Une cause rare de douleurs lombaires

Une cause rare de douleurs lombaires

La Revue de médecine interne 33 (2012) 165–166 Image Une cause rare de douleurs lombaires Lumbar pain of unsual cause M. Valence a , A. Perlat a , J...

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La Revue de médecine interne 33 (2012) 165–166

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Une cause rare de douleurs lombaires Lumbar pain of unsual cause M. Valence a , A. Perlat a , J.-L. Jagut b , L. Sulpice c , B. Turlin d , B. Grosbois a,∗ , P. Jégo a a

Service de médecine interne, pôle accueil-urgences-médecine interne-gériatrie, CHU hôpital Sud, 16, boulevard de Bulgarie, 35203 Rennes cedex, France Département de radiologie, CHU hôpital Sud, 16, boulevard de Bulgarie, 35203 Rennes cedex, France c Département de chirurgie viscérale, CHU hôpital Pontchaillou, 2, rue Henri-le-Guilloux, 35033 Rennes cedex 9, France d Département d’anatomie pathologique, CHU hôpital Pontchaillou, 2, rue Henri-le-Guilloux, 35033 Rennes cedex 9, France b

i n f o

a r t i c l e

Historique de l’article : Disponible sur Internet le 21 mars 2011 Mots clés : Ischémie mésentérique Médiolyse artérielle segmentaire Keywords: Mesenteric ischemia Segmental arterial mediolysis

1. L’histoire

3. Les commentaires

Un homme, âgé de 48 ans, aux antécédents d’hypertension artérielle et de tabagisme actif consultait aux urgences pour douleurs lombaires gauches, associées à une hématurie macroscopique. Le diagnostic de colique néphrétique gauche était retenu et un traitement symptomatique débuté. Quelques heures plus tard, il avait une crise d’épilepsie généralisée. Le scanner cérébral avec injection de produit de contraste en urgence révélait une dissection de l’artère carotide interne gauche. Le lendemain survenait une rectorragie associée à un météorisme abdominal. Les différents examens biologiques ne retrouvaient pas d’arguments pour une vascularite : absence de syndrome inflammatoire biologique, négativité des anticorps anti-nucléaires et ANCA, normalité du complément. Un scanner abdominal était pratiqué (Fig. 1).

Le scanner abdominal montrait également une dissection de l’artère rénale gauche responsable de la douleur initiale. Une résection étendue du grêle a été réalisée avec examen anatomopathologique (Fig. 2). Après la prise en charge chirurgicale, l’évolution a été favorable avec absence de récidive avec 16 mois de recul. La médiolyse artérielle segmentaire est une pathologie vasculaire aiguë non athéromateuse, non inflammatoire, d’étiologie inconnue. Décrite pour la première fois en 1976 [1], elle était jusqu’à récemment, considérée comme très rare mais une meilleure connaissance de cette pathologie a conduit à une augmentation rapide du nombre de cas publiés dans la littérature. La médiolyse artérielle segmentaire est responsable de lésions artérielles le plus souvent viscérales, se manifestant de manière spontanée et brutale, avec des lésions dans un ou plusieurs territoires artériels [2]. Il est possible de distinguer trois populations concernées avec une atteinte artérielle prédominante distincte [2–5] : les sujets âgés avec atteinte des artères digestives, les adultes jeunes avec atteinte des artères cérébrales et les nouveau-nés, enfants, adultes jeunes avec atteinte des artères coronaires. L’atteinte des artères digestives concerne la majorité des cas décrits. Elle se manifeste le plus souvent comme une urgence chirurgicale abdominale : hémorragie intra-abdominale ou rétropéritonéale massive, ischémie mésentérique, avec un tableau clinique associant à des degrés divers, douleurs abdominales, défense ou contracture généralisée, rectorragies [6]. Six formes radiologiques ont été décrites [2,3] :

2. Le diagnostic Une dissection de l’artère mésentérique supérieure liée à une médiolyse artérielle segmentaire.

∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (B. Grosbois).

0248-8663/$ – see front matter © 2011 Société nationale française de médecine interne (SNFMI). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.revmed.2011.02.014

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M. Valence et al. / La Revue de médecine interne 33 (2012) 165–166

Fig. 1. Scanner abdominal avec injection de produit de contraste : dissection de l’artère mésentérique supérieure avec un aspect de faux chenal thrombosé.

contraste, qui permet une étude fiable et non invasive de ces lésions et devrait peu à peu remplacer l’angiographie [3]. L’histologie est nécessaire pour obtenir un diagnostic de certitude. Elle permet de distinguer deux phases évolutives de la maladie : la phase destructrice et la phase réparatrice [2]. Des lésions correspondant aux deux phases peuvent être observées sur une même pièce histologique. La phase destructrice est caractérisée par une vacuolisation de la média (dissociation des cellules musculaires lisses par des vacuoles cytoplasmiques) débutant à sa partie externe, limitée à cette partie ou pouvant s’étendre à toute l’épaisseur de la média, sans atteindre la limitante élastique interne et l’intima. Il s’agit de lésions focales, circonférentielles ou non. Cette destruction de la paroi musculaire entraîne dilatation artérielle, formation d’anévrysmes, dissection. À la phase réparatrice, un tissu de granulation vient combler les lésions de la média, et peut s’étendre aux portions d’artère saine adjacentes. Cela aboutit à des artères d’apparence saine ou sténotiques. Cependant, en l’absence d’urgence chirurgicale, le diagnostic peut être porté devant des aspects radiologiques évocateurs et la régression spontanée des symptômes. Le traitement de la médiolyse artérielle segmentaire est uniquement symptomatique : prise en charge chirurgicale ou par des méthodes de radiologie interventionnelles (embolisation) si nécessaire, mesure de réanimation associées. Il n’existe pas de traitement de fond de cette maladie dont l’étiologie demeure inconnue. L’évolution se fait vers une résolution spontanée. Après un début brutal sévère nécessitant souvent une prise en charge chirurgicale en urgence et pouvant mettre en jeu le pronostic vital [7], une stabilisation voire une régression des lésions est observée sur les différents examens d’imagerie de contrôle [3], avec absence de récidive d’accident vasculaire durant le suivi. Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article. Références

Fig. 2. Examen anatomopathologique : lésions artérielles mésentériques avec aspect de grignotage de la partie externe de la média avec vacuolisation, second chenal au sein de la média avec accumulation de sang, absence de lésion athéromateuse ou de vascularite.

dilatation artérielle, anévrisme unique, anévrismes multiples responsables d’un aspect en collier de perles, dissection artérielle, sténose artérielle et occlusion artérielle. Les techniques utilisées sont l’angiographie et le scanner avec injection de produit de

[1] Slavin RE, Gonzalez-Vitale JC. Segmental mediolytic arteritis: a clinical pathologic study. Lab Invest 1976;35:23–9. [2] Slavin RE. Segmental arterial mediolysis: course, sequelae, prognosis, and pathologic-radiologic correlation. Cardiovasc Pathol 2009;18:352–60. [3] Michael M, Widmer U, Wildermuth S, Barghorn A, Duewell S, Pfammatter T. Segmental arterial mediolysis: CTA findings at presentation and follow-up. AJR Am J Roentgenol 2006;187:1463–9. [4] Lee SI, Chew FS, Splanchnic segmental arterial mediolysis. AJR Am J Roentgenol 1998;170:122. [5] Slavin RE, Saeki K, Bhagavan B, Maas AE. Segmental arterial mediolysis: a precursor to fibromuscular dysplasia? Mod Pathol 1995;8:287–94. [6] Phillips CK, Lepor H. Spontaneous retroperitoneal hemorrhage cause by segmental arterial mediolysis. Rev Urol 2006;8:36–40. [7] Basso MC, Flores PC, de Azevedo Marques A, de Souza GL, d’Elboux Guimaraes Brescia M, Campos CR, et al. Bilateral extensive cerebral infarction and mesenteric ischemia associated with segmental arterial mediolysis in two young women. Pathol Int 2005;55:632–8.