CONCBIrrlONS ACTUELLF.S DE L'~MOTION
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VUES PSYCHANALYTIQUES SUR LES I~MOTIONS PAP,
DANIELLAOACHE
( Univers#d de Paris, Sorbonne, Paris) I.
~ M O ~ O N ~r An~CT
Le terme <<6motion>>est peu employ6 dans la litt6rature psychanalytique. Sans doute ~ cause du fair q, e la litt6rature psychanalytique a 6t~ :l'abord une litt6rature de langue alk ,nande, c'est le terme affect qui :L pr6valu. Des tentatives pour d61imiter |'emploi des termes affect, 6motion, sentiment, n'ont pas abouti. Affect est employ6 darts le sens le plus large. Dans une masse consid6rable de fairs et d'id6es, on peut introduire quelque clart~ en formulant diverses oppositions: 1. On parle d'affect ~ propos de d6charge affective massive,, chez renfant et chez radulte, mais aussi de sentiments contr616s, de <
, affects <) de Reich (postures ou gestes st6r6otyp6s, mimiques faciales ou vocales, etc.). 3. On parle d'affects /L propos de manifestations aigues, ou chron'lues, de port~e pathologique ou caract6rologique. 4. Les affects peuvent encore ~:tre l~nibles ou agr6ables. 5. Les affects peuvent etre vagues, ind6termin6s ou, au contraire, qualifids et de signification sp6cifique. Ces oppositions n'6puisent sans doute pas la diversit6 des points de rue .,.ous lesquels les affects peuvent etre consid6r6s. Comme ces points de rue ,~'.ecombinent, il est clair que la vieille distinction de r6motion-choc et ,:le r6motion-sentiment ne suffit pas/~ rendre compte de leur diversit6. Devant le probl6me de la d6finition de !'affect ou de r6motion, la psychanalyse se trouve dans une situation qui n'est ni meilleure ni pire que ceUe des autres disciplines psychologiques. L'affect est une qualit6 toujours pr6sente de la conduite, de rexp~rience et de la co qmunication. Nous isolons certains fragments de leur ensemble et de leur suite parce que la qualit6 a,Tective y apparaR au premier plan. L'dmecgence d'affects appa~-emment isol6s, souvent observ6e en psychanalyse, ne d6ment pas cette fa¢on de voir; la psychanalyse montre que c'est d'abord cet isolement mSme de
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l'affect qui le rattache/t l'ensemble de la personne, dans le cas, par exemple, de rirruption d'un affect isol6 chez un obs6d6, et elle s'efforce, en rattachant 17affect/L un contexte latent, d'en d6chiffrer la signification et la fonction. I1. VUF~ COURANTESSUR L'~VIOTION DANS L'EXPi~RIENCEPSYCHANALYTIQUE Pla~ons-nous d'abord dans la perspective du psychanalyste praticien, laissant de c6t6 l'61aboration th6orique et tentant de d6gager quelques-unes des observations et des vues courantes qui ont pour objet l'~motioa dam la th6rapie analytique. La cure psychanalytique a 6t6 oppos6e A la c~tharsis, clans laquelle on pensait que l'abr~action des affects li6s au conflit pathog6ne jouait un rSle essentiel et m~me principal. Or, si la catharsis a 6t6 critiqu6~ et abandonn~e, :'est que l'abr~action des affects avait des effets seulement passagers et ne suffisait pas A d6goger le sujet de l'emprise de ses conflits inconscients. Tel est en revanche le but de la cure psychanalytique, A propos de laquelle on peut par suite se demander si l'6motion y joue encore un r61e, et lequel. Beaucoup de patients viennent A ranalyse parce qu'ils sent #n6s par des affects, dent l'exemple le plus familier est l'angoisse. D'un point de vue c!escriptff, l'angoisse, sans d6termination apparente, peut suffire ~ empoisonnet l'existence du consultant. I1 est plus frequent que l'angoisse, ou d'autres affects p6nibles, se m~lent ~ des symptbmes et A rensemble de l'existence. Plus rarement, on vient consulter pour une indifference affective #n6ralis~e ou limit6e ~ certaines aires, indifference dent on a souvent not6 qu'elle est une <>. Bien des traits de caract6re sent des attitudes affectives consolid~es. Au total, il est constant que la vie affective du patient pose des probl6mes; ainsi le premier entretien avec un dipsomane peut suffire pour montrer au clinicien que le dernier acc6s a 6t6 motiv6 par un 6tat A peine pergu de mauvaise humeur et de mb:ontentement de soi. D~s que le patient est aux prises avec la situation analytique et l'application de la r~gle de libre association, on voit raffectivit6 intervenir. La situation analytique, en elie-m~me, constitue une exp6rience sans pr~c6dent, devant laquelle il est compr6hensible que l'anxi6t6 se manifeste, parfois d'une mani6re aigu6, plus souvent sous la forme larv6e de rinqui6tude ou de la perplexit6. Le patient fait alors intervenir s-,s d6fenses, c'est-a-dire qu'il d6veloppe des r6sis~ances ou, pour mieux dire, un transfert de d6fense. Le transfert de d6fense donne lieu/t deux observations: la premi6re est qu'il est dirig6 centre des 6motions; la seconde est qu'il peut, ~ cette fin, utiliser des 6motions ou des attitudes 6motionne~les. La d6fense centre les 6motions prend souvent la forme d'attitudes crisp6es, tendues; parfois, ere s'exprime
CONCEFrION$ ACTUELLES DE L'I~MOT~ON
sans ~luivoque, comme chez une patiente qui, chaque lois qu'elle ressentai~t un d6but d'~motion, se levait du divan et se pr6parait Apartir. Plus masqu6c et plus subtile, la d6fense centre l'6motion s'exprime par une attitude g6n6rale et diffuse, comme la bonne humeur, la plaisanterie, l'ironie, le sarcasme; cette attitude peut rester Iongtemps dissimul~e, comme chez un de nos patients qui r6v61a, apr~ une longue l~riode d'analyse, qu'il 6tait rare qu'il s'6tendit sur le divan sans s'etre pr~lablement livr6 A une sorte de ~ricane.. ment int~rieur~>. Dans tous ces exemplcs, l'attitude 6motionnelle constitue un <~ran afl'ectif}~, qu'il faut souvent longtemps pour percer. Dans une teile conjoncture, ce centre quoi se d6fend le patient, c'est centre les 6motions ~nibles qui ont sanctionn6 l'expression de ses tendances reprochables et motiv6 leur r~pression. Si ces tendances reprochables sent 6veill~es, ou plut6t r6veill~es, l'angoisse, la culpabilit6, la honte, le d6goi~t qu'elles ont induits le seront aussi. C'est done la menace ou l'imminence de ces 6motions l~nibles qui motivent les operations d6fensives du sujet. Si ces operations d6fensives r6ussissent, l'affect p6nible est 6vit6. Si elles 6chouent, l'affect risque de se d6velopper avec une intensit6 redoutable. Ces observations concr6tisent la remarque que toute op6ration d6fensive est dirig6e centre des affects, bien que l'on parle surtout de la d6fense centre los pulsions; cependant, si l'on peut decrire certaines diff6rences entre la d6fense centre les pulsions et la d6fense conlre les affects, les m6canismes de d6fense, dans l'ensemble, sent les m~mes. On comprend par 1~ qu'un laps de temps assez long soit le plus souvent n6cessaire pour que se d6veloppe la n6vrose de transfert dent l'dlucidation et la r&luction repr~sentent le noyau de la th6rapie psychanalytique. On ne saurait trop souligner l'intensit6 et la diffusion des affects connexes/t la n6vrose de transfert, affects qui ne sent pas seulement l'amour, la haine ct l'ambivalence, mais qui illustrent toute la gamme des attitudes 6motionnelles les plus diff6renci6es, comme la culpabilit6, le d6gofit, le soupcon, le sentiment d'injustice subie, le ressentiment vindicatit, l~dia~ion. C'est '~ la n6vrose de transfert que se rattache l'6mergence d'affects apparemment isol6s, par exemple une subite explosion de larmes, voire de sanglots. Nous voudrions surtout remarquer que, bien que l'on d6finisse couramment le transfert par le ddplacement d'un affect apFartenant au pass6 sur la personne de l'analyste, l'affect n'est cependant qu'une manifestation entre autres du transfert, quelque importance qu'il ait pour t6moigner de l'engagement du patient et 6tablir sa conviction. Ce qui se transf6re, en rdalit6, c'est toute une ~tranche)) de la vie du patient ou, pour mieux dire, l':nsemble de la probl6matique de ses relations a v ~ les autres et avec luim~me, et non pas seulement des affects. Et c'est l/t, pr6cis6ment, ce qui per-
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met de d~chifl'rer l'affect transf~r~ et d'en d~vouvrir la signification. L'interpr~tation n'en devient opportune et efficace clue lorsque le patient n'e~t plus sous la compl6te emprise d'un paroxysme ~motionnel et qu'il est en mesure de prendre une certaine distance. L'~volution favot°~ble de la cure modifie le r~gime ~motionnel. Le patient devient plus tolerant aux tensions, il se d~gage progres~;ivement de l'angoisse, en m~me temps qu'il devient plus capable d'exptessions ~motion~elles quatifi~es. 1] s'achemine vers une condition p~ychologique plus proche de la sant~, q~'~exclut aussi bien l'intemp~rance affective aue l'inhibition affective. La psychanalyse n'est pas une psycholosie de la vie ~motionnelle mais bien plutbt une exploration des relations du sujet avec lui-m~me et avec le,~ autres. Mais, dans ¢ette perspective, les ~motions jouent un rble important. Nous avons indiqu~ leurs rapports avec la r~sistance et le transfert. De plus, l'abr~action des affects joue un r61e dans la familiarisation du sujet avec les situations redout~es et les tendances reprochables. Un des r~sultats d'une psychanalyse r~ussie est une modification normative du r~gime ~motionnel du suje~. Ill.
S~0RLA TH~ORIE PSYCHANALYTIQUEDES AFFECTS
En c~pit de l'importance des affects dans la cure psychanalytique, les travau~: th~oriques ne se sont gu~re attaches ~ cette question. L'histoire de la th~orie psychanalytique en rend compte: apr~s la p~riode des c,igines o~ l'analy,,.e ~tait encore real distinguee de la catharsis, la th~orie s'est~'~:r~e sur les instincts, puis, a partir des ann~es 20, sur la psychologie de l'Ego, si b:-.n que la th~orie des aff,~ts est fare de fragments, lesquets, par surcroit, appartiennent a diff6rentes p6riodes de l'histoire des idles psychanalytiques. Ce~endant, dans les dix derni~res ann~es, I'int~ret s'est port6 sur les affects, et ron dolt "~cette orientation quelques travaux importants. Ceux de David Rapaport constituent la tentative lc plus synth~tique pour representer, en ce qui concerne les a~t'ects, l'6volution, les tendances et les probl~mes de la psy,'hanalyse. Lais.,~,nt de c6t~ l'histoire, nous en r~umerons les vues esscntielles afin d'6ta~,~r unc base pour discuter la position psychanalytique et essayer de porter plus loin notre r~flexion. La th~orie qui se d~gage de plus de cinquante ann~es de litt~rature psychanalytique fait d'abord unc place importante a la constitution ht~rbtitaire de l'etre humaia. Cette idle est sl~ili~e par Rapaport sous la forme de voles de d~charges et de seuils inn,s, qui doivent etre consid6r6s comme des propri~t~s de l'espb~e; ce caract~re inn~ fonde le r61e des affects clans la conununication et l'empathie. Les observations faites sur les jeunes enfants per~T~ettent de rattacher a l'h~r~dit~ des variations :individuelles, telles que
CONCEPTIONS Acrur~I:.Es DE L'I~MOTION
la pr&iispo_-.i~on a l'anxi~t~, ou ~. des &tuivalents psychosomatiques, voire des <). Comme l'id~e, et sur le m~me plan que l'id~e dont l'expc~rJence montre qu'il peut avoir un sort different (~tre r~prim~ alors que i'id~e est exprim~, ou inversement), l'affect constitue dans cette perspective un repr~sentant de la pul~ion. La conception du d~veloppement a laquelle se r~f~re Rapaport permet de caract~riser sa position comme <
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d~fensif. Surtout, c'est le d~eloppement de la fonction de signalisation des affects: des affects mod~r6s servent dor~navant de signaux contre le danger ext~r~eur et contre le danger int~rieur de l'inondation affective- ,,it Moi, ~crit Rapaport, qui ~t rorigine subissai~, les affects passivement, parvient les contr6ler et ~ les !ib6rer sous la forme mod~r~e de signaux d'anticip~tio,.v~ (1954, p. 306). On rejoii'~tici la r6vision freudienne de la th~orie de l'ango.sse qui, de reffet de la r~pression, en a fait un signal de danger et le motif le plus typique de la r~pression. Certains aspects du d~veloppement des affects sont plus sp~cifiquement en rapport avec la structuration de l'appareil psychique du (~a, Moi et Surmoi. Cette structuration entraine la continuit6 de cert,'~ins conflits et tensions, et par l~-meme de certains affects, dont l'exemple le plus parlant est le sentiment de culpabilit6. Pour certains, comme E. J'acobson, il est commode de distinguer entre les tensions intrasyst6miques et les tensions intersyst~miques. Pour Rapaport, ces affects continus repr~sentent plut6t rint~gration d'un ensemble complexe, dans lequel chacune des instances psychiques joue son r61e. Ainsi l'affectivit6 de radulte, en contraste avec celle du jeune enfant, se caract~rise par son polymorphisme, clans leque I rexistence d'affects teml~r~s, d'affects-signaux, d'affects de d6fense, n'exclut pas rirruption de d(:charges affectives massives. On ne saurait trop insism" sur la variabUit~ individueile, roptimum pouvant ~tre confu comme un compromis qui exclut la rigidit~ ou rinhibition affective comme rintemp~ran~.e affective" ~Une vie affective riche et modul~e apparak comme rindice ¢~'un Moi fort~ (1954, p. 306). Si l'on consid~re le travail de Rapaport c¢,mme repr~sentant la tentative la plus synth~tique et la plus typique pour ~laborer une th~orie psychanalytique de raffect, on peut ¢onsid6rer cette th~iorie comme situant les affects dans un ~mod~le m~tapsychologique~, c'est-~-dire un module tenant compte la fois du conflit des forces en presence, des quantit~s d'~nergie, de la structure de rappareil p~,ychique et de la psychog6n~se. Le noeud de la th~orie est qu'au cours du d~veloppement de la vie ~motionnelle, la r6gulation des ~motions tend a passer de rlnconscient (ou du (~a) au Moi. La tendance de Rapaport est 6e methe l'accent s,ur le point de rue ~onomique, c'est-a-dire sur les rapports des quantit~s ¢~'~nergie en pr~se~.ce, les effets de tension et les processus de d~charge auxquels elles donnent lieu. IV.
RE.M~XQUESSUR LA TH~'ORIE PSYCHANALYTIQUE DES AFFECTS; PERSPECTIVES NOUVELLES
Ce r~sum6 ne fait pas droit A l'6rudition, A la rigueur et A la subtilit~ du texte de Rapaport. Nous prendrons cepcndant la libert6 de rutiliser
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comm¢ I¢ point de d6part de rcmarques q~i nous conduiront ~ des perspectives diff6rentcs. On pvut se demander s'ily a ~Juelquechose de sp~cifiquement psychanalytique daas la vue selon laquelle ~'affectest la d~harge d'une charge affective, laquellv ¢st une pattie de la p~:tlsion.Que l'6motion 6mane du syst~me des tendances e.st une rue g6n~ralem~.nt accept~e; les 6motions sont ent6es sur des besoins, et los besoins sont charges d'~motions: ce sont des <<6mois)>, et/L r~moi propre au I~esoin s'ajoutent des anticipations d'un ton 6motionnel plaisant ou d6plaisant. Nous nous bornerons, au passage, A nous questionner sur la notion de seuil de la pulsion que Rapaport distingue/~ tout moment du seuil de I'affect. Com~ne le concept de tendance, le concept de pulsion est une construction, et nous ne connaissons la pulsion que par ses mani:e~tations. D6s lors, on ne voit pas comment on peut parler d'un <) de la pulsion. Cett~; fa¢on de presenter los choses se r6f6re ~ des donn6es psychopathologiques, principalement au fait que ia repr6sentation seule peut ~tre rdprim6e, comme dans rhyst6rie, ou l'affect seul, comme dans la n6vrose obsessionnelle, ou l'un et rautre. Mais elle laisse dans rombre les rapports particuliers de l'affect et de rid6e: raffect repr6sente davantage l'6tat du sujet, et l'id6c l'objet, ou robjet-but, vers lequel tend 'a pulsion. Certes, l'exp6rience psychanalytique donne roccasion d'observe~ des affects d6tach6s, isol6s d'un contexte significatif; au cours d'une s6ance, par exemple, un sujet est tout/L coup pris d'une crise de larmes, ou d'un fou rire 6nigmatiques; le travail analytique consiste pr6cis6ment ~ rattacher cos expressions 6motionnelles ~ une situation et ~ un objet, par exemple au psychanalyste et au transfert. En d'autres termes, un affect est une fa¢on de r6pondre/~ une situation (.~t de riser ou d'intentionner un objet; rid6e repr6sente en partie la pulsion, notamment le but/~ atteindre, mais elle repr6sente aussi robjet sur lequel ce but devrait s'accomplir. Ainsi, situer l'affect et l'id6e sin' Ic mSme plum comme deux r6v61ateurs de la pulsioh donne un mod61e insuliisamment 6labor6. Quant aux rapports de raffect et de l'action, la th6se la plus notre est que rexpression affective de la pulsion se substitue/L rexpression active, lorsque raction efflcace est empOxh6e par des obstacles ext~rieurs ou intd-
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rieurs (th~rie confl|ctuelle de l'affect). Ceci est vrai grosso modo, et tout le monde est 6~ccord sur le fair que la perturbation ~motionnelle ;nterf~re avec l'action c~cace (rajournement de r~motion peut clans certains cas rendre possible raction et~cace); en tant que r~ponse, l'~motion est une r6ponse surtout auto-plastique Coouleversement du corps et de la conscience) et, en ce sens, elle peut ell effet ~tre consid6r& comme use r6gression. Mais ces vues, qui ne sont pas propres A la psychanalyse, ne rendent pas compte de la totafit~ des fairs. Tout d'abord, raffect n'est pas seulement motive; il est motiva~t. Ce n'est pas sculement une r~ponse, c'est aussi une question, et il ne mot~;ve pas seulemenl, des actions auto-plastiques conune le boule. versement ~x~otionnel et corer ~e les operations d6fensives. L'action et~cace, le travail productif sont plus ,!ifliciles si le sujet agit A contre-coeur, s'il n'est pas ~motiv~.~, et comment peut-on dire qu'il est motiv6 sans i~Lpliquer au moins un certain ton ~motionnel, comme la bonne humeur ou l'entrain, un niveau ~ptirnum de tension. L'action ext~rofective eUe-m~me n'est pas une d~charge de la pulsion qui exclut la d~harge 6motionneUe: la d~charge active est m~l~e de d~harge affective; elle apparait souvent comme un rem60e contre la tension affective; elle modifie le ton ~motionnel, et cette modificatio~ induit ~ son tour de nouvelles actions; le sujet s'achemine vers l'ach~vement de l'action ~ travers une alternance de tensions et dc d~charges qu'acq:ompagnent des modulations ~motionnelles plus ou moins intenses (E. Jacobson). Ceci fair justice des rues trop simples qui opposeraient l'affect ~ l'oction comme la tension ~ la d6tente. Cherchons mamtenant dans quelle voie nous ont orient6 ces r~flexions. Le mod¢le psychanalytique rattache ~troitement raffect A la pulsion, mai~ ne tient pas assez comp~e des liens de la pulsion et de l'affect avec robjet ou la representation de l'objet. Cette remarque nous am6ne A des rues plus g~n~rales sur l'histoire de la psychanalyse et les caract~res de la th~orie psychanalytique. Rapaport consid~re la p~riode structurale et ~gologique comme I~ derni~re p~riode de l'histoire de la ~h~orie psychanalytique. Or, au cours des an~es 30, de nouvelles preoccupations se sont fa~t jour, qu'expriment dans le langage du m~tier le recour~,; frequent A des expressions telles que ~relations d'objet,, ~relations interpersonnelles,. L'interpr~tation de rhistoire des idles conduit A dire que la th~orie psychanalytique est entr~c dans une quatri~me p~riode, que nous appelons pour notre part ~interpsychologique~; bien plus que dans la p~riode pr~.c~dente, on se pr&~,cupe du r~le de l'entourage psychanalytique, de rinteraction du psychanaly~te et du psychanalys~ (contre-transfert), de la communication et du langage. Preoccupations qui d~s l'origine ont ~t~ pr&entes au sein de l'exl~rience
CONCEPTIONS ACI't~ELLF,S DE L'I~MGTION
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psychanalytique. D'ot~ un d~accord entre l'exp6rience psychanalytique, qui est une experience intersubjective, et la conceptualisation psychanalytique, qui a tendu a isoler rindividu, qui a ~t~, suivant l'expression de John Rickman, une ), tels que la d~pression, la m~lance;ie, la manic, a montr~ qu'elles ~taient des r~seaux complexes de relations inter-et intrasubjectives avec des objets externes et des objets ((int~riori~s)); la m~iancolie a ~t~ rapproch~e du deuil, et le deuil consid~r~ comme un travail par lequel le sujet tente de se d~tacher de robjct perdu; ia manie est une (), une <
Evaluation de rapport de la psychanalyse ~ la connaissance des ~motions Pour terminer, nous tenterons un bilan de rapport de la psychanalyse la connaissance des ~motions, du point de vue de la psychoth~rapie, de la psychopathologic et de la psychologie. 1. En psychoth~tapie, la psychanalyse a mont~ les rapports des ~mo-
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tions avec la r~istance (d6fense contre les ~motions et 6motions (-mine d6fenses), avec le transfert (retour ecmn6sique des ~motions pass~s); Fabr6action rend compte de la catharsis plus clue de la psychanalyse, mais etle joue un r61e darts l'eiticacit6 th6rapeutique de la cure, bien qu'elle ne ~oit pas d&-~ive et qu'elle puisse constimer une r~sistance; au cours d une psychaaaly:e ,eaccomplit une r(~klucation ~motionnelle qui substitue tc contr61e du sujet a l'intem#rance 6motionneUe, aux tensions 6motionnelles #nibles et ~t l'inhibition des ~motions. 2. En psychoputhologie, la psychanalyse a situ~ les 6motions au coeur du conflit n~vrotique, en articulant celui-ci par la notion de la d6fense du sujet contre les 6motions #nibles, que celles-ci soient combattues comme telles ou comme consequences des tendances r~iprim~es. Elle a renouvel~ et consid~rablement enrichi la pathologie de l'affectivit~, qu'il s'agisse de l'hyper~motivit~ ou des d6r6glements majeurs de l'humeur. 3. Du point de vue psychologique, en envisageant sous cet angle les vues les plus #n~rales auxquelles aboutit la conceptualisation th~orique, de nombreuses idles sont communes ~t la psychanalyse et ~t d'autres disciplines psychologiques. Ce qui est propre ~t la psychanalyse est la raise en place des 6motions darts le cadre d'un mod61e ra6tapsychologique, avec une insistance particuti~re sur le point de vue ~:onomique, c'est-~t-dire le rapport des ~motions avecla tension et la d6tente. A notre avis, les tentatives de synth~se th~orique comme celle que nous avons prise comme exemple, n'ont pas assez mis en lumi6re les implications les plus importantes de l'ex#rience psychanalytique, savoir que les 6motions ont un sens dans la communication du sujet avec les autres et avec lui-meme; dans l'ex#rience psychanalytique, l'~motion apparatt comme un signifiant dont la signification est ~t d~chiffrer; elle dit souvent quelque chose que la parole ne dit pas, ou ,Clu'elle ne peut pas fire; comme ~'a ~crit un philosophe: ~da psychanalyse nous permet de comprendre les ~motions comme des pens~es,~.
FROM PERCEPTION TO EMOTION AND ACTION l~ly MAGDA B. AKNOLD
(Loyola University, Chicago, IlL) To the layman, emotion is an experience sui generis, different in quality from either perception or organic sensation. But to the modern psychologist, brought "Jp in the behavioristic tradition, the very status of the phenomenon