Journal d'imagerie diagnostique et interventionnelle 2019;2:305–308
Comment je fais ?
Comment je fais une IRM pour une lésion ovarienne ? How to perform an MRI for an ovarian lesion? A. Bekhouche E. Pottier C. Abdel Wahab A. Milon E. Kermarrec I. Thomassin-Naggara
Service de radiologie, hôpital Tenon, Paris, France Reçu le 3 juillet 2019 ; accepté le 15 juillet 2019 Disponible en ligne sur ScienceDirect le 4 octobre 2019
RÉSUMÉ
MOTS CLÉS
Introduction. – La contribution prépondérante de l'IRM pour la caractérisation des masses annexielles est sa spécificité. Une standardisation des protocoles et des comptes rendus permet une prise en charge adaptée, permettant d'éviter des chirurgies extensives lorsque cela est possible, tout en assurant une détection précoce des lésions à haute probabilité de malignité. Messages principaux. – Le protocole IRM doit comporter au minimum une séquence axiale T2 abdomino-pelvienne, une séquence sagittale T2, une séquence axiale T1 sans et avec saturation de la graisse, une séquence axiale diffusion, une séquence T1 FS après injection dynamique de gadolinium et une séquence T1 FS injectée tardive. Conclusion. – La conclusion du compte rendu doit comporter l'ADNEX MR score et éventuellement une ou plusieurs hypothèse(s) anatomopathologique(s).
IRM Protocole Ovaire ANEX MR Score
KEYWORDS MRI Protocol Ovarian ADNEX MR Score
© 2019 Société française de radiologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
SUMMARY Introduction. – The preponderant contribution of MRI for the characterization of adnexal masses is its specificity. Standardization of protocols and reports allows appropriate care, to avoid extensive surgery when possible whilst ensuring early detection of lesions with high likelihood of malignancy. Main messages. – MR protocol must include T2W sequences (axial and sagittal), T1W sequence with and without fat suppression, DWI sequence and also DCE MRI to build time intensity curves. Conclusion. – The MR report's must conclude with ADNEX MR Score and, eventually, pathological hypothesis. © 2019 Société française de radiologie. Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
TECHNIQUE Préparation de la patiente Aucune recommandation ne peut être proposée pour le calendrier de l'IRM par rapport au cycle menstruel. Un jeûne de 3 à 6 heures est recommandé avant de réaliser l'examen. Une réplétion vésicale modérée est recommandée. En pratique, la patiente doit uriner environ 1 à 2 heures avant l'examen.
Le décubitus dorsal est recommandé. Le procubitus est une « option » dans la claustrophobie. La contention abdominale par une large ceinture abdominale est recommandée. L'utilisation d'un agent antipéristaltique (par exemple, le glucagon, la butyl-scopolamine), sauf contre-indication (par exemple, le diabète ou le phéochromocytome), est le moyen le plus efficace de limiter l'artéfact du péristaltisme intestinal et est recommandée. La spasmolyse intraveineuse semble plus fiable que
Auteur correspondant : A. Bekhouche, service de radiologie, hôpital Tenon, 4 rue de la Chine, 75020 Paris, France. Adresse e-mail :
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https://doi.org/10.1016/j.jidi.2019.07.004 © 2019 Société française de radiologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 305
A. Bekhouche et al.
Comment je fais ? l'administration intramusculaire et le glucagon est meilleur que le butyl-scopolamine.
Choix de l'IRM et de l'antenne Il n'y a pas d'étude comparant l'efficacité des IRM 1,5T vs 3T. Par conséquent, vous pourrez réaliser les examens sur les deux types d'IRM. Les antennes pelviennes à réseau phasé sont recommandées à 1,5T et à 3,0T.
Séquences obligatoires Séquences en pondération T2 : séquence axiale T2 abdomino-pelvienne (remontant jusqu'aux hiles rénaux) ; séquence sagittale T2 ; séquence axiale T2 en coupes fines centrée sur la masse à caractériser. Séquence axiale T1 sans et avec saturation de la graisse. La technique du « dixon » est ici très utile du fait de la présence de séquence « graisse uniquement » permettant une meilleure visualisation de petites portions graisseuses en cas de tératome. Séquence axiale diffusion abdomino-pelvienne. Séquence axiale ou sagittale T1 FS après injection dynamique de gadolinium afin de pouvoir construire des courbes de rehaussement d'une éventuelle portion tissulaire par rapport au myomètre externe. En cas d'hystérectomie, la courbe de référence sera celle du psoas. Séquence 3D T1 FS après injection tardive (2 min 30) de gadolinium (acquisition en axial ou sagittal).
RÉSULTATS [1–6] Origine de la lésion La première étape dans la caractérisation d'une masse annexielle indéterminée est la détermination de son origine annexielle. Les signes à rechercher en faveur d'une origine annexielle sont : la présence de parenchyme ovarien périphérique (« crescent sign ») ;
Figure 1. Description du signal sur les séquences T2, T1 et diffusion.
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la vascularisation par le pédicule lombo-ovarien : à droite, la veine ovarienne naît de la veine cave inférieure et à gauche, elle naît de la veine rénale gauche (d'où l'intérêt de la séquence axiale T2 abdomino-pelvienne) ; l'absence d'ovaire homolatéral visible. En cas de visualisation de deux ovaires normaux distincts de la masse, celle-ci n'est pas d'origine ovarienne. En présence de deux ovaires homolatéraux ou de masse ovarienne déplacée en avant ou en controlatéral, d'autant plus en présence de remaniements nécrotiques ou hémorragiques, pensez à la torsion et rechercher un œdème ovarien, un tour de spire et un œdème du pédicule ovarien.
Analyse morphologique Les séquences T2 vous permettront de décrire : la taille de la masse (3 mesures) et le grand axe d'une éventuelle portion tissulaire ; la forme et les contours de la masse ; le caractère uni- ou bilatéral.
Analyse du signal en T2, T1 et diffusion L'analyse du signal sur les séquences T2 et T1 sans et avec saturation de la graisse se fait en comparaison au psoas, au myomètre, à la graisse sous-cutanée et à l'eau (vessie ou LCR) : on décrira un hyposignal, un isosignal (ou signal intermédiaire) et un hypersignal (Fig. 1 et 2). L'analyse du signal en diffusion se fait en comparaison au signal de l'eau (vessie ou LCR) : on décrira un hyposignal ou un hypersignal. En cas de masse kystique : décrire si elle est uniloculaire, pauciloculaire (2 ou 3 loculi) ou multiloculaire ; en cas de masse multiloculaire, décrire si les loculi sont de signaux identiques ou différents et l'aspect des cloisons (nombreuses, régulières ou irrégulières, regroupées ou non, fines ou épaisses) ; décrire la présence d'une portion tissulaire (une portion tissulaire se rehausse) : végétation (endo- ou exokytique), cloison épaisse irrégulière ou nodule mural ; décrire la présence ou non d'une paroi rehaussée et son aspect (fine ou épaisse, régulière ou irrégulière) ainsi que la présence d'une cloison incomplète ;
Comment je fais une IRM pour une lésion ovarienne ?
Comment je fais ?
Figure 2. Description des différents fluides.
décrire la présence de portions solides non tissulaires (non rehaussées) : débris, phanères, caillots. . .
Courbes de rehaussement Les courbes de prise de contraste de la portion tissulaire décrite par rapport au myomètre peuvent être de trois types (Fig. 3) : type 1 : courbe progressivement croissante sans plateau ; type 2 : rehaussement modéré présentant un plateau ; type 3 : courbe pré-décalée par rapport au myomètre adjacent. Ces courbes permettent de différencier non seulement les tumeurs bénignes des tumeurs malignes avec une sensibilité, une spécificité et une précision diagnostique de 94 %, 80 % et 92 %, mais également de distinguer au sein des tumeurs malignes les tumeurs borderline des tumeurs invasives avec une sensibilité de 88 %, une spécificité de 80 % et une précision diagnostique de 84 %.
Score diagnostique La description de ces différents paramètres morphologiques et fonctionnels permet de calculer le score de risque de malignité ADNEX MR score (Tableau 1). Dans l'étude initiale, ce score avait d'excellentes performances diagnostiques avec une précision de 96 %. Ce score a été ensuite validé en externe par des études françaises, brésiliennes et coréennes. Avec un
score supérieur ou égal à 4, la sensibilité était de 91,7 % (IC95 % = 73–99) et la spécificité de 92,7 % (IC95 % = 86,7–96,6) pour faire prédire une tumeur maligne invasive ou borderline. L'aire sous la courbe était de 0,92 (IC95 % = 0,86–0,98). Une étude européenne multicentrique de validation de ce score (EURAD study) est en cours de publication.
Recherche de signes associés et hypothèse(s) anatomopathologique(s) Il faut décrire la présence de signes associés : signes d'hyperœstrogénie : épaississement endométrial, adénomyose ; signe d'hyperandrogénie : atrophie endométriale, hypertrophie clitoridienne ; épanchement péritonéal ; épaississement péritonéal : épaississement régulier ou irrégulier, nodules péritonéaux ; kyste d'inclusion péritonéal ; aspect des trompes ; torsion annexielle. L'ensemble de ces résultats (aspect morphologique et fonctionnel, ADNEX MR score, signes associés) et les informations clinicobiologiques (âge, statut ménopausique, symptômes, contexte, marqueurs. . .) permettront d'émettre une ou plusieurs hypothèse(s) anatomopathologique(s). On pourra distinguer :
Figure 3. Courbes de rehaussement.
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A. Bekhouche et al.
Comment je fais ? Tableau 1. ADNEX MR Score.
Risque de malignité (%) Classification
Score
Disparition de la lésion en IRM
0
Très faible risque
1
Kyste uniloculaire ou trompe avec hyperT2 (type 5) sans portion tissulaire
0–1,7
Faible risque
2
Kyste uniloculaire endométriosique, sans rehaussement interne Lésion graisseuse, sans portion tissulaire Absence de rehaussement pariétal Portion tissulaire en hypoT2W et hypo DW signal Kyste uniloculaire avec hyperT1 (type 3-4) (non graisseux ou endométriosique) 5,1–7,7
Risque intermédiaire 3
Kyste multiloculaire, sans portion tissulaire Portion tissulaire se rehaussant selon une courbe type 1 Portion tissulaire se rehaussant selon une courbe type 2
26,6–57,1
Risque élevé
4
Portion tissulaire se rehaussant selon une courbe type 3
68,3–100
Très haut risque
5
Implants péritonéaux
les lésions fonctionnelles : kyste fonctionnel, kyste lutéal hémorragique, endométriome ; les lésions infectieuses : abcès tubo-ovarien, tuberculose génitale ; les tumeurs épithéliales: séreuses : – cystadénome séreux bénin, cystadénome séreux borderline, cystadénocarcinome séreux, – cystadénofibrome, – tumeur de Brenner ; mucineuses : cystadénome mucineux bénin, cystadénome mucineux borderline, cystadénocarcinome mucineux ; les tumeurs germinales : tératome mature kystique, tératome immature, dysgerminome, tumeur du sac vitellin ; les tumeurs du stroma et des cordons sexuels : stroma : fibrome, fibrothécome, tumeur stromale sclérosante, cordons sexuels : Granulosa, Sertoli–Leydig; les autres tumeurs : métastases, lymphome. . .
Points à retenir Le protocole doit comporter au minimum une séquence axiale T2 abdomino-pelvienne, une séquence sagittale T2, une séquence axiale T1 sans et avec saturation de la graisse, une séquence axiale diffusion, une séquence T1 FS après injection dynamique de gadolinium et une séquence T1 FS injectée tardive. La première étape de l'analyse est de déterminer l'origine de la lésion. L'aspect morphologique, la description du signal sur les séquences T2, T1 et T1 FS et diffusion et la courbe de rehaussement permettent de donner l'ADNEX MR score.
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CREDIT AUTHOR STATEMENT Toutes les personnes répondant aux critères d'auteur sont répertoriées comme auteurs et tous les auteurs certifient avoir participé suffisamment au travail pour assumer la responsabilité publique du contenu, comprenant la participation à la conception, du design, de l'analyse, de la rédaction et de la révision du manuscrit. Déclaration de liens d'intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d'intérêts.
RÉFÉRENCES [1] FRANCOGYN, SFOG, ARCAGY-GINECO, CNGOF, Conduites à tenir initiales devant des patientes atteintes d'un cancer épithélial de l'ovaire. INCa, Recommandations et référentiels / Recommandations de pratique clinique 978-2-37219-410-5. [2] Thomassin-Naggara I, Daraï E, Lécuru F, et al. Diagnostic value of imaging (ultrasonography, doppler, CT, MR, PET-CT) for the diagnosis of a suspicious ovarian mass and staging of ovarian, tubal or primary peritoneal cancer: article drafted from the French Guidelines in oncology entitled "Initial management of patients with epithelial ovarian cancer'' developed by FRANCOGYN, CNGOF, SFOG, GINECO-ARCAGY under the aegis of CNGOF and endorsed by INCa. Gynecol Obstet Fertil Senol 2019;47:123–33. [3] Thomassin-Naggara I, Fedida B, Sadowski E, et al. Complex US adnexal masses during pregnancy: is pelvic MR imaging accurate for characterization? Eur J Radiol 2017;93:200–8. [4] Kang SK, Reinhold C, Atri M, et al. ACR appropriateness Criteria® staging and follow-up of ovarian cancer. J Am Coll Radiol 2018;15:S198–207. [5] Li YA, Qiang JW, Ma FH, et al. MRI features and score for differentiating borderline from malignant epithelial ovarian tumors. Eur J Radiol 2018;98:136–42. [6] Masch WR, Daye D, Lee SI. MR imaging for incidental adnexal mass characterization. Magn Reson Imaging Clin N Am 2017;25:521–43.