TRAVAUX ORIGINAUX
M#decine e t Maladies Infectieuses -
1989
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SEROCONVERSION POUR LE VIRUS VIH APRES TRANSPLANTATION HEPATIQUE. DEUX OBSERVATIONS* par Ph. V A N H E M S * ' , A. P A R O T " * , J . P . M I G U E T " ' , A. COAQUETTE .... , S. B R E S S O N - H A D N I " * , D. V U I T T O N " * , H. ALLEMAND*', A . B A S S I G N O T .... M. L A B . . . . , M . C . B E C K E R " * , G . M A N T I O N * * * e t M . G I L L E T * * * RESUME
La transmission du Virus de l'Immuno-d6ficience Humaine (VIH) par des transplantations d'organes ou des greffes de tissus est peu frtquente. Nous rapportons deux observations de stroconversion pour le VIH apr~s transplantation hEpatique. Un malade a continue h utiliser de la drogue par voie intra-veineuse, tandis que rautre a malheureusement Et6 victime d'une erreur de transmission de rtsultat lors du bilan du donneur qui s'est rtvE1E postErieurement sEropositif. Ntanmoins, l'tvolution de ces malades est inttressante car pour rinstant la pr6sence du VIH n'a eu aucune repercussion sur le pronosfic de la greffe dans notre strie de 46 greffts, et bien qu'elle ait pu dans ces 2 cas favoriser la rtcidive de la pathologie initiale, elle n'a pas 6tE suivie de complications majeures au cours de la premiere annte de surveillance. Mots-clts • Transplantation h6patique - VIH. Les modes de transmission du virus VIH, agent du SIDA, sent h l'heure actuelle mieux connus (6). Ils ont Et6 identifi6s avant la ddcouverte de l'agent 6tiologique en 1983 (1). Les 3 modes de transmission maintenant bien documentds sent: la transmission par le sang et ses dErivEs, la transmission par les relations sexuelles et la transmission de la m~re h l'enfant pendant la gr0ssesse. La transmission liEe h la toxicomanie par voie veineuse est due aux aiguilles infectdes partagEes par de multiples toxicomanes. Les observations de sdroconversion pour le virus de l'immunodEficience humaine apr~s transplantation d'organe sent rares : une quinzaine de cas observes apr~s greffe de foie a 6t6 jusqu'~ present publiEe (2, 7, 13, 14). L'dvolution en est gEn6ralement rapidement ddfavorable : 6 malades sur 15 sent d6ctd6s dans les 6 mois. Nous en rapportons 2 cas apr~s transplantation htpatique (TH) sur les 50 rdalisdes au CHU de Besanqon; dans ces 2 cas l'tvolution clinique des malades, ainsi que le devenir de la greffe, n'ont pas semblE ~tre tr~s influences par la presence du VIH.
M A T E R I E L ET M E T H O D E Serum Pour les 2 malades, 37 serums prtlevts sur 17 mois et recouvrant les pEriodes prE- et post-greffes ont 6t6 6tudiEs rttrospectivement et de fa~on simultanEe. Stroiogie
HIV 1
L'ttude strologique a 6t6 effectute par la detection des Ac anti HIV 1 par 2 mtthodes immuno-enzymatiques, ELISA (Wellcome et Abbot HIV 1 recombinant). La d6termination du profil strologique a EtE Etudite en Western Blot (Du Pont de Nemours) et la detection de l'Ag viral p24 effectute par un test ELISA (Abbot, Du Pont de Nemours).
Strologie C M V La detection du CMV a 6t6 rE,'disEe par un test ELISA (Wellcome).
* Requ le 12.12.1988. Acceptation d~finitive le 15.1.1989. ** Dgpartement de Santg publique, Centre Hospitalier et Universitaire Jean Minjoz, F-25030 Besanqon cedex. *** Unitg clinique de Transplantation h6patique, CHU Jean Minjoz, F-25030 Besan9on cedex. **** Laboratoire de Virologie, CHU Jean Minjoz, Besan~on. Correspondance : J.P. Miguet. 339
RESULTATS ET OBSERVATIONS OBSERVATION N ° 1 Monsieur X .... 30 ans, a 6t6 hospitalis6 dans le service d'htpathologie pour TH lide h une cirrhose virale B. Ce
TABLEAU I
Evolution des mar( ueurs du VIH et des sous-populations lymphoc 'taires chez le malade n°~ 02.10.86 J0
Ag HIV
-
25.10.86 31.10.86 J29 J23 +++
06.11.86 11.02.87 10.03.87 J132 J159 J36
2 7 . 0 4 . 8 7 1 9 . 0 8 . 8 ~ 22.( J176 J321 J5
o8~
-I-
Ac p18
+
+
+
++
+
Ac p24
+
+
++
++
+
Ac gp41
+
+
+
++
+%
Ac p55
+
+
+
+
+
Ac p64
+
+
+
+
+
+
+
Ac gpl60
+_
+
CD4
244
131
178
189
CD8
159
629
203
279
patient avait fait une h6patite virale B e n d6cembre 78. La contamination h cette 6poque avait 6t6 rapport6e ~t une h6ro'inomanie intermittente connue depuis 74. L'h6patite jug6e sur la dur6e de l'ict~re avait dur6 6 semaines et le patient ne s'est pas soumis h une surveillance. Un nouvel 6pisode d'h6patite ict6rique en 79 a fait 6voquer le diagnostic d'h6patite chronique active B. La biopsie h6patique a montr6 des 16sions d'h6patite chronique active B d'6volution rapidement cirrhog~ne. Cette h6patite chronique s'est compliqu6e d'une cirrhose r6v616e par une h6morragie digestive en relation avec une rupture de varices oesophagiennes en 84. Un 2 ~me 6pisode d'h6morragie digestive est survenu la mSme ann6e. Depuis ce 2~me 6pisode h6morragique, la cirrhose s'est aggrav6e progressivement, le malade ayant fait une septic6mie h 2 reprises. Lors du bilan r6alis6 en vue de la TH, il existait une ascite, des angiomes stellaires, une 6rythrose palmaire, une grosse rate, une circulation collat6rale porto-cave avec un syndrome de Cruveilhier et une importante d6nutrition. Le malade a 6t6 class6 dans le groupe C de Child. Les r6sultats des examens biologiques 6taient les suivants : globules rouges 4,12/mm3, h6moglobine 10,3 g/l, fer s6rique 71xmol/l (N6-33), plaquettes 50 000/ml, globules blancs 1 700 dont 900 neutrophiles (52,2 %), lymphocytes 700 (39 %), monocytes 100 (8,8 %) ; bilirubine 22 ~mol/l (N 3-8), gamma GT (GGT) 55 U/I (N 2-70), phosphatases alcalines 151 U/1 (N 30-110), ALAT 54 U/! (N 13-52), ASAT 55 U/I (N 16-41); le TP 6tait .~ 40 %, les facteurs II h 28 %, V h 28 %, VII et X h 35 % ; rantig~ne (Ag) HBs 6tait pr6sent darts le serum, de m~me que l'Ac anti HBc, l'Ag HBe et l'Ac anti D ; la recherche d'ADN du virus B 6tait n6gative ; les s6rologies virales, bact6riennes et parasitaires 6taient toutes n6gatives : mononucl6ose infectieuse, syphilis, list6riose, aspergillose, toxoplasmose, candidose, infection h cytom6galovirus (CMV) et VIH. 340
La TH cut lieu le 2 octobre 86 malgr6 un synd~iae grippal typique survenu 8 jours anparavant. Le i~ie provenait d'un donneur de 33 ans, d6c6d6 accidentellement. Le bilan virologique de ce donneur ne montrait pas d'Ag HBs ni d'Ac anti HBe, la s6rologie VIH 6tait n6gative, l'interrogatoire de rentourage n'a pas relxouv6 de facteur de risque pour le VIH. Au cours de l'intervention, Monsieur X... a re~u 16 concentr6s globulaires, 23 plasmas et 49 concentr6s plaquettaires provenant ~Je donneurs s6ron6gatifs pour le VIH. - - Au 15~me jour aprbs la TH est apparu un ictbre. Le bilan biologique a montr6: ASAT 51 U/l, ALAT 624 U/l, GGT l17U/I, bilirubine totale 46 I.tmol/l, bilirubine directe 27 l.tmol/l, phosphatases alcalines 143 U]I. La biopsie h6patique permettait d'observer des 16sions compatibles avec un rejet ainsi que des images d'h6patite parenchymateuse mod6r6e d'6tiologie inexpliqu6e. Apr~s renforcement du traitement immunosuppresseur, le malade put sortir du service avec une prescription de ciclosporine 250 mg/24 h et prednisolone 30 mg/j. - - Au 23 ~me jour, l'Ag HRs 6tait toujours pr6sent 0a~s le serum, accompagn6 cette lois de rAc anti HBe, mais ~ recherche de I'ADN 6tait n6gative ainsi que celle des Ac anti D. - - Trente-six jours apr~s la TH, la s6rologie VIII 6taJt positive en ELISA, confirm6e par le Western Blot. Los Ac anti VIH mis en 6vidence 6talent les suivants : f,c anti p18, p64, p55, gp41 et gpl60. L'antig6n6mie VIr~ (Ag p24) recherch6e r6trospectivement, 6tait positive d~s le 23~mejour aprSs la greffe. L'6volution des diff6rents Ac anti VIH ainsi que celle de l'antig6n6mie est repr6sent6e darts le tableau I. L'antig6n6mie s'est ensuite n6gativ6e tandis que les titres d'Ac augmentaient. De mani~c concomitante 6tait observ6e une s6roconversion vis-h-vi~ du CMV (IgM et IgG). Le malade 6tait alors suivi c~ ambulatoire.
Six mois environ apr~s la greffe, Monsieur X... a 6t6 rrhospitalis6 pour un ict~re cutanEo-muqueux. La biologie hrpatique 6tait alors tr~s perturbre avec des transaminases h 450 U/I ASAT et 420 U/1 ALAT, une bilirubine totale h 60 I.tmol/l, des GGT h 250 U/l, des phosphatases alcalines ~ 200 U/1. La srrologie virale B avait chang6 avec apparition de rAg HBe d'une part et d'autre part prrsence, dans le s6rum, d'ADN du virus B. Une ponction biopsie h6patique concluait ~ une h6patite chronique active. Le marquage sur le foie 6tait positif pour l'Ag HBc et n6gatif pour l'Ag HBs. La rrgression clinique de cet 6pisode s'est faite en 8 semaines. - - En dEcembre 87 est apparue une leucoprnie ~i 2 800 globules blancs/mm3 dont 1 540 neutrophiles/ mm3 et 980 lymphocytes (CD4+ 216/mm 3 et CD8+ 333/mm3). L'examen clinique mettait en 6vidence des adrnopathies diss6minres mais ne montrait pas d'augmentation du volume de la rate chez ee sujet qui gardait une splrnom6galie depuis l'intervention. I1 existait une mycose buccale. Le malade a 6t6 alors considrr6 comme appartenant au groupe III de la classification du CDC (1976). Le 10 mai 88, Monsieur X... 6tait hospitalis6 nouveau pour syndrome grippal. Le bilan biologique montrait les anomalies suivantes : globules blancs 4 700 avec 60,3 % de neutrophiles et 30,2 % de lymphocytes, plaquettes 68 000/ml, gamma globulin6mie 39,7 g/l (N = 12 g/l), vitesse de s6dimentation 71/105, b~ta microglobuline 5,2 mg/l (N 1, 1-3); il persistait de I'ADN viral B "dans le strum. Un syndrome alvrolaire de la base droite avec bronchogramme arrique ainsi qu'un tr~s gros hile droit 6taient apparents sur la radiographic pulmonaire. Le malade a alors refus6 un lavage bronchoalvrolaire. Les srrologies de 16gionneiloses et des infections h Streptococcus pneumoniae, mycoplasme, Chlamydia, Haemophilus 6taient toutes nrgatives. L'rvolution sous Josacyne® 2 g/j a 6t6 satisfaisante ; le traitement immunosuppresseur 6tant maintenu (ciclosporine 150 mg x 2/j et prednisolone 10 mg/j), -
-
-
-
OBSERVATION N ° 2 Monsieur Y .... 52 ans, a 6t6 hospitalis6 dans le service de chirurgie digestive en vue d'une TH pour cholangiocarcinome h localisation hilaire drcouvert au drcours d'un bilan d'ict~re. Le bilan d'extension 6tait nrgatif, l'indication de la TH a donc 6t6 retenue. Les srrologies virales, bact6riennes et parasitaires 6taient toutes nrgatives (VIH, virus B, CMV, listrriose, aspergillose, toxoplasmose, syphilis, candidose). La TH a eu lieu le 20 a6ut 1986. Le foie provenait d'un donneur de 27 ans, accident6 de la route, en coma drpassr, suite h une hrmorragie intracrrrbrale. Au cours de rintervention, Monsieur Y... a re~u 17 concentrrs 6rythrocytaires standards, 30 plasmas et 20 concentrrs plaquettaires provenant de donneurs srronrgatifs pour le VIH. Nous avons 6t6 alertrs par le laboratoire extrrieur ~t notre CHU, qui avait fait la s6rologie VIH du donneur : une erreur de manipulation de tubes avait 6t6 commise et, en 341
fait, le foie provenait d'un sujet dont la srrologie 6tait positive vis-a-vis du VIH et de l'Ag HBs. Nous avons donc entrepris une surveillance srrologique systrmatique du malade. Huit jours aprbs la TH, la s6rologie ELISA 6tait positive et confirmre par Western-Blot. L'rvolution des Ac anti-VIH et de l'antigrnrmie est reprrsentre par le tableau II. Au moment de sa s6roconversion, l'examen clinique du patient 6tait normal et il a pu quitter le service avec une prescription d'immuno-suppresseurs : ciclosporine A, 400 mg/j et prednisolone, 30 mg/j. Le matade a 6t6 ensuite suivi en ambulatoire et les 616ments de surveillance biologique sont reprrsentrs dans le tableau II. Une s6roconversion vis-h-vis du CMV avec pr6sence d'IgM anti CMV est survenue 2 mois apr~s la drcouverte d'une srropositivit6 au VIH. Quatre mois aprbs la TH, le patient a pr6sent6 un ict~re avec cytolyse (585 UI/1 pour les ALAT, 450 UI/I pour les ASAT, bilirubine h 180 p.mol/l, gamma GT 1 400 UI/1). Les marqueurs srriques du virus B 6taient les suivants : Ag HBs+, Ac HBc+, Ag HBe+, Ac HBs+, Ac HBe-avec prrsence d'ADN viral dans le serum. La ponction biopsie de foie pratiqu6e 6tait en faveur d'une h6patite virale aigu& L'amrlioration clinique et biologique a 6t6 nette en 2 mois, et drbut mars 87 les ALAT 6taient ~ 180UI/1 et les ASAT ~ 85 UI/I, les marqueurs du virus B restant inchangrs et ceci tout au long de notre observation (cf tableau II). Devant la persistance d'une cytolyse, un nouvel examen histopathologique a 6t6 pratiqu6 7 mois aprbs la TH, et les 16sions observres 6voquaient alors une hrpatite chronique de type viral B. - - D~s novembre 87, soit 15 mois aprrs la TH, l'6tat grn6ral du patient jusque 1"~satisfaisant s'est alt6r6 avec apparition d'un amaigrissement, d'un subict~re conjonctival, de nausres, de vomissements. Sur le plan biologique, il existait une cholestase ictrrique (gamma GT 1 400 UI/I, bilirubine h 72 ~tmol/1, phosphatases alcalines normales), une cytolyse (ALAT ~t 350 UI/I, ASAT 180 UI/I) et une augmentation des marqueurs de carcinogrn~se sanguins (antigOne carcino-embryonnaire et CA 19.9). La rrcidive nroplasique a 6t6 confirm6e par laparotomie exploratrice. -
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-
-
DISCUSSION Beaucoup d'incertitudes persistent sur le devenir des patients ayant subi une transplantation d'organe et contaminrs soit avant, soit pendant, soit apr~s par le VIH. L'rvolution des malades transplantrs hrpatiques est souvent li6e h la rrcidive ou non de la pathologie initiale surtout en ce qui concerne l'atteinte virale B e t les processus n6oplasiques. Dans ces deux derni~res circonstances, la reprise 6volutive de la pathologie initiale est malheureusement relativement frrquente (4, 10). Pour le patient de l'observation n°l la replication virale B a rrcidiv6 rapidement et s'est accompagnre de 16sions hrpatiques srv~res, alors que le VIH n'induisait pas de complications majeures. L'rvolution de l'infection par le
TABLEAU II Evolution des mart ueurs du VIH et des sous-populations lymphocytaires chez le malade n ° 2 07.08.86 J0
28.08.86 09.09.86 07.11.86 07.01.87 04.03.87 27.06.87 29.09.87 J109 J20 J48 J164 J254 J374 J8
Ag HIV
4-
4-
4-
+
4-4-
-t-4-
++
++
4-+
+4-
-I-
4-4-
4-+
4-4-
4-
4-
4-
4-
+
Ac p31
+
Ac gp41
+
J446
+
+
Ac p17 Ac p24
lO.12.8~7
Ac p55 Ac p66 +
Ac pgl60
+_
+
Ac gpl20 CD4
Normaux
611
441
587
329
592
CD8
Normaux
364
426
904
1 030
1 550
VIH n'est pas apparue plus s6v~re ni plus rapide que chez les toxicomanes non greff6s. Pour rautre patient, le pronostic actuel est li6 h la r6cidive n6oplasique hilaire et non ~ rinfection par le VIH. Cette 6volution relativement b6nigne de rinfection par le VIH chez ces deux malades transplant6s contraste avec l'habituelle s6v6rit6 de l'infection h VIII rapport6e dans ces circonstances (11, 12) et qui 6tait caract6ris6e par l'apparition tr~s pr6coce (au cours des 6 premiers mois) de complications gravissimes entrainant le d6c~s. N6anmoins, le r61e du VIH, et d'un certain degr6 d'immuno-suppression, dans la reprise de replication du virus B, dans le premier cas, et dans la r6cidive tumorale, dans le 2 ~me cas, ne peut ~tre 6cart6. Par ailleurs, ces deux observations appellent plusieurs autres commentaires : - - Le premier concerne le d6pistage des malades s6ropositifs lorsque ceux-ci sont candidats ~ une transplantation d'organe. Un interrogatoire trbs pr6cis sur les ant6c6dents m6dicaux, chirurgicaux et "relationnels" du donneur et du receveur est indispensable. En effet dans la 1~re observation, le patient n'a reconnu que plusieurs semaines apr~s la TH qu'il avait continu6 de faqon intermittente ~ consommer de l'h6ro'/ne par voie veineuse. I1 est donc difficile de garantir rabsence de facteur de risque vis-a-vis du VIH chez tousles malades au moment de la transplantation. La s6rologie VIH est demand6e syst6matiquement avant chaque transplantation, le dosage de l'Ag viral m6riterait d'y ~tre associ6. N6anmoins, ces pr61bvements peuvent 6tre pris en d6faut si la contamination est r6cente ( c a s n ° 1). Bowen et al. (2) proposent comme explication de faux s6ron6gatifs une dilution importante des Ac li6s ~ des transfusions massives. Ceci reste [a d6montrer mais cette situation de transfusions massives est fr6quente chez les cirrhotiques 342
candidats h la TH et peut conduire h ce type de r6sultats faussement n6gatifs. Les techniques d'amplification d'ADN viral dans les lymphocytes pourraient 6tre particulibrement int6ressantes afin de r6duire rincertitude diagnostique (9). Malheureusement, ces examens ne sont pas encore accessibles en routine. - - Le second commentaire concerne les sources de contamination iatrog~nes. Pour les transfusions de produits sanguins la 16gislation fran~aise oblige depuis aofit 1985 tout centre de transfusion sanguine ~t effectuer une recherche syst6matique d'Ac anti VIH par ELISA, ainsi qu'~ proc6der ~ une inactivation virale par la chaleur pour tout produit susceptible de le supporter. Le risque de transmission de VIH h ,partir de sang s6ron6gatif existe mais il est minime, de 1ordre de 1/106 (6). N6anmoins, en cas de transfusions massives, habituelles en TH, ce risque est augment6, justifiant les proc6d6s modernes d'auto-transfusion, en particulier rutilisation d'un r6cup6rateur de sang au cours des TH. Malheureusement, dans le c a s n ° 2, une erreur humaine de manipulation a entrain6 une double'contamination virale (VIH et virus B) par le foie transplant6. - - Le troisi~me commentaire concerne la s61ection de certains malades candidats ?t la TH vis-a-vis de l'infection VIH. Parmi ceux-ci les malades atteints de cirrhose virale B ont probablement un risque 61ev6 d'avoir rencontr6 le VIH ~ cause de modes de transmission voisins. En effet, chez les toxicomanes VIH positifs, les marqueurs du virus B sont pr6sents dans pros de 80 % des cas (3). De plus, l'interrogatoire du malade est peu fiable, et, dans notre observation, il est vraisemblable que malgr6 ses aU6gations le malade ait recouru ~ la drogue dans les mois pr6c6dant la greffe: le syndrome grippal et mononucl6osique survenu imm6diatement avant la transplantation pourrait bien avoir repr6sent6 la primo-
infection par le VIH, comme semble en tdmoigner l'6volution des marqueurs s6rologiques. Chez ce type de patient, avec un pronostic vital d6favorable ~ tr~s court terme li6 ~ la gravit6 de ratteinte h6patique par le virus B, et s6ropositif asymptomatique, la TH peut encore ~tre propos6e (12). I1 parak alors souhaitable de transplanter ce type de patient dans des centres ayant une bonne exp6rience et de la TH et de l'infection ~ VIH (12). Inversement, lorsque le patient pr6sente un stade plus 6volu6 de rinfection h VIH (stade IV, de la classification du CDC 1986), la plupart des 6quipes consid~rent que cet 6tat est une contre-indication ~ la TH. -Le quatri~me commentaire concerne le diagnostic biologique : ces observations montrent h l'6vidence l'int6r& majeur de poss6der une s6roth~lue permettant les 6tudes r6trospectives. I1 serait bon qu'un texte 16gislatif vienne officialiser, tout au moins en milieu hospitalier, une pratique qui devrait ~tre d6j?a la r~gle des laboratoires s'occupant de la s6rologie virale en g6n6ral et en particulier pour le VIH et tout ce qui touche le domaine des greffes (5). - - Le dernier commentaire concerne les interactions m6dicamenteuses. La ciclosporine est utilis6e de mani~re courante chez les malades transplant6s h6patiques, non VIH positifs. Son influence sur l'6volution d'une infection par le VIH est encore mal connue. Les publications sont divergentes quant ~ son action chez les malades s6ropositifs en dehors de la transplantation. Une
SUMMARY
action b6n6fique semble cependant peu probable (8). La toxicit6 li6e ~ rassociation azidothymidine et ciclosporine est encore mal connue. Le probl~me de l'6volutivit6 de l'infection VIH chez ces malades reste pos6. Les malades infect6s accidenteUement avec un greffon auront-ils un profil 6volutif diff6rent de ceux contamin6s avant la greffe ? L'analyse des cas actueUement publi6s ne perrnet aucune conclusion et seules les ann6es ~ venir pourront nous le dire. CONCLUSION La transmission du VIH par transplantation d'organe ou de greffe de tissu doit rester exceptionnelle. Pour ce fake, il est n6cessaire d'61iminer toute incertitude diagnostique pour le donneur et le receveur par des moyens cliniques et biologiques performants. La proposition de Rubin et al. (12) de cr6er un registre regroupant les malades contamin6s par le VIH au d6cours d'une greffe de tissu ou d'une transplantation d'organe est int6ressante et devrait 6tre mise en oeuvre imp6rativement. En effet, seule robservation h long terme de tous les malades infect6s dans cette circonstance permettra de juger du risque 6volutif r6el et des interf6rences m6dicamenteuses, encore plus complexes dans ces c a s q u e celles habituellement rencontr6es dans les autres circonstances d'infection par le VIH.
: HIV SEROCONVERSION AFTER TRANSPLANTATION. ABOUT TWO CASES
The transmission of the Human Immunodeficiency Virus (HIV) by transplantation has been considered as an uncommon event. We report two cases of HIV seroconversion after orthotopic liver transplantation. One patient has continued to use intravenous drug whereas the other patient was transplanted with a liver from a HIV positive donor, due to a laboratory error in screening the liver transplant donor. In both cases, the presence of the HIV was not associated with a morbidity more severe than in the other patients who received a liver transplantation in our series of 46 transplanted patients. Key-words
: Liver transplantation - HIV.
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