Place des marqueurs biologiques dans le dépistage des cancers thoraciques professionnels

Place des marqueurs biologiques dans le dépistage des cancers thoraciques professionnels

Séminaire FMC Place des marqueurs biologiques dans le dépistage des cancers thoraciques professionnels B. Housset D e très nombreux marqueurs ont é...

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Séminaire FMC

Place des marqueurs biologiques dans le dépistage des cancers thoraciques professionnels B. Housset

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e très nombreux marqueurs ont été proposés au cours des dernières années pour identifier précocement les sujets porteurs d’un cancer thoracique qu’il s’agisse d’un cancer bronchique ou d’un mésothéliome. À ce jour, aucun marqueur biologique ne peut être proposé en routine pour le dépistage d’un cancer thoracique qu’il soit ou non d’origine professionnelle. En effet, un dépistage doit répondre à un certain nombre de critères : – la maladie constitue un problème de santé publique ; – le traitement de la maladie à ce stade de début offre un avantage par rapport aux pratiques du moment ; – il existe une phase préclinique de détection ; – le coût du dépistage reste raisonnable ; – le dépistage est acceptable tant pour les soignants que pour les dépistés ; – le test de dépistage est suffisamment performant en terme de sensibilité et de spécificité. Le cancer bronchique remplit les trois premiers critères. En effet, il est maintenant admis qu’un traitement de la maladie à une phase de début, améliore la survie [1]. Ceci est plus discutable concernant le mésothéliome.

Marqueurs biologiques

Service de Pneumologie et de Pathologie Professionnelle, Créteil, France. Correspondance : B. Housset Service de Pneumologie et de Pathologie Professionnelle, CHI, 40 avenue de Verdun, 94010 Créteil Cedex. [email protected]

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Rev Mal Respir 2008 ; 25 : 254-5 Doi : 10.1019/200720020

De très nombreux marqueurs ont été proposés : ADN circulant, anticorps anti-P53, profil protéomique. Nous prendrons ici l’exemple de la mésothéline et de l’ostéopontine qui ont été proposées en 2005 pour le dépistage du mésothéliome. La même démarche peut s’appliquer à tout autre marqueur. La performance diagnostique d’un marqueur biologique est caractérisée par les valeurs de sensibilité et de spécificité. Elles sont estimées pour la mésothéline à 83 % et 95 % respectivement et pour l’ostéopontine à 85 % et 88 % respectivement [2]. En pratique, la question posée est de savoir ce que devient la probabilité de mésothéliome

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lorsque le test biologique est positif. Cette probabilité, aussi appelée valeur prédictive positive (VPP), dépend non seulement des caractéristiques du test, sensibilité et spécificité, mais aussi de la prévalence dans la population étudiée.

poser de nouveaux marqueurs avec des caractéristiques diagnostiques les plus élevées possibles.

Perspectives Populations à risque La population à risque (prévalence élevée) peut être définie sur l’intensité du tabagisme et sur la notion d’exposition à un risque professionnel. Dans le cas de l’amiante il faut tenir compte du délai écoulé depuis le début de l’exposition (latence) et de la dose cumulée de fibres inhalées, dose qui dépend de la durée et de l’intensité de l’exposition. Le développement de questionnaires d’exposition professionnelle permet d’estimer cette exposition avec des performances similaires aux approches biométrologiques [3].

Risques de faux positifs En France, dans les populations exposées, la prévalence est estimée à 100 cas par million d’individus et par an. Le calcul publié dans Info Respiration [4] conduit, pour la mésothéline, à une VPP de 0,0016 soit un risque de 2 sur 1 000 d’avoir un mésothéliome si le test est positif. Le risque de faux positifs est donc majeur et il est important de savoir quelle stratégie sera proposée à un sujet dont le test est positif. En effet, un faux positif expose au risque d’une recherche extensive d’une tumeur qui associe angoisse et risque des examens complémentaires. Le risque d’un faux négatif est par contre le retard à la prise en charge. L’association de deux tests permettrait d’augmenter la spécificité mais ceci se ferait aux dépens de la sensibilité ce qui diminuerait encore l’intérêt de la démarche. Un raisonnement similaire peut être tenu pour le cancer du poumon. La prévalence du cancer bronchique peut être estimée, d’après les études récentes utilisant le dépistage par scanner thoracique, entre 0,5 et 1 % chez les sujets fumeurs [1]. Dans ces conditions, le risque de faux positifs est également important. Il est donc essentiel de pro-

Les progrès de l’épidémiologie moléculaire permettent d’identifier les gènes, les polymorphismes génétiques et mutations associés avec une augmentation de risque du cancer bronchique [5, 6]. De très nombreux génotypes sont associés au cancer bronchique avec des odd ratios relativement bas. L’effet de l’environnement sur l’expression des gènes vient encore compliquer le tableau. L’étude de l’expression des gènes (transcriptome, protéome) est une piste intéressante. Dans l’immédiat les marqueurs biologiques pourraient permettre en association avec l’interrogatoire professionnel, de mieux cibler la population à risque et de justifier alors un dépistage utilisant par exemple des techniques d’imagerie [6]. Les marqueurs biologiques ont donc aujourd’hui une place importante en recherche clinique mais n’ont pas encore trouvé leur place dans la pratique clinique de routine du fait des risques élevés de faux positifs.

Références 1

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The International Early Lung Cancer Action Program I : Survival of Patients with Stage I Lung Cancer Detected on CT Screening. N Engl J Med 2006 ; 355 : 1763-71. Scherpereel A, Lee YC : Biomarkers for mesothelioma. Current opinion in pulmonary medicine 2007 ; 13 : 339-443. Recommandations de la Société de Pneumologie de Langue Francaise sur le mésothéliome pleural. Rev Mal Resp 2006 ; 23 : 6S80-92. Housset B : Dépistage du mésothéliome. Info Respiration 2006 ; 76 : 21. Rossi A, Maione P, Colantuoni G, Gaizo FD, Guerriero C, Nicolella D, Ferrara C, Gridelli C : Screening for lung cancer: New horizons? Crit Rev Oncol Hematol 2005 ; 56 : 311-20. Wardwell NR, Massion PP. Novel Strategies for the Early Detection and Prevention of Lung Cancer. Seminars in Oncology 2005 ; 32 : 25968.

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