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72e Congrès de la Société nationale franc¸aise de médecine interne, Tours, 10–12 décembre 2015 / La Revue de médecine interne 36S (2015) A100–A211
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Une otite moyenne aiguë sous anti-inflammatoires A. Cambon 1,∗ , C. Ohlman 2 , M. Patouillet 1 , M. Billhot 1 , T. Carmoi 1 1 Médecine interne, hôpital d’instruction des armées du Val-de-Grâce, Paris, France 2 Radiologie, hôpital d’instruction des armées du Val-de-Grâce, Paris, France ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (A. Cambon) Introduction La thrombophlébite cérébrale septique (TCS) otogène est une complication rare mais redoutable de l’oto-mastoïdite aiguë infectieuse. L’avènement des antibiotiques a largement contribué à la diminution de son incidence, toutefois, le clinicien doit rester vigilant vis-à-vis de cette complication grave et difficile à diagnostiquer. Nous illustrons un cas de TCS otogène favorisée par un traitement mal conduit. Observation Un jeune patient de 23 ans, présente depuis 10 jours des symptômes de sinusite, pharyngite et d’otite moyenne aiguë droite, associés à des céphalées dans un contexte fébrile. Le traitement initié comprend un AINS puis à j4, une corticothérapie (SOLUPRED 60 mg), sous couverture antibiotique probabiliste par Pyostacine. À j7, les céphalées fébriles persistent, et apparaissent une phono-photophobie et des signes d’hypertension intra-crânienne. À j8, devant l’altération de l’état général et des céphalées fébriles intenses, le patient est pris en charge aux urgences. Cliniquement, il présente des signes de focalisation (hémianopsie latérale homonyme gauche) sans autre déficit. Une antalgie et des anti-émétique sont administrés. Une TDM cérébrale avec injection illustre un hématome occipital droit de 3 × 7 × 6 cm, non récent, avec œdème périlésionnel sans effet de masse. L’injection de produit de contraste iodé permet la visualisation d’un saignement actif sans prise de contraste de la lésion. Le patient est transféré en neurochirurgie mais parallèlement, son état neurologique se dégrade avec anisocorie ; du Mannitol est débuté. Une IRM est réalisée révélant une TCS du sinus latéral droit étendue au sinus sphénoïdal et à la veine jugulaire interne droite, compliquée d’un hématome lobaire occipital droit. Sur le plan biologique, il existe un syndrome inflammatoire et une méningite purulente avec hyperproteinorachie, hypoglycorachie et hyperlactatémie. L’examen direct et la culture du LCR sont négatifs, de même que les recherches des S. pneumoniae, N. meningitidis, H. influenzae type B et que le reste du bilan infectieux (antigénurie légionelle et pneumocoque, hémocultures, ECBU). Les bilans de thrombophilie et immunologique sont également négatifs. Le scanner cervico-facial injecté illustre des opacités mastoïdiennes de l’oreille droite. Le scanner TAP est normal. La prise en charge comprend une antibiothérapie probabiliste, une prophylaxie anti-épileptique, une anticoagulation curative par héparine et une mastoidectomie. L’évolution est progressivement favorable en 4 jours, et le scanner à j10 montre une minime augmentation de l’hématome temporooccipital droit sans ressaignement. Discussion Dans la grande majorité des cas, les TCS résultent d’un processus infectieux locorégional ou d’un processus tumoral de la sphère ORL [1,2]. Parmi les causes infectieuses, l’origine otogène a été retrouvée dans moins de 1 % des cas de TCS et concerne préférentiellement la population pédiatrique [1,2]. Les formes septiques otogènes compliquent un échec antibiotique de l’otite moyenne aiguë (spectre, dosage, compliance), ou un traitement anti-inflammatoire non stéroïdien ou une corticothérapie. En dehors du tableau typique de TCS du sinus caverneux (chémosis conjonctival, paralysie oculomotrice œdème papillaire), le diagnostic est parfois difficile devant un syndrome méningé isolé, ou des troubles de la conscience et des formes subaiguës avec céphalées et fièvre traînante, une symptomatologie de sinusite ou d’otite. Le scanner cérébral est souvent réalisé en première intention. Il doit comporter une analyse en fenêtre parenchymateuse
après injection de produit de contraste et une analyse en fenêtre osseuse. L’IRM est devenue l’examen de référence dans la pathologie thrombotique veineuse cérébrale, mais n’apporte pas de bénéfice évident par rapport à l’angioscanner pour l’étude du sinus caverneux. La place de l’héparinothérapie reste discutée, elle diminuerait seulement le nombre de complications (extension du thrombus), sans diminuer le taux de mortalité, mais pourrait favoriser l’embolie septique, voire l’hémorragie cérébrale mortelles [2]. La durée de l’anticoagulation est non consensuelle, et repose sur une concertation neuro-chirurgicale. Conclusion La prescription d’anti-inflammatoires, dans les pathologies infectieuses ORL expose à la survenue d’infections extensives avec complications thrombo-septiques cérébrales. La thrombophlébite cérébrale septique est rare et parfois difficile à diagnostiquer. Les techniques de neuro-imagerie non invasives, réalisées en urgence offrent une analyse anatomique locorégionale précise, confirment le diagnostic de mastoïdite, et dépistent les complications intra-crâniennes associées, telles l’hématome intra-parenchymateux. Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. Références [1] Babin E, Ndyaye M, Bequignon A. Thromboses otogènes du sinus caverneux. À propos d’un cas. Ann Otolaryngol Chir Cervicofac 2003;120:237–43. [2] Park SN, Yeo SW, Suh BD. Cavernous sinus thrombophlebitis secondary to petrous apicitis: a case report. Otolaryngol Head Neck Surg 2003;128:284–6. http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2015.10.211 CA200
Un effet indésirable du déférasirox (Exjade® ) pouvant avoir de lourdes conséquences
R. Bouvet ∗ , F.X. Catherine , S. Audia , S. Berthier , V. Leguy , M. Samson , B. Bonnotte Médecine interne et immunologie clinique, CHU de Dijon, Dijon, France ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (R. Bouvet) Introduction Le déférasirox (Exjade® ) est un chélateur du fer largement prescrit dans les surcharges martiales chroniques posttransfusionnelles. Nous rapportons le cas d’une patiente ayant présenté un nouvel effet secondaire du déférasirox qui aurait pu avoir de lourdes conséquences fonctionnelles. Observation Une patiente de 43 ans, aux antécédents de lymphome hodgkinien de type scléronodulaire traité par ABVD et radiothérapie considéré en rémission depuis 2005, était suivie en médecine interne pour une anémie hémolytique auto-immune (AHAI). L’AHAI s’était avérée réfractaire à la corticothérapie, au rituximab, à la splénectomie, au cyclophosphamide et à la ciclosporine. Elle a bénéficié de traitement symptomatique à type de nombreuses transfusions itératives responsables d’une hémochromatose secondaire pour laquelle un traitement par déférasirox 1000 mg/j a été débuté. Trois semaines après le début du traitement, la patiente a présenté une asthénie sévère, des vomissements et des signes de déshydratation extracellulaire. Le bilan biologique révélait alors une insuffisance rénale aiguë avec une créatininémie à 234 mmol/L, une urémie à 22 mmol/L, une protéinurie à 0,73 g/j associée à une éosinophilie à 900/mm3 et une éosinophilurie positive. Du fait de la forte suspicion d’une étiologie médicamenteuse, la biopsie rénale n’a pas été réalisée. Une suspicion d’insuffisance rénale aiguë immuno-allergique secondaire au déférasirox entraînait l’arrêt du médicament incriminé associé à une réhydratation et correction des troubles hydroélectrolytiques. Une semaine après l’arrêt du médicament la fonction rénale s’était normalisée.