Un trismus révélant une amylose AL

Un trismus révélant une amylose AL

A114 80e Congrès de médecine interne – Limoges du 11 au 13 décembre 2019 / La Revue de médecine interne 40 (2019) A105–A214 Observation Une femme de...

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80e Congrès de médecine interne – Limoges du 11 au 13 décembre 2019 / La Revue de médecine interne 40 (2019) A105–A214

Observation Une femme de 51 ans, caucasienne, ménopausée depuis 6 ans, était adressée en médecine interne pour polyglobulie avec érythermalgie depuis deux ans. Elle avait présenté dans la même période plusieurs épisodes de goutte articulaire, deux épisodes d’insuffisance rénale aiguë transitoires avec lombalgie bilatérale (sans étiologie retrouvée) et de fréquentes hémorragies sous-conjonctivales. L’examen physique révélait la présence de nombreuses télangiectasies prédominant au niveau du tronc et d’une érythrose palmoplantaire. Il n’y avait pas de signe de cirrhose clinique, biologique ni morphologique. Les examens biologiques montraient une polyglobulie JAK2 négative (hémoglobinémie [Hb] 19,4 g/dL, hématocrite 60 %), un taux d’EPO très élevé (525 mUI/mL ; N < 31,9 mUI/mL), une gammapathie monoclonale IgG kappa (9,9 g/L). L’immunophénotypage médullaire détectait 0,4 % de plasmocytes dont 61 % présentaient le phénotype malin CD19 faible, CD38 fort, CD138+, CD117+, CD27−, CD81−. Le caryotype médullaire moléculaire était hyploïdique à 44 chromosomes, avec monosomie 13 et X, gain 1q et délétion partielle 6q, habituel dans les myélomes. Les épreuves fonctionnelles respiratoires avec gazométrie et l’oxymétrie nocturne éliminaient une hypoxémie chronique. L’IRM cérébrale, le scanner thoraco-abdomino-pelvien et la tomographie par émission de positons éliminaient une tumeur sécrétant de l’EPO rénale, hépatique ou de type hémangiome cérébelleux. L’exploration de l’axe hormonal gonadotrope était normale. La recherche de shunt intrapulmonaire ou d’épanchement périrénal était négative. Le traitement initial associait saignées, acide acétylsalicylique à dose antiagrégante et febuxostat. Celui-ci a permis un contrôle de la polyglobulie (Hb 15 g/dL malgré réticulocytose à 210 G/L) et induit une carence martiale (ferritine < 10 ug/L). Le diagnostic de syndrome TEMPI, posé secondairement, a fait modifier le traitement pour 8 cycles de bortézomib, cyclophosphamide et dexaméthasone, permettant l’arrêt des saignées et la normalisation de l’électrophorèse des protéines. Discussion Le syndrome Télangiectasia, Erythrocytosis with elevated erythropoeitin, Monoclonal gammapathy, Perinephric fluid collections, Intrapulmonary shunting (TEMPI) a été décrit en 2011 par Sykes et al. chez des patients âgés principalement de 40 à 60 ans. Seize observations ont été rapportées à ce jour. La gammapathie monoclonale était le plus fréquemment de type IgG kappa (7 cas sur 13). Les taux sériques d’EPO sont toujours supérieurs à 78 mUI/mL et plus souvent à 5000 mUI/mL. Les épanchements périrénaux ont été rapportés dans 13 cas et les shunts intrapulmonaires, pouvant induire une insuffisance respiratoire, dans 9 cas. La goutte, non rapportée à ce jour dans le syndrome TEMPI, est une complication habituelle des polyglobulies essentielles. Les insuffisances rénales transitoires pourraient être liées à une précipitation urinaire d’acide urique. Les hémorragies sous-conjonctivales n’ont pas été rapportées dans ce syndrome. Plusieurs traitements antiplasmocytaires ont été utilisés dans le syndrome TEMPI, comme le bortézomib, le daratumumab, le lénalidomide et l’autogreffe de cellules souches. Tous montrent une amélioration spectaculaire de la plupart des manifestations, c’est pourquoi ce syndrome est classé parmi les gammapathies monoclonales de signification clinique (MGCS). Conclusion Du fait de traitements spécifiques, le syndrome TEMPI mérite d’être connu des cliniciens. L’originalité de notre observation est la présence d’une goutte compliquant la polyglobulie ainsi que la caractérisation du clone plasmocytaire. Il faut évoquer un syndrome TEMPI devant l’association d’une polyglobulie à EPO élevée, de télangiectasies et d’une gammapathie monoclonale. Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. Pour en savoir plus Sykes DB, Schroyens W, O’Connell C. The TEMPI syndrome - a novel multisystem disease. N Engl J Med 2011;365(5):475–7.

Zhang X, Fang M. TEMPI syndrome: erythrocytosis in plasma cell dyscrasia. Clin Lymphoma Myeloma Leuk 2018;18(11):724–30. Liang S-H, Yeh S-P. Relapsed multiple myeloma as TEMPI syndrome with good response to salvage lenalidomide and dexamethasone. Ann Hematol 2019;98(10):2447–50. https://doi.org/10.1016/j.revmed.2019.10.144 CA018

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B. Yaouanc ∗ , A. Teste , M. Ruivard , V. Rieu Médecine interne, CHU d’Estaing, Clermont-Ferrand ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (B. Yaouanc) Introduction L’amylose AL est caractérisée par l’accumulation de dépôts fibrillaires de chaînes légères monoclonales. Elle peut toucher de nombreux organes comme le cœur, les reins, le système nerveux, le système digestif et parfois les parties molles comme les muscles. Nous rapportons ici une présentation atypique avec comme plainte un trismus, une claudication de la mâchoire et une dysphagie. Observation Une femme de 76 ans a consulté en chirurgie maxillofaciale pour un trismus associé à une otalgie gauche évoluant depuis 18 mois. Ses antécédents notables sont des morphées, un psoriasis et une hystérectomie pour fibromes. Elle avait consulté un chirurgien ORL en ville un an auparavant : l’IRM réalisée avait trouvé une infiltration aspécifique de la partie antérieure de la langue ; le scanner du cou avait retrouvé une infiltration diffuse des muscles sus-hyoïdien sans masse individualisable. Les biopsies réalisées avaient retrouvé des ganglions sans signe de malignité ; et l’absence de lésion musculaire spécifique. L’avulsion d’une dent présentant un granulome apical n’avait pas modifié les symptômes. Il est décidé une cervicotomie exploratrice qui a retrouvé une infiltration et un épaississement de tous les muscles sous hyoïdiens ; l’analyse anatomopathologique extemporanée évoquait une myosite. La patiente est adressée en médecine interne pour poursuite des explorations. L’examen clinique retrouvait une claudication de la mâchoire évoluant depuis 2 ans ; une dysphagie fluctuante aux liquides et aux solides avec perte de 4 kg en 6 mois. Pas de déficit à l’examen neurologique ; les réflexes ostéotendineux étaient présents jusqu’en distalité. L’examen de la cavité buccale - gêné par le trismus - retrouvait une macroglossie avec empreintes dentaires. Les analyses biologiques ne retrouvaient pas de cytopénies ni de syndrome inflammatoire ; la fonction rénale était normale et la protéinurie négative ; les CPK étaient normaux. Les anticorps antinucléaires tout comme ceux des myosites étaient négatifs. L’électrophorèse des protéines réalisée retrouvait une hypogammaglobulinémie à 4,6 g/L sans pic avec une diminution de tous les isotypes ; l’immunofixation sérique ne révélait pas d’immunoglobuline monoclonale. Les chaînes légères libres sériques étaient dosées à 263 mg/L pour les lambda et 7,8 mg/L pour les kappa. L’analyse histologique des muscles sous mentaux retrouvait un infiltrat inflammatoire avec présence d’un tissu de granulation ; le rouge Congo a révélé des dépôts amyloïdes au sein des fibres musculaires et en périvasculaires avec une immunofluorescence positive pour les chaînes légères lambda. Le myélogramme réalisé retrouvait 80 % de plasmocytes dysmorphiques. Les enzymes cardiaques, l’échocardiographie et l’IRM cardiaque étaient normaux. Pas de lésion myélomateuse aux radiographies du squelette ni à l’IRM du rachis et du bassin. Le diagnostic de myélome avec amylose AL infiltrant les muscles sus-hyoïdiens sans atteinte cardiaque ni rénale était posé. Un traitement par melphalan/bortézomib/dexaméthasone a été débuté. Après 3 cures, les chaînes légères étaient normalisées ; la tolérance a été marquée par neuropathie périphérique iatrogène justifiant le passage du bortézomib en hebdomadaire. À 6 mois de traitement, amélioration de la macroglossie et de l’hypertrophie

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des muscles sus-hyoïdiens avec une infiltration moins marquée à l’IRM, le trismus et la dysphagie persistaient, nécessitent le recours à une alimentation entérale. Discussion La macroglossie est une lésion typique d’amylose ; elle est présente dans 30 % environ des amyloses AL avec atteinte musculaire. La claudication de la mâchoire est présente dans 12 % des cas d’une série d’amlylose AL avec atteinte musculaire [1]. En revanche la présence d’un trismus révélant les symptômes est rare ; celleci pourrait être causée par une arthropathie amyloïde atteignant les articulations temporomandibulaire. Celle-ci est caractérisée par un épaississement ferme de la membrane synoviale associée à une douleur, une raideur avec limitation des amplitudes sans érosions. Elle est présente dans 3,7 % des cas d’amylose AL ; principalement dans les formes avec une atteinte des tissus mous et des os prédominante [2]. Conclusion L’atteinte musculaire de l’amylose AL est de présentation variable pouvant aller d’une forme pseudo myositique à des formes localisées. L’absence de pic, de protéinurie et d’anomalie cardiaque ne doit pas faire éliminer le diagnostic. La coloration au rouge Congo est simple et peu onéreuse et doit donc être effectuée au moindre doute sur les biopsies musculaires pour ne pas retarder le diagnostic. Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. Pour en savoir plus [1] Muchtar E, Derudas D, Mauermann M, Liewluck T, Dispenzieri A, Kumar SK, et al. Systemic immunoglobulin light chain amyloidosis–associated myopathy: presentation, diagnostic pitfalls, and outcome. Mayo Clin Proc 2016;91(10):1354–61. [2] Prokaeva T, Spencer B, Kaut M, Ozonoff A, Doros G, Connors LH, et al. Soft tissue, joint, and bone manifestations of AL amyloidosis: clinical presentation, molecular features, and survival. Arthritis Rheum 2007;56(11):3858–68. https://doi.org/10.1016/j.revmed.2019.10.145 CA019

Amylose cutanée papuleuse S. Miladi 1,∗ , H. Fatma 2 , S. Boudaya 2 , E. Bahloul 2 , F. Frikha 2 , M. Madiha 1 , M. Abderrahmen 1 , M. Amouri 2 , H. Turki 1 1 Dermatologie, CHU Hédi-Chaker, Sfax, Tunisie 2 Service de dermatologie, hôpital Hédi-Chaker, Sfax, Tunisie ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (S. Miladi) Introduction L’amylose papuleuse (AP), ou lichen amyloïde, est la forme la plus fréquente d’amylose cutanée primitive. Nous nous proposons d’étudier ses caractéristiques cliniques, histologiques et évolutives. Patients et méthodes Étude rétrospective de tous les cas d’AP confirmés histologiquement sur une période de 10 ans (2009–2018). Résultats Il s’agissait de 11 patients, d’âge moyen de 52 ans (33 ans–82 ans), répartis en 5 femmes et 6 hommes (sex-ratio H/F : 1,2). Un diabète type 2 était noté chez un patient. Une histoire familiale d’AP était retrouvée chez deux sœurs. La durée d’évolution moyenne des lésions était de 6 ans (3 mois–12 ans). Tous les patients rapportaient un prurit intense. Dans tous les cas, l’examen cutané révélait des papules kératosiques, pigmentées, confluentes en placard siégeant au niveau : prétibial (90 % des cas), de la face d’extension des avant-bras (27 %), du tronc (36 %), des fesses (18 %) et de la face postérieure des jambes (18 %). La localisation était unique (9 %), double (45,5 %) et multiples (45,5 %). Aucune lésion de lichen plan (cutanée et muqueuse) n’a été associée. La dermoscopie en mode non polarisée, réalisée chez 4 patients, a montré au niveau des papules : des structures pigmentées en « grains de poivre noirs » agencées en rayons autour d’un « carrefour central ». L’examen histologique a identifié, dans tous les cas, la substance amyloïde sous forme de dépôts éosinophiles congophiles au som-

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met des papilles dermiques. Des altérations épidermiques étaient associées : allongement des crêtes épidermiques (3 cas), nécrose kératinocytaire (1 cas), dégénérescence des cellules basales (1 cas). Tous les patients étaient traités par des dermocorticoïdes (DC) et des kératolytiques. L’évolution était marquée par une amélioration du prurit (82 %), persistance des lésions (82 %) et disparition de la kératose (27 %). Discussion L’AP est une affection rarement décrite dans la littérature. Les formes familiales, décrites essentiellement en Amérique du Sud et en Asie, ont été retrouvées chez 2 de nos patients. Conformément aux données de la littérature, les lésions siégeaient préférentiellement en prétibial. Cependant des localisations atypiques ont été relevées dans notre étude telles que les fesses avec prédominance des formes multiples. Le diagnostic repose sur l’examen anatomopathologique néanmoins, la dermoscopie est d’un grand apport. Le mode polarisée, étant plus performant, en mettant en évidence les structures « cristallines », pourrait éviter la biopsie. Les DC constituent le traitement de première intention, mais les résultats sont souvent insatisfaisants. D’autres alternatives thérapeutiques ont été rapportées : peeling à l’acide trichloracétique et le laser CO2. Conclusion L’AP est une affection rare dont l’éthiopathogénie reste mal élucidée. Cependant, une susceptibilité génétique semble être incriminée dans sa survenue. Bien que la confirmation de l’AP soit principalement histologique, la dermoscopie s’avère prometteuse dans l’orientation diagnostique. Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. https://doi.org/10.1016/j.revmed.2019.10.146 CA020

Le larynx : une localisation inhabituelle de l’amylose

M.S. Hamdi ∗ , I. Kechaou , R. Tbessi , I. Boukhris , A. Hariz , L. Ben Hassine , C. Kooli , S. Azzabi , E. Cherif , N. Khalfallah Médecine interne B, CHU Charles-Nicolle, Tunis, Tunisie ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (M.S. Hamdi) Introduction L’amylose correspond à un groupe de pathologies caractérisé par la présence de dépôts extracellulaires de protéines insolubles. Le diagnostic repose avant tout sur l’histologie. L’imagerie peut également être utile au diagnostique en montrant un épaississement tissulaire ou un aspect pseudo-tumoral. L’amylose localisée est caractérisée par des dépôts amyloïdes dans un site isolé de l’organisme sans atteinte systémique. L’amylose laryngée est une forme rare et localisée de diagnostique souvent difficile. À ce propos, nous rapportant une nouvelle observation d’amylose laryngée diagnostiquée dans le cadre du bilan étiologique d’une dysphonie ? Observation Un patient âgé de 67 ans sans antécédents pathologiques notables, tabagique à 40 PA, était admis pour exploration d’une dysphonie d’installation progressive évoluant depuis 1 an et demie. L’examen clinique retrouvait un patient apyrétique en bon état général. Il n’y avait pas d’hépatosplénomégalie, ni d’adénopathies périphériques palpables. L’examen de la gorge montrait la présence de nodules jaunâtres du pharynx avec un aspect dystrophique de la luette. La laryngoscopie objectivait une formation bourgeonnante de la zone des 3 replis à droite atteignant l’épiglotte. La biopsie de cette lésion avait conclu à un aspect de muqueuse malpighienne siège d’un dépôt abondant, éosinophile dont l’aspect évoque un dépôt amyloïde associé à la présence d’un infiltrat dense riche en plasmocytes. La nature amyloïde de ces dépôts était confirmée par la coloration rouge Congo et par l’examen en lumière polarisée. Il s’agissait d’une amylose AL. Une TDM cervico-thoraco-abdominale était réalisée à la recherche de signes en faveur d’une amylose systémique. Elle notait la présence d’une tumeur laryngée supra-glotique droite de la bande