77e congrès de médecine interne, Lyon du 27 au 29 juin 2018 / La Revue de médecine interne 39 (2018) A118–A252
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Observation inédite d’un syndrome de Gitelman associé à un syndrome de Sjögren
Un cas de maladie du pool plaquettaire vide associé à un syndrome de Gougerot-Sjögren primitif
T. Ben Achour ∗ , F. Jaziri , A. Kefi , R. Aoudia , M. Elleuch , M. Mahfoudhi , S. Turki , T. Ben Abdallah , K. Ben Abdelghani Médecine interne, hôpital Charles-Nicolle, Tunis, Tunisie ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (T. Ben Achour) Introduction Le syndrome de Gitelman est rare, habituellement génétique, lié à des anomalies d’un transporteur du tube distal. Il est exceptionnellement acquis au cours de maladies auto-immunes notamment le syndrome de Gougerot-Sjögren (SGS). Quelques cas sporadiques d’association d’un syndrome de Gitelman et d’un SGS ont déjà été rapportés dans la littérature, nous en rapportons une observation. Observation Il s’agissait d’une femme âgée de 60 ans, suivie pour une hypothyroïdie périphérique en rapport avec une thyroïdite de Hashimoto. Elle a consulté pour des myalgies, des polyarthralgies d’allure inflammatoire associés à une xérostomie et une xérophtalmie et des paresthésies des membres inférieurs évoluant depuis six mois. L’examen physique était sans anomalie et la pression artérielle était normale. Par ailleurs, il n’existait pas d’hypertrophie parotidienne ni organomégalie ni anomalie du sédiment urinaire. Les examens biologiques ne montraient ni anomalie de l’hémogramme, ni de la fonction rénale ni syndrome inflammatoire biologique. En revanche, nous avons été interpellés par de nombreuses anomalies hydro-électrolytiques : une hypokaliémie à 3 mmol/L, associée à une kaliurèse inappropriée suggérant des pertes d’origine rénale associée à une hypomagnésémie avec une magnésurie normale, une diminution de la calciurie alors que la calcémie et la phosphatémie étaient normales et une augmentation du taux de bicarbonates à 29 mEq/L. PTH était normale. Par ailleurs, la natrémie, la natriurèse ainsi que la chlorémie et la chlorurie étaient normales. À l’interrogatoire, il n’y avait pas de notion de prise de diurétiques ni laxatifs ni diarrhées ni vomissements. L’examen ophtalmologique a mis en évidence un syndrome sec oculaire bilatéral. L’étude anatomopathologique de la biopsie des glandes salivaires accessoires a objectivé une sialadénite lymphocytaire stade 3 de Chisholm. L’éléctromyélogramme montrait une neuropathie axonale sensitive des membres inférieurs. Ainsi, le diagnostic de Syndrome de Gougerot-Sjögren primaire a été retenu. Devant les anomalies hydro-éléctrolytiques observées une atteinte rénale tubulaire en rapport avec un syndrome de Gitelman a aussi été retenue. La patiente a été traitée par une supplémentation potassique et de magnésium par voie orale et par un traitement symptomatique de l’atteinte glandulaire. Discussion Le syndrome de Gitelman se caractérise par une alcalose métabolique hypokaliémique, une hypomagnésémie, une forte excrétion urinaire de magnésium sans modification de la calcémie ni du calcium ionisé en dépit d’une hypocalciurie. Ces anomalies biologiques sont observées en dehors de la prise de diurétiques thiazidiques, ce qui était le cas chez notre patiente. Le syndrome de Gitelman peut précéder l’installation des signes cliniques du SGS, en particulier la xérostomie et la xérophtalmie. Dans notre observation, le SGS a révélé le syndrome de Gitelman. L’association d’un syndrome de Gitelman acquis et d’un syndrome de Gougerot-Sjögren primaire suggère l’existence d’auto-anticorps dirigés contre le co-transport tubulaire distal Na+ /Cl− . Conclusion Le syndrome de Gitelman acquis reste rare au cours des maladies systémiques, en particulier au cours du SS, néanmoins, on doit y penser devant toute hypokaliémie inexpliquée par une atteinte tubulaire en rapport avec le SS. Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. https://doi.org/10.1016/j.revmed.2018.03.094
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R. Felten 1 , A. Dupuis 2 , A. Eckly 2 , C. Gachet 2 , A.S. Korganow 3 , M. Martin 4,∗ 1 Rhumatologie, hôpitaux universitaires de Strasbourg, Strasbourg, France 2 Inserm, EFS grand est, BPPS UMR-S 949, FMTS, 67000 Strasbourg, France 3 Service d’immunologie, centre national de référence de maladies autoinmmunes, CHRU de Strasbourg, Strasbourg, France 4 Médecine interne, CHU de Poitiers, Poitiers, France ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (M. Martin) Introduction La maladie du pool vide plaquettaire (ou DeltaStorage Pool Disease, ␦-SPD) est une thrombopathie principalement héréditaire, caractérisée par un déficit quantitatif et/ou qualitatif en granules ␦ et de leur contenu (adénosine diphosphate (ADP) et sérotonine), entraînant des syndromes hémorragiques d’intensité variable. De rares cas de ␦-SPD acquis ont été décrit, principalement associés à des hémopathies ou un lupus érythémateux systémique [1]. Nous rapportons ici le premier cas à notre connaissance de ␦-SPD associé à un syndrome de Gougerot-Sjögren primitif (SSp) et réversible sous glucocorticoïdes et immunoglobulines intraveineuses (IgIV) Observation Une femme de 74 ans a été hospitalisée pour rupture splénique spontanée. Elle avait bénéficié 7 ans auparavant d’un remplacement valvulaire mécanique pour sténose aortique, sans complication, et était depuis sous anticoagulant oral (fluindione). Depuis 4 ans, elle présentait des épisodes hémorragiques survenant hors contexte de surdosage en fluindione ou de thrombopénie. À l’admission, le taux plaquettaire, les temps de prothrombine, de céphaline activée et d’occlusion plaquettaire étaient normaux, de même que le facteur von Willebrand et l’activité cofacteur de la ristocétine. La recherche d’anticorps anti-plaquettes était négative. Les tests spécifiques ont révélé une diminution de l’agrégation plaquettaire induite par l’ADP, associée à une faible concentration en ADP et en sérotonine plaquettaires, ainsi qu’une réduction de moitié du nombre de granules denses plaquettaire comparativement aux contrôles, sans aucun signe de déficit en granules alpha ou d’activation plaquettaire. Le diagnostic de ␦-SPD avec déficit en ADP a été retenu. La biopsie ostéomédullaire et le scanner thoraco-abdomino-pelvien n’ont pas montré d’arguments pour une hémopathie sous-jacente. L’association d’un syndrome sec occulobuccal ancien avec test de Shirmer positif, et d’anticorps anti-SSA au 1/1280e antinucléaires positifs a permis d’identifier un SSp associé. Il n’existait aucun passé hémorragique chez les apparentés au 1er et 2e degrés et le dépistage systématique des anomalies plaquettaires chez les 3 enfants de la patiente est revenu négatif. La mise en contact de plaquettes contrôle avec du plasma de notre patiente n’a pas apporté d’arguments pour l’hypothèse d’une thrombopathie induite par un facteur sérique. Devant des épisodes hémorragiques spontanés itératifs et le contexte auto-immun associé, des glucocorticoïdes probabilistes ont été instaurés (méthylprednisolone 500 mg/j durant 3 jours, puis prednisone 1 mg/kg/j avec décroissance lente), suivie par des IgIV (1 g/kg) durant 4 mois. Sous ce traitement, et avec un recul de 36 mois depuis leur arrêt, la patiente n’a pas présenté de récidive hémorragique malgré la poursuite nécessaire de la fluindione avec INR cible 2–2,5. Les tests fonctionnels et le dosage de la sérotonine plaquettaire ne se sont toutefois normalisés que 9 mois et 12 mois après l’arrêt des IgIV et de la corticothérapie respectivement, mais restent stables depuis. Discussion La physiopathologie du ␦-SPD acquise est inconnue à ce jour. L’activation plaquettaire et endothéliale est augmentée dans les cas d’inflammation et d’activation immunitaire chro-
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niques, tels que le SSp [2]. D’autre part, la sérotonine plaquettaire, qui joue un rôle crucial dans l’agrégation, a été récemment rapportée à des taux plus faibles dans le SSp sans que son rôle soit clairement défini [3]. Ainsi, il est possible que chez notre patiente, les glucocorticoïdes et les IgIV aient initialement réduit un état d’immuno-inflammation au niveau cellulaire et rétablit la régulation sérotoninergique plaquettaire, expliquant la normalisation plus tardive des tests d’hémostase. La prise en charge du ␦-SPD reste actuellement principalement préventive, ou symptomatique par transfusions plaquettaire, desmopressine ou facteur VIIa recombinant en cas de saignement. Conclusion Nous rapportons ici le 1er cas de ␦-SPD acquis associé à un SSp et réversible sous glucocorticoïdes et IvIg et souligne l’importance de savoir évoquer cette pathologie en cas de syndrome hémorragique hors contexte de thrombopénie, de maladie de von Willebrand et des troubles de l’hémostase secondaire. Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. Références [1] Nieuwenhuis HK, Akkerman JW, Sixma JJ. Patients with a prolonged bleeding time and normal aggregation tests may have storage pool deficiency: studies on one hundred six patients. Blood 1987;70:620–3. [2] Sellam J, Proulle V, Jüngel A, Ittah M, Miceli Richard C, Gottenberg J-E, et al. Increased levels of circulating microparticles in primary Sjögren’s syndrome, systemic lupus erythematosus and rheumatoid arthritis and relation with disease activity. Arthritis Res Ther 2009;11:R156. [3] Sarac H, Markeljevic J, Mokrovic G, Erdeljic V, Bozina N, Cicin-Sain L. Platelet serotonin in primary Sjögren’s syndrome: Level and relation with disease activity. J Neuroimmunol 2012;251:87–9. https://doi.org/10.1016/j.revmed.2018.03.095 CA074
Syndrome sec et si ce n’est pas un Syndrome de Sjögren ?
R. Bourguiba , S. Bellakhal ∗ , M. Manaa , H. Kedadi , M.H. Douggui Médecine interne, hôpital des FSI la Marsa, Tunis, Tunisie ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (S. Bellakhal) Introduction Le syndrome sec constitue un motif fréquent de consultation en médecine interne. Il peut révélateur d’un syndrome de Sjögren comme il peut révéler d’autres pathologies. L’objectif de notre étude était d’établir le profil clinique et étiologique des patients consultants pour un syndrome sec oculaire ou buccal chez qui le diagnostic du syndrome de Sjögren primitif a été éliminé. Patients et méthodes Il s’agit d’une étude descriptive rétrospective sur des patients consultant en médecine interne pour syndrome sec oculaire ou buccal durant la période allant de 2010 à 2017 et ne présentant pas un syndrome de Sjögren primitif. L’examen ophtalmologique ainsi que la mesure du flux salivaire ont été réalisé pour tous les patients. Résultats Trente patients ont été inclus. Une prédominance féminine a été notée. L’âge moyen était 55 ± 10 ans. Tous les patients avaient un syndrome sec oculaire et/ou buccal. Neuf patients avaient un flux salivaire altéré. Le break-up time était altéré chez douze patients. Une sialadénite cotation 1 ou 2 était notée chez treize patients et une sialadénite cotation 3 ou 4 était notée chez quatorze patients. Tous les patients avaient un bilan immunologique (anticorps anti-ENA) négatif. Tous les patients avaient une sérologie de l’hépatite C négative. Les polyarthralgies étaient la manifestation clinique la plus rapportée (n = 21) suivie par l’asthénie (n = 11). Les étiologies du syndrome sec étaient réparties comme suit : diabète (n = 5), polyarthrite rhumatoïde (n = 5), médicamenteux (n = 4),
sarcoïdose (n = 4), syndrome sec sénile (n = 3), hypothyroïdie (n = 2), cause ORL locale (n = 2) et idiopathique (n = 5). Conclusion La fréquence du syndrome sec est en nette augmentation en particulier dans la population gériatrique. Une cause médicamenteuse devrait être éliminée de principe. Un syndrome de Sjögren devrait être également cherché en présence de symptômes extra-glandulaires. Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. https://doi.org/10.1016/j.revmed.2018.03.096 CA075
Lupus érythémateux systémique révélé par une vascularite rétinienne C. Damak 1,∗ , J. Moez 1 , D. Chebbi 2 , S. Garbaa 2 , F. Frikha 1 , C. Turki 1 , S. Marzouk 1 , Z. Bahloul 1 1 Médecine interne, CHU Hédi-Chaker, Sfax, Tunisie 2 Medecine interne, hôpital Hédi-Chaker, Sfax, Tunisie ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (C. Damak) Introduction L’atteinte ophtalmique du lupus s’observe dans 3 à 30 % des cas se manifestant essentiellement par un syndrome sec oculaire. La vascularite rétinienne occlusive du lupus, par contre, est rare, d’apparition aiguë, et liée dans près de 70 % des cas à la présence d’anticorps anti-phospholipides. Nous rapportons un cas vascularite rétinienne lupique révélant la maladie. Observation Monsieur N.G. âgé de 31 ans, sans antécédents pathologiques particuliers, a présenté en juillet 2017 une fièvre avec des arthromyalgies, une baisse de l’acuité visuelle avec notion de myodesopsies au niveau de l’œil gauche et flou visuel de l’œil droit. L’examen clinique trouvait une altération de l’état général (un amaigrissement de 7 kg en un mois associé à une asthénie et une anorexie) et une synovite du poignet droit. L’examen ophtalmologique spécialisé a montré une uvéite postérieure bilatérale. L’angiographie rétinienne à la fluorescéine a montré une vascularite rétinienne périphérique avec une ischémie maculo-temporale sans œdème papillaire de l’œil droit et une ischémie périphérique avec des néovaisseaux papillaires et une hémorragie intravitréenne. La biologie montrait une anémie hémolytique auto-immune à 7,8 g/dL (test de Coombs direct positif de type complément et IgG), une lymphopénie à 1300 éléménts/mm3 avec des leucocytes normaux, une thrombopénie à 100 000 éléménts/mm3 , une vitesse de sédimentation accéléré à plus que 130 mm à la première heure, une protéine C réactive (CRP) négative, un temps de céphaline aclivée (TCA) à 2 fois le témoins, une insuffisance rénale avec une créatininémie à 115 mol/L (clairance de créatinine à 58,3 mL/min), une protéinurie à 1,7 g/24 h. Le bilan immunologique montrait des anticorps antinucléaires positifs à 1/640 avec des anti-PM-Scl positifs, un complément sérique normal, les anticorps antiphospholipides étaient positifs (l’anticoagulant circulant de type lupique, les anticardiolipines et les anti-bêta 2 GPI positifs) vérifiés à 12 semaines d’intervalles. Une ponction biopsie rénale a montré une glomérulonéphrite lupique proliférative stade III associé à des thrombi intracapillaires. Un lupus érythémateux systémique (LES) avec un syndrome des antiphospholipides (SAPL) associé a été retenu avec atteinte hématologique, articulaire, rénale et une vascularite rétinienne. Un traitement à base de boli de méthylprédnislone (1 g/j) 3 jours de suites relayé corticothérapie forte dose (1 mg/kg/j de prednisone), associé à des immunosuppresseurs type cyclophophamides et un traitement anticoagulant a été instauré. L’évolution a été marqué par l’amélioration clinique, stabilisation de l’atteinte ophtalmique et amélioration de la fonction rénale (créatininémie : 92 mol/L, clairance de créatinine : 84 mL/min). Le recul actuel est de 6 mois.