel traitement proposer dans la prévention de la néphropathie induite par les produits de contraste radiologiques chez les malades atteints de cirrhose ?

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Eric BARRIÈRE Service de Médecine A, Centre Hospitalier Général, Saint-Junien.

L

a néphropathie induite par les produits de contraste radiologiques est une complication iatrogène potentiellement grave, qui représente la troisième cause d’insuffisance rénale acquise à l’hôpital. Sa survenue augmente la durée et le coût de l’hospitalisation. Elle se traduit par une augmentation brutale de la créatininémie, avec le plus souvent un pic vers le second ou le troisième jour suivi d’une récupération progressive de la fonction rénale. Dans ses formes sévères, elle s’accompagne d’une nécrose tubulaire aiguë responsable d’une oligoanurie nécessitant le recours à la dialyse. Le pronostic de ces insuffisances rénales aiguës est sévère, puisque la mortalité en cas de préexistence d’une autre défaillance d’organe (insuffisance cardiaque, insuffisance hépatique,…) est de l’ordre de 30 à 50 % dans toutes les grandes séries. Les principaux facteurs de risque de survenue d’une néphropathie aux produits de contraste sont l’existence d’une altération préalable de la fonction rénale, d’un diabète, d’une hypovolémie efficace (déshydratation, insuffisance cardiaque,…), d’une hypoxie, et les traitements qui modifient l’adaptation de l’hémodynamique intra-rénale à l’hypoperfusion (inhibiteurs du système rénine angiotensine et anti-inflammatoires non stéroïdiens) [1]. L’élimination par le rein des produits de contraste administrés lors de l’examen radiologique entraîne une diurèse osmotique responsable d’une hypoxie transitoire de la médullaire rénale [2]. La médullaire externe du rein fonctionne physiologiquement à pression partielle en oxygène basse ; la stimulation des mécanismes actifs de réabsorption des électrolytes induite par la diurèse osmotique fait basculer un équilibre précaire en augmentant la consommation d’oxygène. La souffrance hypoxique des cellules épithéliales s’accompagne d’une augmentation du stress oxydatif, avec une production accrue de radicaux libres qui participe à la dysfonction rénale. L’identification des facteurs de risques, en particulier du rôle fondamental de l’hypoperfusion rénale, et une meilleure compréhension des mécanismes physiopathologiques ont conduit au cours des trente dernières années à proposer un certain nombre de mesures préventives. L’administration de furosémide, d’antagonistes calciques, de faibles doses de dopamine, de mannitol, ont trouvé là des indications qui n’ont pas résisté à la démonstration de leur peu d’efficacité par les méta-analyses des essais cliniques. La seule mesure préventive ayant jusqu’à présent fait la preuve de son utilité est la restauration et l’entretien d’une hémodynamique systémique suffisante pour assurer une bonne perfusion rénale au cours, et dans les heures qui suivent, l’administration de produits de contraste, obtenue par l’administration d’une solution saline isoosmotique [3-7]. Des études récentes

suggèrent que l’administration de N-acétylcystéine, un chélateur des radicaux libres, pourrait conférer une protection additive au remplissage vasculaire. Bien que cet effet protecteur ne soit pas mis en évidence dans tous les essais cliniques [8-11] vraisemblablement, en raison d’un manque de puissance lié à la très faible incidence de l’insuffisance rénale dans ces études réalisées chez des sujets à risque modéré ou faible, la possibilité d’un effet protecteur chez l’homme d’un chélateur des radicaux libres est cohérente avec les résultats expérimentaux chez l’animal qui démontrent l’implication du stress oxydatif dans la physiopathologie de ces insuffisances rénales. L’albumine 20 %, qui associe un remarquable pouvoir d’expansion volémique transitoire, et des propriétés anti-oxydantes, pourrait également représenter une option thérapeutique préventive cohérente d’un point de vue physiopathologique et par conséquent la plus efficace. L’évaluation de son intérêt dans la prévention de la néphropathie induite par les produits de contraste apparaît particulièrement pertinente chez le malade atteint de cirrhose. En effet, l’insuffisance rénale fonctionnelle, pré-rénale, est une complication fréquente et péjorative chez les malades atteints de cirrhose grave, de stades B et C de Child-Pugh. La vasodilatation artérielle splanchnique observée au cours de la cirrhose, les saignements digestifs répétés, l’ascite qui se constitue aux dépens de la volémie, le déséquilibre de répartition des fluides entre le secteur vasculaire et le secteur interstitiel secondaire à l’hypoalbuminémie concourent à une diminution de la volémie efficace responsable d’une hypoperfusion rénale pouvant entraîner une véritable insuffisance rénale fonctionnelle, le syndrome hépato-rénal. La fréquence des translocations bactériennes à partir du tube digestif induit une augmentation de la production de cytokines pro-inflammatoires qui contribuent à fragiliser l’hémodynamique du malade cirrhotique grave. Enfin, la cirrhose est fréquemment associée au diabète et par conséquent, la néphropathie diabétique [12]. Bien que l’incidence exacte et l’histoire naturelle de la néphropathie induite par les produits de contraste chez le sujet cirrhotique ne soit pas établie avec précision [13], et bien que la néphrotoxicité des produits iodés dans la cirrhose vienne récemment d’être remise en cause [14] (mais étude avec un faible effectif de malades ayant une cirrhose grave), la cirrhose grave représente une situation à risque majeur lors de l’administration de produits de contraste, et lorsqu’elle survient, la conjonction de la défaillance hépatique et rénale a un pronostic particulièrement péjoratif. Il a été montré que l’albumine à 20 %, est la solution de remplissage qui possède la meilleure efficacité d’expansion volémique et a fait la preuve de son intérêt particulier chez le malade atteint de cirrhose [13]. L’albumine est efficace dans la prévention de l’insuffisance rénale fonctionnelle après large paracentèse [15]. L’albumine, comparée à d’autres solutions de remplissage, améliore significativement la survie des malades ayant une infection spontanée du liquide d’ascite et des malades atteints d’un syndrome hépato-rénal [15]. Enfin, il a été montré

Tirés à part : Eric BARRIÈRE, Service de Médecine A, BP 110, Centre Hospitalier Général, 87025 Saint-Junien. E-mail : [email protected]

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E. Barrière

que l’albumine pouvait jouer un rôle dans la formation des radicaux libres au cours de l’inflammation. Plusieurs mécanismes pourraient rendre compte de cette propriété : — l’albumine est la principale source de groupements thiols extracellulaires et plasmatiques (SH) [16] qui possèdent une importante propriété anti-oxydative ;

4. Solomon R, Werner C, Mann D, D’Elia J, Silva P. Effects of saline

— l’albumine fixe de nombreux ligands et parmi ces ligands figurent les ions métalliques (fer, cuivre) qui sont des catalyseurs de la production de radicaux libres [17] ;

6. Eisenberg RL, Bank WO, Hedgock MW. Renal failure after major an-

— l’albumine pourrait également contribuer au recyclage d’autres substances anti-oxydantes telles que la vitamine C ;

7. Weisberg LS, Kurnik PB, Kurnik BRC. Risk of radiocontrast neph-

mannitol, and furosemide on acute decreases in renal function induced by radiocontrast agents. N Engl J Med 1994;331:1416-20.

5. Rudnick MR, Goldfarb S, Wexler L, Ludbrook PA, Murphy MJ, Halpern EF, et al. Nephrotoxicity of ionic and nonionic contrast media in 1196 patients: a randomized trial the Iohexol Cooperative Study. Kidney Int 1995;47:254-61. giography can be avoided with hydration. AJR Am J Roentgenol 1981;136:859-61. ropathy in patients with and without diabetes mellitus. Kidney Int 1994;45:259-65.

— enfin, il a été montré, in vitro, que l’albumine pouvait fixer le monoxyde d’azote produit par les cellules endothéliales, sous forme de composés S-nitrosothiols. Or, le monoxyde d’azote est un puissant vasodilatateur et en constituant un réservoir de monoxyde d’azote l’albumine pourrait contribuer à une vasodilatation intra rénale bénéfique pour limiter les effets toxiques des espèces réactives d’oxygène.

8. Tepel M, Van Der Giet M, Schwarzfeld C, Laufer U, Liemann D, Zidek W. Prevention of radiographic-contrast-agent-induced reductions in renal function by acetylcysteine. N Engl J Med 2000;343: 180-4.

9. Briguori C, Manganelli F, Scarpato P, Elia PP, Golia B, Riviezzo G, et al. Acetylcysteine and contrast agent-associated nephrotoxicity. J Am Coll Cardiol 2002;40:298-03.

10. Brophy DF. Role of N-acetylcysteine in the prevention of radiocon-

L’administration d’une substance anti-oxydante telle que la N-acétylcystéine est, actuellement, recommandée dans la prévention de la néphropathie induite par les produits de contraste chez le sujet non cirrhotique bien que les résultats de la littérature soient discordants. Chez le malade atteint de cirrhose aucune recommandation n’est préconisée. Il semble donc urgent, d’évaluer d’une part l’incidence de la néphropathie induite par les produits de contraste chez le sujet atteint de cirrhose et notamment de cirrhose grave, et d’autre part de comparer des molécules telles que la N-acétylcystéine et l’albumine dans la prévention de cette complication potentiellement grave.

trast-induced nephropathy. Ann Pharmacother 2002;36:1466-70.

11. Kay J, Chow WH, Chan TM, Lo SK, Kwoh OH, Yip A, et al. Acetylcysteine for prevention of acute deterioration of renal function following elective coronary angiography and intervention: a randomized controlled trial. JAMA 2003;289:553-8.

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