75e Congrès franc¸ais de médecine interne – Brest, 14, 15 et 16 juin 2017 / La Revue de médecine interne 38S (2017) A49–A109
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Découverte d’une insuffisance corticotrope chez des patients drépanocytaires hospitalisés pour crise vaso-occlusive et traités par morphine : un phénomène fréquent ? E. Flamarion 1,∗ , M. Michel 2 , C. Guillaud 3 , G. Lascu-Dubos 4 , A. Habibi 5 , E. Fois 6 , C. Droumaguet 7 , M. Khellaf 3 1 Département d’aval des urgences, 51, avenue du Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, Créteil, France 2 Médecine interne, CHU d’Henri-Mondor, Créteil, France 3 Médecine interne, hôpital d’Henri-Mondor, Créteil, France 4 Département d’aval des urgence, hôpital d’Henri-Mondor, Créteil, France 5 Unité des maladies génétiques du globule rouge–médecine interne, hôpital Henri-Mondor, Créteil, France 6 Unité des maladies génétiques du globule rouge, hôpital d’Henri-Mondor, Créteil, France 7 Médecine interne et diabétologie-endocrinologie, hôpital d’Henri-Mondor, Créteil, France ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail : edouard.fl
[email protected] (E. Flamarion) Introduction La morphine est couramment utilisée dans la prise en charge hospitalière de la crise vaso-occlusive (CVO) des patients atteints d’un syndrome drépanocytaire majeur (SDM) [1]. Des cas d’insuffisance corticotrope induite par la morphine ont été rapportés par plusieurs auteurs, notamment en oncologie [2] ; la morphine serait responsable d’un rétrocontrôle négatif au niveau hypothalamo-hypophysaire via l’activation de son récepteur [3]. L’impact potentiel de la morphine sur l’axe corticotrope au cours de la CVO chez le patient drépanocytaire n’est cependant pas connu. Nous rapportons ici notre expérience et la découverte d’une insuffisance corticotrope chez des patients drépanocytaires hospitalisés pour CVO ou syndrome thoracique aigu (STA) et traités par morphine. Patients et méthodes Cette étude exploratoire, prospective et monocentrique, a été menée d’avril à décembre 2016. Ont été inclus les patients adultes avec un SDM, hospitalisés pour CVO ou STA et traités par morphine en intraveineux. Une 1re phase de l’étude a concerné des patients pour lesquels une hypotension (définie par une pression artérielle (PA) systolique < 90 mmHg et/ou diastolique < 60 mmHg) a été observée au cours de leur hospitalisation et ce en l’absence de cause évidente. En guise de groupe témoin, une 2nde phase a concerné des patients sans signe clinique d’insuffisance corticotrope. Chez l’ensemble de ces patients, un dosage du cortisol plasmatique et de l’Adréno cortico-trophin hormone (ACTH) était réalisé à 8 heures. Le diagnostic d’insuffisance corticotrope était retenu si le taux de cortisol était inférieur à 140 nmol/L avec un taux d’ACTH inférieur à 8 ng/L et une supplémentation par hydrocortisone était débutée. À chaque fois que cela était possible, les patients avec insuffisance corticotrope étaient revus à distance de l’hospitalisation et de l’exposition à la morphine pour réaliser un test de stimulation à l’ACTH, ainsi qu’une IRM hypophysaire. Résultats Vingt-sept patients, d’âge médian 30 ans (18–43), suivis pour un SDM homozygote SS (25) ou hétérozygote composite SC (2), hospitalisés pour CVO (22) ou STA (5) ont été inclus. Aucune exposition cortisonique préalable n’était rapportée ; 6 patients avaient une hémochromatose post transfusionnelle sous traitement chélateur. Dans le groupe de patients hypotendus (n = 15 ; médiane PA 92/49 mmHg), 14 patients (93 %) avaient une insuffisance corticotrope (médiane cortisol 50 nmol/L, Q1–Q3 34–90 ; médiane ACTH 4,1 ng/L, Q1–Q3 2,2–7,9). Dans le groupe asymptomatique (n = 12 ; médiane PA 115/65 mmHg), une insuffisance corticotrope (médiane cortisol 51 nmol/L, Q1–Q3 40–75 ; médiane ACTH 7,3 ng/L, Q1–Q3 4,6–11,3) était objectivée chez 4 patients (33 %). La consommation médiane de morphine au cours des
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24 heures précédant le dosage hormonal était de 58 mg [30–68] dans le groupe de patients hypotendus et de 35 mg [23–49] dans le groupe asymptomatique. Parmi les patients avec une insuffisance corticotrope (n = 18), le test de stimulation à l’ACTH, réalisé à distance de l’hospitalisation chez seulement 5 patients, était normal et permettait l’arrêt de la supplémentation en hydrocortisone ; l’IRM hypophysaire, réalisée chez 4 patients, était sans anomalie décrite. Conclusion Dans cette étude préliminaire, nous avons objectivé une insuffisance corticotrope chez un nombre important de patients drépanocytaires traités par morphine lors d’une CVO ou d’un STA, et ce même chez des patients sans signe clinique apparent d’insuffisance corticotrope. Ces données devront être confirmées et précisées au travers d’une étude prospective cas/témoin portant sur un grand nombre de patients et l’impact d’un traitement substitutif par hydrocortisone sur l’évolution (durée, intensité) de la CVO devra être évalué. Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. Références [1] Habibi A, et al. French guidelines for the management of adult sickle cell disease: 2015update. Rev Med Interne 2015;36(5 Suppl. 1) [5S3-5S84]. [2] Rony D, et al. Association between serum cortisol and testosterone levels, opioid therapy, and symptom distress in patients with advanced cancer. J Pain Symptom Manage 2011;41(4):788–95. [3] Pende A, et al. Evaluation of the effects induced by four opiate drugs, with different affinities to opioid receptor subtypes, on anterior pituitary LH, TSH, PRL and GH secretion and on cortisol secretion in normal men. Biomed Pharmacother 1986;40(5):178–82. http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2017.03.048 CO031
Lymphohistiocytoses hémophagocytaires acquises de l’adulte : lymphopénie transitoire sans déficit de cytotoxicité lymphocytaire NK J. Carvelli 1,∗ , K. Mazodier 1 , C. Piperoglou 2 , C. Farnarier 1 , F. Vely 1 , J. Harlé 1 , E. Vivier 2 , G. Kaplanski 1 1 Service de médecine interne, CHU de la Conception, Marseille, France 2 Service d’immunologie, CHU de la Conception, Marseille, France ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (J. Carvelli) Introduction Les lymphohistiocytoses hémophagocytaires (HLH) sont caractérisées par des signes clinico-biologiques communs et sur le plan physiopathologique un « orage cytokinique inflammatoire ». Les HLH acquises touchent essentiellement l’adulte et sont secondaires à des infections, des cancers ou des maladies autoimmunes et inflammatoires. Les HLH génétiques concernent en général les enfants et sont liées à un déficit primitif de la cytotoxicité lymphocytaire qui fait partie des critères internationaux de diagnostic. Nous avons étudié la cytotoxicité lymphocytaire natural killer (NK) chez des patients atteints de HLH acquises pour déterminer si un déficit de la cytotoxicité lymphocytaire était commun aux deux formes de la maladie. Patients et méthodes Sur 2 périodes d’inclusion (2000 à 2004 et 2010 à 2014), nous avons constitué une cohorte prospective et multicentrique de patients atteints de HLH acquise (groupe HLH) en regard de 2 groupes témoins, témoins malades (groupe TM) et volontaires sains (groupe TS). Nous avons recueilli leurs caractéristiques clinico-biologiques. L’étude immunologique consistait en un immunophénotypage lymphocytaire complet et, si le nombre de cellules le permettait, une étude in vitro de l’expression de la perforine par les cellules NK, de leur dégranulation via l’expression
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membranaire du CD107/LAMP ainsi que de leur cytotoxicité naturelle contre les cibles K562 et de leur cytotoxicité dépendante des anticorps contre les cibles P815. Résultats Soixante-huit patients atteints de HLH acquises ont été inclus contre 34 dans chaque groupe témoin. La HLH était secondaire à une infection (n = 30), un lymphome (n = 18), un lupus systémique (n = 7), une maladie de Still en poussée (n = 3) ou idiopathique (n = 10). Fièvre, syndrome tumoral, pancytopénie, hyperferritininémie, hypertriglycéridémie, élévation du CD25 soluble et hémophagocytose médullaire caractérisaient les patients atteints de HLH par rapport aux témoins. Les patients du groupe HLH présentaient une lymphopénie profonde et globale, régressive après guérison. In vitro, l’expression de la perforine par les cellules NK était discrètement et transitoirement abaissée dans le groupe HLH alors que la dégranulation et la cytotoxicité des cellules NK étaient comparables dans les 3 groupes. Conclusion À la différence des formes génétiques, les HLH acquises sont caractérisées par une sévère lymphopénie et non par un déficit majeur de la cytotoxicité lymphocytaire, excluant la présence de mutations homozygotes touchant les gènes de la cytotoxicité chez ces patients comme dans les HLH primitives. La baisse transitoire de l’expression de la perforine chez certains patients pourrait cependant être due à la présence de mutations hétérozygotes ou de polymorphisme du gène de la perforine, actuellement en cours d’étude. Le déficit de cytotoxicité NK ne doit donc pas faire partie des critères diagnostiques de HLH acquise. Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. Pour en savoir plus Ramos-Casals M, Brito-Zerón P, López-Guillermo A, Khamashta MA, Bosch X. Adult hemophagocytic syndrome. Lancet 2014;38:1503–16. Rosado FG, Kim AS. Hemophagocytic lymphohistiocytosis: an update on diagnosis and pathogenesis. Am J Clin Pathol 2013;139(6):713–27. Henter JI, Horne A, Aricó M, Egeler RM, Filipovich AH, Imashuku S, et al. HLH-2004: diagnostic and therapeutic guidelines for hemophagocytic lymphohistiocytosis. Pediatr Blood Cancer 2007;48(2):124–31. http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2017.03.049 CO032
Une transfusion « ponctuelle » ne modifie pas l’interprétation des dosages biologiques utiles à la compréhension de l’étiologie d’une anémie. Résultats d’une étude prospective : l’étude BÉA/T A. Froissart 1,∗ , B. Rossi 1 , B. Ranque 2 , O. Steichen 3 , I. Jarrin 4 , J.F. Bergmann 5 , S. Dautheville 6 , N. Gault 7 , C. Roy 7 , V. Zarrouk 8 , B. Fantin 8 1 Médecine interne, hôpital Beaujon, AP–HP, Clichy, France 2 Médecine interne, hôpital européen Georges-Pompidou, Paris, France 3 Médecine interne, hôpital Tenon, Paris, France 4 Médecine interne A, hôpital Lariboisière, Paris, France 5 Médecine A, hôpital Lariboisière, Paris, France 6 Service d’accueil des urgences, hôpital Tenon, Paris, France 7 Département épidémiologie biostatistiques et recherche clinique, hôpital Beaujon, AP–HP, Clichy, France 8 Médecine interne, hôpital Beaujon, Clichy, France ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (A. Froissart) Introduction Le diagnostic étiologique d’une anémie nécessite la réalisation d’examens biologiques complémentaires tels que le volume globulaire moyen (VGM), la numération des réticulo-
cytes, le bilan martial, des dosages vitaminiques, des marqueurs d’hémolyse, la créatininémie. . . Il est communément admis que ces examens biologiques sont d’interprétation difficile après une transfusion de concentrés de globules rouges (CGR) mais cette conviction n’est pas étayée par la littérature scientifique. Patients et méthodes Nous avons réalisé une étude prospective multicentrique afin de comparer les dosages des principaux examens biologiques utiles à la compréhension du mécanisme d’une anémie, avant et après une transfusion de CGR. Les patients recevant une transfusion ont été inclus dans les services des urgences ou de médecine interne de quatre hôpitaux. Les variables suivantes ont été mesurées avant puis 48 à 72 heures après transfusion : numération formule sanguine (avec VGM et numération des réticulocytes), bilan martial (ferritinémie, fer sérique, transferrine, coefficient de saturation de la transferrine et récepteur soluble de la transferrine), folates sériques et intra-érythrocytaires, vitamine B12 sérique, lactate déshydrogénase (LDH), bilirubine totale, haptoglobine, test de Coombs direct, créatininémie et C réactive protéine (CRP). Nous avons analysé la modification des résultats après transfusion et évalué si des valeurs anormales avant la transfusion restaient anormales après, c’est-à-dire si les modifications observées avaient un impact sur le raisonnement étiologique. Résultats Soixante-dix-sept patients ont été inclus. Les valeurs médianes du VGM, du récepteur soluble de la transferrine, des folates intra-éryhthrocytaires, de la vitamine B12 sérique, de l’haptoglobine, des LDH, du test de Coombs direct et de la CRP n’ont pas été significativement modifiées après transfusion. En revanche, les valeurs médianes de la numération des réticulocytes, de la ferritinémie, du coefficient de saturation de la transferrine, des folates sériques et de la bilirubinémie totale ont été significativement modifiées par la transfusion ; toutefois, plus de 75 des valeurs normales (ou anormales) sont restées normales (ou anormales) (c’est-à-dire ne changeaient pas de classes) rendant la possibilité d’erreur d’interprétation quasi nulle lorsque les résultats post transfusionnels étaient interprétés à la lumière des données de la numération formule sanguine pré-transfusionnelle (en particulier le VGM). Conclusion L’interprétation des examens biologiques pour le diagnostic étiologique d’une anémie reste possible après une transfusion de CGR, en particulier si ces résultats sont analysés au vu des données de la numération formule sanguine pré-transfusionnelle. Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2017.03.050 CO033
Amégacaryocytose acquise : série rétrospective multicentrique de dix cas M. Chilles 1,∗ , C. Merlot 1 , T. Guery 2 , A. Arar 3 , M. Ebbo 4 , L. Terriou 5 , B. Deau-Fischer 6 , B. Godeau 7 , M. Michel 8 , B. Lioger 9 1 Médecine interne, nouvel hôpital d’Orléans (NHO), Orléans, France 2 Anatomie pathologique, nouvel hôpital d’Orléans (NHO), Orléans, France 3 Hématologie, nouvel hôpital d’Orléans (NHO), Orléans, France 4 Médecine interne, hôpital de la Conception, AP–HM, Marseille, France 5 Hématologie, hôpital Claude-Huriez, Lille, France 6 Hématologie, hôpital Cochin, Paris, France 7 Médecine interne, CHU d’Henri-Mondor, Créteil, France 8 Médecine interne, hôpital Henri-Mondor, Créteil, France 9 Médecine interne, 2, boulevard Tonnellé, Tours, France ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail : marie
[email protected] (M. Chilles) Introduction L’amégacaryocytose acquise (AMA) est définie par une thrombopénie acquise, secondaire à l’absence ou à la dimi-