Biosynthèse et métabolisme des phosphonolipides et phospholipides dans les hépatocytes de rat et chez Saccharomyces cerevisiae

Biosynthèse et métabolisme des phosphonolipides et phospholipides dans les hépatocytes de rat et chez Saccharomyces cerevisiae

MGmoires originaux BIOCHIMIE, 1982, 64, 859-865. Biosynth se et m6tabolisme des phosphonolipides et phospholipides dans los hdpatocytes de rat et ch...

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MGmoires originaux

BIOCHIMIE, 1982, 64, 859-865.

Biosynth se et m6tabolisme des phosphonolipides et phospholipides dans los hdpatocytes de rat et chez Saccharomyces cerevisiae. Jacques B A R A U D o et Andr6e M A U R I C E (Re£u le 31-3-1982, acceptd aprds r~vision le 5-7-1982).

Universit~ de Bordeaux H, Laboratoire de Biochimie, 146, rue L~o-Saignat, 33000 Bordeaux.

R~sum~.

Summary.

La ciliatine (acide amino 2-~thylphosphonique) injectde ?t des rats est convertie en phosphonolipide (PnE), comme la phosphoryl~thanolamine est convertie en phospholipide (PE). Les deux produits se retrouvent dans les mitochondries et microsomes des h@atocytes. Leur biogenbse se fait ?t un taux comparable. Leur trimdthylation, leur transfert in vitro en presence d'une prot~ine d'dchange sp~cifique de PE sont trks semblables. Par contre, la levure n'incorpore que trOs faiblement les deux pr~curseurs, ce qui montre que la voie cytidylique directe de synthkse est fortement r@rim~e. La petite quantit~ de PnE et PE [orm~e permet cependant une bonne trim~thylation. La [orte incorporation d'Jthanolamine s'expliquerait alors par un mdcanisme d'dchange de bases. La voie normale de synthbse de PE passe par la d~carboxylation de la phosphatidyls~rine et conduit ensuite ?t la phosphatidylcholine par trim~thylation. L'utilisation des pr~curseurs en trks [aible quantitd a permis de ne pas modifier le cours normal des biosynthbses.

In rat hepatocytes, ciliatine (2 aminoOthylphosphonic acid) is incorporated into phosphonolipid (PnE) by the same pathway leading from phosphorylethanolamine to phospholipid (PE). The two resulting lipids are isolated [rom mitochondria and microsomes. The rates o[ biosynthesis are quite comparable ; the processes of trimethylation and of in vitro transfer in the presence o[ a specific exchange protein are very similar. In yeast, on the other hand, the uptake of the two precursors is very slight, suggesting that the direct cytidylic pathway of phospholipid biosynthesis is strongly repressed. Despite small amounts o[ PE and PnE produced, methyIation occurs with a good yield. The good incorporation o[ ethanolamine may be understood by a base-exchange mechanism. The natural PE biosynthesis is achieved through the decarboxylation of phosphatidylserine, and ]ollowed by methylation leading to phosphatidylcholine. The use o[ very small amounts of precursors does not modi[y the natural course of phospholipid biosynthesis.

Mots-cl~s : phospholipides / phosphonolipides / ciliatine / mitochondries / microsomes / levure.

Key-words : phospholipids / phosphonolipids / ciliatine / mitochondria / microsomes / yeast.

Introduction. Les phosphonolipides sont caract6ris6s par la pr6sence d'une liaison covalente C - P ; les deux principaux, PnE et PnC, sont donc les analogues phosphoniques des deux phospholipides PE et Abr~viations : PC : phosphatidylcholine. PE : phosphatidyl~thanolamine. PL : phospholipides. PS : phosphatidylsdrine. PnC, PnE, PnL : d~riv~s phosphoniques correspondants. <> A qui route correspondance doit ~tre adress~e.

PC, priv6s de la liaison ester entre l'acide L phosphatidique et l'aminoalcool. Ces PnL, d6couverts chez certains protozoaires [1, 2] ont 6t6 trouv6s par la suite chez des bact6ries, invert6br6s et mSme chez des mammif~res [3-5] mais on sait que chez ces derniers l'origine en est exogbne car ils sont incapables de r6aliser la liaison C-P. Par contre, si on donne ?~ un rat un pr6curseur comme l'acide amino 2-6thylphosphonique (ciliatine), il pourra l'incorporer, en particulier sous forme de PnE. I1 a 6t~ montr6, tant in vitro [6] 61

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1. Baraud et A. Maurice.

que in vivo [7] que la synth~se se fait par l'interm6diaire de CMP-ciliatine (analogue de la CDP6thanolamine) r6agissant avec un diglyc6ride (voir revue [8]) ; c'est ce que nous appellerons la <~vole cytidylique directe >>. L'6tude comparative d'incorporation, darts les lipides du foie de rat, de ciliatine, phosphoryl6thanolamine et 6thanolamine, nous a permis de suivre 6galement la m6thylation de PnE en PnC et de PE en PC, et de comparer le transfert in vitro de PE et PnE par une prot6ine d'6change. L'utilisation des m6mes pr6curseurs avec Saccharomyees cerevisiae nous a apport6 des pr6cisions sur le mode normal de biogen~se des phospholipides chez la levure.

Materiel et M~thodes. 1. PRI~CURSEURS : la [2-14C] phosphoryl&hanolamine (activit6 sp6cifique : 33 m C i / m m o l e ) et la [1,2-14C1 6thanoIamine (activit6 sp6cifique : 40 m C i / m m o l e ) provenaient de The Radiochemical Centre, Amersham. L'acide [1,2-14C] amino 2-6thylphosphonique (activit6 sp6cifique : 29 mCi/mmole) a 6t6 synth6tis6 au laboratoire du Professeur E. Neuzil qui nous a aimablement offert ce produit : qu'il en soit ici amicalement remerci6. Selon les exp6riences, ces pr6curseurs ont 6t6 plus ou moins dilu6s avec le produit non marqu6 correspondant. 2. INCORPORATION DE PRI~CURSEURS RADIOACTIFS DANS

LES LIPIDES MEMBRANAIRES : a) chez le rat : des rats Wistar (200-250 g), apr~s un jefine de 24 h, re~oivent par injection intrap6riton6ale 400 nmoles d'un des pr6curseurs ci-dessus. Les animaux sent sacrifi6s 18 h plus tard ; le foie est pr61ev6 et aprbs homog6n6isation les mitochondries et les microsomes sent obtenus selon la technique ant6rieurement d6crite [9]. b) chez la levure : une souche Yeast Form (sauvage) de Saccharomyces cerevisiae sert ~ ensemencer un litre de milieu de culture (Yeast Nitrogene Base : 6,7 g/l) renfermant 2 p. cent de glucose. Chacun des milieux revolt 6galement 400 nmoles d'un des trois pr6curseurs ci-dessus avant d'etre ensemenc6. La culture est conduite en a6robiose jusqu'h la fin de la phase exponentielle de croissance, c'est-/t-dire jusqu'~ densit6 optique constante (environ 18 h). Les cellules sore recueillies par centrifugation (15 mn, 800 g). Elles sent plac6es darts un tampon pH 6,8 (trismal6ate 10 mM, mannitol 0,6 M, E G T A 2 mM) A raison d'un m l par g de levure humide, et agit6es 6nergiquement avec des perles de verre (Braun 0,45-0,50 m m ~ ) pendant 5 m n (agitation manuelle). Apr~s d6cantation et lavage des perles, tes mitochondries et microsomes sent obtenus selon la mSme technique que pour les organelles de foie de rat. Dans tous les cas, la recherche de l'activit6 de la cytochrome C-oxydase montre que la fraction microsomale est pratiquement d6pourvue de contamination mitochonB I O C H I M I E , 1982, 64, n ° 10.

driale. A l'inverse, le dosage spectrophotom6trique de la N A D P H - c y t o c h r o m e C-r&luctase r6v~le que la fraction mitochondriale pr6sente une contamination microsomale, mais toujours inf6rieure 5 5 p. cent. 3. ETUDE DES LIPIDES : leS lipides des mitochondries et des microsomes sent extraits par le m61ange chloroforme/ m6thanol (2/1) et purifi6s selon la m&hode de Folch et al. [10]. La s6paration de PC et PE, ou bien de PC + PnC et PE + PnE, est effectu6e par chromatographie bidimensionnelle sur papier W h a t m a n SG-81, comme d6crit ant6rieurement [9]. Les taches r6v616es par les vapeurs d'iode sent d6coup6es et 61u6es. L'61uat est 6vapor6 ~. sec et sa radioactivit6 est mesur6e dans un compteur ~t scintillation Packard Tricarb 3003, dans un m61ange scinfillant permettant d'estimer la radioactivit6 des pr6curseurs hydrosolubles aussi bien que celle des lipides form6s : POPOP 0,3 g, PPO 7 g, naphtal~ne 100 g, pour un litre de dioxane. I ~ P phospholipidique est dos~ selon la technique de Napias [11]. 4. ECHANGES INTERMEMBRANAIRES DE PE OU P n E : la prot6ine d'6change sp6cifique de PE a &6 obtenue/~ partir du foie de rat, selon la technique de Bloj et Zilversmit [12]. Pour r6aliser les 6changes, on m61ange une suspension de microsomes donneurs renfermant soit PE soit PnE radioactifs avec un grand exc~s d.e mitochondries non marqu6es comme accepteurs et 50 ttg de prot6ine d'6change. Le volume total est de 5 ml, pH 7,4, ~ 37°C. Une agitation magn&ique est maintenue pendant la dur6e de l'incubation qui a 6t6 fix6e/~ 45 mn, la courbe cin6tique ayant montr6 qu'au-del~t de ce temps l'6change est extr~mement lent. Les 6changes en sens inverse ont 6t6 r6alis6s parall~lement, ~ partir de mitochondries marqu6es vers des microseines non marqu6s. Dans tous les cas, un contrSle est effectu6 dans des conditions rigoureusement identiques mais en absence de prot6ine d'6change. Aprbs l'incubation, le milieu est transf6r6 stir un gradient de saccharose /t 4°C, form6 de 15 ml /t 300 g/1 et 10 ml ~ 150 g/1. Les mitochondries sent r6cup6r6es par centrifugation (30 mn, 30.000 g). Le surnageant est amen6 /~ pH 5,1 par addition de 0,2 ml tampon ac&ate 2M pH 5,0. On laisse floculer pendant 30 mn puis on r6cup~re les microsomes par centrifugation (30 ran, 30.000 g). Dans ces conditions la radioactivit6 non r6cup6r6e dans les culots n'a jamais exc6d6 2,2 p. cent du total mis en jeu. 5. DOSAGE DES PROTI~INES : la concentration des suspensions d'erganelles a 6t6 d6termin6e par le dosage des prot6ines selon la m6thode de Lowry et al. [13], avec la s6rumalbumine bovine pour r6f6rence.

R~sultats. I. INCORPORATION DES PRI~CURSEURS DANS LES LIPIDES. 1. F o i e d e r a t : los a n i m a u x s o n t s a c r i [ i c s 18 h apr~s l'injection de 400 nmoles d'un pr~curseur r a d i o a c f i f . L e s m i t o c h o n d r i e s e t les m i c r o s o m e s s e n t o b t e n u s /t p a r t i r d ' u n h o m o g 6 n a t d e foie.

Biosynth~se, mdtabolisme des phosphono- et phospholipides.

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L ' a c t i v i t 6 sp6cifique o b t e n u e avec l ' 6 t h a n o l a m i n e ne diff6rant gu~re de celle o b t e n u e avec la p h o s p h o r y l & h a n o l a m i n e , on peut penser que l'6change de bases, s'il intervient, est de faible ampleur.

Sur une f r a c t i o n aliquote, les P L sont extraits et leur r a d i o a c t i v i t 6 est mesur6e ( t a b l e a u I). O n voit que l'activit6 sp6cifique des P L form6s p a r t i r de la p h o s p h o r y l 6 t h a n o l a m i n e et de l'6than o l a m i n e est p r a t i q u e m e n t la m~me. L ' i n c o r p o r a t i o n de la ciliatine est du m~me o r d r e de g r a n deur, b i e n que plus faible dans Ies m i t o c h o n dries. O n p o u r r a i t la consid6rer 6galement plus faible dans les m i c r o s o m e s car le t u r n - o v e r des

2. Levure : la levure est cultiv6e jusqu'~ densit6 optique constante, en pr6sence de 400 n m o l e s d ' u n des trois pr6curseurs r a d i o a c t i f s utilis6s p o u r

TABLEAU I.

Incorporation de prdcurseurs radioactifs dans les lipides de mitochondries et de microsomes d'hdpatocytes de rat. Radioactivit6 incorpor6e dans les !ipides Pr6curseur inject6

Ciliatine Phosphoryl6thanolamine t~thanolamine

Radioactivit6 inject6e (cpm)

17. 185.780 I 1.355.960 12.236. 200

Mitochondries

Microsomes

cpm

cpm/mg prot6ine (1)

cpm

cpm/mg prot6ine (1)

178.210 272.960 312.020

3 000 4 440 4 800

375. 180 359.310 391.560

4 160 3 980 4 120

(1) Un mg de prot6ine correspond ~ 9,3 fxg P phospholipidique pour les mitochondries et 14,2 ~g pour les microsomes. Dix-huit heures apr~s rinjection d'un prgcurseur radioactif (400 nmoles), les rats sont sacrifi6s. Les mitochondries et microsomes sont obtenus h partir d'un homog6nat de foie. Les ~pides sont extraits et leur radioactivit6 est mesurge (cf. Mat6riel et M6thodes). Les valeurs exprim6es ont 6t6 obtenues sur un 6chantillon d'organelles iso16es 5. partir de 3 rats pour chaque exp6rience. TABLEAU II.

Incorporation de prdcurseurs radioactifs dans les lipides de mitochondries et de microsomes de S. cerevisiae. Radioactivit6 incorpor6e dans les lipides Pr6curseurajout6

Ciliafine Phosphoryl6thanolamine l~thanolamine

Radioactivit6 du pr6curseur ajout6 (cpm)

7.955.000 15.837.100 5.483. 800 12.236. 200

Mitochondries

Microsomes

cpm

cpm/mg prot6ine (1)

cpm

cpm/mg prot6ine (1)

7.550 14.920 16.350 239. 250

270 440 290 1.590

8.310 17.320 14.410 307. 340

610 960 480 2.270

(1) Un mg de prot~ine correspond ~ 15,4 ~g P phospholipidique pour les mitochondries et 10,0 pour les microsomes. La levure est cultiv6e jusqu'h densit6 optique constante dans un i de milieu ayant rex~u au pr6alable 400 nmoles d'un pr6curseur radioactif. Dans le cas de la ciliatine, deux essais ont ~t6 effectu6s avec une dilution isotopique diff6rente par de la ciliatine non marqu6e. Les ceUules sont r6cup6r6es, les organelles isol~es ; leurs lipides sont extraits et on en mesure la radioactivit6 (cf. Mat6riel et M6thodes).

P n L est n e t t e m e n t plus lent que celui des P L : d ' a p r ~ s K r a u s e et al. [14], le d e m i - t e m p s est de 140 h p o u r les P n L , alors que d ' a p r 6 s O m u r a et al. [15] il n ' e s t que de 80 h p o u r les PL.

BIOCH1MIE, 1982, 64, n ° 10.

les rats. D e la levure isol6e on pr6pare les mitochondries et les m i c r o s o m e s ; leurs lipides sont extraits et o n en m e s u r e la radioactivit6 (tab l e a u II).

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J. Baraud et A . Maurice.

On constate en premier lieu que la ciliatine et la phosphoryl&hanolamine sont incorpor6es de la m6me mani6re, les activit6s sp6cifiques, par mg de prot6ine, &ant pratiquement identiques. Mais ces incorporations sont au moins 10 fois plus faibles que celles obtenues dans le foie de rat. L'incorporation de ces deux pr6curseurs ne peut se faire que par l'interm6diaire d'un d6riv6 cytidylique (CMP-ciliatine ou CDP-&hanolamine) : cette voie directe para~t donc de tr~s faible importance chez la levure. Par contre, l'incorporation de l'&hanolamine est beaucoup plus importante ; elle ne peut alors s'expliquer que par un m6canisme d'6change de bases, soit avec PC soit, plus probablement, avec PS. II. NATURE DES LIPIDES FORMI~S. 1. Foie de rat : de m~me que PE peut 6tre trim6thyl6 en PC par une transm6thylase dont le donneur de m&hyle est la S-ad6nosyl-m&hionine, de m6me PnE peut &re converti en PnC, comme l'ont sugg6r6 Tamari et al. [7]. Afin de pouvoir

bien eu lieu pour P E et pour PnE darts des proportions presque identiques, voisines de 15,5 p. cent. Ce r6sultat est en accord avec celui de Sundler et Akesson [16] qui ont montr6 que 20 p. cent environ de PC du foie de rat peut provenir de la m&hylation de PE. On constate aussi que dans les mitochondries le marquage est ~t peu pros 6galement r6parti entre PC et PE de m~me qu'entre PnC et PnE. 2. L e v u r e : lorsque le milieu de culture contient de la phosphoryl&hanolamine, la croissance de la levure s'effectue enti6rement en pr6sence du pr6curseur radioactif. L a PE synth6tis6e sera (videmment trim6thyl6e de la m~me mani~re, qu'elle provienne d'une biosynthbse directe h partir du pr&urseur ou bien de la d6carboxylation de PS. Le rapport entre PC et PE doit doric &re le m~me, qu'il soit obtenu par dosage du phosphore ou par mesure de la radioactivit6, h condition d'admettre, comme nous y avons 6t6 conduits, que le taux de PC synth6tis6e par la <~ voie cytidylique directe >> est faible. Effectivement, le dosage de P nous a permis de calculer

TABLEAU III. T a u x de trim~thylation de P E et P n E en P C et P n C dans les organelles de [oie de rat et de levure.

Pr6curseurs

Radioactivit6 incorpor6e (cpm)

Produit m6thyl6 (p. cent du total)

Mitochondries

Microsomes

Mitochondries

Microsomes

PnC PnE PC PE

1.540 1.400 5.880 5.250

4.160 22.930 3.420 27.960

52,3

15,3

52,8

15,8

PnC PnE PC PE

570 1. 500 1.620 2.260

1. 100 1.770 2. 280 2. 070

27,7

38,4

41,7

52,4

Lipides formgs

A - Foie de rat Ciliatine Phosphoryl&hanolamine B - Levure Ciliatine Phosphoryl~thanolamine

Les lipides extraits des organelles sont fractionn6s par chromategraphie bidimensionnelle sur papier W h a t m a n SG-81. Les taches correspondant ~t PC et PE (avec la phosphoryl6thanolamine) ou h PnC + PC et P n E -t- PE (avec la ciliatine) sont r6v616es par des vapeurs d'iode, d & o u p & s et 61u6es ; la radioactivit6 est mesur6e. Le pourcentage de produit m6thyl6 correspond 7t l'expression 100 P C / P C + PE dans le cas de la phosphoryl&hanolamine, ou k 100 P n C / P n C + PnE dans le cas de Ia ciliatine.

chiffrer le taux de m6thylation, une partie des lipides extraits pr6c6demment est chromatographi6e. Les taches correspondant ?t PE ou PnE et ~ PC ou PnC sont d6coup6es, 61u6es et leur radioactivit6 est mesur6e (tableau III). On constate que dans les microsomes la trim6thylation a BIOCHIMIE, 1982, 647 n ° 10.

que le rapport 100 PC PC + 46,7 pour les mitochondries et microsomes; le m6me rapport, les radioactivit6s incorpor6es, est 41,7 pour les mitochondries et microsomes (tableau III).

PE est 6gal 57,8 pour les calcul6 d'aprbs peu diff6rent : 52,4 pour les

Biosynthkse, m~tabolisme des phosphono- et phospholipides. I1 en va tout autrement lorsque la levure a 6t6 cultiv6e en pr6sence de ciliatine. Dans ce cas, les dosages de P permettent d'6tablir le rapport 100 (PC + PnC) / (PC + PnC) + (PE + PnE) car la chromatographie ne permet pas de s6parer de mani~re satisfaisante un phospholipide de son analogue phosphonique. Ce rapport est le marne que dans l'exp6rience pr6c6dente, ce qui montre que la ciliatine, h la faible dose utilis6e, n'a pas d'influence inhibitrice sur la PE-N-m6thyltransf6rase. Par contre, les mesures de radioactivit6 permette~t d'6tablir le rapport entre les seuls d6riv6s phosphoniques; ce rapport 100 PnC / PnC + PnE est beaucoup plus faible : 27,7 pour les mitochondries et 38,4 pour les microsomes. On peut supposer que la grande quantit6 de PE produite par la levure au cours de sa croissance a concurrenc6 la m6thylation de PnE, dont le taux de biosynth~se, nous l'avons vu, est tr~s faible. III. TRANSFERTS in vitro DE PE ET PnE.

1. Foie de rat : la pr6sence de P L ou PnL marqu6s dans les mitochondries ne peut s'expliquer que par un transfert ~ partir du reticulum

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Bloj et Zilversmit [12] ont isol6 du foie de rat une prot6ine d'6change sp6cifique de PE. Nous avons recherch6 comment se comporte cette prot6ine avec PnE par rapport ~t PE. Pour cela, nous avons r6alis6 des exp6riences de transfert entre organelles marqu6es (mitochondries ou microsomes renfermant PE ou PnE radioactif) et des organelles non marqu6es, en pr6sence de la prot6ine d'6change (voir Mat6riel et M6thodes). Les r6sultats obtenus, apr~s 45 mn d'incubation "3 37 ° C, sont regroup6s dans le tableau IV. La radioactivit6 mesur6e avant transfert correspond h l'ensemble PnE (ou PE) + PnC (ou P C ) ; apr~s transfert, la radioactivit6 retrouv6e dans l'organelle r6ceptrice ne concerne plus que PnE (ou PE). Pour estimer le transfert r6el de PE ou PnE, il faut donc tenir compte des proportions relatives de ces lipides et de leurs d6riv6s trim6thyl6s telles qu'elles apparaissent dans le tableau III. I1 faut aussi d6duire le << transfert )> des essais de contr61e, sans prot6ine d'6change, qui correspond en fait h une contamination in6vitable de l'organelle-r6cepteur par l'organelle-donneur.

TABLEAU IV.

Tranx[ert in vitro de PE ou PnE entre microsomes et mitochondries de ]oie de rat. Organelles

Radioactivit6

Donneur marqu6

Accepteur non marqu6

Totale avant transfert (cpm)

Mito-AEP (44 7g P) Mito-P 6 t h . (45,6 ~,.gP) Micro-AEP (102 IJ.gP) Micro-P 6 t h . (102 ?g P)

Microsomes (a) (200 ug P~ (b) Microsomes (a) (200 vg P) (b) Mitochondries (a) (420/ag P) (b) Mitochondries (a) (420 vg P) (b)

14. 260 14.260 21. 840 21.840 29.890 29.890 28.740 28.740

R 6 s i d u e l l e Transf6r6e (cpm) (cpm)

8. 580 12.780 12.610 19.340 9.280 25.630 7.740 24.480

5. 370 1.240 8.950 2. 100 20.470 3.810 20"490 3.740

PE ou PnE r6ellement P. cent transf6r6ep. cent transf6r6 (c)

37,7 8,7 41,0 9,6 68,5 12,7 71,3 13,0

60,75 66,5 65,8 69,2

Le3 transferts sont effectu6s en 45 mn h 37°C, comme d6crits dans Matfriel et M6thodes. a : en pr6sence de 50 Ixg de prot6ine d'~change de PE. b : en absence de prot6in¢ d'~change. c : pourcentage r6el de transfert de PE ou PnE, apr~s d6duction des exp6riences de contr61e (b), et compte tenu du rapport entre PE ou PnE et leurs d6riv6s trim&hyl6s, non 6changeables (tableau II). Mito- et micro-AEP : organelles pr6par6es ~ partir de foie de rat ayant resu une injection de ciliatine marqu6e. Mito- et micro-P &h. : organelles pr6par6es ~ partir de foie de rat ayant resu une injection de phosphoryl6thanolamine marquee.

endoplasmique, lieu de leur biosynth~se. Ce m6canisme de transfert, ou d'6change, est aujourd'hui bien connu pour les PL, mais h notre connaissance n'a jamais 6t6 6tudi6 pour les PnL.

BIOCHIMIE, 1982, 64, n ° 10.

On constate alors que le taux de transfert de PnE est ?~ peu pros semblable ?t celui de PE, aussi bien dans le sens mitochondries vers microsomes que dans le sens inverse.

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I. Baraud et A. Maurice.

2. L e v u r e : le faible marquage sp6cifique obtenu aurait n6cessit6 de mettre en oeuvre des quantit6s importantes de mitochondries et microsomes, pour obtenir des marquages significatifs apr6s transfert. Dans ces conditions, les contr61es en absence de prot6ine d'6change montrent que le risque d'erreur par contamination ou fusion de membranes est trbs fortement accru. Nous avons donc renonc6 a c e s essais qui, au demeurant, n'auraient pas apport6 d'information nouvelle : les 6changes intermembranaires sont ind6pendants de la nature, e t a [ortiori de l'origine des organelles. Puisque PnE s'6change comme PE entre organelles de foie de rat, il en sera de m6me entre les organelles de levure.

Discussion. On sait que les mammif6res sont incapables de r6aliser la liaison phosphonique C-P, mais si un pr6curseur comprenant d6j~t cette liaison leur est donn6, ils peuvent l'incorporer dans divers m6tabolites et en particulier dans des lipides; c'est ainsi que la ciliatine est convertie en PnE (voir revue [8]). Nous avons montr6 que la ciliatine et son analogue phosphoryl6, la phosphoryl6thanolamine, et mOne l'6thanolamine, sont incorpor6es pratiquement de la m~me mani6re dans les lipides microsomaux et mitochondriaux du foie de rat. Cette incorporation se fait par l'interm6diaire du d6riv6 cytidylique, CMP-ciliatine ou CDP-6thanolamine [7]. La transm6thylation de PnE en PnC avait 6t6 montr6e qualitativement [7], et nous avons trouv6 que 18 h apr~s l'injection de ciliatine, environ 15 p. cent du pr6curseur incorpor6 se trouve sous forme de PnC dans les microsomes. Ce r6sultat est tout ~ fait comparable ~t celui obtenu avec la phosphoryl&hanolamine et en accord avec ceux de Sundler et Akesson [16] qui pensent que 20 p. cent environ de PC est synth6tis6 par m6thylation de PE. Les essais de transfert in vitro en pr6sence de prot6ine d'~change sp6cifique de PE ont montr6 que PnE et PE sont pratiquement transf6r6s de la m6me mani6re. Ce r6sultat n'6tait pas 6vident a priori en raison de la haute sp6cificit6 de la prot6ine d'6change, mais la pr6sence de PnE dans les mitochondries le laissait pr6voir. Nos r6sultats prouvent que la prot6ine d'6change ne reconnait pas la diff6rence, 16g6re il est vrai, entre les parties BIOCHIM1E, 1982, 64, n ° 10.

polaires de PE et de PnE, l'une renfermant une liaison ester phosphorique, l'autre une liaison phosphonique. L'incorporation d'un pr6curseur phosphonique par une levure n'avait pas encore 6t6 tent6e. Nous l'avons r6alis6e avec Saccharomyces cerevisiae et cette incorporation nous a apport6 une fa~on in6dite d'aborder le probl~me des voies de biosynthbse des phospholipides chez la levure. Si la biogenbse des P L est assez bien connue chez les eucaryotes en g6n6ral (voir revue [17]), il n'en est pas de m6me chez ces eucaryotes particuliers ~t bien des 6gards que sont les levures. D~s 1956, Kennedy et Weiss [18] ont montr6 la pr6sence chez la levure de CDP-6thanolamine et de CDP-choline. Waechter et al. [19] ont d6montr6 que PC peut ~tre synth6tis6 par l'interm6diaire de CDP-choline et aussi par m6thylation de PE. Steiner et Lester [20] ont 6tudi6 la m&hylation de PE in vitro puis ont 6tabli [21] que P E peut 6tre form6 soit h partir de CDP-6thanolamine, comme chez les mammifbres, soit par d6carboxylation de PS, comme chez les bact6ries. Cobon et al. [22], par incubation de microsomes ou de mitochondries en pr6sence de s6rine, ont aussi montr6 la formation de PS et sa d6carboxylation en PE. Nous avons observ6 que les taux d'incorporation de la ciliatine et de la phosphoryl6thanolamine sont tr~s faibles et conduisent ~t une activit6 sp6cifique de l'ordre de 15 cpm/p.g P phospholipidique, alors qu'elle est de 330 chez le rat, dans le cas le moins favorable. La formation de PnE, aussi faible soit-elle, ne peut se faire que par l'interm6diaire du d6riv6 CMP-ciliatine ; comme la phosphoryl6thanolamine est incorpor6e au m6me taux, cela prouve que la voie cytidylique directe existe bien chez la levure mais n'y a qu'une tr~s faible activit6. L'&hanolamine-kinase et la choline-kinase ne sont pas concern6es, par contre, la phosphoryl&hanolamine-cytidyle-transf6rase et la phosphorylcholine-cytidyle-transf6rase paraissent peu actives ; elles seraient <> lorsqu'on utilise comme pr6curseur le d6riv6 cytidylique, comme l'ont fait Cobon et al. [22] avec la CDP-choline. La bonne incorporation d'&hanolamine ne peut alors s'expliquer que par le m6canisme d'6change de bases avec PS, qui est synth6tis6 ais6ment par l'interm6diaire du CDP-diglyc6ride [10]. Dans ces conditions, la formation de PC et PnC se fait essentiellement par trim6thylation. Cobon et al. [22] ont d'ailleurs montr6 la grande r6activit6 de la PE-N-m&hyltransf6rase au niveau

Biosynthkse, m~tabolisme des phosphono- et phospholipides.

m i c r o s o m a l , et nous avons effectivement trouv6 que les t a u x de m 6 t h y l a t i o n de P E en P C 6taient b e a u c o u p plus 61ev6s chez la levure que dans le foie de rat. N o s r6sultats m o n t r e n t d o n c que chez S. cerevisiae P E et P C sont s u r t o u t form6s h p a r t i r de PS, d o n t N i k a w a et Y a m a s h i t a [23] ont r6cemm e n t isol6 la synth&ase. L a voie cytidylique directe est f o r t e m e n t r6prim6e, et dans nos exp6riences cette r6pression n ' e s t pas affect6e p a r la faible quantit6 du pr6curseur utilis6 (400 n m o l e s / 1). Si le pr6curseur est i n t r o d u i t h c o n c e n t r a t i o n n e t t e m e n t plus 61ev6e (mM), cette r6pression est plus ou m o i n s lev6e [19, 21]. N o t r e conclusion se trouve renforc6e p a r les t r a v a u x de N i k a w a et Y a m a s h i t a [23] qui ont isol6 un m u t a n t de S. cerevbiae i n c a p a b l e de synth6tiser PS: ce m u tant est alors strictement 6 t h a n o l a m i n e - d 6 p e n d a n t . Remereiements.

Nous exprimons notre sincere gratitude au laboratoire du Prolesseur B. Gudrin, et tout particulidrement Madame G. Velours, qui a r~alis~ pour nous les cultures de levure.

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